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CARTE DE REPARTITION DES SOCIETES AUTOCHTONES DU MONT CAMEROUN

L’abondance des ressources forestières, comme le racontait M. Molua, est à l’origine de l’installation sur le Mont Cameroun. Les richesses du lieu furent fixées dans le nom même du principal foyer, Buea. Ligbea en mokpe (la langue bakweri), veut littéralement dire « l’endroit où le travail est à portée de main ». Les Wakpe aujourd’hui associent au mot Gbea – Buea – lorsqu’ils le traduisent en anglais, la notion d’abondance. Cette abondance est d’abord à comprendre comme une source exceptionnelle de gibier. Les Bakweri furent de grands chasseurs, les mythes le confirment et l’on rencontre à l’heure actuelle des hommes particulièrement versés dans les savoirs cynégétiques. Les premières observations des éclaireurs de la migration se sont ainsi très probablement concentrées sur la faune du volcan.

Cependant la chasse chez les Wakpe, en tant que fait culturel hautement valorisé, est en partie à la source d’un des préjugés dont nous parlerons dans le chapitre III. L’administration coloniale, constatant par la force des choses la place fondamentale accordée à l’activité cynégétique, refusa aux Wakpe toute aptitude à l’exercice de l’agriculture.

Rappelons que l’idéologie coloniale s’est construite en partie sur les thèses du darwinisme social, élaborant des catégories sociétales minutieusement classées selon le mode de vie et la technologie, classes d’autant plus arriérées que les sociétés qu’on y plaçait s’éloignaient en apparence du modèle.

La chasse et la cueillette font partie des activités alimentaires primitives développées pendant la préhistoire bien avant l’invention de l’agriculture, marque des dites grandes civilisations. Cette chronologie caricaturale de ce qui s’est passé au cours des millénaires d’évolution humaine a pesé sur l’imaginaire occidental qui l’a transférée sur les sociétés colonisées pourtant contemporaines. Chasse et agriculture ne pouvaient donc cohabiter au sein d’une même société et la valorisation de la chasse chez les Wakpe fut perçue bien commodément comme le signe d’une absence de savoir-faire en matière agricole.

Pourtant à y regarder de près, si la chasse est un domaine exclusivement masculin, il en va autrement de l’agriculture dont les femmes en maîtrisent une part fondamentale malgré l’investissement récent de l’activité par les hommes. Ce qui a été enlevé aux hommes aurait dû être reconnu aux femmes et l’idée profondément ancrée aujourd’hui affirmant que « les Bakweri

ne savent pas cultiver » est assez éloignée de la réalité, nous aurons l’occasion d’y revenir plus

amplement en Deuxième Partie de cette thèse.

La répartition des tâches agricole et cynégétique selon les sexes, clairement affirmée à l’arrivée des Bakweri sur le Mont Cameroun, nous amène à comprendre, au contraire de ce que

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l’administration coloniale a avancé pendant des décennies, que la société mokpe a perçu lors de son installation et en toute connaissance de cause, le potentiel environnemental global du volcan.

b- Les temps du changement : colonisation et spoliations

Les conflits de mémoire sur le volcan ne sauraient se comprendre sans le soutien d’un éclairage sur l’histoire de la conquête allemande et de l’occupation britannique qui lui a succédée. Les grandes plantations industrielles de la CDC encore en activité de nos jours ne sont pas sans rappeler un passé traumatique qui a débuté réellement dans les dernières années du XIXe siècle, conduisant la région du Mont Cameroun à constituer, à la veille de la première guerre mondiale, la plus vaste zone de plantation de l’Afrique de l’Ouest. Comment l’intérêt colonial allemand s’est-il éveillé pour cette région, quels événements sont à l’origine de la complexité du système d’interaction mémoriel qui nous préoccupe ?

- Naissance de l’intérêt colonial

« Your Excellency,

Yesterday I succeded in buying whole Buea for you »9

C’est en ces termes que le 18 février 1887, le commerçant suédois Georg Valdau amorce une missive historique au gouverneur Julius von Soden, premier Gouverneur du Cameroun allemand (en poste du 26 mai 1885 au 14 février 1891).

Le site de Buea et ses villages satellites viennent d’être achetés à leurs « rois » et « chefs » pour la somme de 25,13 £.

