• Aucun résultat trouvé

Un ministère des Affaires étrangères est fondé pour la première fois en Iran à sous le règne de Fath Ali Shah, en 1821236. Cependant, il manque au gouvernement iranien un cadre

diplomatique expérimenté pour développer des relations avec les pays étrangers. La création d’un établissement d’enseignement politique est décidée par Mirza Nasr-ollah Khan Moshir ol-Dowleh, nouveau ministre des Affaires étrangères, sous l’influence de son fils Mirza Hasan Moshir ol-Molk, (lui-même chef de cabinet de son père), afin de former des diplomates compétents. Mirza Hasan, diplômé de l’école militaire et de la faculté de Droit de l’université de Moscou estime que « tant que le ministère des Affaires étrangères n’aura aucun fondement scientifique [un cadre expérimenté et éduqué], tous les efforts de ce ministère seront mis en échec »237 :

Aujourd’hui le brave peuple musulman d’Iran désire trouver sa place parmi les nations civilisées. […] Il doit connaître les discours politiques et les relations internationales. […] La fondation d’une école des sciences politiques est la solution238.

La fondation de l’école des sciences politiques est accordée par Mozafar ol-Din Shah en 1899 :

Depuis le jour où Dieu Tout-Puissant nous a confié ce grand pays, nous avons fait de notre mieux pour le progrès et la prospérité du pays. Afin d’atteindre ces objectifs sacrés, nous avons décidé de diffuser la science dans le pays. Pour que la lumière de la science fasse disparaitre l’obscurité de l’ignorance. C’est pourquoi, nous avons ordonné de promouvoir l’éducation et d’établir des écoles. En conséquence, plusieurs écoles bien ordonnées ont été fondées. En raison de l’importance des relations internationales, dans la quatrième année de notre règne, nous avons ordonné au ministre des Affaires étrangères la création d’une école de politique où l’on apprend les sciences supérieures. Que cette école

236 Nasser Takmil Homayoun, « L’école supérieure des sciences politique ( Madreseh alieh siasi) », Revue de la Faculté de Droit et de sciences politique, n°63, 2004, page 40.

237 Abdo-allah Mostoufi, Ma autobiographie( Sharh zendegi man),tome II, Téhéran, Zawwar, 1981, page 69. 238Tarbiat, n°265, 1902, page 4.

reste comme un souvenir de nous dans les siècles à venir et que les diplômés de cette école entrent dans l’arène de servitude du gouvernement, en tant que personnels du ministère des Affaires étrangères et des autres organes gouvernementaux. Afin que cet établissement soit pérenne, ainsi que pour qu’il soit protégé de contingences futures, nous l’avons subventionné à hauteur de quatre mille toman chaque année239.

Dès l’obtention de l’autorisation du Shah, l’ouverture de l’école est annoncée aux « garçons de la patrie désirant apprendre les sciences politiques nécessaires »240. Cependant

ces garçons devaient appartenir à la classe aisée de la société pour pouvoir présenter leur candidature. Cette distinction est précisée par Moshir ol-Dowleh, le fondateur de l’école, lors de son discours d’inauguration : « l’objectif de cet établissement est d’admettre les élèves issus des familles nobles et vénérées pour former des diplomates savants et patriotes»241.

Appartenir à une famille « notable et riche » est considéré comme une des conditions obligatoires pour entrer à l’école selon la charte de l’école de l’année 1908. En outre, les candidats doivent être recommandés par un intermédiaire, « pour que ce dernier garantisse le paiement des frais de scolarités ainsi que la bonne conduite du candidat »242.

Une des raisons pour laquelle les dirigeants mettent l’accent sur la richesse de la famille des élèves est que le gouvernement cesse de subventionner l’école à partir de 1908. En ce sens, la préoccupation de Mozafar ol-Din Shah pour les « contingences futures » n’était pas déraisonnable. Dès son arrivée au pouvoir, son héritier, Mohammad Ali Shah, s’affiche comme un monarque traditionnaliste, opposé à la modernité. L’abolition de la subvention annuelle accordée à l’école par le gouvernement est très probablement la conséquence directe de l’opposition du roi à l’établissement des écoles nouvelles.

Néanmoins les critères de recrutement de l’école sont légèrement corrigés dans sa charte de l’année 1915. En plus des candidats issus des couches supérieures, l’école admet gratuitement deux candidats « besogneux et méritants »243.

Le diplôme de fin d’études primaires n’est pas exigé des candidats désirant entrer à l’école des sciences politiques, alors que cette dernière est considérée comme une école supérieure. Cependant, la capacité scientifique des candidats est évaluée lors d’un concours.

239Bagher, Agheli, « L’école des sciences politiques, l’école et la faculté de Droit et de sciences politiques (Madreseh oloum siasi, madreseh ali hoghoogh va daneshkadeh hoghoogh va oloum siasi) », Tarikh moaser Iran, n°7, 1998, pages 349-350.

240Majles, n°53, 1911, page1.

241 Esmaeil Raeen, Faramoush-khaneh et la franc-maçonnerie en Iran (Faramoush-khaneh va franc-maçonnerie dar Iran), Tome I, Téhéran, 1979, page 451.

242 Changiz Pahlavan, Les racines de la modernité (Risheh haye tajadod), Téhéran, Ghatreh, 2004, page 49. 243Idem,page 59.

Au cours de la première année de fonctionnement de l’école, 1899, le concours se déroule en deux parties : écrite et orale. Les participants, âgés de quinze à vint-deux ans, sont examinés en persan, en mathématiques et en grammaire arabe.

Abdo-Allah Mostoufi, un des premiers élèves de l’école des sciences politiques donne des informations, par le biais de ses mémoires, au sujet du déroulement du concours de la première année de l’école, 1899.

Sur le bureau de la salle d’examen oral, il y a un Coran. Le brigadier Baghayeri [un des examinateurs] ouvre le Coran et le donne à Sheikh Lotfali [un autre examinateur]. Ce dernier commence à réciter un verset pour que je continue le reste. Comme par hasard, je connaissais ce verset par cœur. Donc, je l’ai récité jusqu’à la fin. […] Après, Sheikh Lotfali m’a posé quelques questions grammaticales [en arabe]. […] Ensuite, on m’a examiné en orthographe [en persan], il s’agissait d’un texte sur l’histoire des Parthes. A la fin, on m’a posé des questions sur certaines opérations mathématiques244.

Mostoufi ne donne aucune information au sujet d’une épreuve de langue française, car lui-même n’avait aucune connaissance de cette langue avant d’entrer à l’école des sciences politiques. La première année, on manque en effet de candidats, et des individus ne maîtrisant pas le français sont autorisés à concourir. Il est néanmoins certain qu’une épreuve de français figurait d’emblée au concours d’entrée, et qu’au fur et à mesure elle devint obligatoire pour tous les candidats.

Outline

Documents relatifs