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La durée du mandat d’audit externe, élément d’indépendance et d’objectivité de l’auditeur

Paragraphe I : La notion d’audit externe des organisations internationales

B. Les conditions d’exercice de l’audit externe dans les organisations internationales

3. La durée du mandat d’audit externe, élément d’indépendance et d’objectivité de l’auditeur

La durée du mandat477 et l’impossibilité de nommer l’auditeur à une fonction interne de l’OI contrôlée sont des garanties indispensables d’indépendance et d’objectivité. Celles-ci sont des obligations découlant des normes d’audit professionnelles consacrées par les instruments juridiques de la plupart des OI, notamment l’UE, l’UEMOA ou celles du système des NU. Certaines déterminent la durée du mandat478 de l’auditeur externe en tenant compte du principe de rotation. Ce principe permet en effet de changer l’institution nationale de contrôle chargée de vérifier et de certifier les états financiers de l’OI. Son principal avantage consiste à faire bénéficier l’organisation d’expériences multiples d’institutions nationales de contrôle des finances publiques. Cependant, la disponibilité des institutions nationales de contrôle et les considérations économiques liées aux coûts des auditeurs peuvent être un obstacle à la matérialisation du principe de rotation. Dans certaines OI comme l’ONU, ses fonds et programmes, l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et le Programme alimentaire mondiale (PAM), ce mandat est de six ans non renouvelables. Par le passé et jusqu’en 2002, il était de trois ans renouvelables pour le cas des NU. C’est par la résolution 55/248 du 12 avril 2001 que l’Assemblée générale des NU l’a modifié. Dans d’autres OI il est de deux ans. Cette modification de la durée du mandat permet aux auditeurs d’avoir suffisamment de temps pour approfondir leurs travaux et d’assurer la continuité de leur action. Ainsi, un mandat illimité est compromettant pour l’indépendance et l’objectivité des auditeurs externes.

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http://www.intosai.org/fr/sur-lintosai.html (consulté le 17 juin 2014).

477 Cour des comptes européenne, Politiques et normes d’audit de la Cour, op. cit., p. 5.

478 Il convient de se rapporter aux instruments juridiques des OI sur le mandat des auditeurs tant est que chaque

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La détermination d’une durée juste s’avère nécessaire pour l’exécution de leur mission. Car un mandat trop court ne permet pas de réaliser efficacement et avec sérénité l’audit externe. La pratique constante depuis la modification intervenue en 2002 au sein du système des NU varie de trois à six ans non renouvelables. Les membres du Comité des commissaires aux comptes de l’ONU perdent leurs qualités d’auditeurs externes dès lors qu’ils cessent d’exercer leurs fonctions au sein des institutions supérieures de contrôle nationales de leurs Etats membres. Ils sont alors immédiatement remplacés dans leurs fonctions479. La durée du mandat de l’auditeur externe de l’UEMOA est par comparaison relativement plus courte et semble concerner la durée nécessaire à l’exercice de sa mission qui peut s’étendre sur des mois ou une année dans la mesure où les autorités compétentes ne font recours à l’auditeur externe que si cela est nécessaire. Cela s’explique par l’existence de la Cour des comptes de l’UEMOA qui a pour fonction principale de vérifier et de certifier le bon emploi des ressources financières de l’UEMOA.

La charte de l’audit externe dans les OI doit également comporter la procédure de sélection480 et les critères de nomination des auditeurs externes. Il s’agit d’une obligation découlant des normes d’audit professionnelles, précisément celles édictées par l’INTOSAI, qui doivent être transposées dans les règles financières et les règlements financiers des OI. La sélection et la nomination constituent des éléments de leur indépendance. Cependant, l’examen des règlements financiers de plusieurs OI ne comportent pas de telles règles ou sont laconiques sur la question. Ces instruments juridiques ne mentionnent que les autorités ayant le pouvoir de nommer ou d’élire les auditeurs externes. Rares sont celles dont les règlements financiers les prévoient. On peut citer comme exemples celles de l’Organisation mondiale de la Santé et de l’UNESCO qui semblent être les plus complètes dans ce domaine.

