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__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS _________

D - Des pertes en ligne dans les circuits de financement

__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS _________

Depuis que l'objectif de consacrer 3 % du PIB à la R&D a été fixé en 2002, la part de la recherche dans le PIB n'a pas progressé et est restée au niveau de 2,2 %.

Les financements publics de la recherche ont évolué de façon dynamique depuis 2006 : les crédits budgétaires retracés au sein de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur (y compris Agence nationale de la recherche) ont crû de 12 % entre 2006 et 2013, pour atteindre 14 Md€ en 2013, prolongeant ainsi un effort 2004-2010 globalement conforme à la loi de programme.

À ces financements s'ajoute l'effet des investissements d'avenir consacrés à la recherche, qui devraient assurer un financement annuel supplémentaire de l'ordre de 1 Md€ par an sur les années 2012-2020. Le crédit d'impôt recherche, enfin, a connu une très forte augmentation, la créance constituée par les entreprises ayant été multipliée par six depuis 2006 pour atteindre un volume annuel de 5 Md€ en 2010 et estimé à 5,8 Md€ en 2013.

Ce décalage, entre des dépenses publiques consacrées à la recherche, qui connaissent une croissance dynamique, et un taux d'effort de recherche mesuré par le ratio DIRD/PIB, qui reste stable depuis 10 ans, est un motif de déception.

Au regard des comparaisons internationales, le niveau de financement public de la recherche en France peut paraître en ligne avec l'objectif de 1 % du PIB (il est de 0,99 % selon les statistiques de

2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009* 2010

Millions d'euros courants

CIR JEI

financement direct hors défense financement direct défense

organismes publics se situent légèrement en deçà (0,83 %), en raison principalement de la sous-estimation statistique de la recherche relevant du ministère de la défense, et de l'écart entre les financements que la France apporte à l'Union européenne et ceux qu'elle en reçoit.

En outre, le niveau de la DIRD des administrations est établi en retenant conventionnellement 50 % des rémunérations des enseignants-chercheurs dans les dépenses de recherche. Pour la Cour, ce mode de calcul, qui n'est pas partagé par nos principaux partenaires, a pour effet de majorer artificiellement la part des dépenses de recherche en France.

Il doit être revu et affiné par grands secteurs de recherche.

La France ne peut donc pas considérer que le niveau de sa dépense de R&D publique soit totalement satisfaisant au regard des objectifs qu'elle s'est assignés.

Cependant, c'est essentiellement au niveau de la dépense intérieure de R&D des entreprises que les résultats de la France sont en retrait par rapport à ceux de ses partenaires : celle-ci se situe à 1,41 % du PIB en 2010, loin des 2 % visés, et ce taux d'effort de la recherche des entreprises n’a pas progressé depuis 10 ans.

Ce résultat n'est pas à rapporter à une intensité en R&D des PME et grandes entreprises françaises qui serait d'un niveau inférieur à nos partenaires ou en décroissance. Il provient de trois facteurs : une faible intensité en R&D des entreprises de taille intermédiaire, une spécialisation de la France sur des secteurs peu intensifs en R&D, notamment les services, et une évolution de la structure du PIB marquée par la baisse de la part de l'industrie. La politique de la recherche n'a pas toutes les clés de cette situation qui relève de politiques industrielles et économiques plus larges38. Mais elle doit avoir pour objectif de favoriser le développement de la recherche sur des secteurs de pointe, à même de renouveler ou de renforcer le tissu économique.

Ces constats sur la dépense de R&D des entreprises amènent à poser trois questions.

La première concerne le crédit d’impôt recherche (CIR) : l’accroissement spectaculaire de la dépense fiscale résultant de cet instrument a-t-il été efficace au regard de l’absence de progression du ratio DIRD/PIB ? On ne peut répondre à cette question en l’absence

38 BEFFA Jean-Louis, Rapport : Pour une nouvelle politique industrielle, la Documentation française, Janvier 2005 ; et GALLOIS Louis, Rapport : Pacte pour la compétitivité de l’industrie française, la Documentation française, Novembre 2012.

Ces 2 rapports témoignent de la persistance de ces questionnements.

d’études économétriques probantes et sans replacer le CIR dans le contexte de l’impact économique de l’impôt sur les sociétés. Cependant, à titre conservatoire, la dépense afférente doit être contenue, et il faut se donner les moyens de mesurer son efficacité afin de dessiner à terme un dispositif dont le coût soit mieux proportionné aux objectifs à en attendre.

Il faut aussi éviter de présenter comme des évaluations du CIR des simulations ou des extrapolations réalisées à partir du dispositif en accroissement d’avant 2008.

La deuxième question concerne la crédibilité de la cible des 3 % dans le cas de la France à une échéance rapprochée. Comme les Pays-Bas ont choisi de le faire dans le cadre de la stratégie européenne pour 2020, en retenant un objectif de 2,5 %, la France pourrait, tout en maintenant l’objectif des 3 %, se mobiliser autour d’une cible intermédiaire plus réaliste, dans le contexte de redressement des comptes publics, et néanmoins mobilisatrice.

La troisième question concerne les modalités de programmation budgétaire et la lisibilité des moyens consacrés par l’État à la recherche.

Ceux-ci devraient être déclinés dans des prévisions budgétaires plus complètes, plus sélectives et mieux articulées avec la gestion des opérateurs. Or les instruments disponibles rendent difficile une approche budgétaire plus sélective articulée avec de véritables priorités nationales de recherche : l’optimisation des financements, qu’impose le contexte économique, passe par une amélioration des instruments et des données budgétaires.

À cette fin, il serait souhaitable de parvenir à une déclinaison des budgets par grands secteurs de recherche, permettant une meilleure articulation entre l'architecture budgétaire et la programmation pluriannuelle de la recherche. L'horizon de celle-ci devrait être étendu, car la programmation budgétaire triennale apparaît insuffisante pour un domaine stratégique comme la recherche, où les acteurs ont besoin de programmer leur effort à moyen terme.

En conséquence, la Cour émet les recommandations suivantes :

1.

programmer à moyen terme les crédits de l’État destinés à la recherche par grands secteurs scientifiques en prenant notamment appui sur les cinq alliances de recherche existantes et identifier dans cette programmation la part des financements compétitifs nationaux ; 2. donner, dans les documents annexés aux lois de finances des

éléments de synthèse sur l’ensemble des crédits destinés à la recherche par grands secteurs scientifiques ainsi que sur les aides fiscales ;

3. accélérer la production des données relatives au crédit d’impôt recherche et intégrer dans les prévisions budgétaires de 2014 le ressaut inéluctable de la dépense fiscale à cette échéance ;

4. remplacer le taux conventionnel de 50 % d'activité de recherche attribuée aux enseignants-chercheurs par des taux reflétant leur activité de recherche statistiquement constatée par grandes disciplines ;

5. sans remettre en cause l’engagement de consacrer 3 % du PIB à la R&D, fixer un objectif intermédiaire réaliste et mobilisateur ;

6.

décliner cet objectif dans ses deux composantes, administrations et entreprises, et le compléter par un indicateur sur les dépenses de R&D des entreprises par branche d’activités.

Chapitre II

Les financements sur projets : une