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Chapitre 5 Discussion

25- Facteurs affectant l’autogestion de la maladie chronique

Catégories Sous-catégories

Caractéristiques personnelles et habitudes de vie

Connaissance Croyances

Détresse psychologique Motivation

Expérience d’autogestion/ Patterns de vie

Statut de santé Comorbidités

Sévérité de la maladie Symptômes/Effets secondaires Fonctionnement cognitif Ressources Financières Équipement Psychosociales Environnement Maison Travail Communauté Système de soins de santé Accès

Système de navigation/Continuité des soins Relation avec les professionnels de la santé

Les interventions visant l’autonomisation. Quelques articles portant sur des interventions visant l’empowerment (ou l’autonomisation) des personnes se sont aussi avérés intéressants. Ce concept est d’intérêt puisqu’il est lié au soutien à l’autonomie des personnes. En effet, la pratique du soutien à l’autonomie des personnes est « […] un désir pour l’empowerment et l’autoactualisation du client » (Ryan & Deci, 2017d, p. 448). En ce sens,

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la théorie de l’autodétermination met en évidence des mécanismes ou comportements spécifiques permettant l'actualisation de l’autonomisation (empowerment) (Fetterman, 2015). L’actualisation, en psychologie, réfère au processus de mobilisation des potentialités personnelles, préalable à l'action (Dictionnaire Larousse de la langue française, 2019). Ryan et Deci (2017c) expliquent aussi que pour que les systèmes et les organisations soient stables et florissants, ils doivent avoir des membres bien intégrés qui agiront selon leurs valeurs, et qui résoudront volontairement leurs problèmes. Or, cela se produit seulement quand les membres peuvent se sentir empowered21 et habilités à combler leurs besoins psychologiques

fondamentaux d’autonomie, de compétence et d’affiliation à autrui de façon libre et volontaire (Ryan & Deci, 2017c). En ce sens, les conditions qui supportent l’autonomie permettent aux personnes de se sentir plus empowered (i.e. plus confiant et en contrôle de leur vie) et engagés (Ryan & Deci, 2017d). De là l’importance de s’intéresser aussi aux études portant sur des interventions infirmières visant l’autonomisation (empowerment). Aussi, il sera démontré plus loin que certaines études illustrent que l’autonomisation (empowerment) est aussi en lien avec des comportements d’autosoins des personnes, ce qui est également d’intérêt pour le présent projet de recherche.

Cependant, la définition du concept d’empowerment n’obtient pas de consensus parmi les auteurs, et il en va de même pour sa traduction en français. À vrai dire, l’usage de ce terme est même risqué de par la multiplicité des définitions qui lui sont accordées. Il faut préciser que ce concept est étudié dans plusieurs disciplines (sciences sociales, sciences de la gestion, sciences de la santé, etc.) ce qui contribue à la multiplicité des perspectives à son sujet. Bacqué et Biewener (2013) soulignent également l’évolution de ce terme anglo-saxon au fil des années, alors qu’il s’est vu attribuer des sens différents de son origine première. Il importe donc de voir quelle définition est utilisée par chaque auteur utilisant ce terme. Par exemple, le concept d’empowerment est traduit par le terme autonomisation par l’Office québécois de la langue française, qui le définit comme le « processus par lequel une personne ou un groupe social acquiert la maîtrise des moyens qui lui permettent de se conscientiser, de renforcer son potentiel et de se transformer dans une perspective de développement,

21 Définis par le dictionnaire anglais Cambridge par « confident and in control of your life », soit « confiant et

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d'amélioration de ses conditions de vie et de son environnement » (Office québécois de la langue française, 2019). Cette définition est contestée, puisque comme bien d’autres définitions données à ce terme, elle ne respecte pas les deux dimensions de celui-ci, soit le pouvoir (qui est à la racine du mot) et le processus d’apprentissage pour y accéder (Bacqué & Biewener, 2013). Pour ce qui est maintenant des traductions françaises possibles (de manière non exhaustive), autres que l’autonomisation, les termes pouvoir d’agir ou pouvoir d’action (Bacqué & Biewener, 2013; Charpentier & Soulières, 2006), reprise de pouvoir, actualisation (Charpentier & Soulières, 2006), empouvoirisation et capacitation (Bacqué & Biewener, 2013) sont rencontrés dans la littérature.

Sans prise de position sur une définition théorique précise du concept d’empowerment, l’auteure du présent texte fait le choix de traduire le terme anglophone

empowerment par l’autonomisation, qui signifie en français le « fait de se rendre autonome,

de conquérir son autonomie », selon le Dictionnaire Larousse de la langue française (2019). Il importe de souligner que l’idée ici n’est pas de débattre de la définition du concept d’empowerment mais bien de s’intéresser aux interventions liées à celui-ci, étant donné ses liens avec le soutien de l’autonomie des personnes et la pratique d’activités d’autosoins, ainsi que son usage dans des écrits de sciences infirmières.

