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Comparaison des discours de l’élève et de l’enseignant 1 Monitoring Tabou

10. PROBLÉMATIQUE ET QUESTION DE RECHERCHE

12.4 Le cas d’Albert

12.4.3 Comparaison des discours de l’élève et de l’enseignant 1 Monitoring Tabou

Aucun tabou ne ressort du discours d’Albert, mais l’enseignant mentionne que ses élèves utilisent leur agenda à d’autres fins que celle de gérer leurs travaux et leur temps, ce qu’il leur interdit totalement. Cela concerne Albert et c’est ce qui fait que 100% des tabous proviennent

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de l’enseignant de manière directe (explicite) alors que selon Albert, il n’y a pas de limite particulière à l’utilisation de l’agenda (0% tabou).

12.4.3.2 Monitoring - Consignes

Ce qui ressort de l’entretien avec l’enseignant au sujet des médiations mobilisées de façon indirecte est qu’elles proviennent à 100% de l’élève. Cependant, les médiations transmises ou mobilisées de façon directe proviennent à 13% de l’élève et à 88% de l’enseignant, toujours selon celui-ci. Nous attribuons cette divergence de point de vue au fait que l’enseignant mentionne parfois voir Albert appliquer strictement ses consignes. C’est d’ailleurs la manière dont sont définies les consignes directes : « le sujet suit des consignes strictes qui lui sont fournies » (Buysse, 2012a, p. 145). Par contre, selon ce qu’Albert dit, cela est intériorisé chez lui.

12.4.3.3 Monitoring - Questions de relance

Selon Albert, lorsque les questions de relance sont transmises de façon directe, elles proviennent à 100% de l’enseignant, alors que l’enseignant croit qu’elles proviennent à 100% de l’outil. Il est intéressant de constater que l’élève n’attribue aucune question de relance à l’outil sur lequel il semble pourtant se fonder pour s’en poser.

Les médiations mobilisées ou transmises de façon indirecte sont attribuables, selon Albert, à lui-même à 100% alors que l’enseignant perçoit en fournir 60% et croit que le reste (40%) est mobilisé par l’élève. L’enseignant agit effectivement de cette façon avec Albert, ce qui correspond aux questions de relance posées de façon indirecte au sujet desquelles il est dit que : « les sujets doivent être amenés à se poser des questions [de relance] pour les faire progresser» (Buysse, 2012a, p.146) et à travers celles-ci, « le sujet est amené à s’interroger, aller plus loin, à travers des questions » (Buysse, 2012a, p. 146). C’est ce que fait l’enseignant avec Albert lorsqu’il a besoin d’aide.

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12.4.3.4 Monitoring - Procédure

En ce qui a trait aux procédures indirectes, Albert perçoit qu’il les mobilise dans 100% des cas. L’enseignant perçoit plutôt que 50% proviennent de l’élève et que 50% provient de l’enseignant. L’enseignant explique, tel que cité ci-haut, qu’il a donné des conseils à cet élève concernant la procédure qui pourrait lui permettre d’atteindre son objectif : « et puis heu, quand c’est arrivé y’a écouté mes conseils, y’a appliqué mes conseils, il a utilisé l’agenda, heu, pis c’est pour ça qu’aujourd’hui heu, c’est pas un enfant qui fini toutes ses semaines, mais c’est un enfant qui est capable d’aller au bout, donc qui est super satisfait lui de ça dans l’sens où la majorité du temps il termine ou presque sa s’maine, pis pour lui ça c’est très positif » (EE, l. 365). Albert s’est donc doté de sa propre procédure avec le temps, qu’il décrit ainsi : « bin, dans l’fond moi c’que j’fais pour mes travaux, ma technique que j’utilise c’est que moi, moi j’attends d’avoir fini tous mes travaux là, je les mets dans la correction après là je fais toute, je mets les X, après ça mettons que j’t’en train d’en faire un, mettons que chu comme heu, j’ai fini la moitié des travaux pis que là j’en reçois un, là heu, là heu, moi les corrections je les fais juste à la fin, quand j’ai fini tous mes travaux, qu’ils sont tous dans la correction, là j’fais mes corrections » (EA, l. 65). Il dit qu’il utilise sa technique. Cela dit, son enseignant accepte que ses élèves utilisent leur propre procédure et vise à ce qu’ils s’en donnent eux-mêmes, au lieu d’en imposer une durant toute la progression de ses élèves en gestion du temps.

