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Introduction du chapitre

3.2. DIVERSIT ´ E DES FORMES URBAINES EN EUROPE

3.2.1 Etude des indicateurs morphologiques

Pour ´etudier les formes urbaines des villes europ´eennes, l’ensemble des indica- teurs qui ont ´et´e pr´esent´es en section 3.1 sont mobilis´es. Le tableau 3.5 d´etaille les indicateurs utilis´es, et donne la r´ef´erence de l’´equation correspondant, afin d’en fa- ciliter la lecture. Le calcul de indicateurs morphologiques a ´et´e r´ealis´e `a l’aide de proc´edures informatiques automatis´ees que j’ai mis au point afin de permettre le traitement de grand nombre de donn´ees (figure 3.16). L’extraction des grilles de points en fonction des contours des diff´erentes aires fonctionnelles a ´et´e r´ealis´ee sous le programme ArcGIS. Le fichier de donn´ees unique provenant de ce logiciel a ´et´e transform´e automatiquement, sous SAS, de fa¸con `a disposer d’un fichier de donn´ees par villes. Un programme en langage JAVA, sp´ecialement d´evelopp´e, permet de cal- culer, pour une distribution de grille de densit´e donn´ee en entr´ee, les diff´erentes valeurs des indicateurs de forme urbaine (voir section 3.1). Le programme JAVA exporte des fichiers au langage naturel du programme SCILAB, `a partir duquel les donn´ees sont recueillies pour l’ensemble des villes, puis trait´ees par des logiciels classiques de traitement statistique (SAS, R, ExcelStat).

Grille densit´e

EEA Fichier

ArcGIS FichierSAS

Grille ville n Grille ville (n - 1) Grille ville (n - 2) ... Grille ville 3 Grille ville 2 Indicateurs ville n Indicateurs ville (n - 1) Indicateurs ville (n - 2) ... Indicateurs ville 3 Indicateurs ville 2 Fichier

SCILAB statistiqueTraiment conversion JAVA JAVA JAVA JAVA JAVA Scilab

Figure3.16 – Proc´edure automatique d’extraction des grilles de densit´e, et de calcul des indicateurs morphologiques.

3.2. DIVERSIT ´E DES FORMES URBAINES EN EUROPE

Le pas de la grille de 400 m`etres est utilis´e pour les exploitations `a suivre19,

ce choix repr´esentant un compromis entre une taille minimale correspondant `a des temps de calculs importants pour des pas fins, et une taille maximale provenant de la superficie des aires fonctionnelles les plus petites20. La grille correspondant

`a l’ensemble des villes europ´eennes, pour un pas de 400 m`etres totalise plus de 3,5 millions de cellules, ce qui justifie le recours `a des programmes informatiques automatis´es.

La table 3.6 donne les valeurs moyennes des principaux indicateurs obtenus, pour des villes allant de 65 000 habitants (Frankfurt - Oder) `a 12 millions d’habitants (Londres). Les moyennes calcul´ees doivent ˆetre prises avec pr´ecaution, provenant de villes de tailles tr`es diff´erentes. Quelques ordres de grandeurs int´eressants res- sortent toutefois : le rayon moyen d’une ville est `a peine de 25 kilom`etres environ, ce qui correspond approximativement `a la maille ´el´ementaire du semis historique de villes europ´eennes (Bretagnolle et al., 2007) ; pour les villes les plus peupl´ees, le rayon est bien plus important, allant jusqu’`a 62 kilom`etres dans le cas de Paris et 75 kilom`etres dans le cas de Berlin. La distance moyenne entre deux individus dans les aires fonctionnelles europ´eennes est de 13 kilom`etres. Cet indicateur, peu souvent utilis´e dans la litt´erature, sera repris par la suite, notamment pour expli- quer la distance moyenne des trajets quotidiens. La densit´e de population est de 500 habitants par kilom`etre carr´e en moyenne, la moiti´e de celle de l’Ile-de-France, `a titre de comparaison.

