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baines polycentriques

1.1. ETALEMENT URBAIN ET ´ EMERGENCE DE R ´ EGIONS URBAINES POLYCENTRIQUES

1.1.3 Evolution des pratiques de mobilit´ e quotidienne

Les liens entre l’utilisation de l’automobile et l’intensit´e de l’´etalement urbain ont ´et´e mis en ´evidence par de nombreux auteurs (Dupuy, 1991). La diversit´e des formes urbaines h´erit´ees des p´eriodes successives de croissance urbaine (maintien de la densit´e au centre, urbanisation continue le long de corridors d’urbanisation, habi- tat diffus dans certains quartiers d´evolus `a l’automobile) conditionnent partiellement les possibilit´es de d´eplacements depuis, et vers ces lieux.

Les d´eplacements locaux et de longue port´ee sont rendus possibles par des in- frastructures de transport de niveaux diff´erents. Les distances moyennes domicile- travail ne sont pas uniform´ement r´eparties entre les valeurs minimales (0) et maxi- males (le diam`etre de la ville) : la majorit´e des trajets r´ealis´es sont courts, mˆeme dans les plus grandes m´etropoles europ´eennes (en Ile-de-France, environ la moiti´e des trajets domicile-travail font moins de 5 kilom`etres en 1999). En fonction du tissu urbain existant, l’automobile, ou des transports collectifs routiers ou ferr´es, sont ac- cessibles `a la population r´esidente et aux emplois disponibles pour r´ealiser ces trajets courts. Pour les d´eplacements de plus longue port´ee, l’automobile s’est impos´ee soit comme une alternative au train lorsque les deux modes sont disponibles, soit comme un recours unique lorsque le territoire est mal desservi en transports collectifs. De fa¸con sch´ematique, les transports collectifs sont performants sur les liaisons radiales (mˆeme si [Agenais et Laterrasse, 2007] notent que cette efficacit´e diminue avec la distance au centre), et la voiture sur tous les autres types de trajets. Hopquin (2000) r´esume ainsi le manque de performance des liaisons ferroviaires banlieue-banlieue :

1.1. ETALEMENT URBAIN ET ´EMERGENCE DE R ´EGIONS URBAINES POLYCENTRIQUES

« tant qu’il sera presque aussi rapide d’aller de Lyon `a Paris [environ 400 km] que de Conflans-Sainte-Honorine `a Versailles [moins de 30 km] la voiture aura de beaux jours ».

On observe en Europe que la zone o`u l’utilisation des transports en commun est majoritaire pour les d´eplacements quotidiens est d’extension spatiale faible dans la plupart des m´etropoles, Londres constituant peut-ˆetre une exception, avec un r´eseau remarquablement homog`ene sur le territoire de la Greater London Autori- thy. Pour des villes europ´eennes de la base UITP (2001)15 (encadr´e 7), les voitures

sont majoritaires pour les d´eplacements quotidiens (70 % des trajets m´ecanis´es en moyenne)16.

Encadr´e 7 (Base de donn´ees UITP, 2001) La base de donn´ees UITP (2001)a

provient d’une d´emarche internationale de recueil de donn´ees, en provenance de nombreux organismes de transport publics. La premi`ere base de donn´ees de l’UITP date de 1995 « Millenium Database », pour une cen- taine de villes dans le monde ensuite actualis´ee pour une cinquantaine de villes, principalement europ´eennes, en 2001. C’est cette derni`ere base de donn´ees qui est utilis´ee ici. La base de donn´ees UITP (2001) regroupe une centaine d’indicateurs agr´eg´es sur le coˆut, l’utilisation, ainsi que les cons´equences sociales et environnementales des pratiques quotidiennes de mobilit´e, ainsi que des indicateurs socio-´economiques classiques (PIB par habitant, taux de motorisation). Cette base de donn´ees fournit ´egalement des indicateurs g´eographiques simples, comme la population ou la densit´e nette de population.

