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Chapitre 1 - Les fondements théoriques de la relation de franchise

1.1. Les définitions de la franchise et les qualifications des systèmes de franchise

1.1.1. Les définitions de la franchise

1.1.1.2. La franchise est un mode d’organisation interentreprises, en réseau

L’accent est mis sur la collaboration entre plusieurs entreprises, indépendantes sur les plans juridique et financier, qui se sont choisies mutuellement pour tisser des liens étroits ou construire « un faisceau » de relations inter-firmes, en vue de commercialiser des biens :

d’une part le franchiseur, détenteur d’un concept d’enseigne et d’un savoir-faire original,

d’autre part les franchisés, qui investissent dans le concept d’enseigne, sont des « entrepreneurs » qui supportent le risque et dirigent leurs points de vente.

La franchise implique donc deux patrimoines distincts mais dont l’exploitation commerciale est liée par un contrat (Dioux et Dupuis, 2005). Le patrimoine du franchiseur peut d’ailleurs être constitué lui-même de points de vente succursalistes, avec des salariés, qui présentent la même homogénéité aux yeux des consommateurs que les points de vente franchisés2. On parle alors de réseaux « mixtes » et le taux de mixité est le rapport entre le nombre de points de vente succursalistes et le nombre de points de vente total de l’enseigne (Cliquet, 2002)3.

Le franchiseur, à qui revient généralement l’initiative du partenariat, entend exercer un certain contrôle sur « son » réseau et jouer le rôle d’ « intégrateur » ou de « leadership » : la distribution de ses produits ou services est sélective. La franchise est un réseau « star » c’est-à-dire une structure dans laquelle le pouvoir de décision est réparti de façon inégale entre les

1 Définition adaptée de Dioux J. et Dupuis M. (2005), La distribution, stratégies des groupes et marketing des

enseignes, Pearson Education, 527 p.

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Dans la plupart des cas, le client d’un point de vente appartenant à un système marketing vertical ne connaît pas le statut du point de vente dont il est client. Le statut du PDV peut être déduit néanmoins dela raison sociale de l’entreprise, obligatoirement mentionné sur le ticket de caisse : s’il s’agit d’un magasin indépendant, les coordonnées de l’exploitant apparaissent (par exemple, la SARL Dupont) ; s’il s’agit d’un magasin propriété de l’enseigne, la raison sociale de l’enseigne apparaît.

3 Cliquet G. (2002), Les réseaux mixtes franchise-succursalisme : apports de la littérature et implications pour le marketing des réseaux de points de vente, Recherche et Applications en Marketing, 17(1), 57-73.

partenaires, l’un d’entre eux étant pilote1. Le franchiseur assure les fonctions de sélection des franchisés, de définition de la stratégie du réseau et exerce un contrôle des activités de « ses » franchisés, de manière à assurer l’homogénéité de l’offre vis-à-vis des clients2. Cet élément permet de distinguer les réseaux de franchise des coopératives de détaillants qui sont des réseaux communautaires « horizontaux » constitués de plusieurs entreprises de poids équivalent qui se distribuent la fonction de pilotage sans qu’aucune ne détienne un rôle de régulation privilégié et se répartissent les bénéfices qui en résultent, sous forme de ristournes.

Le franchisé adhère à un réseau de franchise dans le but de bénéficier d’un « système de réussite ». Son objectif est la réitération d’une réussite commerciale (Leloup, 1993 ; Duniach-Smith, 2003)3. Cela suppose, outre le droit à l’usage de l’enseigne et du concept distinctif, la transmission par le franchiseur d’un savoir-faire original et substantiel, et une assistance continue. Le franchisé rémunère le franchiseur en versant un droit d’entrée, une redevance sur le chiffre d’affaires4 en plus de la marge commerciale sur les produits achetés. Trois critères permettent de distinguer la franchise des autres formes de coopération verticales contractuelles que sont la licence de marque, la concession et le contrat de commission-affiliation :

Le degré de restrictions verticales ; La question des exclusivités ;

La question de la transmission du savoir-faire.

La figure et le tableau ci-après détaillent ces éléments. La figure hiérarchise les principaux contrats de distribution selon le degré de contraintes imposées au distributeur. Aux extrémités du schéma, à gauche, figure le contrat de vente classique sur le marché (sans partenariat formalisé) et à droite, l’intégration caractérisée par la propriété en propre des points de vente, à la tête desquelles sont nommés des managers salariés. Le tableau qui suit présente une comparaison des contrats sur les deux autres critères annoncés : la question des exclusivités territoriales, qui consiste en un monopole des ventes sur une zone de chalandise, celle de

1 Le vocabulaire est varié dans la littérature pour désigner l’entreprise pilote : intégrateur, architecte, pivot, hub

firm, broker, ou encore strategic center.

2 Pour autant, le franchisé reste indépendant, libre dans son activité : le contrat de franchise n’établit pas de « lien de subordination » caractéristique du contrat de travail.

3 Leloup J-M. (1993), Droit et pratique de la franchise, Encyclopédie Delmas, Dalloz, page B22 ; Duniak-Smith K. (2003), La franchise internationale : une contribution à l’étude des modes d’entrée à l’étranger, Thèse de doctorat en sciences de gestion, Université de Montpellier I.

