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les dispositions du droit français et du droit anglais se distinguent non seulement dans leur détail, mais encore dans leurs principes fondamentaux Le droit anglais

exige que tous les documents relatifs aux faits litigieux soient révélés. En revanche,

le droit français part du postulat que la production forcée ne doit pas devenir une

procédure qui ouvrirait les archives de son adversaire »

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.

L'opposition est en réalité superficielle. Elle masque une réelle convergence du point de vue de la sanction. Le discovery de Common Law n'est pas une mesure de perquisition à même de permettre la révélation de documents que l'auteur d'une infraction entendrait dissimuler (I). La combinaison du régime de production forcée, du régime de l'expertise et des mesures d'instruction in futurum de l'article 145 CPC fournit un accès aux preuves détenues par l'adversaire au moins équivalent au discovery de Common Law (II).

I- DISCOVERY DE COMMON LAW

205. Il convient de distinguer l'objet de l'obligation de discovery (A) de sa sanction (B).

489 J. A. JOLOWICZ, «La production forcée des pièces en droit français et anglais», in Nouveaux juges,

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A- L'objet de l'obligation

206. Royaume-Uni. Le discovery trouve une source jurisprudentielle en Common Law, avant

d'être fixée législativement au milieu du XIXème siècle490. L'étendue de l'obligation de

divulgation a été fixée par le test PERUVIAN GUANO491 à « tous les documents susceptibles de faire avancer son propre cas, ou nuire aux prétentions de son adversaire » ainsi qu'à tous les documents susceptibles de fournir une piste d'enquête vers d'autres documents (train of inquiry) avec le même effet492. Ce test particulièrement compréhensif a eu pour effet - en pratique - dans les

affaires les plus complexes, de rendre l'obligation de divulgation « virtuellement illimitée » et le processus de discovery aussi « monumentalement inefficace »493, qu'extrêmement coûteux494.

490 Consécration de la discovery of evidence par le Common Law Procedure Act de 1854 (§50) puis par le Supreme Court of Judicature Act de 1873 (art. 26 et 27 annexe) et enfin dans les Rules of the Supreme Court Order 24 RSC qui régissaient la procédure civile devant la juridiction suprême à partir de la fusion des cours de Common Law et d'Equity en 1883, jusqu'en 1999, avec l'adoption des nouvelles Règles de Procédures Civiles (Rules on Civil Proceedings – RCP).

491 United-Kingdom. Court of Appeal (Queen's Bench Division). 20 décembre 1882. Compagnie Financiere du Pacifique v. Peruvian Guano Company. (1882) 11 QBD 55. "It seems to me that every document relates to the matters in question in the action, which not only would be evidence upon any issue, but also which, it is reasonable to suppose, contains information which may - not whichmust - either directly or indirectly enable the party requiring the affidavit either to advance his own case or to damage the case of his adversary. I have put in the words "either directly or indirectly", because, as it seems to me, a document can properly be said to contain information which may enable the party requiring the affidavit either to advance his own case or to damage the case of his adversary, if it is a document which may fairly lead him to a train of inquiry which may have either of these two consequences […] In order to determine whether certain documents are within that description, it is necessary to consider what are the questions in the action: the Court must look, not only at the statement of claim and the plaintiff's case, but also at the statement of defence and the defendant's case."

492 La notion de "train of inquiry" pose une difficulté de traduction. En anglais, le terme "train" fait référence à à une série de pensées ou d'événements logiquement reliés. La notion se rapproche ainsi d'une piste d'enquête. La notion se comprend mieux dans le contexte de l'affaire bien-nommée qui lui donne son nom. Une compagnie de transport maritime formait une demande en inexécution contractuelle. La défenderesse contestait la formation du contrat, en alléguant de simples pourparlers. La défenderesse avait obtenu une première mesure de discovery contre le demandeur afin de voir produire son journal de bord. Le journal de bord faisait référence à des courriers échangés postérieurement à la date de la rupture alléguée du contrat. La défenderesse a pu obtenir - sur la base du test du "train of inquiry" - une seconde mesure de discovery afin de voir produire lesdits courriers, au motif qu'ils pourraient montrer que les négociations se poursuivaient postérieurement à la rupture, ce qui démontrerait – a contrario – que le contrat n'avait pas été conclu.

493 H. WOOLF, Access to Justice, Interim Report to the Lord Chancellor on the civil justice system in England and Wales, Ministry of Justice, United-Kingdom Government, June 1995. Chapter 21: Discovery. § 17. "The result of the Peruvian Guano decision was to make virtually unlimited the range of potentially relevant (and therefore discoverable) documents, which parties and their lawyers are obliged to review and list, and which the other side is obliged to read, against the knowledge that only a handful of such documents will affect the outcome of the case. In that sense, it is a monumentally inefficient process, especially in the larger cases. The more conscientiously it is carried out, the more inefficient it is".

494 R. HEILBRON, Civil justice on trial: The case for change, Joint Committee Bar Council/Law Society, June 1993. "Much of the expense is caused by discovery"

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207. Réforme WOOLF. Suite au rapport de Lord WOOLF495 en 1996, l'ancien régime de discovery Order 24 RSC a été recodifié en 1998 au sein des Civil Proceedings Rules (CPR) Part 31 sous le nom nouveau de disclosure496. Selon la définition de l'article 31.2, « une partie divulgue un

document en déclarant qu'un document existe ou a existé »497. La divulgation de l'existence du document

s'accompagne d'un droit d'inspection des documents divulgués, sauf exceptions tenant notamment au secret498. L'obligation de disclosure est imposée par ordonnance du juge499. La

demande de divulgation peut être effectuée préalablement à l'introduction de l'instance au fond500.

L'obligation de disclosure emporte obligation pour la partie de procéder à une « recherche raisonnable » en vue de la divulgation de tous les documents qui appuient ses propres prétentions ou les prétentions de son adversaire501. L'obligation de disclosure contraint les

parties à révéler l'existence de pièces qui leurs sont défavorables. Comme le résume Lord WOOLF :

« le trait caractéristique [du discovery] est d'imposer aux parties de révéler des

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