• Aucun résultat trouvé

Comparaison des discours au sujet de Jolianne 1 Monitoring Tabou

10. PROBLÉMATIQUE ET QUESTION DE RECHERCHE

12.4 Le cas d’Albert

12.5.3 Comparaison des discours au sujet de Jolianne 1 Monitoring Tabou

Pour sa part, l’enseignant identifie un tabou transmis directement qui concerne Jolianne (et les autres élèves) : « Donc tout est possible. La seule chose que je j’exige je dis « On travaille pas sur des travaux d’récupération si on n’a pas terminé c’qu’on a à faire actuellement » (EE, l.

127

248). C’est ce qui explique que, selon l’enseignant, 100% des tabous proviennent de lui de manière directe et que, selon Jolianne, il n’y a pas de tabous.

12.5.3.2 Monitoring - Consignes

De façon générale, notre analyse répartit les consignes entre l’outil, l’élève et l’enseignant, alors que l’enseignant s’attribue 100% des consignes directes et qu’aucune indirecte ne ressort. Dans le discours de Jolianne, 25% des consignes directes vont à l’outil, 25% à elle- même et 50% à l’enseignant, alors que les consignes indirectes se partagent entre l’outil (50%) et elle-même (50%).

Jolianne est en sixième année et elle a le même enseignant et le même fonctionnement concernant l’agenda depuis trois ans. Son enseignant doit lui rappeler les consignes de l’utilisation de celui-ci et la manière de sélectionner ses travaux de façon adéquate afin de pouvoir bien gérer son temps. Selon l’élève, une partie de ces consignes est intériorisée (donc mobilisée de façon indirecte par l’élève). Dans le discours de l’élève, cela correspond à 50% et dans le discours de l’enseignant, à 0%. Nous pensons que cette divergence de point de vue provient du fait que l’élève perçoit avoir intériorisé une partie des consignes alors que l’enseignant croit qu’il doit les rappeler régulièrement à l’élève : « pour que est soit capable de l’faire. Sinon ya des, ya des consignes de base que j’, je donne par exemple ya, ya un mois et d’mi j’avais d’mandé d’écrire d’avance sur ses prochaines semaines, en bas de v’nir me voir, parc’que sinon elle oublie, simplement elle commence sa journée donc là elle s’écrit heu en bas d’son journal un rappel pour heu « Viens, heu, va voir M. Morita pour discuter des priorités », des choses comme ça » (EE, l. 90). Certaines consignes directes comme celles citées ci-avant proviennent de l’enseignant et perdurent depuis trois ans. Bien qu’une partie de ce qu’elle doit faire semble intériorisée dans le discours de l’élève, nous pensons que l’enseignant doit les lui redire régulièrement.

128

12.5.3.3 Monitoring - Questions de relance

Nous avons constaté que Jolianne semble attribuer 100% des questions de relance à son enseignant, transmises de façon directe et que celui-ci les attribue toutes de façon indirecte, 25% à l’outil et 75% à lui-même. Nous interprétons cette différence de point de vue comme le fait que Jolianne a l’impression de se faire poser des questions qui relancent sa réflexion au sujet de sa gestion du temps.

Rappelons qu’aucune question de relance indirecte n’est présente selon les données recueillies dans le discours de Jolianne (0%) et qu’aucune ne l’est de manière directe selon le discours de l’enseignant (0%).

12.5.3.4 Monitoring - Procédure

Les procédures indirectes proviennent de l’élève dans 75% des cas, selon l’enseignant, et dans 100% des cas, selon Jolianne. Ils sont donc plutôt en accord avec le fait qu’une grande partie de celles-ci est mobilisée par l’élève elle-même.

Par contre, les procédures directes sont issues, selon l’enseignant, à 100% de lui alors que l’élève en attribue 25% à l’outil, 38% à elle-même et 38% à son enseignant. Notre cadre de référence décrit bien, selon nous, la vision de l’enseignant : « l’enseignant estime qu’il faut donner des procédures détaillées aux sujets » (Buysse, 2012a, p. 146). En effet, dans l’exemple suivant, l’enseignant en fait mention : « donc on, est s’met des p’tits numéros à côté en fonction des priorités qu’on s’donne. Idéalement, j’fais ça au début jusqu’à c’qui comprennent comment on choisit les priorités pis après ils le font eux-mêmes. C’est pas tous les élèves qui s’rendent là comme Jolianne est en sixième année mais faut encore que j’le fasse avec elle » (EE, l. 61).

L’enseignant de Jolianne lui impose une procédure supplémentaire dans le but qu’elle développe une meilleure gestion de son temps : «…typiquement avec Jolianne j’avais fait ça un temps, ça l’aidait, heu, c’est une feuille que j’lui avais préparée avec des cases à cocher »

129

(EE, l. 120) et « heu, mettons un lundi matin, cinq cases à cocher c’tait aller voir M. Morita pour les priorités, remplir son agenda, heu, chois…, heu, faire ses premiers travaux pis à onze heures et d’mi heu, vérifier qu’les travaux sont mis dans la correction des choses comme ça. Donc dans des cas particuliers, j’rajoute dans l’agenda des outils spécifiques à leurs besoins » (EE, l. 124). La copie de son agenda présentée en annexe XIII appuie ces propos. Nous verrons plus en détail l’analyse de l’outil de Jolianne plus tard. L’élève ne se donne pas de

consignes, bien que l’analyse de son entretien nous indique que certains éléments sont

intériorisés, dans le sens où elle connait certaines procédures et commence à les intérioriser afin de pouvoir les utiliser seule dans le futur.

