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Liens avec le Cadre européen commun de référence

Chapitre 3. Apprendre en groupe à distance

3.1. La formation à distance

3.1.1. FAD : Aperçu historique

Bates (1995) ainsi que Marot et Darnige (1996) distinguent trois générations dans la formation à distance. Elles sont toutes liées de près aux support matériels, voire technologiques, de leur époque et à la médiatisation qu’elle permet.

Première génération : Enseignement par correspondance

La toute première forme de la formation à distance (FAD), l’enseignement par correspondance, est née au milieu du 19e siècle avec le timbre. Ceux qui ne pouvaient

pas participer à des cours présentiels – par exemple les enfants qui ne pouvaient pas aller à l’école à cause des effectifs trop importants, ou bien ceux qui habitaient loin de l’école – ont ainsi pu recevoir des cours écrits. L’évolution des techniques d’impression a permis l’existence de manuels, mais aussi d’envoyer des lettres et imprimés par la poste. Depuis le tout début, le développement technologique a donc influencé et conditionné la formation à distance. Les premiers établissements de FAD ont vu le jour dans la seconde moitié du 19e siècle ; un exemple pour cette génération

« Centre National d’Enseignement par Correspondance ». L’objectif de la formation à distance était depuis le début de faciliter l’accès au savoir pour tous.

Deuxième génération : Pluralité des médias

Les médias se sont ensuite diversifiés. Depuis les années 1960, on commence à utiliser à côté du papier des cassettes audio, des cassettes vidéo, la radio et la télévision, ainsi que dès la fin des années 1980 des ressources numériques. Les ressources sont maintenant spécialement conçues pour la FAD, ce qui n’était pas le cas auparavant. Le tutorat est introduit, qui représente une médiation entre l’apprenant et l’enseignant. L’Open University britannique représente typiquement cette deuxième génération. L’adjectif « open », qui se traduit littéralement par « ouvert » en français (on parle alors de Formation Ouverte et A Distance (FOAD)), recouvre trois aspects. Ce sont 1. un accès matériel facile, qui consiste souvent en une délocalisation de la formation à domicile, dans l’entreprise ou dans une centre de ressources ; 2. un accès institutionnel sans diplôme et 3. un caractère flexible et souple, ce qui signifie par exemple une gestion autonome du temps de formation, qui se traduit par une souplesse des horaires et de la durée des séquences (cf. 1.1.2.).

Troisième génération : Médias de communication réciproque

La formation à distance ne répond plus seulement à un éloignement géographique important ou des effectifs trop importants de l’école, mais permet également d’éviter les longs déplacements dans les zones urbaines avec une circulation automobile dense, ou de proposer une solution aux personnes ayant des objectifs d’apprentissage très ciblés. Grâce à l’apparition et à l’amélioration des outils de communication (téléphone et fax, puis à partir des années 1990 le courriel, le chat, le forum de discussion, l’audioconférence, la visioconférence, etc.), une interaction directe entre l’enseignant et l’apprenant ou bien entre les différents apprenants est rendue possible. L’interaction se fait alors d’individu à individu, d’individu (enseignant) à un groupe ou bien d’un groupe à un autre groupe. L’utilisation de la visioconférence, à laquelle va se référer la partie 4.1. de ce travail, s’inscrit clairement dans ce que Bates appelle la troisième génération de la formation à distance.

Une quatrième génération ?

En 2000, le gouvernement français a lancé un appel d’offre en vue de stimuler la création de formations à distance et de soutenir les dispositifs existants. Les premiers étudiants ont pu s’inscrire dans les « campus numériques » dès la rentrée 2001. Ces environnements se définissent comme

des dispositifs de formation en modules, répondant à des besoins bien identifiés, combinant les ressources du multimédia, l’interactivité des environnements

numériques et l’encadrement humain et administratif nécessaire aux apprentissages et à leur validation (Ministère de l’Éducation Nationale 2001c). Une définition du dispositif de formation donnée par Pothier (2003) éclaire et complète bien la citation qui précède. Elle décrit le dispositif comme

un ensemble de procédures diverses d’enseignement et / ou d’apprentissage, incluant moyens et supports, construit en fonction d’un public (et éventuellement d’une institution), d’objectifs et de conditions de travail particuliers. Les buts d’un dispositif sont de répondre au mieux à des demandes variées et d’individualiser le travail grâce à la flexibilité du système ainsi qu’à la variété des supports (utilisations des TICE) et des modalités (travail personnel, tutorat, séances en groupe) (Pothier 2003 : 81).

Si le Ministère met bien en avant le caractère innovant des campus numériques, leur description n’introduit pourtant pas d’élément nouveau par rapport à la troisième génération de la formation à distance. Les atouts du multimédia continuent à être soulignés, par exemple ceux d’une souplesse au niveau de l’espace et du temps – c’est-à-dire une facilité d’accès à la formation et le choix du rythme de l’apprentissage. De même, l’individualisation, sous forme d’une réponse ciblée aux besoins de l’étudiant en représente un atout constant. Elle va de pair avec une responsabilisation de l’apprenant, qui est décrit comme un acteur autonome. Le Ministère insiste également sur l’adaptabilité du dispositif, mais qui passe explicitement davantage par l’Homme que par les technologies ; les forums et les chats par exemple rendent le contact avec les autres acteurs de la formation (l’enseignant, le tuteur ou les autres apprenants) facile. Comme dans la troisième génération, l’apport des technologies ne se situe donc pas uniquement au niveau des caractéristiques du multimédia (c’est-à- dire de permettre de rompre l’unité de lieu, l’unité de temps et l’unité d’action ainsi qu’un feed-back automatique), mais surtout au niveau de l’interaction humaine à distance.

Si cette présentation des campus numériques ne se distingue pas des formations à distance de la troisième génération, elle a pourtant ceci de particulier qu’elle se limite exclusivement à internet comme média autant des ressources matérielles que de l’échange entre les participants de la formation. En effet, l’Éducation Nationale française a surtout pour objectif de rattraper un retard au niveau international en matière de formation à distance basée sur les nouvelles technologies. Tandis qu’en France, la formation à distance concerne encore une population relativement faible, elle s’est largement répandue aux États-Unis ou au Canada. (Delwasse & Jarrige 2000). Si ces dispositifs sont appelés des « campus », c’est parce qu’ils concernent exclusivement l’enseignement supérieur, et plus précisément les universités, les grandes écoles, les Instituts Universitaires de Technologie (IUT) et de Formation de Maîtres (IUFM). L’appel d’offre s’étend dès 2002 explicitement, au-delà des formations à distance à proprement parler, également à des « cours en ligne » ou des

environnements de bureautique personnalisés pour les étudiants inscrits en présentiel (Ministère de l’Éducation Nationale 2002). Sous l’appellation « formation à distance », nous ne faisons cependant pas référence à ce type de mise à disposition de supports numériques. Ils ne représentent en effet pas de dispositifs de formation à part entière et en constituent tout au plus des outils.

Pour résumer, il ne nous semble pas que les rares changements récents permettent de parler d’une quatrième génération de la FAD. On constate seulement une préférence pour le travail en groupe (cf. chapitre 3), qui profite des possibilités d’interaction humaines que les technologies offrent ; de plus, les dispositifs ont tendance à recourir exclusivement à internet et à laisser de côté les supports hors ligne (numériques comme le CD-Rom ou la disquette et non numériques comme le livre ainsi que la cassette audio ou vidéo).