Cet épisode rocambolesque de l’histoire de la conquête du Mont Cameroun par les Allemands est à resituer dans le contexte global de la lutte acharnée qui se mène depuis la moitié du XIXe siècle entre Anglais, Allemands et Français sur la côte camerounaise. Eminemment symbolique de la démarche d’accaparement des terres de l’espace camerounais dans son ensemble, la prouesse apparente de Valdau, comme la plupart des achats qui va s’ensuivre,

9

« Excellence, hier j’ai réussi à acheter la totalité de Buea pour vous », Lettre de Georg Valdau au Gouverneur von Soden, Mapanja le 18 février 1887, Archives Municipales de Buea, Qb/d 1887/1.

repose sur l’un des malentendus les plus tragiques ayant régi les rapports entre colons et populations autochtones de l’histoire du Mont Cameroun.

C’est à partir des années 1880 et suite à une série d’accords entre subrécargues, officiels britanniques et chefs locaux, que le développement de l’activité commerciale s’intensifie sur la côte camerounaise. Parmi les Européens, les Anglais dominent à cette époque les transactions et les autochtones du littoral (Douala pour la plupart) tirent habilement profit de leur statut d’intermédiaires dans les échanges avec les fournisseurs de l’intérieur. Le troc est à cette époque un moyen d’échange efficace et le commerce va florissant. Les villages côtiers contrôlent très strictement l’accès à l’intérieur des terres et s’imposent tant commercialement que politiquement.

Ce n’est qu’en 1868 que la première firme allemande Woermann s’établit à Douala, suivie en 1875 par Jantzen und Thormählen. Ces deux investisseurs auront par la suite un rôle considérable sur la destinée des gens du Mont Cameroun.

Les récits des voyageurs et des missionnaires contribuent considérablement à attirer l’attention de l’Empire allemand sur les richesses exceptionnelles de la région. La maîtrise que les autochtones développent sur ce système marchand est à l’origine de l’idée qui se répand dans les milieux européens qu’il y aurait avantage certain à contribuer directement à la production des biens d’importation, échappant ainsi à la mainmise des chefs autochtones (Michel, 1969 : 184).

L’installation des premières firmes allemandes marque le début d’une course effrénée, dans la région du Mont Cameroun, entre Allemands et Anglais pour la conquête des terres nécessaires à la mise en place d’un système de plantation perçu comme rentable.

Les Allemands entreprennent dans le début de l’année 1884 l’annexion de la ville de Victoria (actuelle Limbe) alors que les Anglais, par le biais de traités, tentent de conserver leur prééminence dans la région de Douala. Le jeu des traités, passés en toute hâte avec les chefs côtiers, basé sur les garanties fallacieuses de la protection des échanges commerciaux et de l’autonomie des chefs, laisse entrevoir l’existence de clauses alors inavouables, laissées dans l’ombre par les Européens afin de s’attacher rapidement les faveurs des nouveaux colonisés et asseoir leur domination. L’objectif des Anglais dans la course à l’annexion est de pénétrer le plus rapidement possible l’intérieur des terres afin de contourner la zone de Victoria et couper ainsi la route aux Allemands vers l’hinterland (Njeuma, 1989 : 125).

S’ensuit une période particulièrement agitée où la propagande missionnaire et la pression des émissaires européens conduit à des désaccords profonds au sein des populations. Les

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hommes restés fidèles aux premiers traités avec les Anglais voient d’un mauvais œil la nouvelle puissance allemande alors que cette dernière conquiert de nouveaux adeptes notamment parmi la jeunesse africaine. Les troubles sociaux sérieux qui naissent de cette course acharnée à la terre amènent les deux concurrents au bord d’une guerre en fin de compte évitée de justesse.

Le 14 juillet 1884, Gustav Nachtigal annexe officiellement la zone littorale de Douala (incluant Bimbia aux pieds du Mont Cameroun) et hisse le drapeau allemand à Douala. Le lendemain, la Cour d’Equité mise en place par les Britanniques et régissant les échanges commerciaux et politiques entre Européens et Africains est abolie. A sa place est établi le Conseil du Cameroun, placé sous la présidence d’un représentant allemand (Ndumbe Kum’a, 2005). Le consul Hewett, dépêché de Grande Bretagne en catastrophe, débarque sur la côte quelques jours seulement après l’annexion allemande, laissant échapper la dernière chance d’officialisation d’un protectorat anglais.

La course contre la montre se poursuit un temps entre Anglais et Allemands dans la région de Bimbia et aux pieds du Mont Cameroun. C’est à qui signera le premier le maximum de traités avec les populations locales, la rivalité donnant lieu à de grotesques joutes d’annexion. L’émissaire Rogozinsky, mandaté par le Vice-Consul britannique White comptera à son actif trente-cinq traités avec les chefs autochtones, entre janvier et février 1885 (Molua, 1985 : 27).