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Union Internationale des Transporteurs Publics.

L’´etalement urbain s’est accompagn´e d’une substantielle augmentation des dis- tances domicile-travail. Par exemple, en France, cette distance est de 7,5 kilom`etres en 199917, en hausse de 66% par rapport `a 1975, d’apr`es Aguilera et al. (2006) : les

d´eplacements centre-centre sont en baisse, tandis que ceux concernant la banlieue augmentent.

L’accroissement des possibilit´es de d´eplacement se traduit par une ´evolution

15Union Internationale des Transporteurs Publics.

16Les villes appartenant `a l’ex-bloc sovi´etique (Prague, Budapest, Varsovie, Cracovie) de cette

base de donn´ees ont une fr´equentation plus importante des transports collectifs. Pour ces villes, environ 40 % des d´eplacements quotidiens sont effectu´es en voiture (UITP, 2001).

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Pour expliquer pourquoi cette distance moyenne est plus importante que la distance m´ediane (5 kilom`etres en Ile-de-France), il faut observer que la distribution des distances domicile-travail fait apparaˆıtre une distribution exponentielle, de sorte que, th´eoriquement, la m´ediane de la distribution est inf´erieure `a la moyenne, les deux ´etant s´epar´es par un facteur ln(2) .

progressive de la notion de proximit´e. La part des trajets `a l’int´erieur d’une mˆeme commune est en baisse depuis plusieurs recensements, comme en attestent les tra- vaux d’Aguilera & al. (2005) portant sur sept aires urbaines fran¸caises entre 1990 et 1999.

Pour illustrer cette ´evolution de la mobilit´e domicile-travail, la figure 1.2 (ef- fectu´ee `a partir des recensements de la population) donne l’´evolution de la distance domicile-travail, d’une part, et du taux de stabilit´e18, d’autre part, pour les com-

munes de l’aire urbaine de Paris19, entre 1982 et 2006. Rappelons que l’aire urbaine

de Paris est une entit´e g´eographique fond´ee sur les flux de navetteurs20 `a une date

donn´ee ; Julien (2007) met en garde contre l’erreur m´ethodologique qui consiste `a ´etudier de fa¸con diachronique un ph´enom`ene g´eographique, en conservant indˆument les mˆemes d´elimitations, alors que l’aire urbaine de Paris a vari´e consid´erablement entre 1968 et 199921(Julien, 2005). Les cartes de la figure 1.2 doivent ˆetre consid´er´ees comme une double illustration de l’accroissement g´en´eral des distances `a l’emploi entre 1982 et 1999 (on observe une stabilit´e entre 1999 et 2006) et de l’int´egration m´etropolitaine, avec la baisse des taux de stabilit´e des communes les plus excentr´ees. Notons toutefois l’existence de polarit´es secondaires fortes dans l’aire urbaine de Pa- ris, des communes dans lesquelles les actifs travaillent localement `a plus de 40 % : Paris, Versailles, Saint-Germain-en-Laye, mais aussi des villes historiques de plus petite taille, comme Fontainebleau ou Meaux. Le changement quantitatif (accrois- sement des distances et baisse des taux de stabilit´e) semble s’accompagner d’un changement de structure (´emergence de polarit´es secondaires).

18C’est-`a-dire le nombre d’actifs travaillant dans leur propre commune. 19

Selon ses contours de 1999.

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Le terme de « navetteur » renvoie aux individus effectuant des d´eplacements domicile-travail sur de longues distances, par exemple en quittant sa commune de r´esidence.

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Les contours les plus r´ecents de l’aire urbaine de Paris, issus du recensement de population 2006, n’´etaient pas disponibles en Septembre 2010.

1 .1 . E T AL E M E NT UR B AI N E T ´E M E R G E NC E D E R ´E G IO NS UR B AI NE S P O L YC E NT R IQ UE S

Fig. 1.2 – Evolution des distances `a l’emploi, et des taux de stabilit´e communaux dans l’aire urbaine de Paris, entre 1982 et 1999.