La sélection et la nomination des auditeurs tiennent aussi compte du principe de transparence, de professionnalisme, de compétence. Elles doivent aussi faire appel à la concurrence et garantir l’égalité d’accès de tous aux fonctions d’auditeurs externes.

La transparence se traduit par la publication d’un appel d’offre sur les sites des OI et l’affichage de la liste des candidats. C’est en vertu de ces critères que sont publiés par les OI des documents sur les profils des postes. Il peut par exemple être demandé aux futurs

479 V. site du Comité des commissaires aux comptes des NU, http://www.un.org/fr/auditors/board/, (consulté le

17 juin 2014).

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candidats de produire des documents qui renseignent leur identité, leur biographie, leur expérience dans l’exercice de la profession d’auditeurs d’institutions supérieures de contrôle des comptes publics, des informations sur celles-ci, les missions d’audit réalisées par les candidats et une déclaration de confidentialité.

En outre, la sélection et la nomination des auditeurs des OI doivent tenir compte de l’ensemble des systèmes géographiques d’institutions de contrôle des Etats membres en vue de promouvoir la diversité de ses membres. Ce principe est assez important pour toutes les OI. Il est complété par celui de rotation précédemment évoqué pour la durée du mandat des membres du Commissariat aux comptes des NU. La représentation géographique est un principe essentiel au sein du Comité des commissaires aux comptes des NU et dans le système des NU. A titre d’exemple, la Cour des comptes française a assuré jusqu'au 30 juin 2010 le contrôle du commissariat aux comptes des NU. Il assure également la présidence d’une dizaine de structures d’audit externe des comptes des OI parmi lesquelles on peut citer l’OIF, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la Science et la Culture (UNESCO)481

. Elle n’exerçait cependant pas cette fonction d’audit au sein du Département des Opérations de Maintien de la Paix des NU (DOMP). L’audit externe de ce département est exercé, grâce aux accords conclus entre l’ONU et certaines institutions nationales de contrôle des finances publiques, par l’institution nationale de contrôle des finances publiques de la République populaire de Chine. Celle-ci a également effectué l’audit de l’UNICEF. L’institution supérieure de contrôle nationale du Canada482

assure la vérification externe des comptes de l’Organisation internationale du Travail. Celle de l’Inde a assuré jusqu’en 2011 le contrôle externe des comptes de l’Office des Migrations internationales (OMI), de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), de l’Organisation mondiale du Tourisme (OMT) et du Programme alimentaire mondiale (PAM) dont le mandat a pris fin en 2016483. L’institution supérieure de contrôle de l’Afrique du Sud dont le mandat s’est achevé en 2012, assurait la présidence de la vérification des comptes du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), du Bureau des Nations Unies pour les services d’appui aux projets (FNUOP) et de l’Office des

481 Pour l’UNESCO, son mandat a pris fin en 2011. 482 Fin de mandat en 2011.

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travaux et de secours des Nations Unies (UNRWA)484. L’institution nationale d’audit de la Grande-Bretagne a remplacé la Cour des comptes française depuis l’expiration du mandat de celle-ci aux NU. Elle est donc chargée d’auditer les services des NU, à l’exception du département des opérations de maintien de la Paix des Nations Unies (DOPM). On constate une très forte présence des institutions supérieures nationales de contrôle de la France, de la Grande-Bretagne, de l’Inde et de la République Sud Africaine au sein du système des NU avec une très faible représentation de celles du continent africain.

La présence de la Cour des comptes française au sein d’autres OI est encore plus marquée. En effet, en vertu des accords de coopération qu’elle a conclus avec les institutions supérieures de contrôle nationales des pays en développement, notamment africaines, qui bénéficient de son expérience bicentenaire acquise dans le contrôle des comptes publics, la Cour des comptes françaises sert d’appui à l’OIF dans le contrôle des finances des Etats francophones.

Les éléments culturels y compris l’usage d’une langue485 commune facilitent la création de regroupements régionaux d’institutions nationales de contrôle des finances publiques. Le rôle de ces regroupements d’États au sein d’organisations professionnelles d’audit est de définir et d’harmoniser des principes et règles d’audit applicables dans le secteur public et dans les OI. On peut à cet effet citer l’Organisation africaine des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (AFROSAI), de l’Organisation européenne des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (EUROSAI) et l’Organisation arabe des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (ARABOSAI), toutes créées sur recommandations de l’INTOSAI.

