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1.1.4 Modèles analytiques des câbles mono-toron

1.1.4.2 Comportement en flexion

Le comportement en flexion est un point délicat et complexe dans l’étude d’un toron mono ou multi-couche. En effet, la présence des contacts au sein d’une section et la géométrie hélicoïdale des fils formant les couches externes, engendrent des non linéarités de contact influençant la rigidité en flexion. Dans [Cardou and Jolicoeur, 1997] et [Cardou, 2006], une revue des modèles analytiques en flexion est proposée. Un résumé des points importants du comportement en flexion est rappelé ci-après.

Deux comportements limites peuvent être identifiés lors d’un chargement en flexion, voir Figure 1.9, à savoir :

— comportement collant (trajet OA) : lorsque la courbure est faible, tous les fils agissent comme une seule et même entité. La force de contact normal est trop importante pour autoriser un déplacement relatif entre les différents composants. La raideur en flexion est alors à son maximum, notée (EI)max,

— comportement glissant (trajet BC) : au delà d’une certaine courbure, tous les fils agissent indépendamment et glissent les uns par rapport aux autres. La flexion des fils sur leurs axes neutres est donc la seule contribution à la détermination du comportement en flexion, et correspond à la raideur minimale, écrit (EI)min.

(a) (b)

Figure 1.9 – Représentation du moment de flexion en fonction de la courbure (a) et de la Raideur en flexion en fonction de la courbure (b) pour un câble mono-toron

Une phase de transition (trajet AB) existe entre le comportement collant et le comportement glissant. Elle coïncide avec le début de l’entrée en glissement des fils hélicoïdaux des couches externes, à une courbure κ0. Dans ce cas les forces de contact normal ne sont plus assez importantes pour garantir un maintien de la section. Arrivé à une courbure κ1, la totalité des fils hélicoïdaux est en phase de glissement ce qui fait chuter la raideur en flexion à sa valeur minimale (EI)min.

Dans [Cardou, 2013], une revue bibliographique discute des différents modèles analytiques prenant en compte la transition entre le comportement collant et le comportement glissant.

Dans la majorité des câbles en service, une pré-tension vient rigidifier le câble à l’état initial et ainsi créer des efforts de contact entres les composants. De plus, des efforts de contact résiduel peuvent être présents dus principalement aux procédés de fabrication. Le trajet OC est donc couramment observé pour des câbles soumis à de fortes variations de courbure.

Modèles poutre courbe

Dans le cas du comportement glissant, aucun frottement n’est considéré et les composants du câble sont libres de se déplacer les uns par rapport aux autres. Les modèles les plus simples qui mettent en évidence cette limite inférieure sur la raideur, sont ceux de [Papailiou, 1997], [Lanteigne, 1985], et [Knapp and Cruickelan, 1991]. Ces modèles négligent la composante en tor-sion du câble lors de la flexion. Dans [Sathikh et al., 2000] il est montré que, même pour des faibles courbures, les fils hélicoïdaux sont soumis à de la torsion, ce qui les font rouler autour des couches adjacentes inférieures. D’autres modèles prennent alors en considération le module de cisaillement dans leur formulation comme dans [Lehanneur, 1949], [Costello, 1997] et [Labrosse, 1998]. Cepen-dant, il est montré dans [Papailiou, 1997], que négliger la raideur en torsion, influence peu la réponse en flexion du câble, voir figure 1.10a.

(a) Raideur minimale en flexion

0 3 · 10−2 6 · 10−2 9 · 10−2 52 52.5 53 Courbure [m-1] K22 =K 33 [N.m 2 ]

Knapp Costello Labrosse LehanneurRebuffel Papailiou

(b) Raideur maximale en flexion

0 3 · 10−2 6 · 10−2 9 · 10−2 360 380 400 420 Courbure [m-1] K22 =K 33 [N.m 2 ]

Figure 1.10 – Comparaison entre les modèles analytiques pour un câble mono-couche à 7 fils (1+6) en flexion : Rc = 2.675mm ; Rs = 2.59 mm ; α = 8.18˚ ; E = 210 GPa et ν = 0.3

Dans le cas d’un comportement en flexion collant, il est considéré que l’ensemble du câble agit comme une seule et même entité respectant l’hypothèse d’Euler-Bernoulli, à savoir que la section du câble reste plane après déformation. Les modèles fondés sur ces hypothèses sont pré-sents dans [Knapp and Cruickelan, 1991], [Papailiou, 1997], [Lanteigne, 1985], [Lehanneur, 1949] et [Rebuffel, 1949], dont certains résultats sont présentés sur la figure 1.10b et développés en an-nexe A . En revanche, lors d’un contact collant, des micro-glissements apparaissent, dus aux forces de contact tangentiel. Cet effet, appelé "l’élasticité du contact tangentiel", implique une baisse de la raideur en flexion à l’état collant, voir [Hardy and Leblond, 2003]. Il est important de noter que la prise en compte de l’élasticité du contact est primordiale pour aborder une étude en fatigue du câble, mais reste néanmoins négligeable pour estimer le comportement collant du câble.

