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Distance entre solutions de non coopération et optimum global en fonction du nombre de pays en interaction

4. Coopération versus non coopération : position relative des solutions d’équilibre

4.2 Distance entre solutions de non coopération et optimum global en fonction du nombre de pays en interaction

Les résultats précédents montrent l’existence d’une solution globalement optimale qui n’évolue pas nécessairement dans le même sens que les niveaux d’émissions d’équilibre de la situation de non coopération. Dans ce paragraphe, on établit dans quelle mesure les solutions globalement optimales diffèrent des niveaux d’émissions qui résultent naturellement des interactions entre les pays. Dans un premier temps, on compare les émissions individuelles et

paiements qui résultent de chacune des situations. On s’intéresse ensuite à la façon dont évolue cette différence en fonction du nombre de pays concernés par le problème. Cette analyse permet de définir les circonstances dans lesquelles une action coordonnée de la part des pays est d’autant plus requise.

Proposition 1.14 :

Dans la situation de coopération totale, si la solution globalement optimale est unique, elle est telle que zC ≤ z* et fCf *.

La Proposition 1.14 se vérifie à la fois sous les conditions de la Proposition 1.2 et respectivement sous les conditions a) et b) de la Proposition 1.4 (section 2). On a vu en effet que chaque fois que l’équilibre de la situation de non coopération était unique, la solution optimale du point de vue de l’ensemble des pays l’était aussi. Autrement dit, les conditions qui garantissent l’existence d’un unique équilibre de Nash en stratégies pures sont aussi celles qui sous-tendent l’existence d’une unique solution globalement optimale. De plus, quelle que soit la configuration considérée, la prise en compte par chaque pays de l’impact de leurs émissions sur les autres les conduit à réduire leur stratégie d’équilibre. On vérifie alors que ce comportement, quand il est adopté par tous, engendre le paiement agrégé le plus élevé. Si tous les pays ont des émissions positives à l’équilibre de Nash, l’hypothèse de symétrie des pays génère également un paiement individuel qui est plus élevé que celui dans la situation de non coopération. En d’autres termes, fC f * pour tous les pays.

Dans la configuration où seul un sous-ensemble de pays a des émissions positives, les autres choisissant un niveau d’émissions nul, la situation de coopération totale s’interprète quel que peu différemment. Les pays qui ont des émissions nulles à l’équilibre de non coopération ne génèrent pas d’externalité sur les autres. Par conséquent, on considère qu’ils adoptent toujours le même comportement dans la situation globalement optimale. La réduction des émissions globales est donc le fait des pays qui ont des émissions strictement positives. Dans la mesure où ces derniers ont un paiement strictement croissant avec le niveau de leur stratégie, leur paiement individuel à l’optimum social diminue par rapport à la situation de non coopération. Autrement dit, on vérifie la relation suivante : C m*

m f

f ≤ , même si globalement la relation

∑fC f* est toujours vraie. De plus on montre que, sous les hypothèses de la Proposition

1.4 b), cette configuration asymétrique engendre un paiement agrégé plus élevé que si le même niveau global d’émissions était réparti sur les n pays. Cette assertion est liée au fait que

les pays présentent des rendements fortement croissants dans leurs activités de consommation et de production.

Enfin, dans le cadre des jeux supermodulaires où la fonction-objectif est différentiable, si l’équilibre Pareto supérieur, Z*, se distingue de la limite inférieure de l’ensemble des stratégies accessibles, alors celui-ci n’est pas Pareto-optimal du point de vue de l’ensemble des pays (Milgrom, Roberts, 1990b). Dans le cadre d’un jeu à externalité négative, il existe un profil de stratégies qui est Pareto-préféré (sans être un équilibre) dans lequel tous les pays adoptent un niveau d’émissions plus faible.

Proposition 1.15 :

Sous les hypothèses de la Proposition 1.3, les niveaux d’émissions de la situation de coopération totale sont tels que ZC ≤Z*et fC ≥ f *.

A l’image des résultats établis sous les hypothèses de la Proposition 1.3 concernant l’existence des équilibres de Nash, il peut exister, sous les mêmes conditions, plusieurs solutions globalement optimales. On montre que le plus petit niveau global d’émissions qui peut être atteint dans la situation de non coopération est toujours supérieur au niveau global des émissions le plus élevé de la situation de coopération totale. Etant donné que dans cette configuration toutes les solutions sont nécessairement symétriques, la proposition sur les paiements en découle. A partir de ces résultats sur la position relative des niveaux d’émissions dans la situation de statu quo et dans la situation de coopération totale, on montre, en plus, que la distance entre les deux est d’autant plus importante que le nombre de pays concernés par le problème environnemental est grand.

Proposition 1.16 :

Quelle que soit la nature des interactions entre les pays, la réactivité des solutions optimales ZC par rapport à n est toujours plus forte à la baisse et plus faible à la hausse que celle des solutions d’équilibre Z* de la situation de non coopération.

