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Brassant deux ou trois strates générationnelles, les acteurs « marginaux » venaient souvent de l’université. Dès 1970, au sein de l’École de Communication de l’Université Fédérale de Rio de Janeiro (U.F.R.J.), où enseigna Heloísa Buarque de Hollanda, un noyau s’était formé autour des étudiants Charles Peixoto, Guilherme Mandaro et Chacal157. À la jonction de la plage de Botafogo et de la pointe de l’Urca, ou dans ses annexes disséminées dans la ville, celle qui héritait du prestigieux passé de l’Université du Brésil constitua sur ce terrain un pôle très actif, bien qu’exposée en tant qu’institution publique aux interventions du régime militaire qui renvoyait arbitrairement,

157 Cf. Chacal, Posto 9 : um pedaço de mau caminho, Rio de Janeiro, Relume-Dumará, Prefeitura, 1998, p. 21.

sous forme de licenciements ou de mises à la retraite d’office, les professeurs jugés subversifs.

En revanche, le statut privé de l’Université catholique, la Pontifícia Universidade Católica (P.U.C.) installée dans le quartier de Gávea, en fit un lieu plus protégé. C’est là, par exemple, que se tint, du 9 au 19 octobre 1973, « Expoesia I », une exposition de poèmes organisée par le Département d’Arts et Lettres, à l’initiative de son directeur Affonso Romano de Sant’Anna, poète lui-même. Dans la diversité quelque peu chaotique des expériences passées et en cours, la manifestation visait, sans parti pris — c’est-à-dire donc de manière non moins désordonnée —, à rendre compte à la fois des leçons des avant-gardes des deux décennies précédentes et des productions poétiques contemporaines, expressions tant sonores ou visuelles qu’écrites. À la P.U.C. de Rio de Janeiro, aux côtés de Luiz Costa Lima, qui avait publié en 1972 sa thèse de troisième cycle, Estruturalismo e teoria da literatura [Structuralisme et théorie littéraire], de Vilma Arêas158 ou d’Antônio Carlos de Brito (plus connu comme Cacaso, pseudonyme par lequel il sera désormais souvent désigné), certains jeunes enseignants comme Clara Alvim159 ou Silviano Santiago160 revenaient de séjours en Europe, où ils s’étaient frottés à la nouvelle critique largo sensu. Les uns et les autres s’employèrent à instiller, dans une didactique passablement

158 Enseignant la littérature portugaise, Vilma Arêas a, dans les années soixante-dix, publié un premier recueil de proses : Partidas, Rio de Janeiro : Francisco Alves Editora, 1976.

159 Parente du cinéaste Joaquim Pedro de Andrade et épouse du poète Francisco Alvim, Clara Alvim fut de ceux qui perdirent leur emploi à l’Université Fédérale de Rio de Janeiro par sanction idéologique. Quand elle revint au Brésil en 1972, elle décrocha néanmoins un contrat à la P.U.C. de Rio de Janeiro, avant de suivre son mari diplomate à Brasília, en 1976.

160 Né à Formiga (Minas Gerais) en 1936, licencié ès-Lettres de l’Université Fédérale du Minas Gerais à Belo Horizonte, Silviano Santiago a soutenu une thèse sur Les Faux-Monnayeurs d’André Gide, à la Sorbonne, en 1968. Il a par la suite voyagé et enseigné au Nouveau Mexique (États-Unis), a obtenu le « tenure » de la State University of New York at Buffalo, a enseigné au Canada, avant d’entrer à la P.U.C. de Rio de Janeiro. Après Salto (São Sebastião do Paraíso, 1970) pour partie dédié à Haroldo de Campos et salué par Affonso Ávila, il a publié en 1978 un second recueil de poèmes, Crescendo durante a guerra numa província ultramarina, Rio de Janeiro, Francisco Alves.

convenue, les leçons fraîchement acquises de l’école structuraliste, de Roman Jakobson à Jacques Derrida, en passant par Roland Barthes, Algirdas-Julien Greimas, Tzvetan Todorov, Michel Foucault ou encore Gilles Deleuze.

