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La convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption

Section II L’Algérie et les conventions régionales et bilatérales

B- Les conventions africaines

1- La convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption

En application de la déclaration adoptée à la première session de l’Union Africaine en juillet 2002 à Durban (Afrique du Sud) et les recommandations de la 37e session ordinaire de la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement en juillet 2001 à Lusaka (Zambie) les Etats africains ont adopté la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption lors de la deuxième session ordinaire de la conférence de l’Union Africaine à Maputo le 11 juillet 2003270.

La présente convention vise, notamment, à promouvoir et renforcer la mise en place en Afrique les mécanismes nécessaires pour lutter contre la corruption et les infractions assimilées dans les secteurs public et privé, faciliter la coopération entre les Etats parties en la matière et créer les conditions nécessaires pour promouvoir la transparence et l’obligation de rendre compte dans la gestion des affaires publiques271.

Afin de lutter contre le blanchiment de l’argent résultant de la corruption, les Etats contractants s’engagent, à travers cette convention, à respecter et appliquer deux types de mesures, préventives d’une part (a) et répressives d’une autre part (b).

a- Mesures préventives

Afin de réaliser ses objectifs, la convention de l’Union Africaine contre la corruption impose aux Etats parties de mettre en place et renforcer les autorités ou agences nationales indépendantes chargées de lutter contre la corruption272. Conformément à cet article, l’Algérie a créé un deuxième organisme nommé l’office central de répression de la corruption chargé des enquêtes et investigations sur les faits de corruption et constitué afin de conforter l'organe de prévention et de lutte contre la corruption chargé d'élaborer la stratégie nationale dans ce domaine273.

Cette convention exige de mettre en place des mécanismes visant à promouvoir la sensibilisation des populations à la lutte contre ce fléau et les infractions

270Association pour la promotion de la bonne gouvernance en Afrique, Bienvenue sur le site de

l’association pour la promotion de la bonne gouvernance en Afrique [en ligne]. Disponible sur : http://www.bonnegouvernanceafrique.com/?page_id=8 [Consulté le 12 septembre 2012].

271 Art. 2 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 272 Art. 5, par. 3 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 273 Voir le chapitre 2 de la deuxième partie.

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assimilées 274 . Sachant que la loi algérienne 275 prévoit des programmes d’éducation, d’enseignement et de sensibilisation sur les dangers que représente la corruption sur la société.

La convention prévoit l’adoption par les Etats parties de toutes les mesures requises afin de réaliser les objectifs suivants :

- Définir comme infractions pénales les actes de corruption et les infractions assimilées276.

- Mettre en place et renforcer les systèmes internes de comptabilité, de vérification des comptes et de suivi, notamment en ce qui concerne les revenus publics, les recettes douanières et fiscales, les dépenses et les procédures de location, d’achat et de gestion des biens publics et services277.

- Protéger les informateurs et les témoins dans les cas de corruption et d’infractions assimilées278 .

Le présent dispositif africain invite les Etats à adopter toutes les mesures qu’ils jugent nécessaires pour établir comme infractions pénales, la conversion, le transfert, la cession, la dissimulation ou le déguisement de la propriété des produits résultent d’actes de corruption ou d’infractions assimilées, ainsi que l’acquisition, la possession ou l’utilisation de la propriété en connaissant, au moment de sa réception, qu’elle est le fruit d’actes de corruption ou d’infractions assimilées279. De sa part, la loi algérienne relative à la lutte contre la corruption punit tout blanchiment du produit des crimes280.

Concernant les mesures préventives dans le secteur public et privé, la convention exige de faire des déclarations d’avoir par les agents publics lors de leur prise de fonctions, ainsi que pendant et à la fin de leur mandat281afin de combattre l’enrichissement illicite et l’introduction de fonds illégaux , par ces agents, dans l’économie des Etats parties.

274 Art. 5, par. 8 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 275 Art. 11 et 15, par. 2 de la loi n°06-01relative à la prévention et à la lutte contre la corruption, modifiée

et complétée.

