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Afin d'appréhender toutes les restrictions horizontales de la concurrence, le champ d'application des législations de droit de la concurrence est en géné-ral large. L'art. 81 § 1 CE interdit «tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées» qui faussent le jeu de la concurrence. Outre les contrats de nature contraignante pour les parties, l'art. 4 LCart inclut dans la définition des «accords en ma-tière de concunence» les conventions sans force obligatoire, ainsi que les pratiques concertées d'entreprises. Les décisions et recommandations d'as-sociations économiques ou professionnelles ne sont pas mentionnées dans la loi suisse, mais l'applicabilité de la LCart à de tels actes est communé-ment admise290.

Un tel inventaire des différents types d'ententes horizontales appelle des définitions plus précises et des délimitations. Les notions seront illus-trées par des exemples pris dans la pratique et ayant trait plus particulière-ment aux conditions générales.

1. Accords

«L'accord existe dès lors que les parties s'entendent sur un plan qui limite ou est susceptible de limiter leur liberté commerciale en déterminant les lignes de leur action ou de leur abstention réciproque sur le marché»291. C'est ainsi que les quatre producteurs belges et luxembourgeois de tubes en acier, qui ont convenu de l'imposition à leurs partenaires d'un contrat type, ont conclu un accord au sens de l'art. 81 CE292.

Les gentlemen

s

agreements, Frühstiickskartelle ou de simples engage-ments caractérisés par l'absence de sanction en cas de défaillance, sont éga-lement considérés comme des accords ou conventions. Ce qui importe, c'est

289 Wolter, p 30-31; Schirmers, p. 7. Selon Dreher, Das deutsche Kartellrecht, p. 899-900, au 31 décembre 1994, sur les 320 cartels annoncés 55 cartels portaient sur les condi-tions; le nombre des recommandations se situait autour de 280. Cf. ég. Emmerich, p. 65.

290 Cf. infra p. 79.

291 Commission du 23 .4.86, Polyp1Vpylène, consid. 81. Cf. notamment Waelbroeck/Frignani, 121ss.

292 Commission, Tubes en acier, Bull. CEE 9/10 ch. 14.

la volonté commune des membres de l'entente de se comporter de façon déterminée sur le marché293.

La Commission a, en outre, précisé que les accords entre associations sont assimilés aux accords entre entreprises, car ils déterminent le compor-tement des membres représentés par les associations294. Les associations représentatives de l'offre et de la demande d'un marché forment une entente lorsqu'elles établissent ensemble les conditions générales à utiliser dans les rapports entre leurs membres.

2. Pratiques concertées

La pratique concertée représente une collusion moins formelle. C'est «Une forme de coordination entre entreprises qui, sans avoir été poussée jusqu'à la réalisation d'une convention proprement dite, substitue sciemment une coopération pratique entre elles aux risques de la concurrence»295 . Il y a pratique concertée lorsque, préalablement à tout comportement de leur part sur le marché, les concurrents ont des contacts dont l'objet ou l'effet est soit d'influencer le comportement des concurrents, soit de leur dévoiler un comportement futur296, et donc d'aboutir à des conditions de concurrence qui ne correspondraient pas aux conditions normales du marché297.

Dans l'affaire du Verre plat dans les pays du Bénélux, la Commission a constaté des réunions de coordination ayant pour objet de se mettre d'accord sur les prix et les rabais. L'existence d'une pratique concertée n'était d'ailleurs pas remise en cause. En matière d'assurance, la Commission était d'avis

293 L'accord n'a pas besoin d'être juridiquement obligatoire: cf. p. ex. CJCE du 15.7.70, Chemiefarma, att. 110-114. Pais Antunes, p. 59. Pour le droit suisse, Conseil fédéral, Message LCart, p. 544; Schmidhauser, n° 34 ad art. 4 LCart; Stoffel, Les ententes, p. 1 O;

TercierNenturi, p. 71.

