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PREMIERE PARTIE : TEXTES ET CONTEXTES

Chapitre 2 Des contextes sociaux

Dans ce chapitre, nous nous proposons d’étudier les univers maghrébin et antillais représentés dans notre corpus. Cette recontextualisation aura également le mérite de nous révéler les spécificités de la condition féminine, cela est d’autant plus important que le statut de la femme dans les sociétés maghrébine et antillaise est indissociable de l’écriture des auteures. La façon dont les femmes sont considérées dans ces cultures respectives influence considérablement la personnalité de leurs personnages et les pousse à adopter un comportement différent de celui qu’on attend généralement d’elles. Ce comportement les éloigne progressivement de leur famille, de leur communauté et même de leur pays d’origine. Dans ce chapitre, le contexte social renvoie essentiellement à la condition féminine au

Maghreb et aux Antilles148 telle que nous la décrivent les différentes études menées à ce sujet.

L’étude du statut de la femme dans les contextes maghrébin et antillais s’accompagnera d’une analyse de quelques extraits de notre corpus et parfois d’autres textes, de cette façon, on pourra déjà voir comment ces quatre romancières se réapproprient dans leurs textes la condition de la femme dans leur société respective.

1. La condition féminine au Maghreb

Le statut de la femme dans les pays du Maghreb (Algérie, Maroc et Tunisie), statut qui

a aussi une incidence sur la littérature maghrébine, est lié d’une part à la culture arabe et

d’autre part à la religion musulmane tout comme la condition féminine aux Antilles est

indissociable du passé esclavagiste et colonial de ces îles.

Comme la plupart des sociétés, les sociétés arabes sont des sociétés phallocratiques c’est-à-dire qu’elles marquent une nette séparation entre les hommes et les femmes, accordant les pleins pouvoirs aux hommes et faisant des femmes des êtres inférieures à ces derniers. Les sociétés arabes ne détiennent pas le monopole de la phallocratie. En effet, dans plusieurs autres régions du monde, on observe des lois discriminatoires envers les femmes malgré les luttes menées par ces dernières pour conquérir leurs droits au sein de la société. Dans la

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Le Maghreb englobe souvent l’Algérie, le Maroc et la Tunisie, de même que les Antilles francophones comprennent d’abord la Guadeloupe, la Martinique et Haïti. Mais dans notre travail et notamment dans ce chapitre nous parlerons davantage de l’Algérie que des autres pays du Maghreb car Malika Mokeddem est d’origine algérienne et Fawzia Zouari, bien que Tunisienne, a composé avec de La Deuxième épouse une histoire sur des personnages majoritairement originaires d’Algérie. Pour ce qui est des Antilles, c’est surtout la Guadeloupe qui nous intéresse car Gisèle Pineau et Maryse Condé en sont originaires et en parlent dans leurs textes. Mais la situation historique, sociale et littéraire de la Guadeloupe étant presqu’indissociable de celle de la Martinique, nous ne ferons pas de distinction entre ces deux îles dans notre analyse des contextes sociaux.

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société occidentale par exemple, ce n’est que vers la deuxième moitié du XXe siècle que le

statut et la condition de la femme se sont considérablement améliorés, mais l’on note encore des domaines où les hommes sont nettement privilégiés par rapport aux femmes. Mais dans le cas du Maghreb et notamment de l’Algérie, les pouvoirs de l’homme sont si étendus que dans

Le Code de la Famille algérien149 par exemple, seul le père est reconnu comme tuteur de ses

enfants mineurs, cette responsabilité ne revenant à la femme qu’à la mort de son époux : « Le père est tuteur de ses enfants mineurs. A son décès, l’exercice de la tutelle revient à la mère de plein droit »150.