Parmi leur public figuraient Ana Cristina Cesar, Eudoro Augusto, Geraldo Eduardo Carneiro, João Moura, Luis Olavo Fontes, qui allaient être d’importants acteurs de la poésie marginale… Professeurs et étudiants partageaient souvent une même vocation pour l’écriture et la littérature, de sorte que la frontière entre eux, moins rigide au Brésil qu’en France, en était d’autant plus distendue. Des échanges se tissaient autour de leurs poèmes, des discussions s’engageaient sur la création, le rôle de l’écrivain, se nouaient des liens de complicité ou d’amitié. Une des preuves nous en est fournit par le recueil de lettres écrites par Ana Cristina Cesar dans les années 1970-1980, Correspondência incompleta. Trois des quatre destinataires sont des relations nées à la P.U.C. ; la quatrième, Heloísa Buarque de Hollanda, l’organisatrice du volume, enseignait à l’U.F.R.J., comme nous l’avons vu, et dirigea, en 1977-1978, le master qu’Ana Cristina Cesar réalisa sur le cinéma documentaire et la littérature161. Pour les autres, deux étaient professeurs de l’université catholique : Cecilia Londres, qui y enseignait la Théorie de la Littérature et Clara Alvim, déjà citée, qui fut d’ailleurs celle qui présenta son élève à Heloísa Buarque de Hollanda. La première fit d’elle son assistante [monitora] à partir de 1974. La dernière correspondante, Ana Candida Perez, étudiante et collègue d’Ana Cristina Cesar — elle avait connue en 1973 au cours que donnait Milton José Pinto sur le théâtre de Nelson Rodrigues —, bénéficia parallèlement de la même promotion. En dehors de l’Université, quelques-uns avaient l’habitude

161 Heloísa Buarque de Hollanda joua même un rôle décisif pour la publication de ce travail : Ana Cristina Cesar, Literatura não é documento, Rio de Janeiro : Funarte, 1980.

de se retrouver, selon les affinités, en quelques domiciles privilégiés : qui chez Virgínia Sabino, la fille de l’écrivain et chroniqueur Fernando Sabino, là où finit le quartier de Leblon ; qui chez Cacaso, sur l’avenue Atlântica de Copacabana ; qui rue Faro, chez Heloísa Buarque de Hollanda, non loin du paisible Jardin Botanique…

Sorties

L’espace de la poésie marginale est aussi fait des rendez-vous à la fois récurrents et transitoires destinés à « promouvoir » les fascicules édités. Une myriade d’artistes, de plasticiens, de musiciens, d’écrivains, s’y retrouvait à la tombée de la nuit pour la sortie d’une ou plusieurs publications concomitantes, souvent accompagnée de lectures de poèmes, de débats, d’improvisations, de happenings. Chacal résume rétrospectivement cette période :

La poésie était alors le fer de lance du mouvement souterrain. Sans les concessions à l’industrie culturelle auxquelles la chanson et le cinéma étaient tenus, les lignes mal tracées s’écoulaient sur la feuille de main en main, de bouche en bouche, de plage en plage. Une poétique sale, jaseuse, mal dite, s’exprimait dans les soirées explosives de la Librairie Muro, au Parc Lage et au Musée d’art moderne162.

Le Parc Lage, une ancienne résidence privée fort luxueuse installée au cœur d’un vaste jardin, avait été transformé en école d’arts visuels. Il avait encore pour lui d’avoir prêté ses décors au Cinema Novo, de Terra em transa de Glauber Rocha aux scènes finales de l’adaptation de Macunaíma par Joaquim

162 « A poesia era então a ponta-de-lança do movimento subterrâneo. Sem os compromissos com a indústria cultural que a música e o cinema atravessavam, as mal traçadas linhas escorriam pelo papel de mão em mão, de boca em boca, de praia em praia. Uma poética suja, boquirrota, mal falada, era expressa em lançamentos explosivos na Livraria Muro, no Parque Lage e no Museu de Arte Moderna. », Chacal, op. cit., p. 31.

Pedro de Andrade. Les salles et les allées en plein air du Musée d’art moderne accueillirent elles aussi, au milieu des années soixante-dix, les auteurs des derniers recueils poétiques parus et leurs invités. Quelques librairies, Cobra Norato, Folhetim, Leonardo da Vinci…, jouèrent également ce rôle tout en assurant, parce que librairies, une continuité à une diffusion plus qu’aléatoire. Certaines hébergeaient plus volontiers tel ou tel groupe en fonction des sympathies du moment, comme la librairie Muro investie un temps par les poètes de « Nuvem Cigana » [Nuage gitan].