294 CJCE du 15.5.75,Frubo, att. 30-31; Commission du 17.12.81, Navewa-Anseau, consid.

38-39. Cf. Gudin, L'entente, p. 121-122, qui précise que cette appréciation se fonde sur 1 'effet utile du droit de la concurrence, 1' association étant un moyen pour les entreprises de s'entendre entre elles.

295 CJCE du 14.7.72, ICI, att. 64; CJCE du 16.12.75, Suiker Unie, att. 26. En droit suisse, selon le Conseil fédéral,MessageLCart, p. 544, est décisifle fait que l'action collective soit consciente et voulue. Cf. Schmidhauser, n° 46 ad art. 4 LCart; TercierNenturi, p. 71.

296 Cf. Gudin,L'entente, p. 118. C'est la position de la Commission dans les procédures de recours de certains producteurs de polypropylène au TPI: p. ex. TPI du 10.3.92, ICI, pt 244. Pais Antunes, p. 72, relève qu'une attente mutuelle relative à un comportement n'est pas nécessaire. Dernier arrêt en date: TPI, arrêt du 15.3.2000, «ciment», aff. T-25/

95 e.a., non encore publié au recueil, pts 1849ss.

297 CJCE du 14.7.81, Züchner, att. 14. Pour le droit suisse, Stoffel, Les ententes, p. 10;

Schmidhausei; n° 46 ad art. 4 LCart; TercierNenturi, p. 71.

qu'il y avait pratique concertée dans la mesure où les sociétés collaboraient effectivement, en particulier en alignant leurs polices d'assurance directes sur les primes et conditions établies par le Teko298 • La Commission a, en outre, conclu à l'existence d'une pratique concertée sur des marchés for-mellement exclus du champ d'application d'un accord contraignant299.

L'accord et la pratique concertée ne se distinguent que par leur intensité et par les formes dans lesquelles ils se manifestent300. La délimitation entre les différents concepts n'est dès lors pas déterminante301. En patticulier, il n'est pas nécessaire de fixer le point exact auquel on ne peut plus parler d' «accord» ou de «convention», mais plutôt de «pratique concertée». La Commission déclare d'ailleurs souvent que la coopération entre les entre-prises du cas d'espèce constitue un accord «ou tout au moins une pratique concertée»302.

Il importe, par contre, de différencier les comportements collusoires, qui sont interdits, des comportements parallèles rationnels dictés par les conditions du marché, en particulier dans un marché oligopolistique303. Tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome les conditions qu'il entend réserver à sa clientèle. Cette exigence d'autonomie n'empêche pas l'entreprise de s'adapter intelligemment au comportement constaté ou à escompter de ses concun-ents304.

Lorsque toutes les preuves de réunions et toute la correspondance sont détruites, la démonstration de l'existence d'une pratique concertée est pro-blématique. Il est alors tentant d'inférer du comportement parallèle des en-treprises l'existence d'une pratique concertée. Dans l'affaire Züchner, la CJCE a estimé qu'un parallélisme de comportement des banques en matière de commission perçue lors de transferts d'argent par chèque pouvait refléter une coordination entre les banques constitutive d'une pratique concertée. Il

298 Commission du 20.12.89, Teko, consid. 16.

299 Commission, Entente à l'exportation du linoléum, 5e rapport sur la politique de concur-rence (1975) ch. 35.

300 CJCE du 8.7.99, Anie, att. 131.

301 C'est la position de la Commission, dans sa décisionPolypropylène du 23.4.86, consid.

87, qu'elle étaye dans le cadre du recours au TPI: cf., p. ex., TPI du 10.3.92, ICI, pts 242-243. Cf. ég. Pais Antunes, p. 76. Pour le droit suisse, cf. Tercier/Venturi, p. 71.