Le texte de Charpentier et Soulières (2006) fournit un autre exemple de la diversité des définitions et du concept même d’autonomisation (empowerment pour ces auteures), pour lequel elles ont même identifié quatre sous-catégories lors de la revue des écrits réalisée pour leur projet de recherche portant sur les droits et l’empowerment des personnes en résidences et en hébergement de longue durée. Bien qu’il s’agisse d’un texte en français et qu’elles précisent avoir choisi la traduction « pouvoir d’agir » pour le concept d’empowerment, elles utilisent tout de même l’expression anglophone abondamment. Leur revue des écrits leur a permis d’identifier l’empowerment structurel, l’empowerment technocratique, l’empowerment des usagers du réseau de la santé et des services sociaux, et l’empowerment au quotidien. Ces divers niveaux reflètent le fait que l’autonomisation22 peut se produire au niveau des individus comme au niveau des collectivités. En effet, l’autonomisation22 réfère

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à un état ou à un processus, qui peuvent être individuels, collectifs, sociaux et politiques (Bacqué & Biewener, 2013). Enfin, étant donné que certains auteurs définissent l’autonomisation22 par un construit faisant référence à l’autodétermination de la personne dans sa relation avec le professionnel de la santé (Barr et al., 2015), il s’avère pertinent de considérer ce que disent des études infirmières sur l’autonomisation22 en lien avec le contexte de la transition post-hospitalisation des aînés.

Un article intéressant est celui de Jerofke, Weiss, et Yakusheva (2014), dont l’étude prospective corrélationnelle visait à explorer la trajectoire d’associations entre le processus de soins infirmiers visant l’autonomisation22 de patients durant une hospitalisation post chirurgie, et les résultats d’autogestion de ces patients après le congé, spécifiquement l’activation des patients et leur statut fonctionnel. Elles réfèrent à l’Organisation Mondiale de la Santé, qui stipule que « le processus d’autonomisation22 survient à l’intérieur d’une

relation de collaboration entre le professionnel et le patient, avec l’intention d’augmenter les capacités des patients à prendre le contrôle de leurs maladies » (Jerofke et al., 2014, p. 1311). Elles ne définissent pas davantage le concept d’autonomisation22 dans cet article, mais l’ont

fait dans un article précédent où elles ont réalisé une analyse de ce concept et le définissent comme un « pouvoir-avec (power-with) qui est actualisé à travers une relation mutuelle et bénéfique de confiance et de respect pour l’autonomie, qui se développe à l’intérieur d’un processus dynamique et centré sur le patient » (Jerofke, 2013, p. 165). Elles réfèrent également aux travaux de Hibbard et Greene (2013) et Hibbard, Greene, et Overton (2013) pour la notion d’activation et y voient un lien avec l’autonomisation22, à savoir que « […] les comportements des infirmières visant l’autonomisation22 des patients facilitent l’engagement de ceux-ci dans les comportements d’autogestion, et ce, à travers le développement de l’activation des patients » (Jerofke et al., 2014, p. 1311). Il est cependant à noter que Hibbard et ses collaborateurs n’utilisent pas le terme empowerment dans leurs écrits, qui sont ciblés sur l’engagement et l’activation.

Les résultats de Jerofke et al. (2014) ont démontré que les patients étaient réceptifs aux comportements soutenant l’autonomisation22 et avaient ensuite un haut niveau d’activation, qui était ensuite significativement associé à leur état de santé mentale. Les

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patients percevaient aussi favorablement les comportements d’autonomisation22 des infirmières. Ces auteures expriment que « les infirmières peuvent susciter l’autonomisation22 des personnes : 1) en aidant les patients à réaliser qu’ils peuvent et devraient participer à leur plan de soins et traitement, 2) en procurant aux patients des accès à l’information, du soutien, des ressources et des opportunités d’apprendre et de croître, 3) en aidant à faciliter la collaboration avec les professionnels de la santé, la famille et les amis, et 4) en permettant aux patients d’exercer leur autonomie dans la prise de décisions » (Jerofke et al., 2014, p. 1311). En fait, ces auteurs tirent ces interventions notamment d’un article de Spence Laschinger, Gilbert, Smith, et Leslie (2010) assez descriptifs quant à des interventions infirmières pouvant susciter l’autonomisation22 des personnes. Elles rattachent ces interventions à des composantes de la théorie du pouvoir structurel dans les organisations de Kanter (2008). Certaines interventions qu’elles proposent concernent les soins aigus en contexte hospitalier, mais la plupart sont applicables au contexte des soins transitionnels post- hospitalisation. Le tableau 26 résume les interventions proposées par Spence Laschinger et al. (2010).

174 Tableau 26

26- Interventions infirmières d’autonomisation des personnes23