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entrepreneuriat social, aujourd’hui

0.2. Éléments de cadrage de la thèse

0.2.3. Délimitation et justification de la recherche

Au cours des lignes suivantes, nous allons démontrer la pertinence9 des représentations qui étayent nos actions et nos choix au niveau épistémologique et méthodologique10 (Fourez, 2009, p. 145). Nous allons présenter plus en détail chaque concept et chaque choix dans la Partie II de ce rapport de thèse, mais nous tenions à introduire le contexte et la spécificité de notre démarche de recherche :

- Au niveau disciplinaire (voir Figure 2) :

o Étant donné que le but des sciences de gestion est le même que toute autre science humaine, c’est-à-dire « analyser les formes d’organisation qui cohabitent dans notre société » (Savall & Zardet, 2004, p. 71), le choix particulier d'un doctorat en Sciences de Gestion se justifie d’une part par l’interdisciplinarité qui caractérise ce champ (ce qui nous a permis d’accéder aux connaissances économiques, psychologiques, sociologiques, anthropologiques et philosophiques, voire historiques et stratégiques, sans avoir peur d’être enclos), et d'autre part, par sa nature actionnable, d’application aux organisations11.

o À l’intérieur des sciences de gestion, nous nous situons dans le champ de la stratégie dans le domaine de l’entrepreneuriat, et plus particulièrement sur le concept de « création de valeur » (Janssen & Surlemont, 2009, p. 28).

o Parmi tout ce que la stratégie entrepreneuriale peut comprendre, nous nous situons dans les phases de conception et de création d’une nouvelle activité, jusqu’à la première année après la création.

o Parmi les possibilités des organisations qui gravitent dans le domaine de l’entrepreneuriat, nous nous intéressons à la notion de projet (Brechet, Schieb-Bienfait, & Desreumaux, 2009; Husson & Schmitt, 2015) et aux projets d’entreprises sociales par une sensibilité propre.

9 Pour nous, « la pertinence est par rapport à plutôt que valeur en soi » (Savall & Zardet, 2004, p. 47). La pertinence révèle notre projet de développer des connaissances contextualisées pour mieux rendre compte de la complexité de notre phénomène.

10En effet, nous essayerons d’expliciter toutes les suppositions que nous avons considérées en amont, étant donné que «

la discussion d’une justification est organisée et délimitée par la zone d’accord définie par le paradigme d’une discipline en

sciences et par le paradigme éthique […] [et qu’]une preuve, n’est, pour l’épistémologue, qu’un discours justificatif

dépendant de présupposés » (Fourez, 2009, p. 145).

11 Avenier et Schmitt (2007, p. 15) rappellent : « Les sciences de gestion ont en effet pour finalité de développer des savoirs sur et/ou pour la gestion des organisations socio-économiques ». Pour approfondir le sujet, voir aussi le dossier thématique « Actionnabilité et recherche en entrepreneuriat et PME » (Volume 17, numéros 3-4, 2004) de la Revue Internationale P.M.E. : Économie et gestion de la petite et moyenne entreprise.

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o Parmi les entreprises sociales existantes, nous optons pour celles les plus explicitement orientées vers une transition écologique (Hopkins, 2008), c’est -à-dire des initiatives résilientes nées de l’engagement citoyen et des multiples réseaux (Transition.org, 2016).

Figure 2. Délimitation du champ de notre recherche Par une telle délimitation disciplinaire, nous voulons positionner notre recherche sans pour autant l’isoler ni la considérer imperméable à d’autres types d’organisation, d’autres concepts de l’entrepreneuriat, ou d’autres disciplines.

- Au niveau ontologique, épistémologique et méthodologique (Figure 3) :

o En tant que théorie de la connaissance, nous avons choisi un paradigme constructiviste radical qui « postule l’existence d’un réel expérimenté », la « non-séparabilité entre observateur et phénomène observé » et le fait que « la construction de connaissance n’est pas nécessairement une co -construction stricto sensu » (Avenier & Gavard-Perret, 2008, p. 25).

o Pour apercevoir la réalité et l’expérimenter, nous avons fait appel à une pensée complexe nous permettant justement de « traiter avec le réel, de dialoguer avec lui, de négocier avec lui » pour « rendre compte des

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articulations » dans un cadre certes incomplet mais non parcellaire (Morin, 2005, p. 10).

o La nature de notre recherche est de type abductive (opposée à une recherche hypothético-déductive ou inductive) basée sur des « allers-retours successifs entre le travail empirique effectué et les théories et concepts mobilisés » (Avenier & Gavard-Perret, 2008, p. 30).

o Parmi les méthodes disponibles, nous avons choisi une méthode qualitative à visée transformative : la recherche intervention (Savall & Zardet, 2004) qui s’est traduit en une activité d’observation participante, conseil, accompagnement, entretiens et modélisation.

o Quant aux outils d’intervention, d’analyse et de traitement d’information, nous avons recouru aux principes de l’ethnométhodologie, c’est-à-dire à des méthodes de sens commun pour agir avec les acteurs et décrire le déroulement de l’action et sa signification (Vinck, 2003, p. 3) ; aux principes de la sociologie de la traduction (ou Théorie de l’Acteur Réseau – TAR) qui mettent l’accent sur les relations et les nœuds tissés entre humains et non humains (Akrich, Callon, & Latour, 2006) ; et aux principes de l’analyse de contenu de discours centré sur le sens et représentations véhiculés par les discours de chaque acteur (Gavard-Perret & Helme-Guizon, 2008).

o Nous nous sommes concentrés sur un seul cas de recherche intervention pour l’aborder dans sa globalité. Nous avons réalisé 9 entretiens formels : 2 accompagnateurs, 3 clients, 2 fournisseurs, 2 investisseurs ; une dizaine d’entretiens informels avec stagiaires, clients, connaissances et amitiés, ainsi que plusieurs rencontres sporadiques12. Les raisons pratiques des choix sont explicitées lors de la partie méthodologique (chapitre 4). Vu que notre intérêt est de questionner la théorie sur les modèles de la valeur mobilisés en entrepreneuriat social, et non la relation entre entreprises sociales, un seul cas d’étude nous suffit. Il s’agit alors à travers la complexité du cas étudié de trouver des dissensus plutôt que les consensus (Schmitt, 2017) afin de développer des connaissances nouvelles.

12Nous voulons mettre en garde sur le fait que nous avons fait un suivi rigoureux de l’évolution du projet de Franck jusqu’au 1er juillet 2016. Après cette date, nous avons bâti une amitié et nous avons continué à en avoir de nouvelles, maintenant informelles. Nous nous sommes retrouvés à plusieurs reprises lors de différents évènements du PeeL, grâce à des contacts qui sont devenus personnels et un réseau qui touche différents acteurs avec des envies plus ou moins similaires.

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Figure 3. Regards que nous posons sur notre recherche.

Quant à la recherche documentaire, nous avons suivi le chemin classique. Nous avons questionné les bases de données mises à disposition par le service de documentation de l’Université de Lorraine. Nous avons utilisé des revues et des rapports rédigés en anglais, en français et en espagnol qui étaient accessibles depuis les mêmes bases de données ou avec Google Scholar. Pour prioriser les sources à utiliser dans notre argumentation, le premier critère a été de regarder un article publié dans des revues bien classées selon les listes publiées par la FNEGE, le HCERES et le CNRS en France, ou le CONACYT au Mexique, et de continuer à chercher les articles auxquels les auteurs faisaient le plus souvent référence.