Il est important de mentionner que la procédure utilisée par Albert a grandement évolué depuis sa quatrième année. L’enseignant relate qu’au début, Albert éprouvait des difficultés organisationnelles qui menaient à une gestion du temps inadéquate et qu’il lui suggérait une

procédure claire à suivre : « et même j’me souviens y’avait des listes à cocher…» (EE, l.

690). Maintenant, Albert a amélioré sa gestion du temps et n’a plus besoin de suivre la

procédure stricte suggérée par son enseignant, il s’est doté de sa propre procédure, tel que

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12.4.3.5 Monitoring - Persévérance

Les perceptions de l’élève et de son enseignant sont très similaires concernant la

persévérance. Ils sont tous deux d’accord sur le fait qu’aucune médiation concernant la persévérance n’est transmise ou mobilisée de façon directe. Pour les médiations indirectes,

Albert en attribue 33% à son enseignant et l’enseignant s’en attribue 40%. Albert s’en attribue 67% et son enseignant lui en attribue 60%. Ces proportions nous apprennent que dans leurs perceptions, Albert mobilise la motivation intrinsèque nécessaire à l’atteinte de son objectif, ce qui correspond tout à fait à la persévérance mobilisée de façon indirecte : « les sujets font preuve d’une motivation qui les amène à surmonter les difficultés, à persévérer » (Buysse, 2012a, p. 146). Effectivement, l’enseignant a également mentionné qu’Albert a persévéré lorsqu’il a rencontré des difficultés et qu’il continue maintenant de le faire afin de poursuivre l’atteinte de son objectif chaque semaine.

12.4.3.6 Évaluation en fonction de l’objectif

Albert dit être satisfait de lui lorsque tous ses travaux sont complétés et qu’il a obtenu toutes les signatures de son enseignant comme approbation : « bin c’est quand heu, c’est quand dans l’fond j’ai toutes mes signatures, ça ça m’dit que ma s’maine est finie, qu’j’ai atteint mon objectif » (EA, l. 169). Comme son objectif est d’obtenir toutes les signatures associées aux travaux dûment complétés, cela nécessite selon nous un regard extérieur, ici de l’enseignant, sur son travail. Albert est donc amené à s’autoévaluer, oui, mais selon des critères établis par lui-même et nécessitant l’intervention, la validation de son enseignant.

Les médiations directes sont attribuables à l’enseignant dans une proportion de 50% et l’autre 50% à l’élève. Selon nous, l’enseignant perçoit que l’évaluation faite en fonction de l’objectif provient autant de lui que d’Albert. « Le sujet se réfère à une évaluation faite par un formateur en fonction de la finalité ou de l’objectif » (Buysse, 2012a, p. 140) : selon l’enseignant, Albert se fie à la fois à l’évaluation faite par son enseignant et à la sienne. Cependant, Albert attribue plutôt les médiations directes dans 33% des cas à l’outil et le reste, c’est-à-dire 67%, à lui-

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même. Il explique la partie attribuée à l’outil en disant qu’il se fie à ce support pour s’évaluer lui-même. Les traces qu’il laisse au courant de la semaine dans son outil lui fournissent une rétroaction dont il se sert pour s’évaluer.

Ce qu’il faut retenir, selon nous, c’est que l’objectif d’Albert consiste à terminer tous les travaux écrits dans son agenda et le principal critère pour l’atteindre est que chaque travail ait obtenu la signature qui lui est attribuée par l’enseignant lorsque celui-ci juge que le travail a été correctement effectué et corrigé. C’est pour cela que les trois sources (outil, enseignant et élève) sont impliquées dans ce type d’évaluation.