En l’absence de contraintes initiales, l’application d’une flexion conduit à une situation de comportement glissant. Ainsi, pour pouvoir observer la phase de transition collant vers glissant, une tension est exercée préalablement à la flexion. Cette force axiale induit des forces de contact entre chaque couche adjacente. La courbure en flexion est considérée constante et suffisamment faible pour négliger la variation de la force de contact. Dans [Lehanneur, 1949], les résultats montrent que le glissement commence légèrement en dessous de l’axe de flexion, au niveau de la zone en compression. Le glissement se propage ainsi plus rapidement vers la zone en compression que vers la zone en traction du câble. Dans [Rebuffel, 1949], Rebuffel apporte une simplification en indiquant que le glissement est atteint simultanément dans ces deux zones, voir Figure 1.11. Pour le modèle de Papailiou [Papailiou, 1997], une nouvelle simplification est formulée, elle considère que le glissement commence toujours au niveau de l’axe de flexion et que la variation de courbure des fils situés sur l’axe neutre peut être négligée. Cela implique que la variation des forces axiales au niveau de l’axe neutre est nulle.

Figure 1.11 – Représentation des différents états de glissement au sein de la section d’un câble multi-couche pendant un chargement en flexion avec pré-tension : état collant (a) et début du glissement (b)

Tous les modèles analytiques, décrivant une phase de transition collant vers glissant, considèrent un contact radial et négligent le contact circonférentiel. Dans le cadre d’un câble multi-couche, la prise en compte de la distribution ponctuelle des contacts entre deux couches adjacentes complexifie fortement l’analyse du comportement collant vers le comportement glissant. Dans [Papailiou, 1997], le contact ponctuel est remplacé par une ligne de contact continue. Cette hypothèse simplifie la mise en équation du problème, tout en ayant un faible impact sur la valeur de la raideur en flexion. Cependant, elle ne permet pas de faire une estimation correcte des contraintes de contact. La transmission des pressions entre les couches d’un câble multi-couche a un rôle important sur la transition collant-glissant. Étant plus proche de l’axe de flexion et subissant une pression de contact plus importante due aux couches supérieures, la couche interne du câble est la dernière à entrer en glissement. Dans [Lehanneur, 1949], on considère une transmission partielle des pressions de contact. Cela implique que la pression exercée sur la couche de fils dépendra uniquement de la

force de contact induite par la couche supérieure. Une transmission complète est considérée dans [Papailiou, 1997], [Hong et al., 2005] ou encore dans [Foti and Martinelli, 2016a]. Pour la phase de glissement, [Lehanneur, 1949], [Rebuffel, 1949], [Papailiou, 1997] et [Lanteigne, 1985] envisagent l’hypothèse que le glissement total d’une couche supérieure est atteint avant l’entrée en glissement d’une couche inférieure. Cependant, il est montré dans [Hong et al., 2005] que le glissement total d’une couche n’est jamais atteint, ce qui est confirmé dans [Houle-Paradis, 2011].

Plus récemment, Foti et al. [Foti and Martinelli, 2016a] proposent d’étudier les différents pa-ramètres influençant le comportement en flexion d’un câble mono-toron. Une nouvelle approche du glissement critique est présentée. Les travaux montrent que le fait d’augmenter le coefficient de friction, fait s’étendre la région de contact collant ainsi que la région transitoire. Il est aussi montré que la courbure critique, évolue linéairement en fonction du coefficient de friction et de la tension axiale initiale. Dans [Foti and Martinelli, 2016b] le modèle est étendu afin de prendre en compte les forces de contact résiduel qui ont un rôle non négligeable sur la largeur du domaine collant.

D’autre travaux se sont consacrés à l’étude en comportement collant du câble en flexion. Dans [Rawlins, 2005] le contact circonférentiel est étudié sans prendre en compte le contact radial entre l’âme et la couche interne. Dans [Sathikh et al., 2000] il est montré que, même pour des faibles courbures, les fils hélicoïdaux sont soumis à de la torsion qui les font rouler autour des couches adjacentes inférieures.

Une comparaison de certains modèles analytiques en flexion avec pré-tension est proposée sur la figure 1.12. On constate ici une forte similitude entre les modèles de Lehanneur, Papailiou et de Foti. Pour la suite des travaux présentés dans cette étude, le modèle de Papailiou sera utilisé à des fins de comparaison. Le développement du modèle est présenté en annexe A .

(a) Câble mono-couche

0 3 · 10−2 6 · 10−2 9 · 10−2 0 2 4 6 8 10 Courbure [m-1] Momen t de flexion [N.m]

Papailiou Lehanneur Foti

(b) Câble multi-couche 0 3 · 10−2 6 · 10−2 9 · 10−2 0 20 40 Courbure [m-1] Momen t de flexion [N.m]

Figure 1.12 – Comparaison entre les modèles analytiques pour un câble mono-couche (a) et multi-couche (b) en flexion avec une pré-tension Ee = 0.001 : Rc = 2.675 mm ; Rs = 2.59 mm ; α = 8.18˚pour le câble mono-couche et Rc = 2.675 mm ; Rs1 = Rs2 = 2.59 mm ; α1 = −8.24˚ ; α2 = −8.24˚pour le câble multi-couche ; E = 210 GPa et ν = 0.3

Modèles semi-continus

L’analyse du comportement en flexion a pu aussi être étudiée par les modèles semi-continus. Ins-pirés par le modèle de Blouin et Cardou [Blouin and Cardou, 1989], Jolicoeur et Cardou proposent

un modèle basé sur l’homogénéisation des couches en cylindres orthotropes, pour l’étude du com-portement collant et glissant d’un câble mono-toron en flexion, voir [Jolicoeur and Cardou, 1996] et [Jolicoeur, 1997]. Cependant, une comparaison avec les modèles discrets de [Costello, 1997], [Lanteigne, 1985] montre que les résultats en flexion ne sont pas satisfaisants. Un modèle est aussi développé dans la thèse de Raoof [Raoof, 1983] afin de discuter des effets de la flexion sur la fatigue des composants.