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3 Eléments de différenciation des communes périurbaines et diffusion des POS

a L’évolution du parc de logement dans le périurbain

En 1990, plus de 80 % des logements périurbains étaient composés de maisons individuelles alors qu’elles ne représentaient qu’à peine 30% des logements des villes-centres et moins de 50% des logements des communes de banlieue (Le Jeannic, 1997a). Depuis, Cavailhès et Goffette-Nagot (2001) révèlent, qu’entre 1984 et 1996, un logement neuf sur cinq s’est construit dans le périurbain alors que ce dernier ne représentait que 14% du parc de logement en 1992 et 15,7% de la population en 1990.

Plateau et Rakotomalala (2005) estiment que l’essor retrouvé de la construction depuis 1994 est essentiellement porté par l’engouement pour les maisons individuelles. Alors que dans les années 1960, seul 25% des logements neufs étaient des maisons individuelles, le chiffre atteignait 50% au début des années 90 et dépassait les 60% pour la période 1999-2004. En outre, parallèlement au développement de la maison individuelle, la hauteur des immeubles a progressivement diminué traduisant une préférence pour les espaces moins denses. Plateau et Rakotomalala (2005) rapportent que « 3% des immeubles collectifs comptent plus de neuf

étages en 2004 contre 6% dix ans auparavant ».

Cavailhès et Goffette-Nagot (2001) révèlent que la superficie moyenne des logements périurbains s’est accrue depuis 1984 (bien que la taille des logements neufs soit restée assez stable) alors que la surface des logements est restée assez constante dans les pôles urbains avec une diminution de la surface des logements neufs. Ainsi, la surface moyenne des logements dans le périurbain atteignait 105m² en 1996, soit une surface supérieure de 32% en moyenne par rapport à celle des logements des pôles urbains. En outre, la surface des maisons individuelles périurbaines dans les petites aires urbaines s’est nettement accrue depuis 1980 passant de 105 à 115 m².

b L’évolution de la structure sociale des communes périurbaines

En France, la part des propriétaires est passée de 50,7% en 1984 à 54,3% en 1996 (Cavailhès et Goffette-Nagot, 2001) et s’est encore accru depuis selon Jacquot et Minodier (2006) pour atteindre 57% en 2005. Jacquot et Minodier observent que la progression du nombre de logements individuels et celle des propriétaires sont assez semblables, à l’instar des progressions parallèles du nombre de logements collectifs et de locataires. A l’inverse, la part des ménages logés gratuitement diminue constamment. Enfin, Jacquot et Minodier rapportent qu’« au 1er janvier 2005, 81 % des ménages habitant une maison en sont propriétaires, alors

Cavailhès et Goffette-Nagot (2001) révèlent que plus de 70% des ménages périurbains sont propriétaires de leur logement contre moins de 40% des ménages des villes centres : « le

statut de propriétaire est largement dominant dans le périurbain, mais on note une augmentation de l’effectif des locataires d’un tiers entre 84 et 96. Par ailleurs, durant la période 1990-1996, un logement sur cinq construit dans une commune périurbaine fait partie d’un immeuble collectif ». Néanmoins, Cavailhès et Goffette-Nagot (2001) soulignent que

« la grande majorité des locataires se situe dans les pôles urbains […], mais en pourcentage,

la plus forte augmentation des locataires se situe dans le périurbain ».

Les ouvriers effectuent plus de 70% de leurs transactions sur le secteur du logement individuel d’après Thiennot (2004) alors que seules 57% des transactions des cadres se concentre sur ce même secteur. En effet, les cadres sont plus urbanisés que les ménages ouvriers. Les retraités apparaissent plus souvent acheteurs d’appartement que de maisons ce qui illustre leur retour vers les pôles urbains. La catégorie des retraités représente 40% des vendeurs pour 25% de la population. Les professions intermédiaires ou de cadres supérieurs représentent plus de 40% des acheteurs mais ne représentent qu’un quart des vendeurs en 2000 alors qu’elles représentent 20% de la population.