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Certains réseaux prévoient des redevances forfaitaires. Soit pour éviter les « tricheries » sur les CA déclarés, lorsque la remontée des chiffres n’est pas informatisée, soit pour se différencier des concurrents : une redevance forfaitaire constitue un argument de vente pour des « nouveaux entrants » sur un marché donné. Plusieurs autres proposent une redevance annuelle forfaitaire mais progressive, négociée ex ante avec le franchisé, sur plusieurs

l’exclusivité d’approvisionnement auprès de la tête du réseau et la question de la transmission du savoir-faire.

Figure 4. : Les formes de contrats selon le degré de contraintes imposées au distributeur

Marché -

Licence de marque

Concession Franchise Commission-affiliation Intégration = PDV en nom propre + Marque Marque et produits Marque, produits, concept, savoir-faire Marque, produits, concept, savoir-faire, stock Subordination Degré de contraintes imposées au distributeur

(Source : d’après Chaudey et Fadario, 2004)1

Tableau 2. : La comparaison des contrats sur les questions des exclusivités et du savoir-faire Contenu du contrat/ Type de contrat de distribution Exclusivité territoriale Exclusivité d’approvisionnement Obligation de transfert d’un

savoir-faire et d’assistance

Autres

Licence de marque non non Non

Concession Oui, élément essentiel à la qualification Oui, contrepartie de l’exclusivité territoriale (en évolution)*

Non, même si dans les faits, un savoir-faire est souvent transmis (formation)

Franchise

Fréquente mais n’est pas un élément essentiel, ni une condition de validité du contrat Oui, partielle ou totale Oui, condition de validité du contrat

Commission-affiliation Idem franchise Idem franchise Idem franchise

Le stock du PDV n’appartient pas au distributeur

* dans la concession automobile, il semble que les distributeurs concessionnaires puissent désormais être multimarques, du fait de la réglementation communautaire.

Nous retiendrons que la franchise est le système vertical qui comporte le plus de restrictions verticales mais qui oblige en contrepartie le franchiseur à transférer un savoir-faire original, substantiel et formalisé. Ce dernier est pour les tribunaux l’objet central de la franchise et une condition de validité du contrat2. Le savoir-faire touche différents domaines. Il peut concerner (Remoriquet et al., 1998)1 :

1 Chaudey M., Fadario M. (2004), Franchising and Alternative Forms of Contract to Organize Vertical Restraints : Evidence from French Networks, in Windsperger G., Cliquet G., Hendrikse G., Tuunanen M. (sous la direction de), Economics and Management of Franchising Networks, Physica-Verlag, 127-142.

2 après la commission-affiliation, citée pour mémoire car elle tend à une plus grande intégration : le stock de marchandises reste la propriété du réseau. La FFF évoque d’ailleurs le risque juridique de requalification en

 Le cœur de métier, son apprentissage technique et commercial. Celui-ci est

généralement formalisé et codifié dans un manuel de procédure appelé « la bible ». Il porte par exemple sur les techniques de coupes avec rasoir pour la coiffure, sur la gestion du parc automobile pour la location de véhicule, sur les contraintes juridiques ou les techniques de vente dans l’immobilier, la connaissance du vin pour un caviste ou encore sur le cahier des charges hygiène et qualité dans la restauration rapide etc. ;

 Un cercle de connaissances périphériques non directement lié au métier mais qui

facilite la gestion du point de vente. Par exemple, des formations peuvent être organisées sur la comptabilité d’un commerce, la gestion des stocks, le recrutement et le management des équipes, le droit du travail, les logiciels informatiques de gestion, les outils de gestion internes au réseau etc. ;

 Enfin, le savoir-faire peut porter sur des connaissances et aptitudes qui permettent au

franchisé d’intégrer les évolutions suscitées par l’environnement, de s’adapter aux changements de savoir-faire. Il s’agit essentiellement de connaissances économiques, juridiques et sociales.

Notons qu’il est fréquent que la qualification des parties du contrat de coopération verticale ne corresponde pas à la réalité du contenu du contrat ce pour deux raisons :

Le terme de franchise « fait peur » car est il synonyme de manque de liberté pour les distributeurs ; certains réseaux préfèrent choisir une autre qualification ;

Les réseaux tendent, lorsque leur marché atteint la maturité ou lorsque la concurrence s’intensifie, à contrôler de manière de plus en plus « serré » les conditions d’exploitation des distributeurs. Nous comparons en annexe A un contrat de concession d’une enseigne du secteur de l’équipement de la maison avec les contrats de franchise étudiés et nous montrons que la distinction entre les deux contrats devient artificielle : les contrats de franchise prévoient souvent une exclusivité territoriale, les concédants transmettent de plus en plus souvent un véritable savoir-faire.

contrat de travail de la commission affiliation, fréquente dans le secteur de l’habillement où la gestion du stock est une question cruciale, en raison d’une frontière fragile entre intégration et subordination. Fédération Française de la Franchise (2006), Toute la franchise 2006 : les textes, les chiffres, les réseaux, FFF, pages 44-45. 1

Remoriquet J., Freyburger R., Kuter P., Rajaonson M.R., Rebert C., Ronde P., Schaller A. (1998), le savoir-faire dans la franchise, recherche commanditée par la Fédération française de la Franchise, Université de

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