Ces remarques mettent en évidence deux aspects de ce renouveau littéraire. Le premier tient à son caractère « alternatif », touchant à la structure éditoriale elle-même sur laquelle nous reviendrons. Ainsi, du seul point de vue de la distribution du livre, les infrastructures brésiliennes étaient (et sont encore) très insuffisantes : il existait dans tout le Brésil, dans les années quatre-vingts, moins de librairies au sens strict (environ quatre cent cinquante) que dans la seule capitale argentine, Buenos Aires, où l’on en dénombrait plus de cinq cents. Devant un système relativement fermé, on s’autoproduit, imprimant avec les moyens du bord, recourant à telle connaissance, détournant les outils de reproduction de son centre universitaire, la ronéo notamment — ce qui explique qu’on ait aussi désigné le mouvement de « génération du “mimeógrafo163” ». L’entraide est de règle, d’un groupe à l’autre, d’une ville à

Sur le rôle du Musée d’art moderne et du Parc Lage, cf. aussi la chronique de Torquato Neto du 17 septembre 1971, qui en signifie déjà l’importance (in : Os últimos dias de Paupéria, op. cit., p. 66).

163 Cf. par exemple Carlos Alberto Messeder Pereira, Retrato de época : poesia marginal anos 70 [Portrait d’époque : poésie marginale — années 70], Rio de Janeiro : Mec-Funarte, 1981, p. 41 ou Antônio Carlos de Brito, « Tudo da minha terra : bate-papo sobre poesia marginal », in : Almanaque, n° 6, São Paulo : Brasiliense, 1978, repris in : Antônio Carlos Ferreira de Brito, Não quero prosa, Vilma Arêas (dir.), Rio de Janeiro : Editora da Ufrj, Campinas : Editora da Unicamp, 1997, p. 19. Cet article de Cacaso est né de son intervention dans le cadre du débat sur la littérature marginale, tenu en juin 1975 au Musée d’art moderne de Rio de Janeiro.

l’autre, d’un État à l’autre, comme le montre la circulation des imprimés de Brasília à Rio, de São Paulo à Belo Horizonte ou à Salvador.

La citation de Chacal met en avant, d’autre part, l’informalité du mouvement, dont les autres points de rencontre doivent être cherchés du côté des cafés, des espaces privés, des plages, voire des groupes carnavalesques164

. Il est significatif que ce même poète ait regroupé les évocations de cette époque sous le simple titre de Posto 9, l’un des repères jalonnant le littoral atlantique de la zone sud carioca s’étendant de Copacabana à Leblon. Le « Poste 9 », concrétisé comme tous les autres par une petite bâtisse de plage où fonctionnaient quelques services de premiers secours, était devenu le point de ralliement de cette bohème après la destruction du « Pier », une digue provisoirement édifiée au début des années soixante-dix pour les surfeurs, à l’entrée est du quartier d’Ipanema, mais qui était devenue un point de concentration des fumeurs de marijuana : « En 74, se souvient Chacal, ils ont démonté le Píer et la fine équipe, telle une dune, s’est déplacée le long de la plage vers la rue Montenegro. Elle a traversé la rue et planté son drapeau en face de l’Hotel Sol Ipanema165 », là où se retrouvaient, quelques années auparavant, les figures paternelles des poètes précurseurs Francisco Alvim et Carlos Felipe Saldanha166.

164 Chacal parle du « bloco [regroupement d’individus défilant ensemble, sous un même intitulé, pendant le carnaval] Charme da simpatia », qui partait de la Praça da Paz, suivait la rue Maria Quitéria et défilait sur l’avenue Vieira Souto, artère de front de mer très richement habitée, jusqu’à l’hôtel Sol d’Ipanema, « où il déposait ses reliques entre le sable et la mer. […] Le “Charme” [sous la baguette de Pedro Cascardo et de Dionísio Oliveira] était le bras ailé de Nuvem Cigana, groupe excessif qui élargit la voix de la poésie dans les années 70. » (« onde depositava seus restos entre a areia e o mar. […] O Charme era o braço alado da Nuvem Cigana, grupo abusado que amplificou a voz da poesia nos anos 70. », Chacal, op. cit., pp. 30-31).

165 « Em 74, desmontaram o Píer e a galera, como uma duna, caminhou pela praia na direção da Montenegro. Atravessou a rua e hasteou sua bandeira em frente ao Hotel Sol Ipanema. » Chacal, ibid., p. 29.