En d’autres termes, on montre que si le niveau global des émissions z* est décroissant en n, comme sous les hypothèses de la Proposition 1.4, celui à l’optimum global zC l’est encore plus. De la même façon, si l’ensemble des niveaux globaux Z* est croissant en n, comme sous les hypothèses des Propositions 1.2 et 1.3, les solutions globalement optimales ZC peuvent,

circonstances dans lesquelles le niveau des émissions globales Z* croît en n à l’équilibre de Nash, tandis que ZC décroît en n à l’optimum social. Dans ce cas, l’écart entre les deux situations est d’autant plus grand que le nombre de pays en interaction est important. Il convient de souligner cependant que si les émissions globales sont décroissantes en n à l’optimum social, alors les niveaux d’émissions individuels le sont nécessairement aussi. Cette assertion n’est pas forcément vérifiée dans l’autre sens.

Pour conclure, cette dernière proposition permet de généraliser un résultat de Finus, Rundshagen (1998) qui repose sur une fonction de paiement spécifique et selon lequel plus le nombre de pays qui souffrent de l’externalité globale est élevé, plus la nécessité d’une coordination des politiques environnementales nationales se fera ressentir. Cette assertion est donc vérifiée quel que soit le type de comportement postulé pour les pays.

*

* *

L’analyse menée dans ce chapitre est essentiellement fondée sur le signe de la dérivée seconde croisée des fonctions de paiement. Elle nous a permis de faire le tour des relations envisageables entre les pays et de leurs conséquences sur le problème de l’accumulation des GES dans l’atmosphère. Les résultats obtenus constituent une typologie des comportements stratégiques des Etats dans le cadre d’un problème environnemental global tel que le changement climatique.

La mise en œuvre de politiques environnementales génère des comportements stratégiques de la part des pays, dans le sens où ces dernières reviennent en fait à fixer les niveaux d’activités économiques des pays ou encore, leur stratégie de développement. Dès lors que les activités de production présentent des rendements décroissants (B′′ < 0), le niveau des émissions globales peut se fixer à un niveau d’autant plus élevé qu’il existe des effets de renforcement entre les stratégies des pays. En présence de fortes complémentarités, par conséquent, chaque pays fixe son niveau d’activités d’autant plus haut que celui des autres l’est aussi. Il peut émerger, dans ces circonstances, une multiplicité de situations économiquement stables pour les pays. Avec la prise en compte de l’impact des activités humaines sur l’environnement, les

pays devraient faire en sorte de se coordonner sur les niveaux d’émissions les plus faibles, dans la mesure où ils génèrent les paiements les plus élevés.

En outre, vu les résultats établis, il est clair que le bien public « qualité de l’environnement » est fourni de manière insuffisante. Quelle que soit la situation de non coopération considérée, celle-ci est sous-optimale du point de vue de l’ensemble des pays. On remontre ainsi que les pays, quand ils n’intègrent pas l’impact de leurs émissions sur les autres, fixent des niveaux d’activités trop élevés. Quelles que soient les circonstances, ce phénomène est toujours renforcé par le nombre de pays en interaction. L’écart entre la solution globalement optimale et l’équilibre de non coopération est ainsi d’autant plus grand que le nombre de pays concernés par le problème environnemental est élevé. Malheureusement, même si cette solution est celle qui procure l’utilité agrégée la plus élevée, elle n’est pas stable. Chaque pays, pris indépendamment, est incité à revenir sur l’accord de coopération et à dévier de manière unilatérale. La question sur l’éventualité de voir émerger un accord stable mais plus petit fait l’objet de la seconde partie de la thèse, qui a trait aux accords internationaux environnementaux.

L’analyse qui vient d’être menée repose sur l’idée que tous les pays tentent de maximiser leur paiement en choisissant un niveau d’émissions approprié, compte tenu de leurs conjectures sur les stratégies adoptées par les autres pays. L’équilibre de Nash du jeu est alors tel que ces conjectures sont correctes et qu’aucun pays n’est incité à modifier de manière unilatérale sa stratégie. L’hypothèse sous-jacente à ce raisonnement est que tous les pays décident de leur niveau d’émissions en même temps. Cette approche reste justifiée dans le cadre du jeu des émissions globales à N pays, dans la mesure où le problème considéré ne suggère pas, en lui même, une séquence de décisions particulière entre les pays. Il existe pourtant une autre alternative dans le cadre du jeu à deux pays. Elle consiste pour les pays à prendre leur décision l’un après l’autre, le second observant la décision du premier. Dans cette perspective, le jeu des émissions globales devient un jeu en deux étapes et à information parfaite. Une telle modification du jeu n’est pas sans effet sur les stratégies adoptées par les pays, ni sur les équilibres. L’objet du chapitre 2 est double. On étudie d’abord les équilibres du jeu des émissions globales dans le cadre de deux pays et dans ses deux versions (simultanée et séquentielle). On établit ensuite les conditions sous lesquelles l’une et l’autre de ces situations résultent du choix stratégique des pays. Cette approche nous permet de passer outre les critiques usuelles relatives au concept d’équilibre de Stackelberg dans la mesure où, s’il existe

émissions globales étendu. On verra que la nature des interdépendances entre les pays importe de manière significative sur la séquence des décisions des pays et sur l’issue finale de ce jeu étendu.

ANNEXE A :

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