La dimension fractale a ´et´e calcul´ee pour diff´erents seuils de densit´e mettant en ´evidence des r´esultats int´eressants, et notamment la superposition de plusieurs mod`eles d’urbanisation, `a diff´erentes ´epoques, conform´ement `a l’historique rappel´e en section 1.1. L’encadr´e 25 illustre ainsi la diff´erenciation des dimensions fractales des villes-centres historiques, des villes ferroviaires du dix-neuvi`eme si`ecle, et des villes automobile modernes, qui coexistent dans un palimpseste urbain en perp´etuel mouvement.

Les indicateurs ont ´et´e calcul´es pour diff´erents pas de grille et les histogrammes de leurs distributions sont donn´es en annexe (page 415). La plupart des indicateurs utilis´es suivent approximativement une loi normale, et sont stables avec le pas de la grille utilis´ee, `a l’exception notable de l’indice de Moran, tr`es sensible `a la maille sous-jacente, conform´ement `a l’observation r´ealis´ee en section 3.1.4.

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A l’exception du calcul de la dimension fractale qui requiert par d´efinition plusieurs pas de grille.

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L’utilisation d’un pas de grille adaptatif, visant `a conserver un nombre de cellules constant, ind´ependamment de la taille de la ville, semble judicieux du point de vue m´ethodologique, mais n’a pas ´et´e retenu du fait des difficult´es d’impl´ementation et d’interpr´etation.

indicateur (N = 287) moyenne ´ecart-type min max m´ediane Population totale 740 000 1 200 000 69 000 11 600 000 377 000

Densit´e de 4,73 4,95 0,13 39,13 3,00

population (hab / ha)

Surface totale (ha) 197 000 195 000 11 000 1 750 000 144 000

Rayon (km) 22,9 10,3 5,9 74,6 21,4

Entropie 0,77 0,07 0,55 0,93 0,78

Hoover 0,74 0,08 0,42 0,92 0,74

Hi´erarchie 1,46 0,31 2,45 0,73 1,46

Moran 0,08 0,03 0,03 0,19 0,07

Distance entre individus 13,3 6,3 2,3 40,7 12,5

Distance relative 0,25 0,13 0,09 0,86 0,22 Indice d’acentrisme 0,54 0,14 0,25 0,86 0,52 Dimension fractale (0) 1,39 0,03 1,25 1,49 1,39 Dimension fractale (50) 1,18 0,07 0,98 1,36 1,18 Dimension fractale (200) 1,2 0,08 0,98 1,41 1,19 Dimension fractale (1000) 1,35 0,11 1 1,7 1,35

Tab.3.6 – Description statistique des indicateurs morphologiques pour les 287 aires fonctionnelles europ´eennes ´etudi´ees.

3.2. DIVERSIT ´E DES FORMES URBAINES EN EUROPE

Encadr´e 25 (Dimensions fractales) La valeur de la dimension fractale d´epend du seuil de densit´e fix´e au pr´ealable. Les valeurs suivantes ont ´et´e test´ees, en habitants par hectare : (0 ; 10 ; 25 ; 50 ; 100 ; 200 ; 1000) ; pour fixer des ordres de grandeur, les cellules dont la densit´e de popula- tion d´epasse 10 (respectivement 50) habitants par hectare repr´esentent en moyenne 10 % (respectivement 2 %) de la surface totale des aires fonction- nelles. On trouve en annexe (428) les grilles de population de trois grandes capitales europ´eennes (Paris, Londres, Madrid), et des 6 « Larger Urban Zones » de la r´egion Rhin-Ruhr.

Sur l’´echantillon des aires fonctionnelles europ´eennes ´etudi´ees, la valeur de la dimension fractale, est minimale pour une densit´e entre 50 et 100 ha- bitants par hectares, ce qui correspond `a une zone dense qu’il est possible de desservir en transport collectifs : on peut interpr´eter ce r´esultat par la conservation sur le temps long des formes urbaines, en l’occurrence h´erit´ee des modes de transports ferroviaires existant depuis le dix-neuvi`eme si`ecle. Aux deux extrˆemes de la courbe, la dimension fractale est forte pour les seuils de densit´e les plus importantes, correspondant aux villes pi´etonnes histo- riques, et forte pour les seuils de densit´e les plus faibles : la mobilit´e automo- bile a permis une urbanisation dans les interstices des couloirs ferroviaires.