12.5.3.5 Monitoring - Persévérance

En ce qui concerne la persévérance, l’enseignant perçoit que cela vient à 100% de lui, de façon indirecte, alors que Jolianne perçoit que cela vient à 100% d’elle, de façon indirecte. Nous pensons que cette différence peut s’expliquer par le fait que Jolianne connait davantage ses propres raisons de persévérer et que l’enseignant aborde les moyens qu’il utilise afin de favoriser la persévérance de son élève.

12.5.3.6 Évaluation en fonction de l’objectif

Jolianne dit s’autoévaluer en fonction de son objectif personnel : le sentiment d’avoir donné

son maximum, faisant référence aux efforts fournis. Elle explique que, même si ses travaux ne

sont pas tous terminés dans les temps prescrits, elle a atteint son objectif lorsqu’elle ressent un sentiment de fierté envers les efforts accomplis : «…si j’ai fait mon maximum j’ai atteint mon objectif » (EJ, l. 124). Sur ce point, les deux participants sont d’accord; l’évaluation en

fonction de l’objectif correspond à des médiations mobilisées de façon indirecte à 100% par

Jolianne elle-même. Selon nous, cela démontre bien que l’élève a intériorisé ce type d’évaluation en se donnant elle-même des objectifs, tels ceux mentionnés ci-haut, ce avec quoi son enseignant est en accord.

130

12.5.3.7 Évaluation critériée

L’élève ne perçoit pas d’évaluation critériée directe alors que l’enseignant oui, et en attribue 50% à l’outil et l’autre 50% à lui-même.

Ce type d’évaluation, lorsqu’indirect, est réparti entre l’enseignant et l’élève : 50% à l’enseignant et 50% à l’élève, selon l’enseignant, et 67% à l’élève et 37% à l’enseignant, selon l’élève. Ils sont donc d’accord sur les deux sources de ce type de médiation (soit l’enseignant et l’élève), mais le discours de Jolianne fait ressortir qu’elle s’en attribue un plus grand pourcentage. Nous pouvons effectivement voir les critères établis par Jolianne et par l’enseignant et détaillés ci-haut dans les analyses des évaluations critériées concernant cette élève.

12.5.3.8 Évaluation formative

Les deux participants attribuent 100% de l’évaluation formative directe à l’enseignant. Pour les évaluations de ce type transmises ou mobilisées de façon indirecte, le discours de l’élève en fait ressortir 100% étant attribuables à l’élève alors que le discours de l’enseignant en fait ressortir 50% étant attribuables à l’élève et 50% attribuables à lui-même.

12.5.3.9 Évaluation sanction

Tout comme dans le cas des deux autres élèves, aucune évaluation de type sanction n’est présente ni dans le discours de l’élève, ni dans le discours de l’enseignant. Selon nous, cela s’explique par le fait que ce n’est pas le type d’évaluation préconisé par l’enseignant, le fait de voir l’erreur comme un échec, de percevoir que « toute erreur est jugée comme une faute, et toute réussite fait l’objet d’une récompense, quel qu’ait [sic] été le moyen de l’atteindre » (Buysse, 2012a, p. 141).

131

12.5.3.10 Synthèse de la comparaison

Les discours de Jolianne et de son enseignant sont comparés en fonction des pourcentages de chaque médiation de deuxième ordre, selon le mode de transmission direct (explicite) ou indirect (implicite), et selon la source de la médiation, soit l’outil, l’élève ou l’enseignant (tableau 16). Il en ressort que l’enseignant joue un rôle important dans la transmission de médiations. L’enseignant perçoit davantage ses interventions comme directes, alors que Jolianne attribue ces interventions à elle-même et à l’enseignant. Ils sont tous deux d’accord avec le fait que toute la persévérance est mobilisée indirectement par Jolianne. L’outil est en support concernant surtout les consignes et la procédure. Aucune évaluation sanction ne ressort.

132

Tableau 16 : Tableau synthèse comparatif de l’analyse des discours au sujet de Jolianne Tableau synthèse comparatif de l’analyse des discours au sujet de Jolianne51,52 Discours

Médiations de 2e ordre

Enseignant Jolianne

Source de la médiation selon l’enseignant et Jolianne et mode de transmission (D= direct; I= indirect)

Outil Élève Enseignant Outil Élève Enseignant

D I D I D I D I D I D I Monitoring en % Tabou 0 0 0 0 100 0 0 0 0 0 0 0 Consigne 0 0 0 0 100 0 25 50 25 50 50 0 Question de relance 0 25 0 0 0 75 0 0 0 0 100 0 Procédure 0 0 0 75 100 25 25 0 38 100 38 0 Persévérance 0 0 0 0 0 100 0 0 0 100 0 0 Évaluation en % En fonction de l’objectif 0 0 0 100 0 0 0 0 0 100 0 0 Critériée 50 0 0 50 50 50 0 0 0 67 0 33 Formative 0 0 0 50 100 50 0 0 0 100 100 0 Sanction 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