Cavailhès et Goffette-Nagot (2001) observent que les agriculteurs, les artisans et les ouvriers ont vu leur part dans la population périurbaine reculer au profit des employés, des cadres et des professions intellectuelles durant la période 1984-1996. Les ouvriers restent en proportion plus nombreux dans le périurbain même si leur part s’est dégradée. La part des cadres et des professions intermédiaires croît dans le périurbain. D’après la mise à plat de Cavailhès et Goffette-Nagot (2001), les revenus des ménages sont les plus élevés dans les communes de banlieue, même si la dispersion est grande. Par contre, la situation de nombreuses communes-centres s’est dégradée entre 1984 et 1996. Si Rouxel (2003) constate que « l’éventail des

revenus est plus ouvert dans les pôles urbains, et plus encore dans les villes-centres de ces pôles », il estime que le départ des classes moyennes des centres-villes au profit des

communes périurbaines explique le niveau supérieur des revenus médians dans les communes périurbaines par rapport aux pôles urbains. Ainsi, le revenu moyen des communes périurbaines rattrape celui des banlieues.

Beaucoup d’élus périurbains redoutent que leur commune ne devienne un ghetto social sous l’effet de la croissance démographique. Aussi est-il très courant (sinon systématique) de rencontrer des restrictions sur la surface des parcelles vendues dans les communes dotées d’un POS (PLU). La surface impartie est en général voisine de 800m² mais il maintenant courant de rencontrer des surfaces minimales de 1000 à 1500m².

c L’évolution des équipements et des services publics dans les communes périurbaines

Bien que l’évolution des équipements publics soit retardée par rapport aux évolutions démographiques, Champsaur (2001) observe un renforcement de ces derniers dans les communes périurbaines durant la décennie des années 90. Les communes de l’EDR restent cependant assez bien pourvues avec un niveau d’équipement comparable à celui des communes périurbaines. En revanche, à taille de population égale, les communes de l’EDR sont mieux équipées que les communes périurbaines. La proximité des pôles urbains, qui concentrent les services nécessitant les plus lourdes infrastructures (hôpitaux…) et ceux ayant les plus grandes aires de marché (théâtres, salles de concert, musées…), limite sans doute, selon Champsaur, les possibilités de développement de nouveaux équipements dans les communes périurbaines. Champsaur (2001) note que l’évolution la plus notable parmi les équipements collectifs communaux est celle de l’école élémentaire. Il ressort également de l’inventaire communal de 1998 que les services du domaine socioculturel et ceux en direction des enfants et des jeunes (écoles, garderies, centres de loisirs, équipements sportifs) sont maintenant bien implantés dans les communes périurbaines périphériques. Si les services en direction des jeunes enfants (école élémentaire, garderie, services à la petite enfance…) ont progressé dans les années 1990, c’est probablement parce que, l’école élémentaire est perçue par les élus locaux comme un service public essentiel à la vivacité de leur commune et que les jeunes parents périurbains se voient souvent obligés de scolariser leurs enfants sur le pôle urbain même lorsque leur commune de résidence dispose d’une école élémentaire mais qu’elle ne propose ni cantine ni garderie. Il reste que le développement de ces services publics représente souvent une lourde charge pour les budgets municipaux qui peut nécessiter une poursuite de la croissance démographique pour mieux l’amortir.

d La diffusion des POS et des PLU dans les aires urbaines

La délivrance de permis de construire pour de nouveaux logements implique à terme une extension des réseaux, du service de ramassage des déchets, du service de transport scolaire, dont la charge budgétaire est souvent très conséquente pour les petites communes. Les municipalités périurbaines sont incitées à de doter d’un POS pour pouvoir maîtriser leur développement urbain et éviter soit le mitage de leur commune par des constructions isolées soit un développement urbain en doigt de gants le long des axes routiers.

