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comporte-ment rationnel des offrants dans des environnecomporte-ments antagonistes.

Un marché142 est parfaitement concurrentiel lorsque les prix sont des données qui s'imposent à chaque opérateur économique, en raison du fait que personne n'a une influence suffisante pour en altérer le niveau: toute modification de sa production par une entreprise n'aura qu'un effet imper-ceptible sur la production totale du marché; or, c'est cette production totale qui détermine le prix par la loi de l'offre et de la demande143. Le producteur ne peut ainsi qu'adapter les quantités qu'il produit (c'est un price-taker) et l'acheteur les quantités qu'il acquiert au prix du marché144. Outre un nom-bre élevé d'offrants et de demandeurs (atomicité du marché), le modèle de la concurrence parfaite ou atomistique implique un produit parfaitement homogène145, une connaissance parfaite et rapide chez tous les acteurs

éco-139 Samuelson/Nordhaus, p. 27 et 267-268; Heertje e. a., p. 205; Gabszewicz, p. 4.

140 Schmidhauser, Protection des consommateurs, p. 8: «Une concurrence efficace est[ ... ] l'assurance que l'intérêt personnel ne deviendra pas primordial. Elle instaure un équili-bre économique qui contribue haimonieusement au bien-être général». Cf. ég. Kliege, p. 110-111.

141 Samuelson/Nordhaus, p. 264; Salin, p. 23-25.

142 Un marché est le lieu où se confrontent les offres et les demandes d'un même bien.

143 Varian, p. 302: « Bien que le prix du marché soit indépendant de l'action de chaque agent individuel sur un marché concurrentiel, ce sont les actions de l'ensemble des agents qui déterminent le prix du marché». La courbe de demande à la firme est horizon-tale: le prix de vente est invariable quelles que soient les décisions prises par un produc-teur particulier.

144 Gabszewicz, p. 10-12; Salin, p. 1 O; Heertje e.a., p. 172.

l45 Par «produit», il faut entendre «un ensemble de services consommés globalement par les acheteurs» (Gabszewicz, p. 23): il faut décrire le produit à l'aide de toutes ses carac-téristiques ou attributs .

Un produit est homogène lorsqu'il est offert à la vente dans une forme identique par tous les concurrents. Les produits homogènes sont totalement interchangeables. «Aussi petit soit le différentiel de prix entre ces produits [homogènes], le choix des consomma-teurs se po1te exclusivement sur le produit qui est vendu au prix le plus faible». En revanche, si les produits ne sont pas des substituts parfaits, rien n'empêche, si les prix sont différents, que certains consommateurs persistent à acheter le produit le plus cher (Gabszewicz, p. 20).

nomiques de toutes les données pertinentes du marché (transparence par-faite du marché) et l'absence d'obstacles à l'entrée et à la sortie du marché (parfaite mobilité)l46.

En concurrence parfaite, les entreprises pénètrent sur le marché tant que les possibilités de profit ne sont pas épuisées 147 . A long terme, le prix d'équilibre équivaut au coût marginal148 : la recherche du profit finit par tuer le profit 149. Il ne peut se former, à un moment donné, qu'un prix unique: un vendeur qui exigerait un prix plus élevé ne vendrait pas ses produits; de plus, aucun vendeur n'a intérêt à vendre à un prix inférieur au prix d'équili-bre 150. Ce prix satisfait à la fois les offrants et les demandeurs compte tenu de l'environnement dans lequel ils se trouvent.

L'intérêt de la concurrence parfaite est d'assurer que les ressources soient employées de la façon la plus efficace grâce à la coïncidence du prix avec le

146 Gabszewicz, p. 3; Heertje e.a., p. 185-186; Salin, p. 9-10.

147 Gabszewicz, p. 13.

148 Le coût marginal est le coût de production d'une unité supplémentaire. Le producteur qui agit rationnellement et conformément à un désir de maximisation de ses profits, étendra sa production aussi longtemps que cela lui est profitable; il produira une unité de plus tant que le coût de cette unité est inférieur au profit qu'il en retire, à savoir jusqu'au point où le coût marginal coïncide avec la recette marginale.

