• Aucun résultat trouvé

De la gestion intégrée à la Directive Cadre sur l’Eau Directive Cadre sur l’Eau Directive Cadre sur l’Eau Directive Cadre sur l’Eau

1.1 Gestion intégrée de l’eau et subsidiarité en France

1.1.1 L'enrôlement des parties prenantes dans les bassins versants

En France, la gestion intégrée de l'eau a pris appui sur le territoire du bassin versant, via une gestion coordonnée de la ressource en eau entre les services de l'État, les collectivités territoriales, les usagers et les ONGE (Organisations Non Gouvernementales Environnementales). Si des éléments de la société civile participent à cette gouvernance, le

grand public ciblé aujourd’hui par la DCE, ne fait pas encore partie de la configuration. Il y

figure de manière indirecte, représenté par les élus, les syndicats professionnels, les chambres consulaires, les associations. La question de la participation explicite du grand public à la construction de cette gouvernance locale de l'eau n'était pas posée au début de ce processus. Au commencement, l'enjeu fondamental de la mise en place de la gestion intégrée de l'eau en France fut de faire émerger une « gestion patrimoniale de l'eau », une ressource à faire partager entre les usagers, mais pas encore à protéger pour elle-même92.

En 1959, le Commissariat Général au Plan créa une commission de l’eau chargée de préparer une réforme et un code de l’eau, dont l’aboutissement fut la loi du 16 décembre 1964 (n°64-1245), intitulée « loi sur la répartition des eaux et la lutte contre les pollutions ». Cette

91 Ibid.

92 BARRAQUE B. (1998), « Les services publics d'eau et d'assainissement face au développement durable ».

40

commission était composée d’un collège d’ingénieurs des Grands Corps de l’État, des fonctionnaires des Mines, des Ponts et Chaussées et du Génie rural93. La préoccupation principale qui émergea alors concernait le risque que les dégradations de la ressource eau freinent la croissance économique et le développement. Les enjeux proprement environnementalistes apparurent plus tard, au cours des années 1980 et 199094.

Il fut ainsi convenu de territorialiser la gestion de l’eau en établissant des coopérations institutionnelles et des interdépendances locales dans des territoires de gestion inédits. La loi sur l’eau de 1964 institua le territoire administratif des « bassins versants » dans un mouvement original de décentralisation. Six grands bassins versants divisent le territoire français, chacun étant administré par un Comité de Bassin et une Agence de l’Eau (cf. ci- dessous figure 2).

Le Comité de bassin est une instance décisionnelle composée d’un collège de représentants des services centralisés de l'État, de représentants des collectivités territoriales et de représentants des usagers de l’eau (une centaine de membres au total). Les membres du Comité de bassin ne sont pas élus, mais désignés par les organisations ou les opinions qu'ils représentent, de même que leur composition est donnée par la loi.

L’Agence financière de Bassin (devenue Agence de l’Eau depuis 1992) est une instance exécutive, un établissement public à caractère administratif doté de la personnalité et de l’autonomie financière, placée sous la tutelle des ministères de l’Environnement et des Finances.

L’Agence de l’eau est chargée de fournir un appui technique et financier, en instaurant un système de redevances proportionnel à l’usage de l’eau et aux rejets polluants. Elle dispose d'un personnel qualifié qui fournit des conseils et des expertises aux collectivités territoriales et aux usagers. L’idée initiale fut de créer des communautés d’usagers, dans un champ limité aux collectivités locales et aux industriels, pour solidariser les usagers et mutualiser les investissements de mobilisation de la ressource et de lutte contre la pollution. Les Agences de l’eau ne disposent cependant pas du pouvoir de police, concernant le contrôle et la sanction des usagers. Ce pouvoir est réservé aux Préfets, et son exécution repose sur les services

93 CHEVALLIER H. (2007), L’eau, un enjeu pour demain, Paris, Editions Elebore.

94

41 déconcentrés de l'État au sein de missions interministérielles (MISE), organismes aux capacités de contrôle cependant limitées95.

Figure n°2 Les sept bassins versants de la France métropolitaine

La redevance perçue par l’Agence de l’eau porte sur tous les usages de l'eau (individuels et collectifs, économiques et domestiques) et est destinée à financer la politique du bassin (définie dans les programmes pluriannuels), ainsi qu’à soutenir des projets et des opérations ponctuelles correspondant aux orientations prioritaires : assainissement, économies d'eau, protection contre les inondations et aujourd'hui de restauration des milieux aquatiques. L'Agence de l’eau fonctionne comme une mutuelle ; les recettes de la redevance sont redistribuées sous forme de subventions ou de prêts pour financer les mesures programmées. Dès la loi de 1964 les redevances sont en principe établies selon le principe « usager de

95

42

payeur », déclinaison du principe « pollueur-payeur », mais c'est en réalité, in fine le Comité de Bassin qui applique ce principe en fixant localement l'assiette de la redevance.

Le Comité de Bassin décide des grandes orientations de la politique du bassin et contrôle le produit de la redevance. Considéré comme un « parlement de l’eau », étant donné sa composition collégiale, il a autorité dans le bassin pour fixer non seulement l'assiette fiscale des redevances (le montant de la contribution pour chaque type d'usager), mais également pour définir l'utilisation de ces ressources financières. En principe, les intérêts sectoriels doivent être dépassés au nom de l'intérêt général. Il s'agit de faire endosser à ces acteurs locaux une responsabilité d'intérêt général qui repose sur une vision partagée des enjeux96 et soit conforme aux objectifs généraux de préservation de la ressource en eau et plus récemment de préservation des milieux aquatiques.