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Freud avant la psychanalyse, une première théorisation.

Approche théorique de la douleur

3) Approche psychanalytique : la douleur comme effraction.

3.1. Sigmund Freud.

3.1.1. Freud avant la psychanalyse, une première théorisation.

3.1.1.1. Contexte.

L’intérêt de Freud pour l’Antiquité, très visible par la collection d’objets qu’il a constituée tout au long de sa vie, se remarque encore par les mentions qu’il fait de ses connaissances et de ses lectures, qui jalonnent son œuvre comme des appuis ayant valeurs de vérité première. Freud est lecteur de Theodor Gomperz, par qui il découvre entre autre Empédocle, qui conçoit la douleur sur le modèle de l’insatisfaction alimentaire. C’est le besoin de compléter le semblable par le semblable qui se trouve à la base de tout désir, et c’est ce besoin, satisfait, qui produit la sensation de plaisir, et, non satisfait, de douleur. Nous verrons que Freud, en effet, pendant quelques temps, a opposé le plaisir à la douleur. Cet exemple de l’influence des penseurs de l’Antiquité dans l’élaboration de Freud est un rappel introductif. Régulièrement, Freud s’est tourné vers les philosophes de l’Antiquité et nous en retrouvons les traces, que nous tenterons de souligner, dans son élaboration, en particulier la pensée épicurienne et le stoïcisme. Selon Annie Aubert, « l’histoire de la conceptualisation de la douleur dans la philosophie gréco-latine met en alerte notre attention sur les relations que la notion de douleur entretient avec une série de problématiques : la constitution du moi et la conception de l’appareil psychique – l’idée de mort conçue comme anéantissement, rupture, angoisse – la place du sadomasochisme dans les relations d’objet – la résistance à la douleur et l’effort intellectuel ».131 Ce sont en effet des questionnements qui traversent l’œuvre de Freud.

Avant d’inventer la psychanalyse, Freud se trouvait inscrit dans un contexte de recherche scientifique, qu’il est possible de préciser ici. La formation médicale initiale (1873-

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1881) de Freud est marquée par son intérêt pour la physiologie et l’anatomie, et il publie quelques articles sur le système neurologique d’animaux aquatiques. Il est certainement informé de l’état des recherches sur la physiologie de la douleur. En milieu de parcours, il commence à suivre un enseignement de philosophie, mais il proclame son intérêt pour la psychologie, les deux n’étant pas à l’époque si distincts. Pourtant, la psychologie cherche à se démarquer et à définir son champ propre. L’orientation donnée à la psychologie alors est celle de la démarche expérimentale, sous influence de la méthodologie alors en vogue pour les recherches en physiologie. Il s’agit de mesurer les sensations, de réduire en éléments simples des faits complexes pour construire les bases d’une psychologie scientifique qui « s’est donné pour tâche de rapporter toutes les qualités de nos sensations à des quantités extérieures ».132 La douleur est étudiée en laboratoire, comme réponse à la piqûre, soit une situation reproductible. En 1850, Helmholtz mesure la vitesse de l’influx nerveux et c’est le temps de réaction à la douleur qui capte tous les intérêts.

Les psychologues Herbart, puis Wundt n’abordent pas la douleur en elle-même, ils l’intègrent dans le cadre de leurs théories des sentiments, dans lesquelles douleur et plaisir sont l’expression de grandes tendances qui animent la vie psychique. Cette représentation résonne avec les théories évolutionnistes très en vogue à l’époque, sur fond de conception épicurienne selon laquelle tout animal cherche le plaisir et fuit la douleur.

C’est dans ce contexte que Freud s’inscrit, physiologiste orienté vers la psychologie. Paul Laurent Assoun précise une position épistémologique de Freud, dans le fait qu’il utilise essentiellement le microscope à des fins d’observation et ne construit pas de protocole expérimental : « L’affinement du procédé d’investigation est déterminant »133. L’influence de ce contexte et la façon dont Freud s’en empare est ainsi définie par Laplanche : « Le biologique se présente de trois façons dans le freudisme : comme origine, comme modèle (avec la polyvalence que l’on peut attribuer à ce terme...), et enfin comme espoir, comme perspective d’avenir et très précisément comme perspective thérapeutique ».134

