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4.5 Les activités mathématiques proposées dans la CoP

4.5.4 Conclusion sur les activités proposées dans la CoP

Les sections précédentes nous ont permis de présenter les problèmes proposés dans la CoP. Supportés par des arguments de nature didactique et ergonomique, les choix que nous avons faits visent deux objectifs principaux. D’une part, il s’agit de favoriser l’adoption de ces problèmes par les enseignants. Sur ce point, nous avons montré comment nous avons assuré une assez grande va- riété parmi des problèmes que nous avons généralement extraits des travaux d’ERMEL, ce qui nous permettait de bénéficier en partie de leurs expérimentations. Il faut souligner que, contrairement un numéro spécial Grand N ✭✭ Points de départ ✮✮ et à ERMEL CE2, nous avons toujours fourni les solutions et des preuves des problèmes, celles-ci étant plus ou moins accessibles aux enseignants

mais toujours en prenant en compte le contexte de CoP. D’autre part, il s’agit aussi de favoriser l’activité d’une CoP émergente d’enseignants et donc, ici, de favoriser leur participation en lien avec les ressources proposées. Les présentations des problèmes sur le site Web sont concises, les indications données aux enseignants sont formulées en termes de propositions, plusieurs scénarios sont possibles mais ne sont pas toujours présentés, aucune consigne à destination des élèves n’est précisée, les productions possibles des élèves ne sont quasiment pas évoquées. Les différences avec la présentation qui en est faite dans les ouvrages ERMEL sont donc nombreuses. En particulier, les différents scénarios sont peu évoqués alors qu’à l’inverse ils forment la trame de la présentation d’une activité dans les ouvrages ERMEL. Ces informations sont volontairement manquantes afin de déclencher des échanges dès l’émergence de la CoP, c’est à dire dès le début de l’expérimentation.

Le site Web a subi quelques modifications pendant l’expérimentation. La plus important concer- nant les problèmes est l’ajout d’une rubrique Commentaires qui propose notamment des éléments de recherche et de débats possibles pour chaque problème. Suite à nos observations lors de l’an- née I, nous avions noté que les enseignants avaient parfois du mal à les repérer et nous avions fait la proposition d’ajouter quelques informations de nature à les aider dans la gestion de leurs séances. Les enseignants avaient accepté sous réserve que les ajouts respectent la logique ✭✭ minimaliste ✮✮ du site Web. Ces éléments consistent donc à résumer les potentiels de recherche et de débat des problèmes mais sans pour autant proposer un scénario obligatoire pour l’enseignant. Autrement, il s’agit plus d’étayer le travail de préparation des séances et de gestion en cours de séance que de décrire la façon dont on doit procéder. Lors de l’expérimentation, les enseignants ne demanderont pas d’aller plus loin sur ces aspects.

4.6 Conclusion

Ce chapitre était consacré aux activités de recherche et de preuve entre pairs (RPP). Après avoir montré l’intérêt de cette expression et de l’expression activité orienté notion ou technique (ONT), nous avons aussi défini les potentiels de recherche, de débat, de résistance et de résistance dynamique, didactique de ces activités qui nous servent à mieux les caractériser et les analyser. En complément du cadrage théorique présenté au chapitre 2, ces concepts nous ont permis de mener des analyses didactique et ergonomique a priori des expérimentations déjà menées autour des activités RPP, des instructions officielles et des ressources destinées aux enseignants du cycle 3 de l’école primaire. Un premier résultat de ce chapitre est donc d’avoir montré la pertinence des concepts mobilisés – activité RPP et ONT ; potentiels d’une activité RPP ; utilité, utilisabilité, adaptabilité et acceptabilité d’une ressource – et leur complémentarité avec les outils didactiques classiques pour analyser des activités RPP et des ressources proposant de telles activités.

De l’analyse des expérimentations et de la littérature professionnelle, nous retenons que la place des activités RPP à l’école est légitime et qu’elle correspond à une transposition pertinente de l’acti- vité des mathématiciens dans la sphère scolaire. Pourtant, nous avons plusieurs fois relevé le manque de référence à des études scientifiques sur l’activité des mathématiciens et souligné qu’il serait pro- bablement intéressant de mieux distinguer l’activité idéalisée des mathématiciens de leur activité réelle, par exemple en ce qui concerne leur connaissance de l’usage formel des quantificateurs, leur façon d’apprendre les mathématiques et la validité des résultats ou des démonstrations publiées. N’ayant pas mené nous-mêmes une telle étude, nous avons trouvé que, si elle était relativement rai- sonnable dans ses ambitions, l’expérimentation des ✭✭ problèmes ouverts ✮✮ était celle qui s’attachait

4. ACTIVITÉS DE RECHERCHE ET DE PREUVE ENTRE PAIRS

le plus à montrer sa légitimité par rapport à l’activité des mathématiciens et celle qui cherchait le plus à s’intégrer dans les pratiques existantes, ce qui est au coeur de notre projet. En particulier, nous retenons que des problèmes relativement simples à mettre en oeuvre suffisent probablement pour favoriser la pratique d’activités RPP, voire permettent aussi d’avoir des effets de bords pertinents sur la pratique des enseignants mais aussi sur l’activité des élèves. C’est le deuxième résultat de ce chapitre.

