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La convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme

Section II L’Algérie et les conventions régionales et bilatérales

A- Les conventions arabes

2- La convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme

Contrairement à la convention précédente, cette dernière traite du blanchiment d’argent à titre principal. Le but affiché de cette convention est l’amélioration de la coopération entre Etats arabes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

Selon la présente convention le blanchiment d’argent est le fait de commettre ou la tentative de commettre tout acte visant à dissimuler ou à déguiser l’origine illicite des biens.

Le financement du terrorisme est le fait de réunir, fournir ou transférer les fonds par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, dans l’intention de les utiliser, en tout ou en partie, en vue de financer un acte de terrorisme défini dans la convention arabe de lutte contre le terrorisme247.

Cette convention incite les Etats contractants à prendre deux types de mesures à savoir : des mesures nationales (a) et d’autres régionales (b).

245 Ibid. par. 2.

246 Publié au JORADP n°11 du 12 février 2001.

247 Art. 1, par. 8 et 9 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du

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a- Mesures à prendre au niveau national

La présente convention engage les pays contractants à adopter les mesures qui se révèlent nécessaires afin de contrôler les banques, les établissements financiers et les autres institutions exposés au blanchiment d’argent. Ainsi, permettre aux établissements luttant contre le blanchiment d’argent de coopérer et d’échanger des informations avec les autres institutions similaires au niveau national, régional et international248.

L’article 7 de la présente convention est inspiré de la recommandation 26 du GAFI. Les pays contractants doivent mettre en place une cellule de renseignement financier qui serve de centre national pour recueillir , analyser et transmettre les déclarations d’opérations suspectes et d’autres informations concernant les actes susceptibles d’être constitutifs de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.

La cellule de renseignement financier doit avoir accès, directement ou indirectement et en temps voulu, aux informations financières, administratives et en provenance des autorités de poursuite pénale pour exercer correctement ses fonctions et notamment analyser les déclarations d’opérations suspectes.

Les Etats parties doivent prendre toutes les mesures nécessaires afin de contrôler le mouvement des capitaux de et vers l’étranger249.

Par ailleurs, les institutions financières doivent prendre les mesures de vigilance « due diligence » à l’égard de la clientèle y compris l’identification et la vérification de l'identité de leurs clients, ainsi que les bénéficiaires effectifs. Elles ne doivent pas tenir des comptes anonymes ni des comptes sous des noms manifestement fictifs.

Elles doivent conserver pendant au moins cinq ans toutes les pièces nécessaires se rapportant aux transactions effectuées, à la fois nationales et internationales, afin de leur permettre de répondre rapidement aux demandes d'information des autorités compétentes.

Si l'institution financière a des doutes concernant une opération précise ou à la pertinence des données d’identification du client elle doit informer l’autorité compétente.

248 Art. 4 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme 249 Art.5 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

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La convention a imposé une disposition indispensable. Les Etats parties doivent adopter les mesures nécessaires pour que les banques et les institutions financières ne révèlent pas aux personnes concernées les investigations ainsi réalisées250. En vertu de l’article 8, paragraphe 3, les pays contractants sont tenus de réviser régulièrement leur législation interne relative à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme conformément aux exigences des institutions internationales. Par ailleurs, chaque partie adopte les mesures législatives et autres qui se révèlent nécessaires pour conférer le caractère d'infraction pénale au blanchiment d’argent251.

Aux termes de l’article 10 les Etats doivent incriminer le financement du terrorisme dont l’utilisation, l’acquisition et la détention des biens dont celui qui les acquiert, les détient ou les utilise sait qu'ils sont destinés à financer une activité criminelle.

La responsabilité pénale et si ce n'est pas possible, la responsabilité civile ou administrative doit s'appliquer aux personnes morales sans porter atteinte à la responsabilité pénale des personnes physiques252.

Concernant la compétence judiciaire, l’article 12 prévoit que les juridictions de l’Etat partie sont compétentes lorsque l’infraction du blanchiment d’argent et / ou du financement du terrorisme est commise hors de son territoire mais dans le but de porter préjudices à ses intérêts ou si l’auteur de l’infraction porte sa nationalité et se trouve sur son territoire en application de la règle « l’Etat n’extrade pas ses nationaux ».