Pour cette nébuleuse à « 99 % artiste167 », les années allant de 1975 à 1980 virent le règne du Sol Ipanema, mais aussi de la paillote du « Russe » et de la rue Montenegro168, rebaptisée Vinícius de Moraes en 1980 puisque la petite histoire raconte que c’est de l’un de ses bars que le célèbre poète et parolier a remarqué la « garota de Ipanema » chantant depuis dans nos oreilles sur la mélodie d’Antonio Carlos Jobim. En cette ère de chaos politique entretenu au nom de l’Ordre et du Progrès, de retour à l’ordre moral, Ipanema restait

le refuge et l’exutoire de la bourgeoisie intellectuelle et bohème. […] Les habitués du Poste 9 [étaie]nt des psychanalystes en vue, des cinéastes comme Joaquim Pedro de Andrade, Glauber Rocha, Júlio Bressane ou Carlos Diegues, des acteurs et des musiciens comme Caetano Veloso, Gal Costa, Ney Matogrosso, les Novos Baianos, Norma Benguell, Regina Casé… Le Poste 9 lan[çait] les modes audacieuses, comme le topless, ou la

tanga169.

Collections

Cette structure informelle n’exclut toutefois pas l’émergence de polarités, sous la forme de groupes identifiés le plus souvent par une sorte de sceau éditorial. La collection « Frenesi » [Frénésie], en publiant en octobre 1974 Francisco Alvim (Passatempo [Passe-temps]), Roberto Schwarz (Corações veteranos [Cœurs vétérans]), Antônio Carlos de Brito (Grupo escolar [Groupe scolaire]), Geraldo Eduardo Carneiro (Na busca do sete-estrelo [En quête des

167 Chacal, ibid., p. 30.

168 Cf. Chacal, ibid., p. 46.

169 Armelle Enders, Histoire de Rio de Janeiro, Paris : Fayard, 2000, p. 309. Renvoyons aussi à la source brésilienne : Scarlet Moon de Chevalier, Aréias escaldantes. Inventário de uma praia, Rio de Janeiro : Rocco, 1999, pp. 18, 31-32 et 59. La « tanga » désigne un maillot de bain des plus économes en matière textile.

étoiles filantes170]), les textes de João Carlos Pádua et les photographies de Bita (Motor [Moteur]), rassemble des noms dont certains témoignent d’une exigence intellectuelle, d’une conscience critique peut-être plus grande que d’autres. Carlos Alberto Messeder Pereira, qui consacre à « Frenesi » près d’une cinquantaine de pages dans sa précieuse enquête ethnographique sur la poésie marginale, lui attribue un caractère « “plus organisé”, “plus institutionnalisé” », au regard de la production anarchique et ludique qui la précède171

. La collection a en outre la particularité de réunir deux générations, les tout jeunes auteurs et ceux qui, comme Roberto Schwarz, Cacaso ou Francisco Alvim, ont déjà un livre à leur actif, paru au cours de la décennie précédente : respectivement les essais de A sereia e o desconfiado172

[La Sirène et le Méfiant], et les recueils de poésie A palavra cerzida173 [La parole ciselée] et Sol de cegos174 [Soleil d’aveugles]. Deux étudiants y côtoyaient ainsi leur professeur de théorie littéraire, licencié en philosophie, un enseignant de l’Université de São Paulo, licencié en sciences sociales et titulaire d’un master en littérature comparée obtenu aux États-Unis, mais qui avait dû s’exiler à Paris, et un diplomate. Les cinq « lancements » furent organisés à la librairie Cobra Norato, et la collection n’eut pas de suite.

Moins unifié et plus circonstanciel en un sens, mais aussi un peu plus durable, le label « Vida de Artista » [Vie d’artiste] — dont la légèreté se matérialisait par un ballon dirigeable suspendu dans les airs, légèrement incliné — fut à l’origine étroitement associé à la communauté fréquentant les week-ends de la maison de campagne de Luis Olavo Fontes, à partir des années

170 « Sete Estrelo » désigne une constellation. L’expression, elle, parle d’une chose d’accès difficile, sinon accessible. Notre traduction, non littérale, cherche à s’approcher de l’image.

171 Carlos Alberto Messeder Pereira, Retrato de época, op. cit., pp. 137-182, et en particulier p. 138.

172 Roberto Schwarz, A sereia e o desconfiado , Rio de Janeiro : editora Civilização Brasileira, 1965.

1975175. L’isolement et la convivialité qui y régnaient étaient propices aux rencontres et aux échanges de vue et d’expérience entre jeunes artistes de tous horizons et de toutes expressions. Alors plus ou moins compagne de « Lui », Ana Cristina Cesar y était une sorte d’égérie, sans que, pour autant, jamais elle ne publie dans la collection. Les livres en sont techniquement moins soignés. La « marque » consiste en un simple tampon confectionné par Cacaso et appliqué aléatoirement sur les exemplaires, au hasard des rencontres et des agréments tacites. Elle se révèle de ce fait plus perméable, transcende les cercles, réunit aussi bien le Cacaso de « Frenesi » que Chacal, du groupe « Nuvem Cigana ».

