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2 Constitution du corpus

2.1 Les catégories de sources consultées

2.1.1 Les discours d’acteurs du journalisme

Afin de saisir les discours circulant au sein du groupe professionnel des journalistes belges, nous avons inclus des textes écrits par des acteurs du milieu journalistique et médiatique : journalistes, directeurs de médias, professeurs de journalisme, etc. Nous nous sommes focalisé sur plusieurs types de publications : la revue professionnelle de l’Association générale des journalistes professionnels de Belgique (AGJPB), l’Annuaire de la presse belge édité par l’AGJPB, des manuels de journalisme, mais également des ouvrages et articles relatifs au journalisme en Belgique écrits par des acteurs du journalisme ou consignant des discours de ces acteurs.

Une part importante des discours d’acteurs du journalisme que nous étudions dans ce chapitre est issue des publications de l’AGJPB. Dès lors, il apparait essentiel de présenter cette association afin de pouvoir situer les textes analysés. Créée en 1886, l’Association de la presse belge (APB) symbolise la professionnalisation du métier de journaliste en Belgique et la volonté, de la part du groupe professionnel, de définir ses frontières (Van den Dungen, 2001, 2005). Cette association a changé de nom à deux reprises46. À l’occasion de la refonte de ses statuts au tournant des années 1930, elle devient l’Association générale de la presse belge (AGPB). En 1978, sa fusion opérée avec l’Union de la presse périodique belge (UPPB) donne lieu à l’AGJPB47. L’association est fédéralisée en 1998 et donne naissance à deux entités qui la constituent à partir de cette date : l’Association des journalistes professionnels (AJP) et la Vlaamse Vereniging van Journalisten (VVJ)48. Notons que si, selon l’AJP, la majorité des journalistes belges francophones en activité font partie de ses membres (voir Libert, 2017 : 26-27), il est difficile d’évaluer précisément cette proportion49. Toutefois, l’intérêt que revêt le nombre de membres de l’association est relativement secondaire dans le cadre de cette étude : nous nous intéressons à cette association en tant qu’actrice importante au sein du groupe professionnel et, de ce fait, productrice de discours sur l’activité journalistique.

46 Dans ce travail, nous utilisons systématiquement l’appellation correspondant à la période concernée.

47 À partir de cette date, les employeurs ne peuvent plus faire partie de l’Association (Association générale des journalistes professionnels de Belgique [2011], « 125 ans d’histoire de l’AGJPB », AGJPB 1886 – 2011 : L’Association des journalistes professionnels de Belgique fête ses 125 ans, numéro spécial, septembre, p. 6).

48 Il faut noter que ces associations ne représentent les journalistes de la presse spécialisée que depuis février 2016, lorsque l’AJP fusionne avec l’Association des journalistes de la presse périodique (AJPP) et que son équivalent néerlandophone, la Vereniging van Journalisten van de Periodieke Pers (VJPP) rejoint la VVJ (Libert, 2017 : 17).

49 L’AJP nous a communiqué qu’en 2017, 77,6 % des journalistes qui ont le statut de journaliste professionnel et qui disposent donc d’une carte de presse étaient affiliés à l’association. En revanche, tous les journalistes qui ont une carte de stagiaire, dont les conditions d’obtention sont moins exigeantes, sont nécessairement membres de l’AJP. Par ailleurs, Standaert et Grevisse (2012) ont noté que de nombreux jeunes journalistes n’entraient pas dans les conditions pour prétendre à l’obtention d’une carte de presse.

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2.1.1.1 La revue professionnelle de l’AGJPB

La revue professionnelle publiée par l’AGJPB apparait en 192050 sous le titre Le Journaliste. Celle-ci nous a paru constituer une source de première importance afin d’étudier les discours des acteurs du groupe professionnel des journalistes en Belgique. La recherche des archives de cette publication s’est révélée particulièrement ardue. Nous avons consulté l’ensemble des collections incomplètes disponibles à la Bibliothèque royale de Belgique, à la Réserve précieuse de la Bibliothèque des sciences humaines de l’Université libre de Bruxelles et dans les locaux de l’AJP.

