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Fond d’entretien routier (FER) : une première réponse à la dégradation routière Si l’État djiboutien a bénéficié de l’aide des bailleurs de fonds internationaux pour

Piraterie dans le monde entre 2006 à

Encadré 1 : spécificités et libéralisation du transport routier éthiopien

3 Corridors routiers : Djibouti – Addis-Abeba

3.4 Contexte régional et difficultés du train : à cause de l’hégémonie routière

3.5.2 Fond d’entretien routier (FER) : une première réponse à la dégradation routière Si l’État djiboutien a bénéficié de l’aide des bailleurs de fonds internationaux pour

réhabiliter le corridor de transit, il fut contraint de trouver les moyens d’assurer, sur le long terme, la conservation en bon état du réseau routier. À cet effet, il fut créé en 1999, un organisme chargé de l’entretien routier, le Fonds d’entretien routier (FER).

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En dépit des réticences éthiopiennes, le gouvernement djiboutien met en place ainsi cet organisme chargé de lever des fonds pour l’entretien et la réhabilitation des corridors routiers. Concrètement, il s’agit de faire participer les utilisateurs aux coûts inhérents à son entretien, avec l’introduction d’une taxe touchant les transporteurs. Ce faisant, Djibouti adopte le même modèle de fonds routiers en vigueur en Afrique subsaharienne depuis les années 90 (Benmaamar, 2006).

Un fonds routier proprement dit est un fonds séparé du cadre budgétaire général de l’administration centrale. Cela signifie que son financement provient en partie des redevances d’usagers susceptibles d’être affectées aux dépenses d’entretien et/ou l’achat des équipements utilisés. Le fonds d’entretien routier de Djibouti est un Fond d’entretien dit de deuxième génération induisant une séparation de la fonction de financement de celle de l’exécution, et ce, à la différence du Fonds d’entretien de première génération (Potter, 1997). En d’autres termes, il y a là une totale séparation entre l’organisme chargé du financement et celui en charge de l’exécution.

Une taxe pour financer le FER.

Le principe de base pour le calcul de cette taxe est de 0,5 dollar (US) par tonne de marchandise transportée. Cependant, dans un premier temps, en raison de l’absence de moyens de pesage, le Fonds routier applique un tarif forfaitaire de 30 tonnes par camion ce qui équivaut à 15 dollars (environ 2700 DJF).

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Figure 37 : Évolution des recettes récoltées par FER 2001-2010

Source : Fonds d’entretien routier (FER) et Calcul de l’auteur

En raison de l’augmentation soutenue du nombre de camions et donc de la dégradation rapide de la chaussée, les autorités djiboutiennes pensent à augmenter le tarif de la redevance : il s’agit de permettre au FER de disposer des moyens nécessaires à l’entretien routier (Figure 37).

Les autorités éthiopiennes expriment encore une fois leurs réserves et qualifient cette redevance routière de contre-productive. Selon les Éthiopiens, une telle mesure risque d’alourdir les charges supportées par les transporteurs routiers et d’impacter négativement, à terme, leur économie. Pourtant, la taxe appliquée par les Djiboutiens reste en dessous des recommandations du COMESA qui recommande l’application d’un barème de 10$/100km/camion équivalent à une redevance de 44$112 pour le corridor routier (RN1), long d’environ 220 km. Les nouvelles tarifications entrent en vigueur en 2004, obligeant désormais les transporteurs routiers à s’acquitter de 1$ pour la tonne de

112Le tarif recommandé par le COMESA revient à 44$ parce qu’on prend en compte un aller-retour soit

220 km multiplie par 2, c'est-à-dire prélèvement de la redevance lors de la descente même si le camion revient vide.

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marchandise transportée (au lieu de 0.5$) pour une charge moyenne de 40 tonnes au lieu de 30 tonnes. Néanmoins, les autorités djiboutiennes s’accordent juste à relever la taxe forfaitaire de $15 à $20.

Figure 38 : évolution du nombre de camions sur le corridor

Source : Fonds d’entretien routier (FER) et Calcul de l’auteur

Parallèlement à l’accroissement des activités portuaires et donc du transit éthiopien qui passe de 3 097 294 tonnes de marchandises (hydrocarbures compris) en 2002 à plus de 8 830 934 tonnes en 2009, sur cette même période, le flux de camions passe de 102 505 camions à plus de 250 000 camions (Figure 38). Ceci est considérable sur une période aussi courte (environ 7 années) et permet au FER de récolter plus d’argent. Ainsi, en 2014, les sommes récoltées par le FER s’élevaient à plus de 1 milliard DJF (5 670 000 dollars) ce qui correspond à un montant cinq fois plus élevé que les recettes générées en 2001.