302 Cf. p.ex. Commission, Cobelpa, consid. 24. Le procédé a été admis par la CJCE (CJCE du 8.7.99, Anie, att. 132).

303 Commission du 23.4.86, Polypropylène, consid. 87. Whish, p. 197ss; Gudin, L'entente, p. 125 et 130; Franzosi, p. 385ss. Pour le droit suisse, cf. Conseil fédéral, Message LCart, p. 544; Zach, n° 270ss.

3o4 CJCE du 16.12.75, Suiker Unie, att. 174; CJCE du 14.7.72, ICI, att. 118; CJCE du 14.7.81, Ziïehner, att. 14.

y a une forte présomption de comportemente concerté entre entreprises lors-que celles-ci insèrent systématilors-quement dans leurs contrats des clauses qui dérogent notablement au droit dispositif ou à la réglementation découlant de la nature du contrat3os.

Néanmoins, un comportement parallèle ne constitue pas une preuve d'une pratique concertée si d'autres explications sont plausibles306 . Les en-treprises peuvent se comporter de façon identique, non en raison d'un désir de coordonner leur comportement, mais parce que leur appréciation indivi-duelle des conditions du marché leur dicte de suivre la stratégie du concur-rent afin de ne pas encourir la perte de clients307 . En particulier, l'analyse économique du marché peut révéler qu'un comportement parallèle est inno-cent quand le marché est oligopolistique, les produits sont homogènes et les prix transparents308. C'est pourquoi, dans l'affaire Zûchner, la CJCE a indi-qué à la juridiction nationale saisie du fond du litige qu'elle devait détermi-ner, outre d'éventuels prises de contact ou échanges d'informations entre banques, si, eu égard aux conditions du marché, les taux uniformément ap-pliqués étaient différents de ceux qui auraient résulté du libre jeu de la concurrence309. Un tel raisonnement est bien évidemment applicable aux autres conditions de transaction. Il appartient aux autorités de la concurrence de rechercher si le parallélisme de comportement peut être rattaché à un concours de volontés310.

La ligne de démarcation entre comportements parallèles autonomes et pratique concertée est difficile à tracer dans les faits. Pour qu'il y ait prati-que concertée, une coopération est sciemment substituée à la concurrence découlant d'actions indépendantes des entreprises. Cette coordination peut résulter de contacts directs ou indirects entre les parties311 .

3o5 Bovet, La nature juridique des syndicats de prêt et les obligations des banques diri-geantes et gérantes: aspects de droit des obligations, de droit bancaire et de droit cartel/aire, Fribourg (Ed. universitaires) 1991, n° 1224-1226.

306 CJCE du 14.7.72, ICI, att. 66; CJCE du 28.3.84, CRAM, att. 16 et 20; CJCE du 31.3.93, Pâtes de bois JI, att. 71.

307 Whish, p. 195; Grynfogel, p. 16.

308 Cf. CJCE du 14. 7. 72, ICI, att. 104ss; CJCE du 31.3.93, Pâtes de bois JI, att. 72, 101 ss.

Pour une analyse plus poussée, cf. Waelbroeck/Frignani, n° 133, selon lesquels le re-mède ne peut être que structurel puisque le parallélisme de compo1tement est causé par la structure du marché.

309 CJCE du 14.7.81, Züchner, att. 21.

310 Dans la pratique suisse, cf. Commission de recours pour les questions de concurrence, décision du 23.9.99, X, DPC 1999/3 p. 503 pt 4.2.

311 Whish, p. 196; Van Bael/Bellis, § 212 p. 34-35; CJCE du 14.7.72, ICI att. 64 et 118;

CJCE du 16.12. 75, Suiker Unie att. 26 et 174.

3. Décisions et recommandations d'associations d'entreprises

L'uniformisation des conditions générales est le plus souvent l'œuvre d'as-sociations économiques ou professionnelles. La nouvelle LCart a fâcheuse-ment omis de spécifier qu'elle concerne aussi les associations d'entreprises, tandis que l'article 81 § 1 CE mentionne expressément qu'il s'applique aux cas où les entreprises coordonnent leurs agissements par l'intermédiaire d'une association d'entreprises.