3.1.1.2. La cocaïne.

Dans un contexte de découvertes des effets stupéfiants de la cocaïne et de la morphine, il n’y a rien d’étonnant au fait que Freud en fut consommateur, comme d’autres médecins,

132 FREUD S. (1950) Esquisse d’une psychologie scientifique, In La naissance de la psychanalyse, Paris, PUF,

1979, p.328

133 ASSOUN P.L. (1981) Introduction à l’épistémologie freudienne. Paris, Payot, p.105 134

artistes ou philosophes. Il en consomme pour la première fois en avril 1884 et en prescrit assez vite à son ami Fleischl, atteint de morphinomanie, avec la perspective d’un sevrage de ce produit. Il écrit également une série d’articles sur le sujet ; « De la coca » (juillet 1884), « Contribution à la naissance de la cocaïne » (janvier 1885), « Addenda à De la coca » (février 1885), « A propos de l’action générale de la cocaïne » (mars 1885) et « Cocaïnomanie et cocaïnophobie » (juillet 1887). Sous le regard de Freud, son père est opéré de l’œil sous anesthésie locale à la cocaïne en 1885. Freud écrira dans sa biographie son intérêt marginal mais profond pour un alcaloïde dont il attendait la gloire. Les premiers effets sur son ami Fleischl sont satisfaisants et Freud écrit à sa fiancée qu’il se sent médecin d’avoir pu venir en aide à un malade. Rapidement pourtant, cet ami devient dépendant de la cocaïne tout autant que de la morphine et il tombe dans un désespoir extrême. Dans sa propre expérimentation de la cocaïne, Freud découvre des réponses à ses maux car elle provoque l’augmentation de toutes les facultés mentales et l’accroissement de la résistance à la douleur : « Une douzaine de fois environ, j’ai contrôlé sur moi-même cette protection que la coca procure contre la faim, le sommeil, et la fatigue, ainsi ce durcissement qu’elle exerce en vue d’un travail mental. »135 » Freud constate que, lors d’une grave crise de dépression, une faible dose de coca l’a « magnifiquement remonté »136. Freud se dit affligé d’inhibitions intellectuelles que la coca l’aide à surmonter, elle l’aide à soutenir l’effort de penser et à lutter contre ses obsessions concernant l’année de sa mort. Freud souffre également de douleurs corporelles dont il témoigne dans ses correspondances avec Martha ou avec Wilhelm Fliess. Cet homme est d’une importance toute particulière pour Freud : à la fois son ami, mais aussi son rival, son médecin et le confident épistolaire de ses maux qui chagrinent sa vie, il est encore celui sur qui s’appuie la quête de sens, de compréhension. Comme l’écrit G. Burloux : « Parce que la douleur chez l’homme est toujours adressée à l’autre et que l’intersubjectif est aussi important que l’intrasubjectif, c’est dans cette ouverture à autrui qu’elle (la douleur) cherche à trouver un sens. Or Freud avait besoin pour fonctionner d’être en relation avec un homme, sorte de double, narcissique et homosexuel avec lequel il entretient des rapports ambivalents »137

Il appelle ses maux de tête des « crises de migraine », mais il souffre également d’affections nasales et de troubles gastro-intestinaux assez vagues. En 1884, à propos d’une sciatique, Freud écrit à sa fiancée : « Je suis resté couché toute la matinée avec d’affreuses

135 FREUD S. (1996) De la cocaïne. (Ecrits réunis par Robert Bick) Paris, PUF. 136 Ibidem p.91

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douleurs, et je me suis regardé dans la glace en frémissant à la vue de ma barbe hirsute. Ma fureur augmentant sans cesse, a enfin éclaté et j’ai décidé de ne plus avoir de sciatique, de redevenir un être humain, de renoncer au luxe d’être malade…/… Bonne nuit ma princesse, et plus un mot sur ma sciatique ».138 Cette attitude de dénégation de la douleur, très stoïcienne de prime abord, recouvre d’autres processus qui porteront Freud vers l’élaboration théorique de la douleur. Les années suivantes verront apparaître des troubles cardiaques. Avec l’auto- analyse, l’ensemble de ces troubles se fera moins présent.