276Art. 5, par. 1 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 277 Ibid. par. 4

278 Ibid. par. 5

279Art. 6 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption.

280 Art. 42 de la loi n°06-01 du 20 février 2006 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption,

modifiée et complétée.

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Les Etats contractants s’engagent à adopter les mesures nécessaires pour définir l’enrichissement illicite comme un acte de corruption et infractions assimilées282. Pour la convention, l’immunité n’a aucune importance devant l’objectif de lutte contre la corruption et les infractions assimilées tel que le blanchiment d’argent. Elle prévoit que toute immunité accordée aux agents publics ne constitue pas un obstacle à l’ouverture d’une enquête sur des allégations et d’un procès contre de tels agents283.

Chaque Etat partie doit adopter les mesures nécessaires pour donner effet au droit d’accès à toute information qui est requise pour aider à la lutte contre la corruption et les infractions assimilées284.

S’agissant de la corruption dans le secteur privé, le présent dispositif exige aux Etats d’adopter toutes les mesures nécessaires pour prévenir et lutter contre les actes de corruption et les infractions assimilées commis dans ce secteur285. La convention de l’UA accorde une attention particulière au fait que les médias et la société civile doivent avoir accès à l’information notamment à travers l’engagement des Etats parties à vulgariser cette convention et à créer un environnement favorable qui permet à la société civile et aux médias d’amener les gouvernements à faire preuve du maximum de transparence et de responsabilité dans la gestion des affaires publiques286. Or, le rôle des médias et celui de la société civile en Algérie reste très marginal.

En plus des exigences citées ci-dessus, la présente convention comprend un dispositif assez unique parmi les conventions régionales sur la lutte contre la corruption287. Elle prévoit que les Etats parties doivent encourager la coopération régionale, continentale et internationale pour empêcher les pratiques de corruption dans les transactions commerciales internationales.

Elle encourage tous les pays à prendre des mesures législatives pour éviter que les agents publics malhonnêtes ne jouissent de biens acquis illicitement. Ils sont invités à travailler en étroite collaboration avec les institutions financières de lutte contre la corruption pour bannir la corruption dans les programmes d’aide au développement et de coopération en la matière288.

282 Art. 8 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 283 Art. 7, par. 5 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 284 Art. 9 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 285 Art.11 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 286 Art. 12 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 287 G. Dell, Conventions contre la corruption en Afrique, qui peut faire la société civile pour qu’elles

fonctionnent ? Guide de plaidoyer pour la société civile, Berlin : Transparency international, 2006, p.33.

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b- Mesures répressives

Selon la présente convention tout acte de corruption est considéré comme un délit donnant lieu à l’extradition. De ce fait, chaque Etat partie s’engage à extrader toute personne inculpée ou reconnue coupable d’un acte de corruption ou d’infractions assimilées commis sur le territoire d’un autre Etat partie et dont l’extradition est demandée par cet Etat289.

L’extradition n’est pas le seul moyen de répression. La convention prévoit, également, la confiscation290 et la saisie des produits de la corruption291.

En plus, les établissements internes de chaque Etat partie ne peuvent plus invoquer le secret bancaire. Chaque Etat contractant doit adopter les mesures qu’il juge nécessaires pour doter ses tribunaux ou ses autres autorités compétentes des pouvoirs d’ordonner la confiscation ou la saisie de documents bancaires, financiers et commerciaux.

Ce dispositif ne concerne pas que les établissements internes, mais aussi la relation entre les Etats parties qui ne peuvent désormais invoquer le secret bancaire pour justifier leur refus de coopérer dans les cas de corruption et d’infractions assimilées292. C’est ce que prévoient, également, les articles 51, 58, 63 et 64 de la loi algérienne n°06-01 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption, modifiée et complétée.

Les Etats contractants doivent s’engager à conclure des accords bilatéraux permettant de lever le secret bancaire sur les comptes alimentés par des fonds de provenance douteuse et à reconnaître aux autorités compétentes le droit d’obtenir auprès des banques et des institutions financières, sous couverture judiciaire, les éléments de preuve en leur possession293.