Pour sa part, justement, ce « Nuage gitan » semble le plus structuré de ces « labels » éditoriaux176

. Son nom vient d’une chanson écrite par Lô Borges et Ronaldo Bastos, interprétée par Milton Nascimento sur le célèbre Clube da esquina [Club du coin de la rue] (1972), autre album référence de l’époque, d’une fraîcheur et d’une créativité toutes juvéniles. Ce même Ronaldo Bastos avait constitué, toujours sous ce nom, une société à vocation culturelle mais sans projet défini, sur le modèle de l’« Apple » des Beatles. Autour d’une poignée de personnes fréquentant la « Maison de Silvestre », dans le quartier bohème de Santa Teresa, « Nuvem cigana » se mit à réunir chaque semaine, de manière informelle, des poètes, musiciens, dessinateurs, architectes… De ces discussions à bâtons rompus surgit l’idée de mettre l’équipement graphique rudimentaire de la firme au service de la poésie. Charles y publia Creme de lua [Crème de

174 Francisco Alvim, Sol de cegos, Rio de Janeiro : Gráfica olímpica ed., 1968.

175 Cf. Retrato de época, op. cit., pp. 282-313. L’amphitryon est d’ailleurs le premier à s’y éditer : Luis Olavo Fontes, Prato feito, Rio de Janeiro : coll. « Vida de Artista », 1974. Puis viennent en 1975 : Chacal, América ; Luis Olavo Fontes et Antonio Carlos de Brito, Segunda Classe ; Eudoro Augusto, A Vida alheia ; Antonio Carlos de Brito, Beijo na boca (publié en octobre 1975). Auxquels il faut ajouter, en octobre 1976, Papéis de viagem, de Luis Olavo Fontes, et, sans date : Carlos Saldanha, Aqueles papéis.

lune] en 1975, un recueil suivi de plusieurs autres177, puisque la collection devait perdurer jusqu’à la fin des années soixante-dix. S’y ajoutait une production d’affiches, de calendriers… La forte personnalité de Chacal tourna aussi « Nuvem cigana » vers l’« événement » : la soirée, le spectacle plus ou moins improvisé comme celui d’une parole qui advient en une sorte de féconde immédiateté, avec un sens du rythme, de la synthèse, de la formule, particulièrement adapté à la performance ou à la chanson. La sortie de Quampérios donna ainsi lieu, en 1977, à des festivités dont Cacaso rend compte en ces termes :

Le Parc Lage a vécu une nuit de fête, avec son préau intérieur bondé de gens, une scène en bois à moitié improvisée et une sonorisation, des projections de diapositives, une dramatisation fantaisiste, des intermèdes musicaux, mais surtout les poètes disant leurs poèmes et ceux d’autres auteurs, le poète récitant, ce qui constitue un curieux moyen terme entre la littérature et la musique populaire, le poète devenant une synthèse entre l’homme de lettres et le chanteur, entre l’acteur et lui-même178.

On comprend mieux ainsi les mentions d’« Hendrix, Joplin, Jim Morrison, Brian Jones » dans l’introduction que Chacal rédige pour l’édition commémorative de son premier recueil poétique, Muito prazer179

. Dans une fine analyse d’un recueil

177 On note, en 1975 encore, Vau e talvegue [Val et thalweg] de Ronaldo Santos. Puis, en 1976, Charles à nouveau, avec Perpétuo Socorro [Perpétuel secours] ; Guilherme Mandaro, Hotel de Deus [Hôtel de Dieu] ; et un recueil collectif : Almanaque biotônico vitalidade n° 1, suivi l’année suivante du n° 2. En avril 1977, Chacal y publie Quampérios. La collection, forte de son succès, accueille deux volumes parus en 1975 sous d’autres auspices : O rapto da vida [Le rapt de la vie] de Bernardo Vilhena et América de Chacal (édité initialement par « Vida de artista »). Enfin, en octobre 1979, paraissent Coração de cavalo [Cœur de cheval] de Charles, 14 bis de Ronaldo Santos et Atualidades atlânticas [Actualités atlantiques] de Bernardo Vilhena.

178 « O Parque Lage viveu uma noite de festa, com o saguão interno apinhado de gente, um palco de madeira meio improvisado com aparelhagem de som, projeções de slides, dramatização a fantasia, momentos musicais, mas sobretudo os poetas dizendo os seus poemas e os de outros autores, o poeta recitando, o que constitui um curioso meio-termo entre a literatura e a música popular, o poeta sendo uma síntese entre literato e cantor, entre ator e ele mesmo. », Antônio