Après ses études de physiologie, Freud se décide pour un exercice de la médecine, mais dans sa biographie, il avoue n’avoir aucune prédilection particulière pour les activités de médecin, mais qu’il était plutôt « mu par une sorte de désir de savoir »139. Dans une lettre à Ferenczi, Freud constate : « La passion de venir en aide me manque, et j’en vois maintenant la raison : c’est parce que, dans ma prime jeunesse, je n’ai jamais perdu un être aimé ».140 Cette affirmation est contredite par sa biographie puisqu’il a perdu un jeune frère prénommé Julius, alors qu’il n’était lui-même âgé que d’un an et quelques mois. De plus, nous avons vu que dans une lettre adressée à Martha, il se dit sensible au fait d’avoir pu apporter de l’aide. Selon A. Aubert, « Freud, quant à lui, souffre d’un événement traumatique qui n’accède pas au statut de douleur psychique, événement dont les traces seront lisibles, au cours de la période suivante, dans les textes concomitants de son auto-analyse ».141 Nous aurons l’occasion de revenir sur cet événement traumatique, suivi d’une chute ayant provoqué hémorragie et douleur physique.

Le mode de rédaction des articles sur la cocaïne a ceci de particulier qu’il évite la question du sujet qui souffre en mettant en avant une approche théorique sous le signe des effets antagonistes de la morphine et de la cocaïne pour lesquels l’individu disparaît au profit de l’organisme. Nous trouvons là un modèle d’opposition très présent dans le contexte scientifique d’alors. Freud médecin ne veut pas renoncer à la recherche théorique. De ses expériences, il constate de possibles effets comme anesthésique local, mais l’application médicale de son étude sera reprise par un collègue, Koller, qui l’utilise comme tel dans la chirurgie oculaire.

La tentative de sevrage de son ami morphinomane est un échec, et Freud l’assiste dans sa dérive de toxicomane. Pour autant, il continue à vanter les mérites de la cocaïne, comme un

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SCHUR M. (1975) La mort dans la vie de Freud. Paris Gallimard, p.52

139 FREUD S. (1984) Sigmund Freud présenté par lui-même. Paris PUF.

140 Lettre à Ferenczi, le 10 janvier 1910, citée par Michel SCHNEIDER. (1980) Blessures de mémoire, Paris,

Gallimard, pp. 62-63

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déni de sa responsabilité dans l’évolution de la santé de son ami. Lorsqu’il reconnaît les effets désastreux de la coca sur Fleischl, il l’accuse d’avoir usé d’injections alors que lui-même ne les aurait pas prescrites. Ernest Jones précise pourtant : « Il commença par vanter l’effet des piqûres. Mais après d’autres expériences malheureuses consécutives à l’usage de la drogue, les réactions de culpabilité et d’autoreproche durent converger vers un point déterminé, vers les piqûres dont il avait lui-même recommandé l’emploi. Il fallait qu’il oubliât cette erreur ».142 Ce thème de l’injection reviendra dans le rêve de l’injection faite à Irma.

3.1.1.3. Rencontre avec le Pr. Charcot.

En 1885, Freud bénéficie d’une bourse d’études lui permettant de passer quelques semaines dans le service du Pr. Charcot à Paris, célèbre pour ses travaux de neurologie. Charcot s’intéresse à la douleur, dans les formes négatives de la sensation : l’anesthésie et l’analgésie, et dans les formes symptomatiques de la clinique de l’hystérie : hyperesthésie et douleur, trouble de la sensibilité…Charcot pense l’hystérie comme une maladie nerveuse, avec une origine traumatique. Il s’appuie sur le modèle des maladies neurologiques lésionnelles, et s’il propose d’abord une étiologie sexuelle, il abandonne ensuite cette idée. Il écrit : « J’ose espérer qu’un jour ou l’autre, la méthode anatomo-clinique, en matière d’hystérie, comptera un succès de plus à son actif, en permettant de déceler enfin l’altération primordiale, la cause anatomique dont on connaît aujourd’hui tant d’effets matériels ».143 Charcot est lui-même influencé par Briquet qui, en 1859, dans son traité sur l’hystérie144, présente, selon l’avis de Paul Bercherie, « la source et une des formes les plus achevées de la conception préfreudienne de l’hystérie ».145 Il reconnaît les troubles de la sensibilité associés à diverses douleurs que reprendront Charcot, puis Freud, pour qui la question de la douleur s’impose donc, mais de l’extérieur. Charcot se distingue par sa mise en évidence de l’hystérie masculine et par son insistance sur l’importance du traumatisme. Le facteur déclenchant la maladie est un ébranlement à la fois physique et psychique sur fond primordial d’hérédité. Cette dimension du traumatisme sera reprise par Freud. Charcot observe que l’ébranlement traumatique ne révèle parfois ses effets que bien plus tard : « On voit quelquefois ces gens-là, au moment de l’accident porter secours aux autres blessés, puis regagner leur destination soit en montant dans un autre train, soit même quelques fois à pied… Quelques troubles nerveux