Cependant, nous avons aussi trouvé que, malgré leur variété et même si les indices relevés par les expérimentateurs sont encourageants, aucune étude, parmi celles étudiées, ne s’est attachée à montrer rigoureusement sa pertinence en matière d’apprentissage par les élèves ou par les en- seignants. Concernant les élèves, nous ne mènerons pas une telle étude mais nous reprendrons à notre compte l’hypothèse de (Arsac et Mante 1997, p. 23) selon laquelle un petit nombre de situa- tions peuvent constituer des situations de référence pour l’enseignant et les élèves et ainsi soutenir des apprentissages sur le long terme. Il s’agira donc dans l’expérimentation, d’une part, de faire ✭✭ vivre ✮✮ des moments de recherche et des moments de débats mathématiques dans la classe, en tenant compte des contraintes des pratiques existantes et en essayant d’en affaiblir certaines, et, d’autre part, au-delà de cette expérimentation, de miser sur une diffusion des connaissances plus ou moins automatique ou contrôlée dans le système cohérent et complexe des pratiques de classe192.

Notre étude didactique et ergonomique a priori des instructions officielles et de la littérature professionnelle à destination des enseignants du cycle 3 a montré, sauf exceptions, que le rôle de l’enseignant est généralement considéré comme primordial mais aussi comme complexe. À cet égard, les documents consultés contiennent plusieurs éléments susceptibles d’aider l’enseignant à pratiquer des activités RPP avec ses élèves. Cependant, nous y avons aussi relevé plusieurs défauts. D’une part, ces ressources souffrent généralement de défauts en matière d’utilité, d’utilisabilité et d’acceptabilité. D’autre part, elles se situent rarement dans des dynamiques de pratiques, par exemple en proposant des options de mise en oeuvre, en explicitant les différents choix effectués par les auteurs, en étayant le passage de pratiques existantes à de ✭✭ nouvelles ✮✮ pratiques. Ceci tend donc à valider notre hypothèse concernant le fait que l’ergonomie des ressources n’est pas optimale pour favoriser la pratique d’activités RPP par les enseignants et le fait que l’inscription dans des dynamiques de pratiques reste largement à explorer, ce qui est justement au coeur de notre travail et de l’approche de Wenger.

À ce point de la conclusion, il faut souligner les deux principales limites de notre étude. Tout d’abord, elle repose sur des hypothèses en matière d’ergonomie qu’il faudrait étayer par des analyses empiriques car elles ont un impact direct sur nos analyses. L’expérimentation y contribuera en partie. D’autre part, l’étude ne porte que sur un volume limité d’expérimentations et de littérature, parmi les plus accessibles aux enseignants. Nous ne pouvons donc vérifier la généralité de nos conclusions.

Finalement, les différentes analyses menées dans ce chapitre ont étayé nos choix concernant les activités permettant de favoriser l’émergence d’une CoP d’enseignants ayant pour entreprise commune de faire pratiquer des activités RPP à leurs élèves. Dans les ressources proposées aux enseignants, nous avons certes ✭✭ comblé ✮✮ certains manques constatés dans la littérature mais, en cohérence avec la perspective de Wenger, nous en avons aussi laissés certains, afin justement de favoriser l’émergence de cette CoP. Des contraintes techniques de faisabilité feront aussi que nous ne ferons qu’une exploitation réduite des potentialités liées à l’utilisation d’un site Web.

Il s’agit maintenant d’analyser l’expérimentation menée et de voir si nos choix se sont révélés 192Sous entendu, celles des enseignants mais aussi celles des élèves.

Chapitre 5

Déroulement de l’expérimentation et

analyse de la CoP

D

ANS ce chapitre, nous présentons tout d’abord une chronologie synthétique du déroulement

de l’expérimentation année par année afin d’en donner une vue d’ensemble. Dans une se- conde partie, nous analysons une partie de l’activité de la CoP afin de répondre à nos interrogations concernant, d’une part, la pratique des activités RPP et, d’autre part, la pertinence des hypothèses faites en matière de design pour favoriser l’émergence d’une CoP d’enseignants. Dans ce chapitre, l’étude sera centrée sur les choix des problèmes mis en oeuvre, la consultation du site Web, les comptes-rendus de séances rédigés par les enseignants, les réunions et le rôle de coordination. Dans le chapitre suivant, nous analyserons la place des enseignants, particulièrement de Mme

S

, en termes de trajectoires dans la CoP et nous complèterons les premières réponses données.

5.1 Chronologie et déroulement général

Pour chaque ✭✭ année ✮✮1 de l’expérimentation, nous présentons dans cette section une synthèse de son déroulement. L’objectif est de préciser la trame de l’expérimentation et de l’activité de la CoP avant d’étudier plus en détail certains de ses éléments dans les sections suivantes. La notation (I) désigne la première année d’expérimentation, (II) la deuxième et (III) la troisième.