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UTILISATION EXEMPLAIRE DES TIC

FACTEURS INFLUENÇANT L’INTÉGRATION DES TIC

3.1. Choix méthodologique : l’étude multicas

Le champ de l’étude sur l’intégration des TIC, et plus spécifiquement celui de l’exemplarité à l’intégration des TIC, est relativement jeune. À l’exception d’une recherche (Honey et Moeller, 1990, où n = 20) relativement ancienne dans le contexte en pleine mouvance des TIC et d’une recherche plus récente (Ertmer, Ross et Gopalakrishnan, 2001, où n=17), jusqu’à maintenant, l’utilisation exemplaire des TIC ne semble avoir été explorée que par des enquêtes utilisant des questionnaires. À titre d’exemples, les travaux qui sont apparus les plus pertinents et importants à l’égard de cette problématique furent réalisés par questionnaires auprès de nombreux sujets (Hadley et Sheingold, 1993, n = 608 ; Becker, 1994, n = 516 ; Berg, Benz, Lasley et

Raisch, 1997, n = 76). Ces études offrent l’avantage indéniable de produire des résultats généralisables, en présentant les caractéristiques communes aux nombreux sujets. Elles masquent cependant la spécificité de chaque individu et le contexte dans lequel il évolue. Hadley et Sheingold (1993) soulignent à cet effet que :

Afin de découvrir ce que de nombreux enseignants, reconnus pour leurs efforts à utiliser les TIC, faisaient en classe et ce qu’ils avaient l’impression d’avoir accompli, nous avons choisi de faire, dans cette étude, une collecte de données par enquête, tout en étant conscient de sacrifier une partie de la profondeur et de la texture qu’une étude qualitative aurait permise.42 (Traduction libre, p. 264)

Il est donc apparu important d’offrir une vision complémentaire à ces études et d’apporter, dans le champ d’études, plus de « profondeur » et de « texture », tels que le soulignent Hadley et Sheingold. Ainsi, c’est en s’attardant à la spécificité des individus plutôt qu’à leurs traits communs, grâce à une méthodologie qui permet d’étudier chaque individu en profondeur et de le questionner longuement pour comprendre ce qui rend son cheminement unique, qu’il convenait d’explorer le phénomène de l’utilisation exemplaire des TIC. Le choix de l’étude de cas, et plus particulièrement d’une étude multicas (Yin, 1994 ; Stake, 1995 ; Karsenti et Demers, 2000) comme méthodologie de recherche, est donc apparu le plus approprié, et ce pour plusieurs raisons. Selon Karsenti et Demers (2000), cette méthode de recherche « fournit une situation où l’on peut observer l’interaction de divers facteurs ; ceci

permet de saisir la complexité et la richesse des situations sociales » (p. 225).

L’étude de cas permet l’étude en profondeur d’un individu et la description détaillée de sa spécificité et du contexte dans lequel il évolue. L’étude multicas permet, quant à elle, de faire émerger les convergences entre les cas. Elle revêt donc un caractère

42 «!We selected a survey methodology for this study, recognizing that it was necessary to sacrifice

some of the depth and texture that qualitative studies allow in order to see what many teachers, recognized for their efforts using technology, were now doing and felt they had achieved!» (Hadley et

comparatif qui va au-delà du cas individuel et qui la rend plus robuste que l’étude de cas simple.

Yin (1994) et Anderson (1998) soulignent que l’étude de cas est une méthodologie de recherche appropriée quand : « les questions de recherche s’intéressent au

« comment » et au « pourquoi » (…) » (Traduction libre, Yin, 1994, p.1). Yin ajoute

que l’étude de cas est un choix intéressant « quand le chercheur a peu de contrôle sur

les événements et quand la recherche porte sur un phénomène contemporain étudié dans son milieu naturel43 » (Traduction libre, p. 1). Le problème posé par la présente recherche se situe au niveau du comment et pourquoi certains enseignants ont développé une utilisation exemplaire des TIC et porte sur un phénomène très contemporain [l’intégration des TIC au primaire] qui, bien qu’il soit commun à de nombreux milieux et pays, a été étudié dans le contexte spécifique au Québec. De plus, il a été impossible de contrôler les événements puisque les enseignants à l’étude avaient déjà développé une utilisation exemplaire des TIC. Comme la recherche répond aux trois conditions de Yin, le choix de l’étude de cas comme méthodologie de recherche est apparu pertinent et justifié.

3.1.1. Caractéristiques de l’étude de cas

Plusieurs auteurs proposent des ouvrages sur l’étude de cas comme stratégie pédagogique ou méthodologie de recherche, toutefois, quatre références traitent plus spécifiquement de l’étude de cas comme méthodologie de recherche en éducation :

- Merriam (1988), selon une perspective interprétative ; - Stake (1995), selon une perspective « mixte » ;

- Yin (1994), selon une perspective plus positiviste ;

43 «!(…)“how” or “why” questions are being posed, when investigator has little control over the

events, and when the focus is on a contemporary phenomenon within some real-life context!» (Yin,

- Karsenti et Demers (2000), proposent une synthèse des trois approches précédentes.

Sur le plan épistémologique, une recherche interprétative est appropriée pour comprendre le cheminement qui a mené des enseignants à développer une utilisation exemplaire des TIC. Comme l’explique Savoie-Zajc (2000), la recherche interprétative est « animée du désir de mieux comprendre le sens qu’une personne

donne à son expérience » (p. 172). Ainsi, de par sa nature, ce type de recherche colle

bien à l’objectif défini au premier chapitre, et c’est pourquoi l’approche de Merriam a été adoptée.

Merriam (1988) attribue quatre caractéristiques à l’étude de cas qualitative. Elle soutient que l’étude de cas est :

- spécifique, (Traduction libre de « particularistic ») puisqu’elle s’intéresse à une situation, un événement, un programme ou un phénomène particulier ; - descriptive, puisqu’elle produit une description détaillée et complète d’un

phénomène ;

- heuristique, puisqu’elle présente une nouvelle compréhension d’un phénomène, favorise la découverte de nouvelles significations et confirme ce que l’on sait ;

- inductive, puisqu’elle favorise l’émergence de concepts, d’hypothèses ou de généralisations sur un phénomène.

De plus, comme le mentionne Merriam (1988), la méthodologie de l’étude de cas convient particulièrement bien aux recherches exploratoires :

Si les théories sont inexistantes ou si les théories en place n’expliquent pas adéquatement le phénomène, il est impossible de formuler des hypothèses pour structurer la recherche. Le chercheur employant la méthodologie de l’étude de cas amasse le plus d’information possible sur le problème

[description en profondeur] dans le but d’interpréter le phénomène et de développer une théorie.44 (Traduction libre, p. 28)

La présente recherche vise à produire une description détaillée du cheminement qu’ont parcouru les enseignants ayant développé une utilisation exemplaire des TIC. Elle tente ainsi d’offrir une nouvelle compréhension du phénomène, une compréhension plus en profondeur de la spécificité des individus à l’étude (les cas), pour laisser émerger des hypothèses permettant de mieux comprendre comment se développe une utilisation exemplaire des TIC.