142 JONES E. cité dans Sigmund Freud, De la cocaïne. Op. Cit. p.53

143 Cité par BERCHERIE P. (1983) In Genèse des concepts freudiens. Paris, Navarin, p.62 144 BRIQUET P. Clinique et thérapeutique de l’hystérie, p 203, cité par A. AUBERT, Op. Cit. p.39 145

plus ou moins vagues, surtout des insomnies, sont tout d’abord seuls observés ; puis tout à coup, après plusieurs jours, plusieurs semaines ou même plusieurs mois, les symptômes de la maladie nerveuse se démasquent dans toute leur intensité ».146 La théorie implicite de Charcot concernant la douleur est qu’elle est, parmi d’autres symptômes, le résultat d’une lésion et il la tient pour une manifestation majeure des symptômes hystériques, par excès ou par défaut.

3.1.1.4. D’un intérêt intellectuel pour la douleur.

Les textes de Freud regroupés dans le recueil intitulé Naissance de la psychanalyse et ceux partagés avec J. Breuer dans Etudes sur l’hystérie signalent un intérêt soutenu pour le phénomène de la douleur et la question de la transformation de l’énergie psychique en énergie somatique. Freud donne la primauté au psychique : « Il est possible de faire naître des sensations et des douleurs en tout endroit du corps en dirigeant son attention …/…De même que la concentration de l’attention engendre ou augmente les douleurs, de même celles-ci disparaissent lors du détournement de l’attention ».147 Nous observons là une influence de la philosophie cartésienne pour laquelle l’âme domine le corps au dépens de la clinique qui montre que la pensée ne peut pas engendrer une douleur, même si elle peut en atténuer la sensation. Pour Freud, le corps est soumis aux forces psychiques : « On sait combien sont fréquentes dans l’hystérie, les anesthésies absolues, profondes, dont les lésions organiques ne peuvent reproduire qu’une faible esquisse ».148 Il abandonne l’hypothèse d’une lésion telle que Charcot la conçoit pour l’hypothèse d’une altération d’une propriété fonctionnelle : « Une telle altération serait par exemple une diminution de l’excitabilité ou d’une quantité physiologique qui, dans l’état normal, reste constante ou varie dans des limites déterminées ». 149 Cette altération fonctionnelle entraînerait une altération de l’idée, de la représentation de la partie atteinte. C’est là un point très important pour les élaborations à venir. L’intérêt de Freud pour la douleur le porte vers une quête de compréhension sans pour autant négliger l’attention au patient : « C’est cependant une injustice flagrante ; quelle que puisse être la cause des douleurs, fût-ce l’imagination, les douleurs elles-mêmes n’en sont

146 CHARCOT JM. Leçons du mardi, tome 1, 13ème leçon, p 283 à 299. In Leçons sur l’hystérie virile, textes de

Charcot réunis par OUERD M. (1984) Paris, SFIED.

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FREUD S. (1890) Traitement psychique (traitement de l’âme), in Résultats, Idées, Problèmes I : 1890-1920, Paris, PUF, 1988. p.8.

148 FREUD S. (1893) Quelques considérations pour une étude comparative des paralysies organiques et

hystériques, In Résultats, Idées, Problèmes, I : 1890-1920, Paris, PUF, 1988 p.50

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pas pour autant ni moins réelles, ni moins violentes ».150 C’est là un principe auquel il s’est tenu, mais dont il est possible de concevoir qu’il savait d’expérience, par les douleurs qui l’assaillaient, ce qu’il en était. Et il s’épanche auprès de Fliess sur sa tristesse d’ignorer s’il est lui-même atteint de dépression ou bien s’il est hypocondriaque.

