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Chapitre III : La fixation du nombre de délégués au conseil communautaire : un équilibre délicat entre règles formelles et informelles

Section 2 : Des illustrations concrètes de la répartition des sièges communautaires : une pluralité de pratiques politiques soumises aux compromis entre élus

A. Les communautés de communes : une palette variée de répartition de sièges

Certains établissements publics de coopération intercommunale font un choix politique de représentation égalitaire des délégués de communes au sein de leurs conseils communautaires. Pourtant, aucune disposition législative intercommunale ne les soumet à cette obligation d’attribution égalitaire des postes communautaires. Ainsi un même nombre de sièges est attribué à chaque commune membre de l’EPCI indépendamment de la taille de sa population. Cette répartition de sièges de délégués communautaires se fait, certes, sur la base d’un accord amiable entre élus comme le stipule l’article L.5214-7, « la répartition des sièges au sein du conseil de la communauté de communes se fait, soit par accord amiable de l’ensemble des conseils municipaux, soit en fonction de la population », mais elle laisse aux élus la possibilité de construire la composition politique de l’organe délibérant.

Les élus, après les élections municipales de mars 2008, qui font le choix de la répartition stricte des sièges entre communes sont animés par le souci d’éviter la sous- représentation ou la sur-représentation des communes membres. L’un des exemples qui met en évidence cette répartition égalitaire des sièges communautaires entre les communes est la communauté de communes de Monts d’Azur, composée de quatorze communes. Chaque commune dispose sans tenir compte de la taille de la population de deux sièges de délégués de communes, soit au total 28 conseillers communautaires.

Pour Michèle Olivier, maire de la commune d’Andon et présidente de la communauté de communes des Monts d’Azur, cette expérience de répartition égalitaire des sièges de conseillers communautaires qui a fonctionné sous la mandature intercommunale précédente, et reconduite après les élections municipales de 2008, a l’avantage d’équilibrer les rapports de forces politiques au sein du conseil communautaire :

« Nous sommes deux conseillers communautaires par commune. Les décisions sont presque toutes prises à l’unanimité. On arrive à être tous d’accord sur la gestion de notre communauté de communes. Ainsi, des élus communautaires ne peuvent imposer leur décision à une autre commune ».297

La détention égalitaire du nombre de sièges communautaires par commune avait été la condition posée par les maires pour adhérer à une intercommunalité. Chaque maire ne voulait pas se sentir en minorité dans la prise de décision communautaire. La répartition égalitaire des sièges obligeait donc les maires à entrer dans une logique de prise de décision à l’unanimité. Michèle Olivier qui préside la CC des Monts d’Azur depuis sa création en 2000 n’a pas voulu prendre le risque de remettre en cause ce partage de sièges. Préserver son mandat de président passait par la reconduction de la pratique précédente d’attribution des sièges communautaires. Lors des élections municipales de 2008, les candidats dans leurs réunions publiques298 au sujet de l’intercommunalité ont défendu de maintenir en l’état le nombre actuel de conseillers communautaires. En défendant le statut quo communautaire, les maires veulent offrir des gages d’une certaine autonomie de leurs communes auprès de leurs

297 Extrait de l’entretien réalisé le 15 avril 2007 avec Madame Michèle Olivier, maire de la commune d’Andon et

présidente de la communauté de communes des Monts d’Azur.

298

Réunions publiques de Jacques Ballestra, candidat à la mairie d’Escragnolles, février 2008 ; de Thierry Gueguen candidat à la mairie de Séranon, janvier 2008…Ces candidats défendent le nombre de sièges communautaires précédent qu’ils veulent maintenir.

électeurs au sein de la CC des Monts d’Azur. Cependant, d’autres élus adoptent un système mixte de répartition des sièges.

Ainsi, après les élections municipales de 2008, des élus ont adopté, dans certaines communautés de communes, un système mixte de répartition de sièges qui consiste à accorder au préalable un nombre minimum de sièges communautaires par commune avant d’appliquer une stricte règle d’attribution proportionnelle à la population de la commune membre de l’établissement public de coopération intercommunale. Cette pratique implique donc au préalable un accord politique entre les élus pour attribuer un nombre minimum de sièges par commune et le reste des sièges attribués en fonction de la taille démographique de chaque comme membre. Par exemple, les élus de la communauté de communes des Terres de Siagne299, créée le 1er janvier 2009, à travers l’article 6 des statuts qu’ils ont élaborés, font le choix de ce système mixte de répartition des sièges communautaires. Ce mode de répartition a pour but d’atténuer l’importance démographique des communes les plus importantes et de fait, accentue les différentiels de « représentativité » des conseillers communautaires.

Le système mixte de répartition des sièges de délégués de communes, l’une des « inventions » des élus qui permet la combinaison de l’attribution d’un nombre minimal de conseillers communautaires par commune et la répartition proportionnelle à la population, et dans une moindre mesure, l’attribution des sièges en fonction des strates démographiques, est le plus courant dans les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre du département des Alpes-Maritimes car seule la CC des Monts d’Azur a adopté un système de répartition égalitaire de sièges communautaires. Le système mixte de répartition des sièges dans les communautés a l’avantage de permettre à chaque commune de disposer d’au moins un siège et d’amoindrir le poids des villes-centres dans les conseils communautaires. Cependant un seul critère d’attribution de sièges communautaires ne fait pas le consensus entre les élus. Ce choix peut aussi cacher d’autres réalités.

Si le choix de la répartition égalitaire des sièges communautaires au sein de la CC des Monts d’Azur vise à mettre sur un pied d’égalité les élus communautaires dans la prise de décision, celui des élus de la CC de Terres de Siagne semble s’inscrire dans une logique politique. Initiateur de ce regroupement intercommunal, Maxime Coullet, conseiller général et maire UMP d’une petite commune (Saint-Cézaire-sur-Siagne - 3 575 habitants) ne veut pas voir son pouvoir intercommunal diminué par une commune moyenne (Peymeinade – 7 844 habitants) détenue par un maire nouvellement élu en 2008, plutôt situé à gauche (Françoise Brousteau, soutenue par André Aschieri, maire Vert et Ecologiste de Mouans-Sartoux). En fait, si les maires attribuaient les sièges communautaires sur le seul critère démographique, la commune de Peymeinade en détiendrait plus dans une communauté de communes composée de 5 communes dirigées par des maires UMP. Une solidarité partisane UMP se joue là-aussi pour affaiblir un « partenaire intercommunal » de l’autre bord politique. Mais au-delà de cette solidarité partisane, chaque maire UMP cherche aussi par le mécanisme de la répartition mixte de sièges communautaires à détenir un certain pouvoir de décision au sein de l’assemblée intercommunale.

299 La communauté de communes des Terres de Siagne a été créée le 1er janvier 2009. Le conseil communautaire

compte 25 conseillers communautaires titulaires et 18 conseillers communautaires suppléants selon la répartition par commune, définie à l’article 6 des statuts.

B. L’atténuation des logiques démographiques dans la répartition des sièges

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