Au moment de son lancement, Le Journaliste est rédigé uniquement en français. La revue devient bilingue en 1939 et prend le nom Le Journaliste/De Journalist51. Elle disparait, durant la Seconde Guerre mondiale, entre mai 1940 et décembre 194452. Si nous n’avons trouvé aucune archive relative à la période s’étalant de 1920 à 1940 dans les trois bibliothèques dans lesquelles nous nous sommes rendu53, nous avons consulté la table des matières analytique contenue dans l’Annuaire de la presse belge de 1966-1968. Cette table nous a permis d’éliminer l’éventualité que les numéros introuvables contiennent des articles dont les titres se situaient au centre de notre sujet de recherche. Il reste toutefois hautement probable que des propos relatifs à l’usage de la langue y soient disséminés.

Nous avons pu reconstituer la collection complète, à quelques numéros près, entre décembre 1944 et octobre 1964. Au cours de cette période, la revue est mensuelle mais il arrive que certains numéros couvrent plusieurs mois. La publication cesse de paraitre dans les années 1960 pour des raisons économiques54. Elle revient en 1976 « sous la forme d’un “quatre pages” dactylographié et polycopié »55. En 1979, la revue donne lieu à une version francophone, Journalistes, et une version néerlandophone, De Journalist. Les mêmes textes sont alors traduits dans les deux langues pour chacune des éditions56. L’AJP a conservé la collection complète de cette publication depuis 1981. À cette date, la revue est bimestrielle. Elle voit doubler sa fréquence de publication en janvier 2000 et son volume se réduire à peu près de moitié au même moment. Nous avons dépouillé l’ensemble des numéros jusqu’en avril 2015, date de notre dernière consultation des archives dans les locaux de l’AJP.

50 L’Annuaire 1966-1968 (p. 900) présente la publication de la façon suivante : « Bulletin de l’AGPB. Institué par décision le 7 décembre 1919. Les numéros 1 et 2 sont datés janvier et février 1920. »

51 Association générale des journalistes professionnels de Belgique (2011), op. cit., p. 5.

52 La table thématique contenue dans l’Annuaire 1966-1968 ne référence aucun numéro entre ces deux dates.

53 Il n’est pas exclu que des portions de collection soient disponibles dans d’autres bibliothèques du pays. De futures recherches seront nécessaires pour tenter de trouver les numéros manquant à notre dépouillement.

54 S.n. (1979), « Le Journaliste - De Journalist », Annuaire de la presse belge, 1978-1979, p. 85.

55 Ibid.

56 Voir Borloo, Jean-Pierre (2018), « Journalistes n° 200. Pourquoi 200 ? », Journalistes, février, n° 200, p. 7. Les rédactions deviennent indépendantes à partir de la création de l’AJP et de la VVJ en 1998, même si certains textes sont communs aux deux publications.

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Pour l’ensemble des périodes explorées, chaque numéro a été feuilleté dans son intégralité. Toutefois, la totalité des contenus n’a pas été lue systématiquement : les articles portant sur des sujets en apparence trop éloignés de nos préoccupations ont été ignorés. Ce jugement de pertinence a été porté principalement à partir des titres et des intertitres, y compris des encadrés, mais également d’un survol des pages.

2.1.1.2 L’Annuaire de la presse belge

Nous nous sommes penché sur la plus ancienne publication régulière de l’AGJPB : l’Annuaire de la presse belge. Ces annuaires consignent les coordonnées mises à jour des membres de la presse belge, certains textes législatifs liés à la presse, mais aussi la présentation de la plupart des associations ou corporations du secteur journalistique belge. Ils contiennent également, de manière moins importante et moins régulière, des contributions textuelles plus longues, et comportent systématiquement une introduction. Ce sont principalement ces textes qui ont retenu notre attention.

Toutes les archives de ces Annuaires disponibles à la Bibliothèque royale de Belgique et à la Bibliothèque des sciences humaines de l’ULB ont été consultées. Selon différents documents, le premier Annuaire officiel date de 189957 ou de 190158. Nous n’avons pu trouver d’édition avant celle de 1908, qui constitue la première édition illustrée59. Au total, nous avons pu accéder à 30 éditions de cet Annuaire, éditées entre 1908 et 200360. Il s’agit de la quasi-totalité des éditions qui ont paru au cours de cette période61. Six textes provenant de ces éditions ont été inclus à notre corpus.