Freud s’oriente vers une théorie de l’accumulation ; la migraine serait le fait d’une accumulation de substances sexuelles n’ayant trouvé de débouché satisfaisant. Dans le manuscrit E, l’angoisse est l’effet d’une accumulation de tension sexuelle physique : « La tension sexuelle se transforme en angoisse dans les cas où, tout en se produisant avec force, elle ne subit pas d’élaboration psychique qui la transformerait en affect… ».151 La distinction entre douleur et angoisse reste flottante jusqu’en 1900 environ. Ensuite, Freud ne parle plus de douleur mais d’angoisse et de déplaisir. Nous y reviendrons.

Dans le même temps d’une théorisation basée sur l’accumulation, une autre théorisation, basée sur la perte, le manque, apparaît : « Nous n’avons aucune peine à imaginer que lorsqu’un groupe sexuel psychique subit une très forte perte d’excitation, une aspiration pourrait-on dire, se réalise dans le psychisme, et produit un effet de succion sur les quantités d’excitation voisines. Les neurones associés doivent abandonner leur excitation, ce qui provoque une douleur ».152 Dans cette apparente contradiction qui s’inscrit d’emblée dans la réflexion de l’économie psychique qui jalonne toute l’œuvre de Freud, nous retrouvons une des particularités de la difficulté à penser la douleur entre l’en moins et le trop. Une autre formulation de l’en moins se trouve chez Levinas, un des rares philosophes contemporains à se pencher sur cette question ; « Dans la douleur on observe …/… un refus de se donner, un élément réfractaire à l’unité, à l’ensemble, à la synthèse …/… le vécu de la douleur est tributaire du fait d’avoir conscience de ne pas pouvoir embrasser la conscience de la douleur ».153 D’autre part, J.B. Pontalis reprend la question de l’en trop : « Si une sensation est trop forte, c’est le trop qui est la douleur » et c’est ainsi que doit être entendu pour lui que la douleur physique est le paradigme de toute douleur.

L’en moins ou le trop, le manque ou l’excès suggèrent déjà l’impossible inscription dans le système de représentation. Sans la formuler comme telle, Freud est confronté à cette dimension particulière dans sa tentative de théorisation. Nous relevons dans ces textes du recueil « Naissance de la psychanalyse » des signifiants qui s’inscrivent dans la théorie du

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FREUD S. Traitement psychique. Op. Cit. p.8

151 FREUD S. Manuscrit E, In Naissance de la psychanalyse. Op. Cit. p.84 152 FREUD S. Manuscrit G, In Naissance de la psychanalyse. Op. Cit. p.97

153 LEVINAS E. dans un entretien accordé à Jean Marc Nores dans le cadre de son doctorat de philosophie La

traumatisme, tout en évoquant les premières douleurs de Freud, de lui-même ignorées ; hémorragie, blessure… La perte d’excitation est dite aussi appauvrissement « qui se produit d’une façon qui ressemble à quelque hémorragie interne, et qui se manifeste au sein des autres pulsions et des autres fonctions. Ce processus d’aspiration provoque une inhibition et a les effets d’une blessure, analogue à la douleur ».154 A. Aubert met en évidence, avec justesse nous semble-t-il, que cette métaphore de l’hémorragie « se révèlera être la figure que prend, pour se faire représenter, l’événement de la petite enfance oublié par Freud. C’est un exemple éloquent de symbole mnésique. Nous voyons là un exemple de la fonction théorétique animée par la relation du penseur avec sa douleur intime : comme la construction dans l’analyse, elle prend la place du souvenir absent ».155 Cependant, nous voyons apparaître une notion qui restera présente tout au long de la théorisation freudienne sur la douleur et qui sera bien mise en évidence par J.D. Nasio dans son texte sur la douleur physique : le mode de défense en réponse au traumatisme peut être lui-même douloureux. Nous y reviendrons.

De 1885 à 1895, année au cours de laquelle se trouve rédigée l’Esquisse d’une psychologie scientifique, dans laquelle il consacre deux parties à la douleur, Freud échange