La toute-puissance du père arabo-musulman ressort encore du fait que c’est souvent lui qui choisit l’époux de sa fille qu’elle ne découvrira très souvent que le jour des noces ; et

même après son mariage, la femme demeure sous l’autorité des hommes de sa famille à

savoir : le père, l’oncle, le frère qui peuvent châtier pour n’importe quel motif. Il en est de même en ce qui concerne le mariage et sa dissolution, les droits de la femme y sont restreints,

par exemple, elle ne peut pas se marier à un non musulman, tandis que l’homme lui possède

ce droit151 ; d’autre part, selon l’article 11, « La conclusion du mariage, pour la femme

incombe à son tuteur matrimonial qui est soit son père, soit l’un de ses proches parents » de sorte que légalement la femme ne possède presque pas de responsabilités et de droits, même quand il s’agit de décision aussi personnelle et importante que le mariage. Par ailleurs quand il s’agit de divorcer, la femme est soumise à de nombreuses conditions, par exemple, selon l’article 53, alinéa 1, elle ne peut divorcer que « pour défaut de paiement de la pension alimentaire prononcée par jugement à moins que l’épouse eut connu l’indigence de son époux au moment du mariage sous réserve des articles 78, 79 et 80 de la présente loi » ou encore selon l’alinéa 5, seulement « pour absence de plus d’un an[ de la part du mari] sans excuse valable ou sans pension d’entretien » tandis que l’homme dispose librement du droit de

divorcer, aucune condition ne lui est imposée pour le faire.152

Ce sexisme bien enraciné dans cette société s’avère être la cause principale de la

rébellion de la femme. C’est ce que l’on retrouve dans les romans de Malika Mokeddem et de

149

Le Code de la Famille algérien a été institué le 09 juin 1984 sous l’influence des mouvements intégristes islamistes. Il régit la vie de famille dans les aspects comme le mariage et sa dissolution, la représentation légale des individus et la succession.

150

Article 87 du Code de la Famille algérien. 151

Article 31du Code de la Famille algérien. 152

Pour divorcer, l’homme n’est pas soumis à des conditions, mais si le juge constate qu’il a abusé de son droit de divorcer de sa femme, il peut lui imposer une amende pour dommage au préjudice subi par l’épouse. Seulement, le code ne spécifie pas les abus auxquels l’homme ne devrait pas se livrer quand il divorce de sa femme, de sorte que l’on peut dire que l’’homme n’a aucune condition, ni d’obligation à respecter lorsqu’il désire répudier son épouse.

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Fawzia Zouari. Les personnages féminins de ces romans et particulièrement Leïla dans Les

Hommes qui marchent et Halima dans La deuxième épouse ont une conscience aiguë des discriminations sexuelles qui forgent leur société. Leïla par exemple constate avec stupeur que les joies et notamment la liberté issue de l’indépendance tant désirée par les hommes et les femmes algériens ne profitent qu’aux hommes, on lit en effet :

Au lendemain de l’indépendance, la première préoccupation des hommes était encore et

toujours de cacher, de cloîtrer leurs femmes. Liberté oui, mais pas pour tout le monde. Il fallait vite remettre les choses en ordre, réaffirmer les traditions et ne pas laisser les femmes se griser et gloser plus longtemps. Cacher les femmes à tout prix, même derrière

des tas d’ordures. Les maintenir, elles, dans l’ancienne condition, dans la soumission. 153 Le ton désabusé de Leïla dans ce passage trahit la déception de l’adolescente face aux comportements des hommes après une indépendance chèrement acquise tant par les hommes que par les femmes. Leïla pointe du doigt la rigidité et le caractère discriminatoire de la tradition arabo-musulmane qui veut que les femmes soient invisibles et soumises servilement aux hommes. Pour Leïla, comme pour tant d’autres femmes, la lutte pour l’indépendance de l’Algérie était aussi une lutte pour la liberté de la femme, un combat contre des traditions ancestrales opprimantes envers les femmes. Dans le combat pour la liberté de la nation, hommes et femmes ont donné leur vie pour l’indépendance ; et pourtant une fois acquise, cette indépendance ne profite qu’aux hommes qui ont tôt fait de rogner l’espace de liberté conquis par les femmes durant la lutte contre l’oppression de l’occupant français et de réintroduire les traditions oppressives. Cette conscience aiguë de la discrimination sexuelle causée par les traditions et l’égoïsme de l’homme provoque chez Leïla une révolte : « Ils ont barbouillé de noir les premières joies de l’indépendance. Ils ont déjà mis des chaînes à la jeune Houria comme ils emprisonnent les filles à la puberté. Ils ont détruit mes souvenirs