57 D’après l’édition de l’Annuaire de 1966-1968, p. 899. La table des matières analytique fait référence à des articles publiés dans des éditions avant 1901. Elle précise que « deux publications analogues » antérieures ont été éditées pour 1885-1892 et 1896 (p. 899).

58 Selon un document édité par l’AGJPB (Association générale des journalistes professionnels de Belgique [2011], op. cit., p. 4).

59 Notons que l’on peut lire, dans l’Avant-propos de cette édition : « La Presse belge était, jusqu’à présent, le seul organisme important de notre activité sociale qui n’eût pas son annuaire, bien qu’étant peut-être le mieux qualifié pour en posséder un. […] Notre Annuaire illustré de la presse belge vient donc combler une lacune. ». La table des matières thématique contenue dans l’Annuaire de 1966-1968 atteste pourtant l’existence de numéros antérieurs à 1908.

60 Les éditions consultées sont les suivantes : 1908, 1909, 1910-1911, 1920-1921, 1922-1923, 1929, 1927-1928, 1929-1930, 1933, 1937-1938, 1949-1950, 1955, 1957-1958, 1960, 1963, 1966-1968, 1974-1975, 1978-1979, 1981, 1986, 1988, 1989, 1991, 1993-1994, 1995, 1996, 1997-1998, 1998-1999, 2000, 2003. L’Annuaire n’existe plus aujourd’hui sous sa forme papier : seule une base de données en ligne est mise à disposition des membres de l’AJP.

61 Comme on le voit dans la note précédente, près de la moitié des volumes consultés portent la mention de deux ou trois années consécutives. Par ailleurs, l’Annuaire n’est pas paru certaines années. L’Annuaire 1966-1968 (p. 899) mentionne l’ensemble des éditions entre 1899 et 1966 et nous a donc permis de vérifier la complétude des collections consultées. Ce recensement comporte toutefois au moins deux erreurs : 1) il indique que l’Annuaire est paru chaque année entre 1899 et 1914, alors que nous avons consulté une édition bisannuelle 1911-1912 ; 2) il ne mentionne pas l’édition de 1955 que nous avons consultée. Nous n’avons pas retrouvé les éditions antérieures à 1908. Sur la période 1908-1966, nous n’avons pas trouvé d’archives pour 1913 et 1914, et il nous manque l’édition qui serait parue en 1965. Après 1966, nous sommes au moins certain, grâce à des notes manuscrites, qu’il n’y a pas eu d’annuaire entre 1981 et 1986.

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Certains discours contenus tant dans la revue professionnelle que dans les Annuaires sont le fruit d’auteurs qui, par leur implication dans l’AGJPB ou ses publications, s’inscrivent éventuellement dans une démarche militante de la pratique de leur métier. Il convient d’en avoir conscience et, dès lors, ne pas considérer ces discours comme forcément représentatifs des discours partagés par le groupe professionnel dans son ensemble. Afin de récolter des discours d’auteurs qui ne s’investissent pas obligatoirement dans les différentes associations professionnelles, nous avons recherché d’autres types de sources.

2.1.1.3 Des manuels de journalisme, des ouvrages et des articles

Nous avons inclus, de manière moins exhaustive et systématique, plusieurs publications consacrées au journalisme belge, dont des livres et des articles de revue. Plusieurs manuels issus de différentes écoles de journalisme belges ont également été consultés. Nous avons considéré le discours pédagogique comme révélant des représentations sur ce que doit être le métier de journaliste et sur la manière dont le groupe professionnel doit le pratiquer (voir Ruellan, 2006 : 377 ; Montañola et Souanef, 2012 : 160). Deux manuels inclus à notre corpus proviennent de l’Institut pour journalistes de Belgique. Inauguré en 1921 et émanant directement de l’AGJPB, cet institut constitue la première école belge de journalisme. Après avoir pris le nom d’Institut de journalisme (IDJ) au tournant des années 2000, il a fermé ses portes en 2013.

Nous avons également été aidé, dans cette recherche de documents, par la bibliographie d’un mémoire réalisé en 1994 à l’Université libre de Bruxelles intitulé Publicité et médias : facteurs de dégradation de la langue française ? (Thomas, 1994). Plusieurs sources utilisées par l’auteure ont ainsi été incluses à notre corpus. De plus, c’est cette bibliographie qui nous a mené, en premier lieu, à nous diriger vers les archives de La revue générale (voir section 2.1.3).