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CHAPITRE I : CONTEXTE GLOBAL

1.1.2 Contexte national

Le Président de la République et le gouvernement issus des élections démocratiques de novembre 2010 héritent d’un pays qui traverse d’énormes difficultés au triple plan politique, économique et social.

Aujourd’hui, la Guinée figure parmi les pays les plus pauvres du monde, après plus de 53 ans d’exercice de sa souveraineté. Son économie est délabrée et la situation sociale au plus bas. Cet échec est imputable à la gestion calamiteuse des ressources et des hommes, et l’environnement peu propice au triple plan politique, institutionnel et socio-économique.

Au plan politique et institutionnel

Au niveau politique, la tension était à son comble à la veille des élections. De nombreux affrontements ont eu lieu entre les militants et sympathisants des partis politiques qui se sont soldés par des pertes en vie humaine et une dégradation du climat de confiance entre gouvernants et gouvernés.

Le déficit chronique de démocratie enregistré au cours des 50 dernières années a annihilé l’initiative individuelle des guinéens au profit de la démagogie et de l’attentisme. La militarisation de l’appareil d’Etat (sous préfets, préfets, gouverneurs de régions) a contribué à accentuer la déchirure entre l’armée et les populations à la base depuis l’arrivée de la junte au pouvoir en 2008.

C’est pourquoi, face au clientélisme, au népotisme, au favoritisme et à l’incapacité de l’Etat à jouer pleinement son rôle d’arbitre impartial, les populations découragées ont choisi le repli identitaire vers leurs communautés d’origine. Peu à peu les partis politiques ont commencé à se former et à évoluer sur des bases purement ethniques mettant en danger l’unité nationale. Malgré la présence de plus de cent partis politiques sur le terrain, tous les regroupements se sont fait essentiellement sur des bases régionalistes ou ethniques.

Le Conseil National de Transition (CNT) qui fait actuellement office de parlement est un regroupement de personnes connues pour leur intégrité choisies par les autorités de la transition.

L’institution est composée de citoyens recrutés à travers le pays et la diaspora pour faciliter la transition. Mais l’absence de parlementaires élus sur une base démocratique reste un problème à résoudre. Les préparatifs sont en cours pour organiser ces élections dans les meilleurs délais.

Les élections locales et communales transparentes n’ont pas été faites depuis plusieurs décennies.

L’incompétence notoire de la majorité des présidents de Commune était un frein au développement des localités. Ils ont été remplacés récemment par des personnes nommées par le nouveau gouvernement.

Des élections transparentes et crédibles au niveau local sont programmées début 2012. Elles sont indispensables pour assoir une culture démocratique et un Etat de droit.

Après un demi-siècle de dictature, d’instabilité et de marasme économique, les guinéens ont élu en novembre 2010 un Président au suffrage universel libre et démocratique. L’investiture a eu lieu le 22 décembre 2010. Elle a été suivie par la formation d’un nouveau gouvernement. Pour les nouvelles autorités, il est impératif de recoudre le tissu social, de taire les rivalités et faire la paix entre les fils du pays pour qu’ils travaillent la main dans la main pour la construction d’une nation moderne, solidaire et apaisée.

La réconciliation entre toutes les composantes de la société, la justice et l’équité sont la préoccupation majeure du gouvernement, car la paix sociale et l’harmonie entre les communautés sont essentielles à la mise en place d’un cadre de développement économique et social viable pour les décennies à venir.

Pour que le changement et le développement économique et social soient une réalité, il y a d’autres préalables à réunir. L’administration publique doit s’atteler à l’instauration d’un Etat de droit, au respect des principes de bonne gouvernance, et au respect des droits humains. Il est aussi essentiel d’organiser des élections législatives, communales et locales crédibles, transparentes et inclusives, de garantir l’implication et la participation effective de toutes les composantes de la nation dans un cadre démocratique ouvert à tous. C’est à ce prix fort que la paix sociale, l’harmonie et la concorde nationale reviendront et que le développement se fera. Lors de son allocution à la nation le 2 Octobre 2011, évoquant la question des élections législatives en vue, Monsieur le Président de la République a réaffirmé son engagement en ces termes :

« Aucun obstacle n’est insurmontable, aucune divergence ne peut résister devant notre attachement commun à la liberté et au respect des lois. Je souhaite, en tant que garant du respect de la Constitution, que tous les partis politiques participent à cette élection et que tous les électeurs aient la possibilité de voter. La transparence et la crédibilité de cette élection est un gage supplémentaire pour notre pays tant sur le plan intérieur qu’extérieur ».

Au plan économique et social

Sur le plan économique et social, la croissance s’est ralentie, l’inflation s’est accrue à des niveaux sans précédent, la pauvreté s’est aggravée, les conditions de vie dégradées et les dépenses publiques dans les secteurs sociaux réduites.