Sont ainsi des décisions d'association au sens de l'art. 81 § 1 CE les conditions uniformes que l 'Associazione Bancaria Italiana imposait à ses membres lorsque ceux-ci concluaient avec leurs clients des contrats d'ouver-ture de crédit en compte courant et des contrats de cautionnement général destinés à garantir l'ouverture de crédit3 12. Les réglementations du Concordato Incendio relatives aux conditions générales standard des poli-ces d'assurance incendie reposaient sur les décisions de son assemblée gé-nérale et de ses autres organes; elles sont des décisions d'association3 13 .

Dans la branche sanitaire, l'association suisse des grossistes fournissait à ses membres des conditions générales et obligeait ses membres à s'y tenir.

La Commission des cartels a jugé qu'un tel état de fait était soumis à l'an-cienne LCart314. Il en était de même des «règles de concurrence» adoptées par l'association suisse des assureurs de choses qui contenaient notamment des conditions d'assurance uniformes 315. Il ne fait aucun doute que les déci-sions d'association de nature contraignante sont, en droit suisse, des ac-cords obligatoires au sens de l'art. 4 al. 1 LCart. Par définition, il y a une convention entre les membres de l'association qui rend la décision obliga-toire316.

Les recommandations élaborées par une association d'entreprises sont comprises dans le terme «décision» de l'art. 81 § 1 CE. «La recommanda-tion, quel qu'en soit le statutjuridique exact, constitu[e] l'expression fidèle de la volonté de[! 'association] de coordonner le comportement de ses

mem-En droit suisse, Commission des cartels, mem-Entretiens entre exploitants de cartes de crédit, Pub!. CCSPr 1 a/1996 p. 112-113.

312 Avocat général D. Ruiz-Jarabo Colomer, dans CJCE du 21.1.99, Bagnasco, pt 30.

313 Commission du 20.12.89, Concordato Incendia, consid. 15.

314 Commission des caitels, Branche sanitaire (1991 ), p. 103 et 118-119.

315 Commission des cartels de 1988, Marché des assurances choses, p. 97-98, 106.

316 Cf. notamment Schmidhauser, n° 33 ad art. 4 LCart. Tercier/Venturi, p. 71-72, pensent que c'est une question qui devra être tranchée et précisée par les autorités chaigées de l'application de la nouvelle loi.

bres»317 . Il suffit que la recommandation soit conforme aux statuts et qu'elle ait été portée à la connaissance de ses membres suivant les modalités requi-ses318.

En droit suisse, les recommandations sont assimilées à des pratiques concertées si elles traduisent la volonté de l'association d'organiser le comportement de ses membres et si ceux-ci y adhèrent effectivement: il faut donc qu'elles soient suivies de certains effets319.

La recommandation FEDETAB portant sur la fixation des remises maxi-males et des critères à remplir pour pouvoir en bénéficier, ainsi que sur les délais de paiement du prix, était présentée comme un acte unilatéral de l'as-sociation des producteurs et importateurs de tabacs manufacturés, mais était rédigée en vue d'être appliquée par tous ses membres; elle constituait donc une décision d'association au sens de l'art. 81 § 1 CE320.

La Commission des cartels a estimé que les conditions générales édic-tées et recommandées par !'Association suisse des banquiers (ASB) tom-baient sous le coup de l'ancienne LCart321 . L' ASB a objecté que le modèle de conditions générales était une prestation de service permettant aux ban-ques de s'inspirer des dispositions standardisées pour la rédaction de leurs propres conditions et n'empêchant pas une adaptation du modèle dictée par le marché322 • Non seulement l'association a reco1mnandé à ses membres 317 CJCE du 27.1.87, Verband der Sachversic/1erer, att. 32. Waelbroeck/Frignani, n° 127.