d’enfant et veulent brider mes espoirs ! »154 Le ton et les expressions utilisés ici montrent le

désenchantement d’une enfant devant les dures réalités de sa société postindépendance. Leïla, car il s’agit bien d’elle, constate que ses rêves et ses attentes par rapport à l’indépendance algérienne n’étaient que des utopies et que l’obéissance obséquieuse des hommes et des femmes aux traditions arabes au lendemain de l’indépendance constitue une menace pour son idéal d’une société plus tolérante envers les femmes.

Dans ce passage, Leïla assimile Houria (l’indépendance nouvellement acquise par l’Algérie) à une jeune fille comme si l’indépendance vue sous un angle féminin était d’abord une libération de la femme algérienne avant d’être une libération contre l’occupation

153

Mokeddem, Malika, Les Hommes qui marchent, op. Cit., p. 246. 154

52 française. Ainsi, mettre des chaînes à Houria c’est refuser la liberté aux femmes. La métaphore de la liberté enchaînée correspond à la claustration des filles pubères et l’inverse est tout aussi valable car le fait de maintenir la claustration traditionnelle des jeunes filles

pubères est en quelque sorte l’emprisonnement de la liberté et de l’indépendance récemment

acquise. En fait pour Leïla, il n’y a jamais eu d’indépendance dès lors que la liberté des filles et des femmes n’a jamais été reconnue. La véritable indépendance ou alors la véritable liberté aurait consisté en une libération de la femme, en une amélioration de la condition féminine qui n’aurait pu avoir lieu que si et seulement si les hommes renonçaient leurs coutumes et leurs traditions oppressives à l’égard des femmes. Ce but n’ayant pas été atteint, les chaînes ou traditions ayant été maintenues voire renforcées, l’indépendance de 1962 n’a pas servi les intérêts des femmes.

Si d’un côté les hommes sont à l’origine d’une tradition discriminatoire envers les femmes, d’un autre côté, elles se font elles-mêmes complices des mauvais traitements qui leur sont infligées non seulement en les acceptant mais aussi en les perpétuant. En effet, comme le montre Françoise Mozzo-Counil, la structure familiale des sociétés musulmanes reconnaît aux

femmes le statut de mère et de gardienne des traditions, c’est le seul rôle digne qui soit

attribué à la « mère-épouse ».155 La femme est chargée de transmettre à ses enfants la

bienveillance, la compréhension, l’amour et le savoir. Et pourtant, elle transmet plus souvent l’intolérance au sexe opposé et une soumission servile au sexe masculin. La mentalité ségrégationniste de la société maghrébine est donc aussi transmise et perpétuée par la mère puisque c’est elle qui éduque les enfants et leur enseigne les mécanismes de fonctionnement

de la société. D’ailleurs plusieurs études comme celles menées par Aïcha Belarbi156 ont

démontré que la femme mariée musulmane agit souvent en mère abusive qui favorise le garçon au détriment de la fille en marquant une nette césure entre les deux. L’éducation conduit alors vers des agissements profondément sexistes, répressifs pour l’une et hyper

permissifs pour l’autre157.