12.4.3.7 Évaluation critériée

Les médiations mobilisées ou réalisées de façon directe sont attribuables, selon l’enseignant dans 50% des cas à l’élève et dans l’autre 50% des cas, à l’outil. Albert en attribue plutôt 38% à l'outil, 13% à son enseignant et s’en attribue le 50% restant. Leur perception est donc différente de ce côté. Nous attribuons cette différence de point de vue au fait que l’élève doit percevoir qu’il s’évalue lui-même en fonction de ses critères alors que l’enseignant perçoit que c’est lui qui réalise cette évaluation en fonction des critères qu’il a, en majeure partie, préalablement établis auprès de son élève.

12.4.3.8 Évaluation formative

Dans l’analyse du discours d’Albert, les médiations de type direct sont absentes. Par contre, son enseignant en mentionne qui viennent à 100% de lui, de façon directe. Implicitement (indirectement), Albert en attribue 25% à l’enseignant et 75% à lui-même, alors que l’enseignant s’en attribue 60% et en attribue 40% à l’élève. Selon nous, cette différence de perception est due au fait que chacun s’exprime davantage sur ce qu’il fait et moins sur la part de l’autre. Concernant l’évaluation formative, l’enseignant aborde souvent le fait qu’il donne des conseils à ses élèves : « Bin on, ça on, j’donne des conseils à tout l’monde, toute la classe, quasiment à toutes les s’maines» (EE, l. 174). Selon nous, cela démontre bien le caractère

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implicite (indirect) des médiations puisqu’il amène ses élèves à réfléchir pour s’autoévaluer. L’évaluation formative est réalisée de façon indirecte lorsque l’élève est amené (par l’enseignant, entre autres) à s’autoévaluer de façon formative (Buysse, 2012a), et c’est le cas ici d’Albert.

12.4.3.9 Évaluation sanction

Aucune évaluation de type sanction n’est présente dans le discours de l’élève, ni dans celui de l’enseignant. C’est le cas également pour Laurence. Nous pensons que l’enseignant amène ses élèves à analyser et à réfléchir à leurs erreurs dans le but d’améliorer leur propre rétroaction, ce qui expliquerait qu’une analyse de type sanction soit absente dans les deux cas analysés. Tel que mentionné ci-haut, Buysse (2012a) décrit ce type d’évaluation comme étant un jugement sans appel où l’erreur est perçue comme un échec et, selon nous, l’enseignant ne perçoit pas l’évaluation de cette manière.

12.4.3.10 Synthèse de la comparaison

Nous comparons maintenant les discours d’Albert et de son enseignant à son sujet en fonction des pourcentages de chaque médiation de deuxième ordre selon le mode de transmission direct (explicite) ou indirect (implicite) et selon la source de la médiation, soit l’outil, l’élève ou l’enseignant (tableau 12). Il en ressort que les sources de médiations sont partagées entre l’enseignant, l’élève et l’outil. L’élève utilise et se fie à son outil, notamment concernant la

procédure, questions de relance, l’évaluation en fonction de l’objectif et l’évaluation critériée. Comme son objectif est d’avoir terminé tous ses travaux, il est logique qu’il se fie à

son outil afin de s’évaluer puisque c’est là que la complétion de ceux-ci est consignée. Aucune évaluation sanction ne ressort.

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Tableau 12 : Tableau synthèse comparatif de l’analyse des discours au sujet d’Albert Tableau synthèse comparatif de l’analyse des discours au sujet d’Albert42,43 Discours

Médiations de 2e ordre

Enseignant Albert

Source de la médiation selon l’enseignant et Albert et mode de transmission (D= direct; I= indirect)

Outil Élève Enseignant Outil Élève Enseignant

D I D I D I D I D I D I Monitoring en % Tabou 0 0 0 0 100 0 0 0 0 0 0 0 Consigne 0 0 13 100 88 0 0 0 0 100 100 0 Question de relance 100 0 0 40 0 60 0 0 0 100 100 0 Procédure 67 0 0 50 33 50 75 0 0 100 25 0 Persévérance 0 0 0 60 0 40 0 0 0 67 0 33 Évaluation en % En fonction de l’objectif 0 0 50 0 50 0 33 50 67 50 0 0 Critériée 50 0 50 33 0 67 38 0 50 100 13 0 Formative 0 0 0 40 100 60 0 0 0 75 0 25 Sanction 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

12.4.3.11 Comparaison des modes de transmission perçus

Du point de vue du monitoring, les données relatives au discours de l’élève nous montrent qu’il perçoit avoir intériorisé une majorité (71%) des médiations relatives au contrôle. Les données issues de l’analyse du discours de l’enseignant nous montrent davantage un partage entre ce qui est intériorisé (56% indirect) et ce qui ne l’est pas (44% direct).