Les données du ministère de l’Equipement sur la planification urbaine apportent des éclairages nouveaux sur la périurbanisation, qui interrogent en retour les finalités et le fonctionnement de la planification urbaine.

Les deux cartes de France en annexe n°3 permettent d’apprécier l’évolution spatiale de l’adoption des POS entre 1988 et 2003. La comparaison des deux cartes révèle que ce sont les zones qui avaient déjà en 1988 le plus de POS où les POS se sont le plus développés. Ainsi la région lyonnaise, le Val de Loire ou la plaine d’Alsace, ont connu un très important développement de la planification urbaine entre 1988 et 2003. En outre, il ressort également que les 11 aires urbaines précédentes citées par (Julien, 2001) ayant concentré la moitié de l’accroissement démographique entre 1990 et 1991 sont aussi des aires urbaines qui ont connu une forte activité en matière de planification urbaine. Par ailleurs, la carte de 2003 montre bien que les zones littorales et les aires urbaines sont particulièrement couvertes par des POS ou des PLU.

Figure n°7 : Proportion des documents d’urbanisme en 2003 selon la distance au pôle urbain le plus proche 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 moins de 5 min 5 à 10 10 à 15 15 à 20 20 à 25 25 à 30 30 à 35 35 à 40 40 à 45 plus de 45

Classes de distance temps au pôle urbain le plus proche

P o u rc e n ta g e CC PLU RNU

Source : Données DGUHC, état d’avancement des documents d’urbanisme en 2003

Le graphique n°7 illustre qu’il existe une relation négative quasi linéaire entre la part des communes dotées d’un POS ou d’un PLU et la distance au pôle urbain le plus proche. Les cartes communales (CC) se rencontrent préférentiellement à des distances supérieures à environ 30 minutes des pôles urbains, ce qui correspond à des zones appartenant à l’espace à dominante rurale (EDR).

Figure n°8 : Evolution de la proportion de communes dotées d’un document d’urbanisme en 2003 en fonction de la taille de la population communale

0,00 20,00 40,00 60,00 80,00 100,00 120,00 moins 500 500 à 1000 1000 à 1500 1500 à 2500 2500 à 3500 3500 à 5000 5000 à 10000 10000 à 50000 50000 à 100000 plus de 100000

Classes de taille de population

P o u rc e n ta g e CC PLU RNU

Source : Données DGUHC, état d’avancement des documents d’urbanisme en 2003

Le graphique n°8 indique que l’existence d’un POS ou d’un PLU est très fortement corrélée à la taille de la population communale puisque 90% des communes de plus de 1000 habitants ont un POS ou un PLU. Les cartes communales se rencontrent presque exclusivement dans les communes de moins de 1000 habitants.

Figure n°9 : Etat d’avancement des documents d’urbanisme en 2003 selon le ZAUER 0 20 40 60 80 100 120

POURB PERIU MULTI RURAL POEMP COEMP

ZAUER Po u rc e n ta g e CC PLU RNU

Source : Données DGUHC, état d’avancement des documents d’urbanisme en 2003

Le graphique n°9 révèle qu’à peine 30 % des communes rurales de l’EDR possèdent un POS ou un PLU en 2003 alors que ce niveau monte à presque 50% des communes multipolarisées et atteint respectivement 60 et 98% pour les communes périurbaines et les pôles urbains.

Figure n°10 : Etat des POS et des PLU selon le ZAUER 0 10 20 30 40 50 60 70

POURB PERIU MULTI RURAL POEMP COEMP

Po u rc e n ta g e PLUap PLUelab PLUrev

Source : Données DGUHC, état d’avancement des documents d’urbanisme en 2003

Le graphique n°10 présente l’état des POS et des PLU selon trois catégories : (i) POS-PLU approuvés ; (ii) POS-PLU en élaboration ; (iii) POS-PLU en révision.

