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CHAPITRE I : MISE EN CONTEXTE

1.5. Historique de la CTC et ses reformes

1.5.5. Le clivage Nord-Sud et la réorientation de la CTC

Mis à part les clivages sociopolitiques qui prévalaient au Togo, le comité de relance des activités de la CTC s’est rendu compte aussi de l’influence des clivages ethniques notamment Nord-Sud sur la cohésion entre les Togolais membres de la CTC. Ce clivage, selon certains historiens, semble être le prolongement des «propagandes et des discours» promus par les régimes politiques post indépendantistes en Afrique, lesquels ont donné lieu à une division en clans antagonistes dans le cas du Togo (Gayibor, Goeh-Akue, 2010 : 136).

Les avis et suggestions reçus au cours de ces entrevues ont permis au comité d’élaborer des recommandations susceptibles, comme le souhaitait le président d’alors dans sa lettre aux membres, de «ressouder les liens au sein de la Communauté»32 et de développer un fort

29Objectifs de la CTC à sa création. Disponible sur http://www.diastode.org/ctc/presentation.html, consulté le 9 février 2014.

30La DIASTODE est un collectif de certains Togolais de la diaspora qui lutte pour l’avènement de la démocratie au Togo. Voici le lien d’un document type de cette lutte :

http://www.diastode.org/Droits/Pourquoi_Eyadema_doit_partir.pdf

31Disponible sur http://www.diastode.org/ctc/presentation.html, consulté le 9 février 2014. 32Lettre du président aux membres pour informer les Togolais de la création du comité de relance.

sentiment d’appartenance. Ces recommandations sont formulées autour de quatre orientations stratégiques qui sont:

 Améliorer la performance organisationnelle de la CTC

 Améliorer et adapter l’offre de services aux besoins des membres  Contribuer à la prospérité du Canada

 Apporter un soutien effectif au développement du Togo

Nous résumerons brièvement les trois premiers points qui rejoignent notre préoccupation de départ.

Améliorer la performance organisationnelle de la CTC

Le comité suggère à la CTC de se consacrer en priorité à sa mission d’organisation exclusivement communautaire, c’est-à-dire s’adressant aux Togolais qui vivent au Canada, tel que le lui avait demandé le Congrès d’intégration et d’orientation de la Communauté togolaise au Canada, tenu à Sherbrooke33, en actualisant les textes en vue d’une adaptation au contexte actuel. Pour ce faire, selon le comité, la définition «claire» de tous les services que la CTC propose doit être faite. Il propose également que la visibilité de la CTC soit améliorée en faisant accroitre et en élargissant les efforts de communication. Tout cela dans un esprit de promotion des valeurs de solidarité, responsabilité, égalité et diversité pour créer un sentiment d’appartenance. Enfin le comité propose une grande rigueur administrative permettant une gestion peu claire qui a été soulignée par les membres, de par le passé.

Améliorer et adapter l’offre de service aux besoins des membres

Le comité de relance a aussi recensé les « besoins réels »34 des «nouveaux migrants»35 togolais. Cette population est notamment aux prises avec des difficultés d’insertion

33 Un congrès pour la redynamisation de la CTC fut organisé à Sherbrooke pour les 10 ans d’existence de la CTC.

34Ces besoins se sont diversifiés compte tenu de la pluralité des profils de migrants (venus directement du Togo ou ayant transité par un pays d’Europe...) Togolais et de leur accroissement au Canada et particulièrement au Québec (Selon Statistique Canada, la population immigrante d’origine togolaise au Canada est 84 pour cent résidente 69 pour cent des Togolais sont dans la province du Québec).

professionnelle. Car «la majorité des Canadiens d’origine togolaise occupant un emploi serait située dans la classe moyenne et ceux détenant un niveau élevé de diplôme ont du mal à s’insérer dans la vie professionnelle et se retrouvent pour la plupart des cas dans une situation de pauvreté endémique » (Rapport-CTC, 2010 : 16). Le Rapport-CTC, en s’appuyant sur les études faites par Lindsay (2001) sur les facteurs de discrimination des migrants africains au travail, retient la faiblesse de leur réseau socioéconomique comme l’un des facteurs explicatifs de leur situation de non «insertion professionnelle».

Il faut dire que selon le rapport, «l’analyse du profil socioéconomique de la population immigrante d’origine togolaise au Canada [aurait] démontré qu’elle est hautement scolarisée et qualifiée, mais éprouve d’énormes difficultés dans le domaine de l’insertion professionnelle» (Rapport-CTC, 2010 :28). Selon certaines études sur l’intégration des migrants au Québec (Chica, 2009; Forcier et al., 2012) les difficultés semblent être liées à des pratiques discriminatoires36 (dont nous avons parlerons dans le chapitre suivant) qui influencent, plus ou moins, l’intégration des Togolais dans les réseaux professionnels. Pour faciliter l’insertion professionnelle, la CTC devrait, estime le Rapport-CTC, favoriser un espace de rencontre, à travers les activités qu’elle organise, en vue de permettre aux membres d’abord de se connaitre, ensuite de mettre à profit le réseau personnel des uns et des autres, en vue de faciliter leur intégration socioprofessionnelle (Rapport-CTC, 2010). La promotion culturelle par l’entremise des activités culturelles37 est aussi proposée comme critère, qui pourrait valoriser l’identité des personnes d’origine togolaise et des jeunes togolais issus de l’immigration. L’accueil et l’appui à l’installation des nouveaux arrivants et l’assistance aux membres en cas d’évènements heureux ou malheureux sont également proposés par le comité de relance.