C’est d’ailleurs ce que Halima, l’un des principaux personnages de La Deuxième

épouse, constate lorsqu’elle se livre à une analyse critique de sa famille qui n’est qu’un échantillon de la société maghrébine :

J’avais envie de partir avec un homme parce que je voulais rendre ma vie intéressante. Et parce que j’avais fini par haïr la société des femmes. Notre maison n’en désemplissait

155

Mozzo-Counil, Françoise, Femmes maghrébines en France, Lyon, Editions chronique sociale, 1994, p. 24. 156

Belarbi, Aïcha (Dir.), Femmes et Islam, Casablanca, Le Fennec, 1998. 157

53 pas. Six sœurs, quinze tantes, des cousines par douzaines qui débarquaient à la maison au moindre prétexte, à l’occasion la plus futile. Et ça piaillait! Et ça se disputait! […] Lorsqu’elles se hasardaient dehors, couvertes de leur voile car elles avaient atteint l’âge

de la puberté, elles se serraient instinctivement les unes contre les autres, par réflexe

d’auto-défense – contre les testicules menaçants – on aurait dit, une nuée de mouettes paniquées par une tempête surprise. De fait, la proximité physique nous donnait

l’impression de devenir une seule personne. Nous marchions les corps cousus dans le

regard des hommes, la respiration suspendue à leurs jugements.158

Comme cela ressort de cet extrait, Halima est révoltée contre sa société qui réifie les femmes et ne leur donne aucune consistance, mais aussi et surtout contre la gent féminine qui se laisse volontiers réifier, car trop passive. Cette passivité est déjà perceptible à travers la conception que les femmes ont de leur propre corps et de leur personne. Elles refusent d’exister par et pour elles-mêmes d’où ce besoin instinctif et nécessaire d’être avec d’autres femmes. Au lieu de chercher à s’imposer, elles trouvent un moyen d’exister et pourtant elles

n’existent pas: elles cultivent l’instinct grégaire. La narratrice parle à juste titre d’une

« société des femmes » où tout est prétexte pour se retrouver et avoir l’illusion de vivre car la vie en groupe aspire l’individu et le dépersonnalise. En groupe, l’individu n’existe pas ; quant au groupe lui-même, il n’est pas dynamique puisque face au regard masculin il se fond en une seule personne incapable de tenir tête à l’homme. La vie en groupe est d’ailleurs une caractéristique de la société arabo-musulmane qui définit l’individu selon son appartenance à une communauté familiale, ethnique, religieuse ou autre : « Aujourd’hui encore, un Maghrébin est censé être musulman (ou parfois juif) et fait l’objet de l’inévitable

interrogation : wuld ashkûn ? (fils de qui ?) »159. Comme le montrent ces paroles, l’individu

arabo-maghrébin est automatiquement associé à un groupe et ne peut se mouvoir en dehors de celui-ci. Ainsi, chaque individu fait partie de la ‘‘ Oumma’’, expression arabe désignant la communauté de fidèles musulmans, et à ce titre, doit la soutenir par une participation active aux rassemblements religieux ayant lieu tous les vendredis par exemple ou aux grandes fêtes populaires célébrées en l’honneur des ‘‘Saints’’ censés protéger la communauté tout entière.

Le sentiment d’appartenance à la ‘‘Oumma’’ ou à la communauté familiale et tribale

est si vif qu’il imprègne tous les aspects de la vie de l’individu arabo-musulman : son comportement, ses choix en matière de mariage, d’éducation, doivent être conformes aux

exigences du groupe auquel il appartient et préserver son honneur d’où la chasteté

pré-maritale des filles et des sœurs, la continence de la veuve et de la divorcée. Le groupe réglemente donc la vie et les activités de l’individu et souvent à son détriment comme le

158

Zouari, Fawzia, La Deuxième épouse, Paris, op. Cit., pp. 84-85. 159

Hédi Chérif, Mohamed, « L’empreinte des appartenances communautaires sur les sociétés » in Camille Lacoste-Dujardin, Yves Lacoste (Dir.), L’Etat du Maghreb, Paris, La Découverte, 1991, p. 150.

54 constate tristement Leïla : « Maintenant, elle le savait. Leur mode de vie sacrifie toujours les aspirations de l’individu au profit de celles de la tribu »160. En effet, dans le monde arabo-musulman, l’individu ne peut être que membre du groupe c’est-à-dire intégré dans une structure qui ne peut se maintenir qu’en assurant la régulation des activités de ses membres, notamment les membres de sexe féminin.