Ce graphique n°10 montre que c’est au sein des communes multipolarisées que la part de POS ou de PLU en élaboration était la plus importante en 2003. Ce constat peut être mis en parallèle avec l’intensité de leur croissance démographique que connaissent ces communes.

e Le débat sur l’étalement urbain

La périurbanisation est l’objet de débats passionnés parmi les économistes sur son caractère excessif. Bien que ces débats présentent un caractère très normatif, ils ignorent souvent la réalité de l’intervention publique déjà existante pour se concentrer sur ce qu’il faudrait faire ou ne pas faire. La périurbanisation est accusée d’étendre trop fortement les agglomérations (Camagni et al. 2002), de gaspiller de manière irréversible des terres arables, de menacer des équilibres naturels, d’engendrer la ségrégation sociale, de provoquer des embouteillages, de contribuer au réchauffement global… Les économistes urbains sont, en général, plus réservés sur les critiques et surtout sur les solutions que d’autres catégories d’intellectuels comme les urbanistes. Mills (1999) et Brueckner (1999) s’opposent aux critiques les plus fréquentes faites à l’étalement urbain en défendant l’idée que les solutions alternatives proposées par les

pouvoirs publics doivent être évaluées au regard de l’efficacité sociale du marché foncier concurrentiel.

Selon Mills (1999), la disparition des terres agricoles est un faux problème économique. Il estime que la production agricole est suffisante pour nourrir la planète et que les prévisions sur les tendances futures sont plutôt rassurantes (baisse de la natalité). Il ne doute pas que des mécanismes de marché puissent préserver efficacement les terres agricoles (Mills, 1999). Si les espaces ouverts participent au cadre de vie résidentiel, les autorités locales n’ont qu’à acheter des terrains non développés ou acheter des droits de développement pour préserver des terrains de l’urbanisation. Ces solutions sont préférables, selon lui, aux réglementations qui pousseront les autorités locales à préserver un montant excessif de terres non-urbanisées. Mills (1999) rappelle que la périurbanisation ne signifie pas intrinsèquement de plus longs trajets domicile-travail qu’une ville compacte. Un desserrement des emplois pourrait avoir lieu et réduire ces distances. Mills (1999) souligne qu’aucune étude sérieuse n’a pu montrer que les coûts d’une infrastructure routière périurbaine dépassaient ses avantages. Il avance qui plus est que le système de l’automobile individuelle est certainement individuellement et socialement optimal. Brueckner (1999) et Mills (1999) recommandent chacun d’instaurer des péages lorsque des coûts sociaux ne sont pas supportés par les automobilistes ou de taxer plus fortement les carburants. Mills (1999) rappelle, enfin, que les politiques de préservation des espaces ouverts ont un coût collectif élevé à travers sur la hausse des prix du logement. Cheshire et Sheppard (2002) abondent dans le même sens avec des éléments empiriques.

Conclusions

Cette première partie livre un portrait historique et actualisé de la périurbanisation en France et rappelle les enjeux des mobilités résidentielles. La structuration de l’urbanisation des espaces périurbains est le produit de la périurbanisation, des circonstances locales et de la planification urbaine. Il ressort en outre des évolutions récentes que la croissance démographique tend à se concentrer dans les communes rurales des franges périurbaines. Cette recomposition de la répartition de la population suppose une évolution de l’offre de services et des équipements publics aux populations. De plus, l’artificialisation des sols s’intensifie également au sein des communes rurales et accentue les préoccupations des pouvoirs publics sur les enjeux environnementaux de la diffusion de l’urbanisation. Enfin, le processus de périurbanisation entérine dans l’espace la ségrégation sociale. On observe enfin que la propagation de la planification urbaine communale est polarisée par les pôles urbains. L’expansion récente de la planification urbaine communale concomitante à une croissance urbaine plus diffuse nous interroge à la fois sur les fondements, sur les finalités et sur les capacités de cette dernière à répondre aux enjeux de la périurbanisation. La prochaine partie est consacrée à l’analyse de l’efficacité du dispositif de planification en France.

II Planification urbaine : entre réglementation et