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d Construction et entretien des canalisations d'eau et des fontaines

9 Administration et fonctionnement

10.1. d Construction et entretien des canalisations d'eau et des fontaines

Les dépenses de construction et d'entretien des canalisations d'eau et des fontaines133 sont

traitées par une rubrique comptable récurrente attestée pendant tout le XVe siècle, sauf entre 1417 et juin 1421. Lors de travaux extraordinaires, des chapitres occasionnels complètent ces informations. L'intitulé de la rubrique récurrente est "mission por les aygues" ou simplement "les aigues". Dès 1477, dans le titre apparaît le mot bornel (fontaine), qui annonce la présence de frais d'entretien des fontaines de la ville: "Les aigues et bornels". Quelquesfois, les intitulés explicitent également les travaux accomplis.

Les eaux étaient amenées (mener, conduyre) à travers la ville par des canalisations en bois à ciel ouvert et ce réseau nécessitait des travaux d'entretien continus (maintenir). Un charpentier s'occupait de la grande partie des besognes, parfois aidé par un autre ouvrier spécialisé et un ou deux manœuvres. Les salaires étaient versés à échéance hebdomadaire. En 1371, les frères Jean et Claus, charpentiers de Bienne, furent engagés pour 10 ans pour la construction et l'entretien du réseau d'eau des fontaines de la ville. Ils devaient fabriquer et installer 120 tuyaux en bois d'une longueur de 7 pieds, s'occuper de leur entretien et les nettoyer deux fois par an, "ou sallir de l'yver et a l'entreir de l'iver". Ils étaient payés 2 sous 6 deniers par journée de travail et recevaient un salaire annuel de 20 florins de Florence par personne, plus 30 sous pour des vêtements convenables à leur travail134.

Les registres comptables fribourgeois attestent la présence d'au moins une quinzaine de fontaines135, d'un puits et de deux étangs136. Les fontaines, alimentées par un réseau de

canalisation en bois de chêne, étaient composées d'une chèvre ou d'un robinet (pollet) et d'un bassin en bois ou en pierre (nock). Les eaux des étangs, situés en amont de la ville, étaient amenées dans toutes les rues de la ville par des canalisations ouvertes. Elles étaient employées pour éteindre les éventuels incendies et, à échéance régulière, pour nettoyer la chaussée des rues avec l'ouverture des bondes des bassins et le déversement des eaux jusqu'à la Sarine.

Pour l'entretien de son réseau d'eau, la ville dépensait en moyenne 107 livres par semestre, soit 3% des dépenses totales, avec un pic maximal de 31% au deuxième semestre 1431 (plus de 1'625 livres). Les frais les plus importants eurent tous lieu pendant la première moitié du siècle, en particulier entre 1428 et 1432, lorsque l'on dépensa en moyenne 700 livres par semestre. Ces

133 Cf. Otmar BÜCHI, "Die Entwicklung der Trinkwasserversorgung der Stadt Freiburg", dans Bulletin de la Société

fribourgeoise des sciences naturelles, 44 (1954), p. 216-224; STRUB, Les monuments, vol. 1, p. 57-58 (étangs), p. 211-244

(fontaines); Marion GARTENMEISTER, "Brunnen im Stadtbild. Ikonographie und Repräsentationsformen in Freiburg

des 16. Jahrhunderts", dans Stadtgründung und Stadtplanung, p. 115-148.

134 AEF, Affaires de la ville, A 77.

135 La chronique fribourgeoise de la fin du XVIIe siècle énumère 23 fontaines publiques – trois à l'Auge, trois aux

Deux Places, quatre entre le pont de Saint-Jean et la Grande-Fontaine, trois entre l'abbaye des Boulangers et la place Notre-Dame, quatre entre la fontaine de Saint-Georges et Jaquemart, trois aux Places, trois entre le Tilleul et la porte de Morat – et plusieurs fontaines appartenant aux monastères et aux maisons particulières (Chronique fribourgeoise du dix-septième siècle, p. 105-107).