Du reste, pour en revenir au cas particulier des femmes, cet instinct grégaire qu’elles cultivent leur fait perdre leur personnalité humaine et les rend semblables à des « mouettes

paniquées » ou selon Assia Djebar à des « alouettes naïves »161 s’adonnant à des activités

futiles qu’Halima dénonce par l’usage d’un vocabulaire dépréciatif : « Et ça piaillait ! » pour signifier que les femmes de sa famille parlent sans arrêt pour ne rien dire ; « Et ça se disputait !». La substitution du pronom « elles » par le pronom démonstratif « ça » pour désigner les femmes et l’usage répété du point d’exclamation fort de ce qui précède et de ce qui suit ne peuvent être que l’expression du mépris et de la colère que Halima éprouve envers la gent féminine passive. Ce qui écœure davantage Halima c’est l’apparente chasteté des jeunes filles. Elles se voilent à l’âge de la puberté pour prouver leur obéissance à la tradition et échapper aux regards masculins qui sont souvent assimilés au désir de possession sexuelle.

Pourtant, ce sont elles qui une fois mères s’empressent de marier leurs filles encore

trop jeunes pour assurer leurs arrières et l’honneur de la famille. Et le comble c’est qu’elles

veillent soigneusement à ce que les jeunes filles mariées témoignent à leurs époux obéissance et soumission comme en témoignent ces paroles d’Halima rapportant les recommandations faites par sa mère et sa tante lorsqu’elles la marient à son cousin Sadek :

La première m’a rappelé mes devoirs envers les miens. Un préserver leur honneur en préservant celui de mon mari […] faire au plus vite des enfants afin de garder mon époux

prisonnier du foyer conjugal. […] leur envoyer un peud’argent du ménage.[…] Mon rôle

constituerait à consoler mon époux de son exil, à lui restituer son Algérie au foyer, à le rassurer sur ses liens avec le clan et la patrie en mettant à sa disposition mon corps, que la

loi de l’adoul avait décrété son bien propre. 162

Dans ce passage se trouve résumé le rôle de la femme maghrébine pour les traditionnalistes intégristes et pour les matrones. Comme nous pouvons aisément le remarquer à la lecture de cet extrait, ce sont d’abord les mères et les belles-mères qui asservissent les jeunes filles mariées en leur imposant une ligne de conduite conforme aux usages communément admis dans leur société sous-peine d’être soit répudiée soit secondée par

d’autres épouses. Ainsi Yamina dans Les Hommes qui marchent, vit dans la crainte d’être

160

Mokeddem, Malika, Les Hommes qui marchent, op. Cit.,p. 310. 161

Les Alouettes naïves est aussi le titre d’un des romans de Assia Djebar publié en 1962 aux éditions Julliard. 162

55 répudiée parce qu’elle n’arrive pas à accoucher d’un garçon. Quand elle met au monde sa première fille, elle subit la désapprobation de sa belle-mère et de ses voisines :

Dame Zohra se renfrogna et foudroya du regard la citadine qu’elle avait pour belle-fille.

[…] Non. On ne s’égosillait pas en youyous pour la naissance d’une fille ! « Quand ma mère était jeune disait souvent Zohra, il y avait encore des familles qui enterraient les

filles à leur premier cri. Il n’y avait pas de place dans leur vie pour les bouches inutiles », prétendaient-elles. Aujourd’hui on ne tuait plus les petites filles mais elles restaient

toujours indésirables. 163

Quand Yamina accouche de Bahia sa deuxième fille, l’exaspération est à son comble : On bouda longuement Yamina. Fi donc ! La citadine se faisait accoucher d’une roumia

pour ne mettre au monde que des filles ! Si elle continuait, la répudiation risquait de lui

pendre bientôt au nez. Le problème c’est que renvoyer Yamina à Oujda ou l’affubler d’une darra, une deuxième épouse, aboutirait à une nouvelle brouille des deux clans familiaux à peine réconciliés164.