Gudin, L'entente, p. 119-120, développe: l'atiicle 81 § 1 CE ne vise que les comporte-ments multilatéraux d'entreprises; dès lors, la décision d'association, acte unilatéral en apparence, ne peut relever de cette disposition que si elle est assimilable à un acte mul-tilatéral de ses membres eux-mêmes. Pour cela, il faut que l'association agisse en tant que mandataire de ses membres et que sa décision soit nécessairement fondée sur la volonté de ces derniers.

318 Commission du 5.12.84, Assurances incendie, consid. 23. Une décision d'association ne devient collective que si les statuts de l'association lui permettent de s'exprimer au nom de ses membres (cf. Gudin, L'entente, p. 119).

319 Schmidhauser, n° 42 ad mi. 4 LCart; Zach, n° 268; Tercier/Venturi, p. 72; Meier-Schatz, Horizontale, p. 812. Conseil fédéral, Message LCart, p. 544; Secrétariat de la Commis-sion de la concurrence, rapport du 12.12.97, Chambre fiduciaire, DPC 1997/4 p. 479;

Commission de la concurrence, décision du 17.8.98, Service- und Reparaturleistungen an ÔI- / Gasbrennem und Kompaktwiirmezentralen, DPC 1998/3 p. 382, pt 3 7;

Commission de la concurrence, Rapport annuel 1999, DPC 1999/4 p. 551, 569-570.

Contra Drolshammer, p. 32, qui reconnaît toutefois que la recommandation est soumise à la LCart.

320 CJCE du 29.10.80, van Landewyck, att. 86 et 102ss.

321 Commission des cartels de 1989, Accords entre banques, p. 178 et 200. Il faut noter à cet égard que, contrairement à la nouvelle loi, l'ancienne LCati assimilait expressément les recommandations aux cartels (art. 2 al. 2 aLCart).

322 Association suisse des banquiers, p. 142-143.

d'adapter leurs conditions générales à la lumière du modèle, mais égale-ment «la recommandation a été très largeégale-ment suivie»323. Il s'ensuit une coordination des comportements concernant les conditions générales, coor-dination voulue par l'association et ses membres. C'est donc à juste titre que la Commission des cartels a admis l'applicabilité de l'ancienne LCart au modèle de conditions générales.

Par entente horizontale, on désigne ainsi toute collaboration, formelle ou informelle, directe ou indirecte, entre plusieurs entreprises concurrentes qui agissent de concert et qui restreignent le jeu de la concurrence (art. 4 LCart et art. 81 § 1 CE). La réduction de la concurrence est le deuxième élément constitutif de la définition et est examinée ci-dessous. En droit communautaire, le champ d'application de l'art. 81 § 1 CE est en outre conditionné à l'affectation du commerce entre Etats membres, mais je n'aborderai pas cet aspect.

B. Restrictions de concurrence

L'applicabilité de la LCart est limitée, conformément à l'art. 2 al. 1 lu en combinaison avec l'art. 4 al. 1, aux ententes qui «visent ou entraînent une restriction de la concurrence». De même, le droit communautaire ne soumet à l'emprise de l'art. 81 CE que les ententes qui «0nt pour objet ou effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence».

Dans la mesure où elles limitent les parties dans leur liberté de prendre certaines décisions commerciales de manière indépendante, la plupart des ententes ont des effets sur la concurrence324. Toutefois, le fait que les enten-tes entrent dans le champ d'application du droit de la concurrence ne permet aucune conclusion quant à leur illicéité et quant aux sanctions. Cela signifie simplement que les autorités ont compétence d'examiner les pratiques.

Evaluer l'intensité de ces effets permet de distinguer entre les restrictions de peu d'importance, qui sont admises sans autre examen, les restrictions notables, qui ne sont admises qu'à ce1taines conditions, et la suppression totale de la concurrence, qui est interdite dans tous les cas.