136 Le puits était vraisemblablement situé là où s'érige aujourd'hui la fontaine de la Samaritaine. La Chronique

fribourgeoise du dix-septième siècle (p. 95) disait encore: "fons ad puteum dictus". Berchtold situait le grand puits à

l'emplacement de la fontaine du Plätzli (BERCHTOLD, Histoire du Canton de Fribourg, vol. 1, p. 225), alors que Strub

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113 coûts furent principalement occasionnés par des travaux au Grand Etang situé sur la route de Payerne sur un terrain appartenant à l'hôpital. Un autre grand ouvrage, entrepris entre 1425 et 1434, fut la construction de la nouvelle fontaine en pierre jaune de Neuchâtel à la place du marché au bétail, au Bourg137.

Suite aux grands frais engendrés par la construction de la fontaine du marché au bétail et d'autres bassins, les conseils de la ville intervinrent afin de garantir leur bon usage. Une ordonnance, datée du 21 mars 1435 et confirmée en 1458, interdit aux bouchers de laisser de la viande immergée dans les bassins et établit que l'eau devait être gardée propre, afin de permettre l'abreuvage des chevaux. Les bannerets furent chargés de choisir un ou deux hommes secrets pour chaque fontaine, afin de surveiller l'application de ces prescriptions138.

Puits et fontaines étaient inspectés par des hommes engagés par les autorités municipales, qui veillaient à ce que personne ne les endommage: il s'agissait de sautiers, de guetteurs ou même de véritables maîtres des eaux, correspondant quelquefois aux charpentiers chargés de l'entretien des canalisations139.

Dès 1433, le portier de la porte des Etangs était chargé d'assurer le bon écoulement des eaux en cas de fortes pluies, service pour lequel fut fixée une rémunération annuelle de 20 sous140. En

1439, le portier Johan Malliollet reçut 40 sous pour la même période de travail:

Item a Malliollet porteir sus la porta deis Estan pour son solaire de cy an finist a ceste Sain Johan pour cen que il gouverne l'aigue deis Estan – 40 s.141

Le droit de puiser l'eau des fontaines pouvait être accensé par la ville à des particuliers, ce qui fut fait à plusieurs reprises142. Un autre droit d'exploitation du réseau hydrique fribourgeois qui

leur fut accensé fut celui de la pêche dans les étangs: le 22 février 1445, la ville, en manque d'argent, décida d'accorder ce droit au plus offrant143. Les recueils de lois nous révèlent que l'eau

des étangs ne pouvait être utilisée sans le consentement des autorités municipales, et que la pêche, tout comme le détournement des ruisseaux d'alimentation, étaient normalement interdits144.

137 Cf. RUDELLA, 213 et AEF, Législation et variétés, 5b, nr. 745 (ordonnance du 24 septembre 1433). Maître

Hans Sifrid fut chargé de recouvrir de plomb le bassin de la fontaine: "[...] messeigniours hont ordonnaz de forrar de

plon le bornel dou marchié deis bestes et que lour hont tramis querre maistre Hans Sifrid pour faire lodit ovrage".

138 PCL 417. 139 PCL 641. 140 PCL 411. 141 CT 73 (1439/I), p. 41. 142 PCL 84 (1378), 85 (1379), 352h (1428), 390 (1429). 143 PCL 530bis.

144 PCL 202 (1411); 352b (1427). Le portier de la porte des Etangs était chargé de veiller à l'application de ces

DAMIANO ROBBIANI

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Les frais pour la construction et d'entretien des canalisations d'eau et des fontaines sont plus importants pendant la première moitié du siècle, quand la ville peut y consacrer plus d’argent. Entre 1428 et 1432 on travaille au Grand Etang, situé sur la route de Payerne, et on construit la nouvelle fontaine à la place du marché au bétail, au Bourg.