Comment est dépensé l’argent ainsi récolté ? L’état des corridors routiers s’est-il amélioré depuis la mise en place du FER ?

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Les dépenses du FER

Durant ses premières années de fonctionnement, le FER effectue un certain nombre d’investissements portant notamment sur l’équipement de la gendarmerie routière, l’installation des bureaux de collecte et de contrôle le long du parcours. Le fonds finance à hauteur de 15 millions de francs le budget de fonctionnement de la brigade de la sécurité routière de la gendarmerie nationale. Cette brigade assure, entre autres, la sécurité tout au long du corridor et procède aux contrôles des véhicules pour faire respecter les limites de chargement autorisées. Les investissements réalisés par le FER portent aussi sur l’achat de grues de levage des camions destinées à libérer la chaussée en cas d’accident. Ces grues sont stationnées dans les différents locaux de la sécurité routière, à savoir PK 20, PK 51 et Yoboki, mais restent insuffisantes eu égard au flux des camions113. En somme, ces différents investissements n’ont pas réellement permis au FER d’accomplir pleinement sa mission. Selon l’ancien directeur du FER, Souleiman Moumin, le fonds a dû supporter d’autres charges jusqu’en 2010, ce qui obère la capacité du Fond à investir dans l’entretien routier.

En plus des recrutements effectués, le FER a eu à supporter le paiement de salaires des anciens cheminots et d’une partie des employés du Ministère de l’Équipement et des Transports (MET). Suite à l’interruption du train, le MET a transféré les charges salariales des cheminots sur le budget du FER créant ainsi un effectif pléthorique114 par rapport au besoin réel de l’organisme. Ces différentes charges continuent toujours de peser sur l’équilibre financier de l’organisme absorbant ainsi une part significative de recettes. Déjà pointée du doigt dans l’étude diagnostique pour l’intégration sur le commerce (EDIC) en 2004, cette situation semble toujours être d’actualité. En 2011, selon le FER, plus de 35% des sommes collectées ont été utilisées soit pour le traitement de salaires soit pour des activités ne relevant pas directement de l’entretien.

113Il semble qu’aujourd’hui l’unique grue fonctionnelle soit celle stationnée à PK 12 alors le corridor

routier est long d’environ 217km.

114Selon les données statistiques fournies par le FER, les effectifs étaient au moins une centaine de

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Par ailleurs, le FER contribue au financement de bon nombre de projets comme la viabilisation de certains quartiers de la capitale ou des tronçons de route non empruntés par les poids lourds éthiopiens. Ces financements soulèvent la question de l’utilisation inappropriée des recettes du FER.

Nonobstant l’absence de chiffres détaillés sur l’utilisation des recettes de FER, tout laisse à penser que l’État tend à utiliser ses fonds pour financer des projets sans aucun lien avec les missions dévolues au fonds.

Usant de leur statut d’utilisateurs et de contributeurs les Éthiopiens demandent à siéger au conseil d’administration du FER115. Les autorités djiboutiennes continuent d'opposer une fin de non-recevoir à cette demande, et ce, pour des raisons liées à la souveraineté nationale. Une telle posture est quelque peu contradictoire eu égard à la présence de la douane éthiopienne au port de Djibouti. Tout laisse à penser que la présence, du moins, du secteur privé au conseil d’administration du FER, à l’instar de ceux du continent, aurait permis un meilleur contrôle des dépenses engagées. Quant à la question de la non- représentativité du secteur privé, ni le responsable du Fonds routier ni ceux du Ministère de l’Équipement et des Transports (MET) n’ont souhaité répondre à nos questions.

Cependant, en transformant le Fonds d’entretien routier en une agence djiboutienne des routes (ADR) on s’interroge si l’État tente de répondre aux critiques concernant l’utilisation des sommes collectées. Il faut aussi souligner que les bailleurs de fonds, notamment, l’UE, continuent de prendre en charge l’essentiel de l’entretien du corridor routier malgré l’existence du FER.

Donc, pourquoi l’État souhaite-t-il élargir les champs d’intervention de l’organisme puisque les recettes restent toujours au même niveau.

115Plus de 95 % de transporteurs sont éthiopiens selon les données du FER et la Banque centrale de Djibouti

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