L'art. 81 § 1 CE interdit les accords même s'il n'est pas établi qu'ils ont été appliqués. La seule existence de règles est de nature à influencer le comportement des signataires en les conduisant à renoncer à certaines

opé-323 Commission des cartels de 1989, Accords entre banques, p. 200.

324 Schmidhauser, n° 22 ad ait. 4 LCart; Drolshammer, p. 32; TercierNenturi, p. 72.

rations contraires à la lettre ou à l'esprit de ces règles325. De même, le carac-tère indicatif des recommandations d'association n'empêche pas l 'applica-tion de l'art. 81 CE lorsque les membres de l'associa'applica-tion ont tendance à se conformer aux recommandations et lorsque le respect de celles-ci a un effet sensible sur la concurrence326. Le simple fait que, dans certains cas, des membres de l'association puissent ne pas suivre les recommandations n 'em-pêche pas les autres de prévoir, avec un degré de certitude raisonnable, la politique générale suivie327.

Dans les affaires Polypropylène, le TPI et la CJCE ont eu l'occasion d'admettre, conf01mément à une interprétation littérale du texte de l'art. 81

§ 1 CE, qu'une pratique concertée peut n'avoir qu'un objet anticoncurrentiel, qu'elle est donc illicite indépendamment de son éventuelle matérialisation sur le marché328. Si la notion même de pratique concertée présuppose, outre une concertation entre entreprises, un comportement sur le marché faisant suite à cette concertation et un lien de cause à effet, elle n'implique pas nécessairement que ce comportement produise l'effet concret de restrein-dre, d'empêcher ou de fausser la concurrence329 . Même s'il n'est pas possi-ble de considérer que la concertation produit nécessairement des effets sur le comportement des entreprises qui y ont participé, il y a lieu de présumer, sous réserve de la preuve du contraire qu'il incombe aux opérateurs concer-nés de rapporter330, que les entreprises participant à la concertation tiennent compte des informations échangées pour déterminer leur comportement sur

325 Commission du 15.7.75, Aluminium brut, consid. II/3 et 4.

326 Van Bael/Bellis, § 211; Whish, p. 194. CJCE du 29.10.80, van Landewyek, att. 88;

CJCE du 27 .1.87, Verband der Saehversieherer, att. 29ss.

327 CJCE du 17.10.72, VCH, att. 21; TPI du 22.10.97, SCK et FNK, pt 164; Commission du 16.9.99, TACA, consid. 448.

328 CJCE du 8.7.99, Anie att. 122-123; CJCE du 8.7.99, Monteeatini, att. 123-124. Cf.

également Pais Antunes, p. 62ss; la Commission, devant le TPI (10.3.92), ICI pts 245-247; TPI du 17.12.91,Hereules, att. 259 et 261. Les partisans de cette thèse soutiennent que le comportement parallèle n'est qu'un indice de fait d'une pratique concertée et non pas un élément constitutif. Contra, Waelbroeck/Frignani, n° 137, qui estiment que la mise en œuvre de la concertation est nécessaire. Schmidhauser, n° 46 ad art. 4 LCart, semble être du même avis: pour lui, il y a pratique concertée tacite lorsqu'une entreprise adopte un comportement dans l'expectative que les autres le suivent et lorsque les autres répondent effectivement à cette attente.

329 CJCE du 8. 7.99, Anie, att. 118 et 124; CJCE du 8.7.99, Monteeatini, att. 125.

330 La preuve que la concertation n'a influencé en aucune manière leur propre comporte-ment sur le marché parce qu'elles se sont dégagées «des liens et connaissances qui résultent de la concertation», sera pa1ticulièrement difficile à établir (Idot, Notion d'en-tente, p. 5).

ce marché33 l. La concertation entre entreprises n'est pas en soi condamnée:

l'idée est que les entreprises ont agi ensuite sur la base de cette

l'idée est que les entreprises ont agi ensuite sur la base de cette