En outre, la mal gouvernance s’est installée avec son train d’improvisation, de corruption, de mauvaise gestion, d’abus de biens sociaux et de déficits alarmants. Les finances publiques étaient mises à rude épreuve. En effet, l’accroissement des dépenses militaires et l’augmentation de la masse salariale des fonctionnaires se sont soldés par un accroissement exorbitant des dépenses publiques. Les recettes fiscales ayant stagné du fait de la contraction des activités économiques et d’une gestion inappropriée des deniers publics, le déficit budgétaire s’est creusé d’une année à l’autre. Les contrats pluriannuels passés par la junte militaire entre 2009 et 2010 totalisent 2,2 milliards de dollar américain, soit 50%

du PIB au mépris de toutes les procédures de passation des marchés publics. Le déficit budgétaire était essentiellement financé par des avances de la Banque Centrale et par une accumulation d’arriérés de paiement de la dette.

A ces difficultés se sont rajoutées les contraintes dictées par un environnement économique et financier international marqué par les effets encore présents de la crise de 2008, le renchérissement des prix mondiaux des produits alimentaires et du carburant, les récentes crises financières en Europe et

Amérique du Nord, l’endettement faramineux et la récession économique qui menacent les pays occidentaux.

L’insuffisance des politiques économiques et sociales de la première République s’est traduite par le délabrement de l’économie au milieu des années 80. En dépit des nombreuses réformes mises en œuvre et des acquis incontestables enregistrés à partir de 1985, début de la seconde République, les mutations annoncées et le développement économique et social qui devaient les accompagner n’étaient pas au rendez-vous en fin 2008 à l’arrivée de la junte militaire du CNDD au pouvoir.

La Guinée avait inexorablement glissé dans la catégorie des « Etats fragiles », en raison de la déliquescence des institutions qui avaient été vidées de leur substance, l’affaiblissement de l’autorité de l’Etat, et la détérioration des infrastructures de base et des conditions de vie des populations. Autant de facteurs qui ont favorisé l’émergence sur la scène politique des syndicats et de l’armée.

Le pays qui avait pourtant bien démarré son processus de développement par des taux de croissance moyen de 4% avec des stratégies emblématiques tels que le Programme National de Développement Humain (PNDH), la Guinée vision 2010 et la Stratégie de Réduction de la Pauvreté au début des années 2000, est tombé progressivement dans un marasme économique doublé d’une profonde crise sociale et politique entre 2001 et 2010.

L’irruption de la junte militaire sur la scène politique a contribué en deux années à dérégler tous les paramètres économiques et sociaux du pays, accentuer les déséquilibres macroéconomiques et provoquer l’isolement du pays par rapport au reste du monde.

La Guinée sous sanctions internationales entre 2008 et 2010 pour raison de coup d’état a doublement subi le choc lié au manque de ressources extérieures. Isolée, la junte militaire au pouvoir, ne recevant plus de ressources de l’étranger et confrontée à des pressions de toute part va suspendre les versements au titre de la dette extérieure et multiplier la masse monétaire pour faire financer les dépenses publiques.

Ces mesures inflationnistes entraineront la réduction du pouvoir d’achat des ménages, la dépréciation de la monnaie nationale face aux devises étrangères et l’amenuisement des réserves de change.

L’activité économique s’est comprimée et la croissance a chuté à des niveaux rarement atteints auparavant.

La dégradation des conditions de vie des populations a atteint un niveau insupportable et entrainé une forte crispation du climat social. L’ampleur de la dégradation de la situation sociale est illustrée par l’Indice de Développement Humain (IDH) estimé à 0,345 en 2010.

La Guinée est de ce fait classée 156ème sur 182 pays. De surcroît, la pauvreté s’est largement aggravée depuis 2002 dans toutes les zones géographiques du pays avec ses implications négatives sur la consommation, la nutrition, l’accès aux services sociaux de base et la cohésion sociale. Si les tendances persistent et sans un effort gigantesque de la part du gouvernement, des partenaires au développement et du secteur privé, la Guinée ne réussira pas son pari de réduire l’extrême pauvreté et la faim à l’échéance de 2015.

La redoutable mission des autorités est maintenant de parachever la transition grâce à l’organisation d’élections législatives et de proposer aux guinéens, un projet de société crédible, tenant compte des réalités socio–économiques du moment et des aspirations profondes des différentes couches de la population. Il est aussi essentiel de faire baisser les tensions intercommunautaires et de recoudre le tissu social à travers une équitable répartition des avantages et des richesses nationales du pays entre

les communautés sans exclusive, de lutter contre la pauvreté en facilitant l’accès des populations aux services sociaux de base notamment à l’eau courante, à l’électricité, à l’éducation, à la santé et à la sécurité alimentaire.

Il est également primordial de promouvoir le développement rural, de développer l’agriculture et les secteurs porteurs de croissance, d’améliorer les infrastructures et de renforcer le secteur privé. Enfin, il faut sécuriser les populations en restructurant les forces de défense et de sécurité en réduisant leurs effectifs et en les cantonnant dans les casernes afin qu’elles ne soient plus une menace pour les populations et la démocratie, encore moins une source d’inquiétude pour les investisseurs étrangers.