12.5.3.11 Comparaison des modes de transmission perçus

Concernant le contrôle, la majeure partie des médiations identifiées serait transmise de façon directe. En effet, dans le discours de l’enseignant, 69% des médiations sont transmises directement, contre 31% indirectement. Selon les données relatives au discours de l’élève, 72% seraient transmises directement et le 28% restant indirectement. Nous interprétons cela comme le fait qu’une minorité de médiations de type contrôle est intériorisée de la part de

51 L’analyse du discours du parent ne fait pas partie du tableau synthèse puisque l’entretien avec celui-ci visait à

valider certains propos tenus par l’enseignant et l’élève et non pas à faire ressortir les médiations de 2e ordre. 52 Les totaux sont présentés dans le tableau 17 pour en alléger le contenu.

133

l’élève et que cette dernière a besoin du support de l’enseignant et de l’outil en majeure partie dans le déploiement de sa compétence de gestion du temps.

Le discours de l’enseignant fait ressortir que 50% des médiations de type évaluation sont directes et l’autre 50% est indirect. Cependant, le discours de l’élève fait ressortir 10% de médiations directes et 90% de médiations indirectes. Selon nous, le portrait que dresse l’enseignant de la situation est probablement plus fidèle à la réalité puisque nos observations en classe, les traces de l’outil et les entretiens mettent de l’avant le fait que l’enseignant est présent de façon quotidienne afin de fournir un support à cette élève dans le développement de sa compétence de gestion du temps.

Tableau 17 : Tableau synthèse de de l’analyse des discours de Jolianne et de l’enseignant selon le mode de transmission

Tableau synthèse de l’analyse des discours de Jolianne et de l’enseignant selon le mode de transmission Discours Médiations de 2e ordre Enseignant Discours Médiations de 2e ordre Jolianne

Direct Indirect Total de la dimension en %

Total de la composante en %

Direct Indirect Total de la dimension en % Total de la composante en % Tabou 100 0 14 100 Tabou 0 0 0 0 Consigne 100 0 28 100 Consigne 67 33 33 100 Question de

relance 0 100 11 100 Question de relance 100 0 6 100

Procédure 71 29 39 100 Procédure 84 16 53 100

Persévérance 0 100 8 100 Persévérance 0 100 8 100

Total

monitoring 69 31 78 100 Total monitoring 72 28 64 100

En fonction de

l’objectif 0 100 10 100 En fonction de l’objectif 0 100 30 100

Critériée 50 50 40 100 Critériée 0 100 45 100

Formative 60 40 50 100 Formative 40 60 25 100

Sanction 0 0 0 0 Sanction 0 0 0 0

134

12.5.4 Traces de l’outil

La copie de l’agenda de Jolianne nous confirme de nombreux éléments mentionnés durant les entretiens semi-dirigés réalisés avec la participante et son enseignant. En effet, des numéros encerclés en rouge ont été ajoutés, témoignant de l’ordre de priorités établi par l’enseignant en collaboration avec l’élève. Les travaux les plus longs sont prioritaires, tel que mentionné dans les entretiens. Aussi, la consigne Venir me voir chaque matin. a été ajoutée à la main par l’enseignant dans l’outil de gestion du temps afin de rappeler à l’élève d’aller établir avec lui les priorités de la journée, et ce, chaque matin.

De plus, le parent de Jolianne avec qui nous avons réalisé l’entretien a écrit dans l’agenda de son enfant à l’encre bleue foncée. Les astérisques veulent dire que le travail a été commencé, mais qu’il n’est pas terminé. Il est aussi écrit la date à laquelle la critique de livre #1 a été réalisée. Le parent a également ajouté un travail, soit la critique de livre #2. Cela corrobore le fait que le parent mentionnait aider son enfant en participant à la procédure à même son agenda. La procédure supplémentaire que le parent a dit avoir ajoutée à l’outil est présente : lorsqu’un travail est commencé, mais non complété, le parent ajoute un astérisque.

Les petits triangles rouges inscrits par l’enseignant sont associés à la consigne PM= retour de

correction qui veut rappeler à l’élève de faire la correction des travaux identifiés par ce

triangle en après-midi. Cette consigne est ajoutée parfois dans l’outil de l’élève.

Les cercles bleu pâle présents dans la colonne de droite réfèrent aux travaux qui n’ont pas pu être complétés durant la semaine et qui devront l’être soit à la maison, soit en récupération. Dans l’exemple de l’annexe XIII, deux travaux n’ont pu être complétés durant la semaine. Ce nombre varie d’une semaine à l’autre.

L’analyse des traces de l’outil de Jolianne nous confirme donc les propos de l’enseignant, de l’élève et de son parent. Elle démontre concrètement les procédures supplémentaires ajoutées par l’enseignant, par le parent et conjointement avec l’élève.

135