Ils s’engagent à coopérer en matière judiciaire. Ils sont invités à mener des recherches et des études sur la manière de lutter contre la corruption et les infractions assimilées et d’échanger l’expertise en la matière sans négliger de fournir mutuellement toute forme d’assistance technique294.

289 Art. 15, par. 5 et 6 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la

corruption.

290 La présente convention a défini la confiscation comme toute sanction ou mesure donnant lieu à une

privation définitive de biens, gains ou produits, ordonnée par un tribunal à l’issue d’un procès intenté pour une ou plusieurs infractions pénales relevant de la corruption.

291 Art. 16, par. 1 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 292 Art. 17, par. 1 et 3 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la

corruption.

293 Art. 17, par.4 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. 294 Art. 18 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption.

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La convention de l’Union Africaine comporte, en matière de mesures répressives, une disposition assez unique parmi les conventions régionales sur la lutte contre la corruption295. Elle prévoit que les Etats parties doivent coopérer dans la conduite des enquêtes et des poursuites judiciaires en matière de corruption lors des transactions internationales296.

Malgré la précision de son contenu, cette convention n’a pas suscité un grand enthousiasme auprès des gouvernements africains. Le processus de ratification allait traîner en longueur. Pour rappel, la convention ne pourra entrer en vigueur qu'à l'issue du dépôt de 15 ratifications.

Le 5 août 2006 un saut historique a été effectué après sa ratification par l’Algérie, le 23 mai 2006, devenue ainsi le 15e pays membre de l’Union Africaine à ratifier cette convention ce qui a permis de déclencher le compte à rebours de l’entrée en vigueur de ce dispositif.

Pour rappel, sur 53 pays membres de l’Union Africaine, 45 l’ont signé et seulement 31 l’ont ratifié297 , contrairement à la convention des Nations-Unies contre la corruption, adoptée pourtant quelques mois après celle de l'Union Africaine, qui a été rapidement ratifiée par la majorité des pays africains.

En réalité, la convention africaine est plus contraignante que celle des Nations- Unies dans la mesure où le dispositif de l’ONU est plus permissif et donne aux pays contractants plus de souplesse et une marge de manœuvre assez large298. Contrairement à celle des Nations-Unies, la convention africaine introduit plus de rigueur dans les mécanismes de contrôle et de suivi d'application299.Cela explique

295 G. Dell, op.cit. p.33.

296 Art. 19, par. 1 et 5 de la convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la

corruption.

297 African Union, 2014 year of agriculture and food security [online]. Available on:

http://au.int/en/treaties [accessed January 3, 2014].

298 D. Hadjadj, L’Algérie n’a toujours pas ratifié la convention africaine de lutte contre la corruption,

absence de volonté politique et fuite en avant, Le soir d’Algérie, 23 mai 2005, p.5.

299 L’article 22 comporte la création d’un comité consultatif au sein de l’Union Africaine, composé de

onze membres élus par le conseil exécutif de l’Union Africaine pour un mandat de deux ans, renouvelable une fois. Il est responsable de la promotion de la lutte contre la corruption, la collecte d’informations sur la corruption et sur la conduite des sociétés multinationales exerçant des activités en Afrique, élaborer des méthodologies, conseiller les gouvernements, élaborer des codes de conduite pour les agents publics et établir des partenariats. De plus, il doit régulièrement présenter un rapport au conseil exécutif sur les progrès réalisés par chaque Etat partie à l’égard du respect des dispositions de la convention de l’UA.

Parallèlement, les Etats parties doivent fournir un rapport au comité sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la convention de l’UA dans l’année qui suit sa mise en vigueur et par la suite une fois par an par le biais des autorités nationales en matière de lutte contre la corruption. En outre, les Etats parties sont tenus d’assurer et de prévoir la participation de la société civile dans le processus de surveillance.

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certainement en grande partie le peu d'empressement des pays d'Afrique et l'extrême lenteur dans le processus de ratification300.

2- La convention de l’organisation de l’Unité Africaine sur la prévention

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