42 L’analyse du discours du parent ne fait pas partie du tableau synthèse puisque l’entretien avec celui-ci visait à

valider certains propos tenus par l’enseignant et l’élève et non pas à faire ressortir les médiations de 2e ordre. 43 Les totaux sont présentés dans le tableau 13 afin d’en alléger le contenu.

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En ce qui concerne l’évaluation, les données sont très similaires entre ce qui est direct et ce qui est indirect. En effet, du côté de l’enseignant, 53% des données concernent les médiations directes alors que 47% concernent les indirectes. Du côté de l’élève, ce sont 52% qui sont relatives aux médiations directes et 48% aux médiations indirectes. Nous interprétons ces données comme le fait que la compétence de gestion du temps, détaillée ici par la composante

évaluation, se partage dans des proportions presqu’égales entre, d’une part, ce qui est

intériorisé par l’élève, et donc ce qu’il peut faire seul, et, d’autre part, ce qui ne l’est pas encore, et donc ce pour quoi le support de l’enseignant et de l’outil est encore nécessaire. Tableau 13 : Tableau synthèse de l’analyse des discours d’Albert et de l’enseignant selon le mode de transmission

Tableau synthèse de de l’analyse des discours d’Albert et de l’enseignant selon le mode de transmission

Discours Médiations de 2e ordre Enseignant Discours Médiations de 2e ordre Albert

Direct Indirect Total de la dimension en %

Total de la composante en %

Direct Indirect Total de la dimension en % Total de la composante en % Tabou 0 100 3 100 Tabou 0 0 0 0 Consigne 89 11 28 100 Consigne 25 75 29 100 Question de

relance 37 63 25 100 Question de relance 33 67 21 100

Procédure 33 67 28 100 Procédure 36 64 39 100

Persévérance 0 100 16 100 Persévérance 0 100 11 100

Total

monitoring 44 56 100 100 Total monitoring 29 71 100 100 En fonction de

l’objectif 100 0 12 100 En fonction de l’objectif 43 57 33 100

Critériée 57 43 41 100 Critériée 80 20 48 100

Formative 37 63 47 100 Formative 0 100 19 100

Sanction 0 0 0 0 Sanction 0 0 0 0

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12.4.4 Traces de l’outil

Dans l’outil d’Albert, nous pouvons constater que les sections sont presque toutes remplies à quelques exceptions près. La section de la page 19244 où les travaux doivent être inscrits est dûment remplie chaque semaine.

La section signature est incomplète, faisant ressortir la possibilité que les travaux auxquels aucune signature n’est associée soient incomplets. Cependant, d’autres sections signature sont dûment remplies, mettant en lumière probablement les semaines où tous les travaux ont été complétés. Cette section viendrait donc confirmer les propos de l’enseignant lorsqu’il mentionne qu’au début, Albert ne terminait pas tous ses travaux dans les délais prescrits (une semaine) alors qu’en cours d’année, il réussissait à le faire, de façon générale, à quelques exceptions près.

La procédure dont Albert dit se doter lui-même (qui consiste à faire les corrections nécessaires après avoir complété tous ses travaux) laisse ses traces dans son agenda. En effet, les X qu’on retrouve à la gauche du titre du travail correspond au fait que le travail a été complété une première fois. Albert s’y fie afin de savoir à quel moment tous ses travaux ont été complétés et qu’il peut ainsi débuter ses corrections. Aussi, les X à la droite du titre du travail correspondent au nombre de fois où des corrections ont été apportées à un même travail.