Dans le cas d'une entreprise dans un marché concurrentiel, le prix égale la recette mar-ginale (!'accroissement net de la recette totale - à savoir le prix multiplié par la quantité vendue - provenant de la vente d'une unité de production supplémentaire), car la vente d'une unité supplémentaire n'engendre pas de perte sur le revenu des autres unités ven-dues, en d'autres te1mes, ne déprécie pas le prix. Le prix coïncide donc avec le revenu obtenu par la vente d'une unité supplémentaire. Une réduction de sa production n'affec-tant pas le prix du marché, le producteur n'a aucune raison de limiter sa production. Cf.

notamment Samuelson/Nordhaus, p. 161; Varian, p. 393-394; Hee1ije e.a., p. 172-173.

149 On parle du paradoxe de la théorie de la concurrence atomistique: l'offre des entreprises nouvelles vient s'ajouter à celle des anciennes, augmentant l'offre totale et faisant chu-ter le prix d'équilibre. Toutes les entreprises du secteur verront, par conséquent, leurs profits diminués. Ce scénario se répétera jusqu'à ce que, en raison de l'existence de coûts fixes, le prix de vente ne soit plus assez élevé pour garantir la rentabilité de la dernière entreprise installée (Gabszewicz, p. 13-14; Salin, p. 37).

La rémunération «normale» des propriétaires des entreprises est incorporée dans le coût moyen de production.

150 Heertje e.a., p. 186; Varian, p. 391. La coexistence de prix différents est impossible. Les élasticités de l'offre et de la demande sont infinies (l'élasticité étant la mesure de la sensibilité d'une demande ou d'une offre à une variation des prix): si un des opérateurs économiques essaie de vendre son produit à un prix supérieur à celui du marché, les consommateurs l'abandonneront et se tourneront vers ses concurrents. «La loi du prix unique» implique que les individus sont capables de comparer les prix. Cf. Salin, p. 6.

coût marginal, à l'absence de recettes supérieures aux coûts et à l'élimina-tion des firmes moins efficaces l 51.

Le modèle de la concurrence parfaite est une situation idéale qui n'existe que très rarement, car l'adéquation des hypothèses de départ avec la réalité fait défaut. En effet, d'une part, les produits apparaissent homogènes ou différenciés selon la définition adoptée et, d'autre part, la prémisse de l 'in-formation parfaite est in-éaliste 152. Néanmoins, «le modèle d'équilibre de la concurrence parfaite n'a pas cessé d'influencer la théorie et la politique de la concurrence et ce, même à une époque où il était admis qu'il ne pouvait servir de principe directeur» 153.

De surcroît, l'offre d'un produit ou d'un service se trouve fréquemment entre les mains d'un nombre réduit d'entreprises, car de nombreux obsta-cles naturels ou artificiels entravent l'entrée sur le marché154. Dans un cas extrême, les demandeurs peuvent n'avoir affaire qu'à un seul offrant qui détient le contrôle de la totalité du marché et qui est en mesure d'agir sur le prix de son produit: il n'existe aucun bien ou service de substitution vers lequel les acheteurs pourraient se tourner (modèle du monopole parfait) 155 . En recherchant à maximiser son profit156, le monopoleur, grâce à son contrôle du marché, n'accroît pas sa production jusqu'au point d'équili-brel57. Comme le monopoleur est responsable de toute la production et comme

15l Gabszewicz, p. 42-43. La fonction de la concurrence parfaite est également d'assurer la décentralisation des décisions, en permettant aux opérateurs de satisfaire à leurs besoins conformément à leurs jugements de valeur, et de garantir la dispersion du pouvoir, donc l'anonymat du partage des richesses («deux objectifs clés de l'idéologie libérale», Gabszewicz, p. 42); cf. également Kliege, p. 108.

152 Salin, p. 47-49. Cf. infra p. 45 et 46.

153 Conseil fédéral, Message LCart, p. 507.

154 Sont des barrières à l'entrée sur un marché notamment les dispositions légales et régle-mentaires, les importantes économies d'échelle, l'avance technologique d'une entre-prise, la forte individualisation d'un produit, le degré poussé d'intégration verticale d'une entreprise. Cf. Samuelson/Nordhaus, p. 154-155; Van Bael/Bellis, § 248ss.

155 Heertje e.a., p. 212; Samuelson/Nordhaus, p. 150.

Pour un marché où il n'y a qu'un seul acheteur, on parle de monopsone.

156 La recherche de maximisation du profit n'est pas l'apanage du monopoleur; cependant, comme nous l'avons vu, les producteurs en concurrence atomistique, dans leur quête commune des occasions de gain, finissent par tuer le profit.

