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Entretiens individuels semi-structurés auprès des réfugiés et demandeurs d’asile

Les entretiens individuels auprès des réfugiés et demandeurs d’asile ont eu lieu entre novembre 2009 et mars 2010 et impliquaient exclusivement des résidents de la RMR de Montréal. Comme il s’ agit d’une recherche exploratoire, les entretiens individuels semi-structurés nous ont permis d’identifier un éventail d’expériences par rapport au phéno mène à l ’étude, expériences que nous n’aurions probablement pas pu connaître par une autre méthode de collecte de données. Ainsi, nous n’avions pas pour but de généraliser les données recueillies à une plus large population ou d’être représentatifs de la réalité montréalaise, mais plutôt de dégager des typologies, des catégories et des cas de figure. Savoie-Zajc (2008 : 349) note que la saturation théorique demeure la meilleure façon de reconnaître que le nombre d’entretiens de recherche est suffisant. Elle définit ce stade de l ’étude comme le moment où un entretien supplémentaire n’ajoutera rien à la compréhension du phénomène à l’étude.

Avantages des entretiens individuels

Nous avons choisi d’effectuer des entretiens semi-structurés individuels afin de profiter des avantages des entretiens non-pré-structurés et des entretiens dirigés. N ous étions ainsi à la fois en mesure d’obtenir des informations suite à des questions standardisées, telles l’âge, l’occupation, le type de ménage, puis d’explorer certaines autres informations, en engageant un dialogue plus libre.

Comme le mentionnent plusieurs auteurs, (Holstein et Gubrium, 2004 : 156; Miller et Glassner, 2004 : 135; Savoie-Zajc, 2008 :342), les entretiens permettent aux chercheurs en sciences sociales de créer

67 des contextes propices à une m eilleure compréhension de l a société. C es auteurs démontrent comment les interactions entre le chercheur et le participant produisent des informations, sans toutefois perdre le sens des propos et les objectifs de la recherche. Lorraine Savoie-Zajc (2008 : 337) définit cette interaction par une « dynamique de co-construction de sens » qui s’établit entre les interlocuteurs, et qui « stimule l’émergence d’un nouveau discours et d’une nouvelle compréhension à p ropos du phénomène étudié ». L’objectif de ces entretiens était donc aussi de nous mener à une analyse axée sur la façon dont ce qui est dit au cours de l’entretien interprète les conditions d’accès au logement, puis aux trajectoires résidentielles, objets principaux de notre recherche.

Ce type d’entretien vise à permettre aux participants de répondre aux questions en les abordant dans leurs propres termes, et en faisant appel à leur propre cadre de référence (May, 2001). Ils fournissent au chercheur les moyens d’explorer le sujet à travers les points de vue des participants, en considérant ces points de vue comme une réalité (Miller et Glassner, 1997). Bien que certaines caractéristiques et dispositions personnelles puissent être considérées comme gênantes pour les interviewés, il peut être plus facile de les révéler devant une seule personne (le chercheur) que devant un groupe (groupe de discussion). Tout cela dépend d’une multitude de facteurs, dont la confiance établie avec l’intervieweur et la façon dont se déroule l’entretien, que l’on ne peut jamais totalement contrôler à l’avance (Beaud, 2001). Dans le cadre de not re étude, les expériences de discrimination ont été abordées plus facilement dans un contexte individuel que lors du focus group. L es entretiens individuels offrent également l’opportunité à l’intervieweur d’aider les participants à s’exprimer, ce qui enrichit la qualité des informations recueillies.

L’objectif derrière l’entretien de r echerche devient donc de fournir un environnement propice à l a communication et à la production de se ns par les participants à la recherche (Holstein et Gubrium, 2004: 152). Le ch ercheur, en co llaboration avec le ou les répondants à l’entretien, participent à un entretien actif qui leur permet d’explorer des perspectives nouvelles du sujet, et de puiser dans divers bassins de connaissances. Miller et Glassner (2004) suggèrent toutefois que le langage des entretiens fragmente les récits lorsqu’ils sont racontés. Cette fragmentation survient pour plusieurs raisons, dont la limite de temps alloué à l’entretien, puis la nature de la recherche et des questions.

La méthode d’entretien

En tant que chercheur, nous devons être en mesure de convaincre le participant de la « légitimité de ses idées, de ses pensées de ses sentiments » (Duchesne, 1996). Nous devons aussi l’assurer de notre intérêt pour son discours, et pour celui des réfugiés et demandeurs d’asile comme lui. Le participant ne retire que très peu de l’entretien, si ce n’est que d’avoir l’impression d’avoir été écouté et compris. L’essence de l’entretien se trouve dans le rapport subjectif que le participant entretient avec le sujet.

68 Selon plusieurs auteurs, notamment Miller et Glassner (2004), la relation entre le chercheur qui mène l’entretien et le participant implique davantage que le fait de fournir des conditions de confidentialité, et des réponses sans jugement aux affirmations de ce dernier. Cette relation implique que le participant se sente assez confortable et confiant dans l’interaction pour répondre adéquatement. La di stance sociale entre les interlocuteurs peut se transformer en une relation de pouvoir et entraîner un manque de confiance du participant à l’égard du chercheur. Ainsi, il importe que nous suscitions la perception du participant d’une relation d’égal à égal avec le chercheur.

Pour mener à bien les entretiens individuels semi-dirigés, nous avons construit un rapport de confiance mutuelle avec nos interlocuteurs, démontré un authentique intérêt pour le discours du participant et assuré la confidentialité de ses propos (Miller et Glassner, 2004). Cette relation s’est construite à travers un ordre bien réfléchi de thèmes à aborder, et une formulation de questions conviviale et non- directive. H olstein et Gubrium (2004 :144) indiquent qu’un chercheur qui connait les différentes facettes d’un problème ainsi que les alternatives qui y sont liées donne l’impression d’une plus grande neutralité. Nous avons donc stimulé les réponses des participants en les supportant dans leurs processus d’élaboration du discours; l’objectif demeurait de fournir au répondant un environnement qui suscite la production d’un récit pertinent et personnel sur la question à l’étude.