Dans ce cas, l’Etat compétent doit soumettre l’affaire sans tarder à ses autorités afin que des poursuites soient engagées à l’égard des infractions mentionnées dans la demande de l’Etat requérant.

En vertu de l’article 13 les pays contractants doivent adopter des mesures nécessaires y compris législatives afin que leurs autorités compétentes soient en mesure de geler, saisir et confisquer les biens blanchis, les produits découlant du blanchiment de capitaux ou des infractions sous-jacentes, ainsi que les

250 Art. 8, par.1 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du

terrorisme.

251 Art. 9 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. 252 Art.11 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

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instruments utilisés ou destinés à être utilisés pour commettre ces infractions ou des biens d’une valeur équivalente sans préjudice du droit des tiers de bonne foi. La présente convention prévoit une disposition particulière. Il s’agit d’inciter les Etats parties à mettre en œuvre des mesures incitatives afin d’encourager toute personne impliquée dans la commission de l’infraction du blanchiment d’argent et/ ou du financement du terrorisme à dénoncer ces infractions ou aider les autorités compétente à les détecter253.

Concernant la prévention du blanchiment, l’article 16 prévoit que chaque partie adopte les mesures législatives et autres qui se révèlent nécessaires pour mettre en place un régime interne complet de réglementation et de suivi ou de contrôle pour prévenir le blanchiment.

L’article 17 cite les mesures qui permettent de combattre le blanchiment d’argent au niveau interne de chaque Etat partie dont l’encouragement de la collaboration entre autorités et citoyens et la protection des témoins.

Outre ces mesures nationales, les pays contractants doivent coopérer entre eux pour lutter efficacement contre le blanchiment d’argent.

b- Mesures à prendre au niveau régional

En vertu de l’article 18, les Etats parties ont l’obligation de coopérer mutuellement dans la mesure la plus large possible les unes avec les autres aux fins d’échange d’informations concernant notamment les personnes soupçonnées, les outils utilisés pour commettre l’infraction et le mouvement des capitaux et biens blanchis.

Ils doivent s’engager à mettre en place des contrôles et des garanties afin de préserver la confidentialité des informations échangées et pour faire en sorte que ces informations ne soient utilisées que de la manière autorisée254.

L’objet des articles 19 et 28 est d’inciter les parties à coopérer mutuellement dans la mesure la plus large possible les unes avec les autres aux fins d'investigations et de procédures visant à la confiscation des instruments et des produits.

Cependant, les Etats parties peuvent refuser la coopération en matière de confiscation si les informations fournies ne sont pas suffisantes pour permettre à

253 Art. 14 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. 254 Art. 18 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

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la partie requise de prendre une décision sur la demande de confiscation ou si les biens objets de la demande n’ont pas de valeurs255.

Les articles 20 et 21 soulignent la nécessité, pour les Etats partie, d’échanger leurs expériences, études et recherches y compris dans le domaine de la formation du personnel et la coopération technique afin de prévenir et lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

L’article 23 est consacré à l’entraide judiciaire. Les pays contractants doivent offrir rapidement, efficacement et d’une manière constructive l’éventail le plus large possible de mesures d’entraide judiciaire pour les enquêtes, les poursuites et les procédures connexes ayant trait au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme256.

L’article 23, paragraphe 3 qui concerne la transmission spontanée d’information est inspiré de l’article 20 de la convention du Conseil de l’Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement du terrorisme du 16 mai 2005.

Une partie peut, sans demande préalable, transmettre à une autre partie des informations sur les instruments et les produits lorsqu'elle estime que la communication de ces informations pourrait aider la partie destinataire à engager ou mener à bien des investigations ou des procédures.

La coopération judiciaire peut être refusée dans le cas où l'exécution de la demande risque de porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l'ordre public ou à d'autres intérêts essentiels de la partie requise, où la mesure sollicitée serait contraire aux investigations, procédures et décisions judicaires prises sur son territoire257.