157 La quantité qui permet d'égaliser la recette marginale et le coût marginal est celle qui maximise le profit total. Au-delà, l'unité supplémentaire produite coûte plus cher qu'elle ne rapporte (la recette marginale est inférieure au coût marginal). Le profit diminue d'autant, mais cela ne signifie pas que le profit devient nul (la recette moyenne étant toujours supérieure au coût moyen). Il ne le devient qu'au point où la recette moyenne équivaut au coût moyen. Entre ces deux stades, des possibilités de profits ne sont pas exploitées par le monopoleur. Cf. Samuelson/Nordhaus, p. 158-159; Salin, p. 32-33;

Varian, p. 430ss.

la production totale détermine le prix, il peut augmenter le prix en réduisant sa production (c'est un price-malœr). Le reproche que font les économistes au monopoleur n'a pas trait aux profits monopolistiques, mais à la réduction artificielle de la production (raréfaction des biens sur les marchés), soit à l'affectation inefficace des ressources l 58.

Néanmoins, le monopoleurn 'est pas totalement libre: il est conditionné par la fonction de demande qui exprime les réactions des consommateurs à toute modification de prix 159 . En effet, la demande étant rarement infini-ment inélastique, il en découle qu'à un prix trop élevé le consommateur cessera d'acheter et que le monopoleur perdra une partie de ses clients.

De plus, la théorie de monopole n'est valide que quand la liberté d'en-trée sur le marché n'existe pas, car la possibilité pour les concurrents poten-tiels d'accéder au marché a pour effet de réduire le profit monopolistique et d'entraîner à la limite la solution concurrentielle (théorie des contestable markets): en effet, lorsqu'il existe une occasion de profit, il se trouve nor-malement des sujets économiques actifs pour s'en apercevoir et pour l'ex-ploiter160. En d'autres termes, le fait qu'un monopoleur soit seul ne signifie pas qu'il possède un pouvoir absolu. Le monopole parfait est rare 161 .

Dans le cas du monopoleur, la recette marginale correspond à la différence entre l'aug-mentation de recettes correspondant à ce que rapporte la vente d'une unité supplémen-taire et la diminution de recettes provenant du fait que les unités précédentes sont ven-dues moins cher, diminution due au fait que pour vendre des unités supplémentaires, l'entreprise doit baisser le prix (Samuelson/Nordhaus, p. 158).

158 Les consommateurs bénéficient d'un niveau de satisfaction moindre: le prix est plus élevé (il est supérieur au coût marginal, donc à la recette marginale) et la production plus faible que dans un marché concurrentiel. Les consommateurs dépenseront leur ar-gent pour des produits qu'ils désirent moins; cela aura pour effet de rejeter la demande vers des produits ou services de substitution dont la production est artificiellement sti-mulée, de détourner, par conséquent, les forces productives vers des activités moins prisées et d'empêcher la satisfaction optimale des besoins des consommateurs. L'écono-mie fonctionne en dessous de son potentiel. Cf. notamment Varian, p. 436; Samuelson/

Nordhaus, p. 161-162; Gyselen, p. 600. Une autre critique tient à la vie tranquille du monopoleur, qui n'est pas contraint de réduire les coûts au niveau le plus bas possible, donc pas contraint d'innover. Cf. Whish, p. 3.

159 Heertje e.a., p. 212; Varian, p. 429: «Pour un prix donné, le monopole ne peut vendre que ce que le marché accepte. S'il choisit un prix élevé, il ne peut vendre qu'une petite quantité. Le comportement de demande des consommateurs constitue une contrainte».

160 Salin, p. 64ss; Heertje, p. 215; Whish, p. 11-12.

Le profit du monopoleur est temporaire dans l'hypothèse de l'entrée libre. L'intérêt des concurrents potentiels à accéder au marché est à la mesure des possibilités de gain, du niveau des obstacles ou des risques de perdre un investissement en le quittant (sunk costs) (Conseil fédéral, Message LCart, p. 547).

161 Il est souvent la conséquence d'une norme étatique ou le résultat d'économies d'échelle.

Cf. notamment Samuelson/Nordhaus, p. 150; Korah, An introduct01y guide, p. 12-13.

Il convient donc de souligner que le monopole ne doit pas nécessaire-ment être condamné: il peut, en effet, être la conséquence inévitable ou même le moteur d'économies d'échelle ou de progrès technologiques 162. C'est la manière dont le monopole est acquis, conservé ou consolidé et utilisé qui est déterminante pour juger de son admissibilité 163.