La Cour des comptes de l’UEMOA obéit à peu près aux mêmes principes. Ses membres, indépendants et au nombre de trois, sont nommés par la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement en vertu de l’article 24 du protocole additionnel n°

1 et l’article 1er de l’acte additionnel n°

09/96 du 10 mai 1996. Leur mandat est de six ans renouvelable aux deux tiers en tenant compte de l’ordre alphabétique des Etats membres qui sont au nombre de huit486. Ses membres n’ont pas de déclaration financière à faire ou de déclaration d’intérêts comme c’est le cas pour le vérificateur externe des comptes l’Organisation mondiale de la

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A. GILLETTE, « La Cour des comptes française », op. cit, pp. 319-332.

485 V. sur la question de la langue dans les OI en matière d’audit : A. GILLETTE, op. cit., pp. 319-332.

486 Les États membres de l’UEMOA sont le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, la Guinée Bissau,

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Santé (OMS) ou de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la Science et la Culture (UNESCO). Cependant, les conditions de nomination et les compétences qu’ils doivent satisfaire sont presque les mêmes.

La charte de l’audit externe dans les OI doit être rédigée de manière à établir clairement les pouvoirs, droits et responsabilités des auditeurs externes. On les retrouve dans la plupart des chartes des OI.

Le mandat de l’auditeur externe est déterminé par la charte de l’audit externe qui est annexé au règlement financier de cette organisation. L’auditeur doit rendre compte au chef de l’OI dont les comptes sont vérifiés et contrôlés. D’où l’obligation d’établir un rapport d’audit à la fin de ses activités. Il doit avoir un accès libre à tous les dossiers nécessaires à la conduite de l’audit et pouvoir accéder aux fonctionnaires, agents et locaux de l’organisation. La charte de l’audit doit également décrire la manière dont il reçoit les plaintes relatives aux allégations de fraudes, de corruption ou de gaspillage des ressources financières de l’OI.

En tout état de cause, il doit recevoir directement celles-ci. En outre, les membres de l’OI doivent avoir le droit de communiquer avec lui en vue de lui fournir des renseignements utiles. Ils ne doivent pas faire l’objet de représailles à la suite des informations qu’ils seraient amenés à lui communiquer. Les chefs (secrétaires généraux, directeurs ou présidents de commissions) doivent prendre des dispositions à cet effet. Cependant, les membres de l’OI pourraient être sanctionnés si les informations fournies par eux avaient pour objet d’induire en erreur les auditeurs externes. Les informations obtenues par les auditeurs externes sont frappées du sceau de la confidentialité qui doit permettre de protéger ceux qui les fournissent.

Sur le principe d’accès aux documents des OI, le point 3 de l’annexe II du mandat pour la vérification des comptes de l’OMPI prévoit que « le vérificateur externe des comptes et ses collaborateurs ont librement accès à tout moment approprié, à tous les livres, écritures et documents comptables dont le vérificateur externe estime avoir besoin pour effectuer la vérification. Les renseignements considérés comme privilégiés et dont le directeur général (ou le haut fonctionnaire désigné par lui) convient qu’ils sont nécessaires pour la vérification et les renseignements considérés comme confidentiels sont mis à la disposition du vérificateur externe des comptes s’il en fait la demande. Le vérificateur externe des comptes et ses collaborateurs respectent le caractère privilégié ou confidentiel de tout renseignement ainsi désigné qui a été mis à leur disposition et ils n’en font usage que pour ce qui touche directement l’exécution des opérations de vérification. Le vérificateur externe des comptes

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peut appeler l’attention des organes directeurs concernés de l’OMPI et de toutes les unions intéressées sur tout refus de communiquer des renseignements considérés comme privilégiés dont il estime avoir besoin pour effectuer la vérification »487.