Au-del`a de l’extension physique des aires d’influence de ces villes europ´eennes, on constate une r´eorganisation interne des flux domicile-travail. Dans le cas de la r´egion parisienne, on observe ainsi une tendance `a un polycentrisme accru au niveau de l’aire urbaine (Berroir et al., 2005). Des polarit´es secondaires ´emergent, autour des villes nouvelles (Marne-la-Vall´ee, Saint-Quentin en Yvelines par exemple), comme autour de l’a´eroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, transformant peu `a peu les pra- tiques de mobilit´es. Appert (2005) ´evoque l’´evolution de la mobilit´e dans la r´egion m´etropolitaine de Londres, c’est-`a-dire bien au-del`a des limites du Grand Londres, s’appuyant sur des polarit´es secondaires en croissance, mˆeme si la zone centrale se densifie dans le mˆeme temps.

Les polarisations ´evoluent toutefois lentement au sein de l’espace m´etropolitain : `a Paris notamment, le centre reste plus attractif que la p´eriph´erie et la distance aux emplois est plus r´eduite pour les emplois p´eriph´eriques que pour les emplois centraux (Aguilera et al., 2006). Les pˆoles des zones interm´ediaires ont, d’apr`es ces auteurs, l’attraction la plus large et correspondent dans le cas de la r´egion parisienne aux zones proches de l’autoroute en rocade A86. Indice d’une contribution des villes nouvelles22 au polycentrisme ´emergeant en Ile-de-France, les distances moyennes

parcourues par un actif allant travailler dans une ville nouvelle sont plus grandes (17 km) que celles parcourues par un actif allant travailler dans un autre pˆole secondaire t´emoin (13 km), montrant une plus grande attractivit´e de ces aires (Berroir et al., 2005). L’´evolution des formes d’habitat et de mobilit´e quotidienne d´ebouche sur des m´etropoles de moins en moins organis´ees autour d’un centre unique. Pour d´esigner de telles structures urbaines, on parle dans la litt´erature de villes polycentriques (Dupont et Pumain, 2000), multicentriques, ou multipolaires (Julien, 2000).

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Les villes nouvelles ont ´et´e d´evelopp´ees en Ile-de-France dans la seconde moiti´e du XXe si`ecle, avec pour objectif de polariser la croissance de la r´egion francilienne (Sch´ema Directeur de la R´egion Ile-de-France, 1965).

1.1. ETALEMENT URBAIN ET ´EMERGENCE DE R ´EGIONS URBAINES POLYCENTRIQUES

Encadr´e 8 (Loi Rang-taille)

La loi rang-taille, appliqu´ee tr`es tˆot au contexte urbain (Zipf, 1949) est une loi empiriquea

reliant la population de la k`e ville la plus peupl´ee `a k et `a

la population de la premi`ere ville, p1, au sein d’un syst`eme de villes. Plus

pr´ecis´ement, on aurait une relation de type puissance entre pk et k :

pk = p1× k−p

ou

log pk = log p1− p log k

Cette loi est surtout ´etudi´ee pour caract´eriser un syst`eme de villes, pour une ´etude nationale ou continentale (Pumain, 2003a ; Bretagnolle et al., 2007 ; Batty, 2006 ; Favaro, 2007) ; la valeur absolue de la pente, p > 0, est couramment appel´ee « degr´e d’in´egalit´e » ou « degr´e de hi´erarchie » et permet de distinguer des syst`emes urbains tr`es hi´erarchiques, quelques villes dominant largement les autres, ou plus ´equilibr´es. Dans le contexte intra- urbain, la pente de la loi rang-taille peut-ˆetre utilis´ee pour quantifier le degr´e de polycentrisme (Batty, 2001) et renseigne plus g´en´eralement sur le niveau de concentration de la population dans quelques centres.

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Mˆeme si elle a re¸cu a post´eriori des justifications th´eoriques (Dauphin´e, 2003).