35En parlant de nouveaux immigrants, c’est par rapport au premiers Togolais arrivés au Canada qui, dans la majorité des cas, avaient reçu une bourse d’études pour se former dans un domaine et avoir la compétence nécessaire pour combler le vide en retournant au Togo. Et donc ils n’avait pas, à priori, des visions d’immigration par rapport à ceux qui aujourd’hui choisissent d’immigrer au Canada par le programme d’immigration (Certificat de Sélection au Canada).

36Ici nous comprenons la discrimination sous deux angles que nous développerons amplement dans un autre chapitre. Dans le premier cas il s’agit d’une « discrimination inhérente » qui provient de la personne qui cherche et qui travaille, par rapport à son passé culturelle et trajectoire de vie professionnelle. La deuxième est une « discrimination structurelle » qui est lié aux pratiques de la société d’accueil dans notre cas le Québec, dont l’immigrant ne maitriserait pas nécessairement les contours à priori.

37Au cours des périodes de l’année comme le 27 avril, date de l’indépendance du Togo, est organisé, des activités culturelles à Montréal.

La contribution à la prospérité du Canada

Concernant le troisième point sur la contribution à la prospérité au Canada, le comité fait le constat que la communauté togolaise ne parvient pas encore à partager suffisamment la richesse de la culture togolaise avec la société canadienne, et que les compétences professionnelles de ses membres sont sous-employées au désavantage de leur pays d’accueil, il est opportun pour la CTC d’adapter son offre de service et ses façons de faire aux attentes légitimes du Canada à l’égard de ses citoyens en matière culturelle et économique. Ainsi il a proposé 4 points sur lesquels la communauté pourra exploiter. Premièrement, sur le plan culturel, la contribution se fera à travers des activités de promotion et de valorisation du brassage des cultures togolaise et canadienne. Pour ce faire, des activités de découvertes culturelles et de sensibilisation pourront être organisées périodiquement en collaboration avec les entreprises d’économie sociale oeuvrant dans ce domaine. Le Comité de relance recommande :

- La participation effective et collective de la Communauté togolaise aux initiatives communautaires organisées lors de la fête nationale du Canada et des fêtes nationales provinciales. Ce sont en effet de bonnes occasions pour partager avec la société d’accueil la richesse du répertoire culturel togolais, particulièrement en ce qui concerne la musique (Akpè, Kamou, Adjogbo, etc.)38

- L’organisation régulière de la fête du 27 avril. Dans sa nouvelle mission d’organisation fédératrice des forces vives de la Communauté, la CTC pourra organiser cette fête anniversaire de l’indépendance du Togo en collaboration avec l’Ambassade du Togo au Canada. Cela contribuera à enlever certaines barrières de nature politique qui font obstacle à l’émancipation de la CTC;

- L’organisation, sur une base annuelle, d’une fin de semaine récréative de brassage culturel et d’intégration, dénommée « Culture+ ». Le comité propose que l’évènement soit organisé durant la fin de semaine de la fête du travail en changeant de ville à chaque année. Il estime que la CTC devrait procurer le lieu, mais la participation ne serait pas limitée à ses seuls membres. Il suggère que l’événement

soit libre et gratuit et l’hébergement et la restauration soient aux frais des participants.

Deuxièmement, le comité note que sur le plan économique, les personnes d’origine togolaise, comme tout autre immigrant, contribuent à la santé économique et financière du Canada à travers le paiement des taxes, impôts et redevances. Cette contribution pourra être améliorée si les professionnels togolais accèdent à de meilleurs emplois et connaissent une plus grande prospérité socioéconomique. Une autre façon pour la CTC d’améliorer cette contribution consistera à appuyer, à l’instar des communautés asiatiques, les entreprises canadiennes dans leurs démarches de pénétration du marché ouest-africain en général et togolais en particulier. Ainsi le comité constate que ce marché est relativement stable et en pleine expansion, malgré quelques problèmes économiques. Dans le but d’insuffler une synergie productive à la démarche, la CTC pourra jouer le rôle d’organisation facilitatrice, en collaboration d’autres organismes canadiens et les représentations togolaise et ouest- africaines au Canada. Pour une meilleure participation de la Communauté togolaise à l’essor économique du Canada.

La dernière des propositions du comité de relance est l’apport d’un soutien effectif au développement du Togo. Nous estimons que ce point n’édifie pas notre objet d’étude. Ainsi nous faisons le choix de ne pas le présenter.

Pour conclure cette partie, retenons que les services de la communauté à ses membres, le partage de la richesse culturelle togolaise avec la société canadienne, la recherche et la transmission des offres d’emplois qualifiés des entreprises privées et des fonctions publiques fédérale et provinciales à la Communauté et l’apport au développement du Togo, représentent les suggestions que le comité a faites au Conseil d’Administration pour rendre les compétences des membres de la CTC profitables aux Togolais et au Québec, leur milieu d’accueil. Ce qui est important de retenir est qu’après ce rapport du comité de relance de la CTC, les nouveaux membres du conseil d’administration ont donné une nouvelle

orientation aux activités de la CTC. La CTC voudrait vivre désormais une nouvelle vocation : mettre l’accent sur une «communauté de services»39.