Les tâches et les modalités de travail de l’auditeur externe sont également inscrites dans la charte. C’est ainsi qu’il doit procéder à des audits de gestion, des audits financiers ou des audits de conformité ou d’optimisation des ressources et à des investigations ou inspections. La charte de l’audit externe l’oblige à fournir un plan d’audit488, un manuel d’audit mis à jour et peut aussi définir les modalités de sa liaison avec les services d’audit interne en vue d’exploiter les résultats de ceux-ci qui pourraient l’aider dans l’accomplissement de sa mission et dans le bon fonctionnement de l’ensemble des activités d’audit au sein de l’OI dont les ressources financières sont soumises à son contrôle.

Les travaux des auditeurs externes prennent fin par la remise à l’organe délibérant ou à l’autorité de laquelle il a reçu mandat du rapport d’audit qui constitue l’une des obligations importantes devant être remplies par lui.

Paragraphe II : Les institutions et organisations professionnelles d’audit externe et leurs relations avec les organisations professionnelles d’audit internes

Les structures et le fonctionnement des institutions d’audit sont à la fois révélatrices de leur complexité et de la différence de conception de l’audit externe des OI. Au sein de l’ONU par exemple, en plus de l’existence du Comité des commissaires aux comptes qui a pour principale fonction d’effectuer l’audit externe de ses comptes, il existe une autre structure, le Groupe d’auditeurs externes, dont la mission est essentiellement de coordonner les activités des organes d’audit externe de l’ONU et de l’ensemble des travaux des vérificateurs externes des fonds, agences et programmes des NU. Cette double structure semble unique au sein des NU et renforce la place et l’importance accordée en leur sein aux activités d’audit. L’existence d’une structure de coordination des audits externes a pour effet notamment d’harmoniser les sources de normes d’audit auxquelles ont recours les services d’audit externe

487

V. Proposition de l’Assemblée générale de l’OMPI sur la révision de la charte de la supervision d’audit interne de l’OMPI, du mandat pour la vérification externe des comptes et du mandat de l’organe consultatif indépendant de surveillance de l’OMPI, 12 septembre 2012, (WO/GA/41/10/ Rev, p. 18), disponible sur http://www.wipo.int/edocs/mdocs/govbody/fr/wo_ga_41/wo_ga_41_10_rev.pdf (consulté le 17 juin 2014).

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des NU. Pour ce qui est, par exemple, du Groupe des auditeurs externes de l’ONU, son statut indique expressément qu’il applique les normes édictées par l’INTOSAI. La source de normes applicables permet d’établir des liens, des relations entre les institutions d’audit externe des OI et les organisations professionnelles d’audit externe dont les plus connues ou qui, en tout cas, servent de référence à l’ensemble des OI du système des NU et d’autres OI comme l’UE et l’UEMOA.

Sont successivement abordées les principales institutions d’audit externe d’OI (A) et la coopération entre les institutions d’audit externe et les OI contrôlées (B).

A. Les institutions d’audit externe des organisations internationales

Pour effectuer leur audit externe, certaines OI peuvent mettre en place des comités de commissaires aux comptes et des groupes d’auditeurs externes. C’est le cas notamment de l’ONU et de l’OIF (1). D’autres OI font le choix d’instituer des cours des comptes (2).

1. Le Comité des commissaires aux comptes et le Groupe d’auditeurs externe de l’ONU

La fonction d’audit externe au sein de l’ONU est assurée par le Comité des commissaires aux comptes composé de trois personnes qui sont toutes désignées en fonction de leurs qualités de chef d’institutions supérieures de contrôle nationales de leurs Etats. Cette condition est prévue par la résolution de l’Assemblée générale des NU qui l’a créé489

. Pour être membre du Comité des commissaires aux comptes490, le candidat doit obtenir le soutien de son pays d’origine qui présente sa candidature à la Cinquième Commission de l’Assemblée générale. Celle-ci la soumet par la suite à l’Assemblée générale de l’ONU, qui l’élit.

Le Comité des commissaires aux comptes est responsable de la vérification des comptes des organes principaux de l’ONU (siège, secrétariat, l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité, les opérations de maintien de la paix), des fonds et programmes de l’ONU ainsi que de ses institutions spécialisées comme le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, le Programme des Nations Unies pour le Développement. Il est aussi compétent à l’égard

489 Résolution 74 (1) de l’Assemblée générale des NU du 7 décembre 1946.

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