Le cas du bassin de la Ruhr, dont la courbe diff`ere de celle des autres ca- pitales europ´eennes, attire l’attention. On observe une dimension fractale plus ´elev´ee aux faibles densit´es, et plus faible aux densit´es les plus fortes, sugg´erant un mod`ele de d´eveloppement diff´erent de ce bassin urbain polycen- trique.

Valeurs extrˆemes des indicateurs et effets de taille

Parmi les douze indicateurs dont les valeurs viennent d’ˆetre pr´esent´es, quatre sont directement li´es `a l’importance d´emographique de la ville : la population, la surface totale, le rayon de la ville, et la distance moyenne entre deux individus. Les autres sont, au moins dans l’interpr´etation qui en a ´et´e faite au cours du chapitre 2, ind´ependants des effets de taille. Il est possible de v´erifier cette hypoth`ese sur l’ensemble des villes europ´eennes.

Les cartes des figures 3.17 et 3.18 repr´esentent le contour et la r´epartition de la population pour les villes correspondant aux valeurs extrˆemes de chacun des in- dicateurs, ainsi que pour une ville correspondant `a la m´ediane de ces indicateurs. L’indicateur de hi´erarchie est maximal pour Barcelone, au centre tr`es dense par rapport `a la p´eriph´erie, tandis que l’urbanisation de la ville de Plock (en Pologne, `a environ 100 kilom`etres de Varsovie) est particuli`erement ahi´erarchique (et dis- pers´ee, sur la carte de la figure 3.17). L’exemple de Wolverhampton (figure 3.17) justifie l’interpr´etation qui est faite de l’indicateur de Moran : l’urbanisation y ap- paraˆıt tr`es compacte, autour d’un petit nombre de noyaux dont un, central, est particuli`erement important. Les autres cartes de ces figures illustrent la diversit´e des formes d’urbanisation des villes europ´eennes.

Les histogrammes de distribution de ces indicateurs morphologiques, qui semblent les moins reli´es `a la population totale de la ville dans leur mode de calcul (densit´e nette, acentrisme, entropie, Moran, hi´erarchie, dimension fractale, distance relative), se rapprochent pour la plupart d’une loi normale (annexe, page 415). La matrice de corr´elation entre l’ensemble des indicateurs morphologiques et la population totale (tableau 3.721) fait apparaˆıtre des liens statistiquement significatifs, entre la popula-

tion des aires fonctionnelles, et la valeur des diff´erents indicateurs morphologiques. Les r´esultats indiquent ainsi que les villes les plus peupl´ees tendent aussi `a avoir : – Une densit´e nette de population plus importante que la moyenne.

– Un ´eloignement au mod`ele monocentrique plus marqu´e (l’indice d’acentrisme est plus ´elev´e).

– Une entropie ´elev´ee, correspondant `a une urbanisation moins organis´ee. – Une autocorr´elation spatiale (indice de Moran) forte, correspondant peut-ˆetre

`a des formes urbaines compactes.

– Une distance relative entre individus plus faible, ce qui va ´egalement dans le sens de formes urbaines plus compactes.

– Un degr´e de hi´erarchie plus fort.

– Une dimension fractale plus importante.

Toutefois, vu la diversit´e des villes ´etudi´ees (la population varie d’un facteur 1 `a 100 dans l’´echantillon), ces liens sont difficiles `a interpr´eter : proviennent-ils d’une diff´erenciation des mod`eles d’urbanisation, en fonction de la population des

3.2. DIVERSIT ´E DES FORMES URBAINES EN EUROPE

min max m´ediane

[DENSE]

Saarbr¨ucken Campobasso Budapest

[HIER]

Plock Barcelona Praha

[DISTREL]

Bucuresti Liepaja Groningen

[ACENTRIQ]

Kavala Manchester Olomouc

Fig. 3.17 – Formes urbaines « extrˆemes » pour les diff´erents indicateurs utilis´es (1/2)