La partie requise ne doit pas refuser d’exécuter une demande d’entraide judiciaire au motif que ses lois imposent aux institutions financières la préservation du secret ou de la confidentialité258.

255 Art. 28, par. 5 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du

terrorisme.

256 Art. 23, par. 1 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du

terrorisme.

257 Art. 25, par. 1 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du

terrorisme.

258 Art. 25, par. 2 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du

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La convention impose aux Etats contractants la coopération en matière de la reconnaissance des décisions judiciaires259, de la confiscation et du renvoi des avoirs et fonds détournés260, ainsi que le transfert des procédures pénales261. En ce qui concerne l’extradition des personnes demandées, la présente convention prévoit que les parties contractantes s’engagent à extrader toute personne poursuivie qui se trouve sur leur territoire à condition que l’infraction commise soit incriminée par les lois des deux parties (requérante et requise)262.

A l’instar de la convention de Riyad, la présente convention traite le cas de la pluralité des demandes d’extradition. La priorité est accordée à la partie dont les intérêts ont été préjudiciés, puis, à la partie sur le territoire de laquelle l’infraction a été commise et ensuite à celle dont la personne à extrader était un national. Lorsque les circonstances sont les mêmes il est tenu compte de la date de la demande d’extradition263.

Contrairement à la convention du conseil de l’Europe de 2005264 , la présente convention prévoit la possibilité d’arrêter provisoirement la personne demandée en attendant l’envoie de la demande d’extradition, ainsi que tous les documents nécessaires qui l’accompagnent. Toutefois, cette personne doit être mise en liberté si la partie requise ne reçoit pas dans les trente jours qui suivent l’arrestation les documents demandés. Dans le cas contraire, l’arrestation ne peut pas dépasser 60 jours qui suivent l’envoi de la demande de l’extradition265.

Cette phase, également appelée procédure de pré-extradition constitue la mesure la plus contraignante en ce sens qu'elle permet d'immobiliser la personne localisée et avant que la procédure d'extradition proprement dite n'ait pu être mise en œuvre, la chose qui peut entraîner un préjudice à la personne détenue. Or, cette convention n’a pas abordé le principe de réparation à raison d’une détention provisoire injuste ou erronée. Le fait de nier une telle possibilité est sans doute de nature à créer une injustice flagrante.

259 Art. 27 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. 260 Art. 28 et 29 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du

terrorisme.

261 Art. 30 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. 262 Art. 31 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. 263 Art. 35 de la convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. 264 Relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et au

financement du terrorisme du 16 mai 2005.

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La question de la protection des témoins et experts a été traitée dans les articles 37 et 38. Les Etats parties s’engagent à protéger les témoins et les experts, ainsi que leurs famille et biens contre tout danger, menace ou contrainte résultant de leur témoignage.

Concernant le transfert des témoins et experts détenus aux fins de témoignage, la partie requise peut refuser ce transfert pour diverses raisons : si la personne détenue refuse ce transfert, si la présence de cette personne est nécessaire sur son territoire en raison des poursuites engagées contre elle, si son transfert vers l’Etat requérant a pour effet de prolonger la durée de sa détention, ainsi que dans le cas où des considérations majeures empêchent son transfert266.

Nous constatons que cette convention n’a pas négligé le consentement de la personne détenue contrairement à la législation algérienne267.

Outre la coopération entre Etats parties, la présente convention prévoit également l’entraide avec les institutions régionales et internationales, l’échange d’informations avec les autres Etats non contractants et la participation aux divers séminaires, réunions et évènements relatifs à la prévention et à la lutte contre le blanchiment d’argent organisés par les institutions régionales et internationales268. La convention arabe de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme est la première convention arabe élaborée principalement pour lutter contre le blanchiment d’argent. Elle a repris l’essentiel des recommandations du GAFI en la matière.

Cette convention a été adoptée le 21 décembre 2010 et entrée en vigueur le 5 octobre 2013 après sa ratification par sept Etats269. L’Algérie a signé cette convention le jour même de son adoption, cependant elle ne l’a toujours pas ratifié.

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