L’Angleterre sent rapidement la situation lui échapper et décide finalement de laisser à l’Allemagne la jouissance de ce qui fut arraché d’étrange lutte. Le retrait des ressortissants britanniques de Victoria se précipite, l’annexion allemande est désormais reconnue. L’Allemagne contrôle officiellement l’ensemble de la côte camerounaise ; ce tournant marque le début de la conquête de l’hinterland.

- Les guerres du commencement

Bien avant la première tentative allemande de mettre un terme définitif au rayonnement des Wakpe de Buea, quelques explorateurs séjournent sporadiquement sur le volcan, rapportant témoignages et observations sur ce qu’il est désormais convenu d’appeler l’exceptionnelle fertilité des sols du Mont Cameroun. Bien plus que les hommes, le potentiel cultural de la Montagne attire l’attention des Européens.

Après leur installation sur l’île de Fernando Po en 1841, des missionnaires baptistes se tournent rapidement vers le continent et envoient en reconnaissance l’un des leurs, John Merrick, au mois d’avril 1844. Ce dernier effectue un court périple autour de Buea et y rencontre le chef Likenye. Merrik relate son séjour difficile au milieu d’hommes que la parole de dieu semble intéresser bien peu, obnubilés par leur passion décadente pour la danse et les joutes verbales10. Le missionnaire ne manque pas cependant de constater que les buissons de cacao, cultivés très haut sur les pentes, sont les plus beaux observés depuis son arrivée en Afrique :

« Eight minutes after ten we passed the last farm of the Bwea people on

the way to the Cameroons Mountain. On this farm grows the finest piece of cocoa I have seen since my arrival in Africa. I was rather surprised that the Bwea people should cultivate farms so far from their towns, and thought they must have good reason for doing so, and on inquiry found that they were in the habit of spendig whole weeks in the woods hunting the ngika, or buffaloe, and during that time cultivated the soil in the vicinity of the chase. »11

Les timides incursions des voyageurs sur la Montagne, au cours des quelques décennies précédant l’annexion, contribuent ainsi à réunir suffisamment de données environnementales pour émoustiller l’intérêt par ailleurs bien éveillé des Européens. Le jeune protectorat allemand sous la direction de von Soden est cependant à cours d’argent et les expéditions de pacification conduites dans d’autres régions du Cameroun accaparent les énergies.

Le vent tourne pourtant lorsque la Mission de Bâle insiste auprès de Kuva Likenye, fils de Likenye, pour obtenir une parcelle sur les hauteurs de Buea. Les Wakpe concèdent aux missionnaires une portion de la terre que Valdau croit avoir achetée pour le compte du Gouverneur von Soden quelques années auparavant. Les nouveaux arrivants s’activent à la construction d’un petit dispensaire et de quelques autres bâtiments (Ardener, 1996 : 79).

L’idée déjà ancienne, véhiculée par les milieux coloniaux, que le climat d’altitude du Mont Cameroun peut accorder un répit aux administrateurs fréquemment victimes des attaques de paludisme, contribue indubitablement aux efforts obstinés d’installation des Chrétiens à Buea. Encouragée par l’administration et notamment par le gouverneur Von Soden convaincu de posséder la « totalité de Buea », financée largement par les firmes allemandes de Douala, la

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D’après les notes de John Merrik publiées dans le Missionary Herald en 1845, une partie du document étant citée par Ardener (1996 : 52-59).

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« A dix heures huit nous passâmes le dernier champ des gens de Buea sur le chemin de la Montagne des Camerouns [le Mont Cameroun]. Dans ce champ poussent les plus beaux pieds de cacao que j’ai vus depuis mon arrivée en Afrique. Je fus quelque peu surpris que les gens de Buea aient à cultiver des parcelles si loin de leurs villes et pensai qu’ils devaient avoir quelque bonne raison de faire ainsi. Je trouvai après enquête que ces gens avaient pour coutume de passer des semaines entières dans les bois à chasser le ngika, ou buffle, et cultivaient alors la terre dans le voisinage de leurs traques. » Notes de John Merrik, reproduites dans Ardener (1996 : 54).

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Mission de Bâle marque par son intrusion durable en territoire mokpe la première étape d’une spirale de violence aux conséquences désastreuses.

L’installation de la Mission à Buea et la période qui s’ensuit contribuent à faire basculer le cours des événements. Les missionnaires rendent alors compte régulièrement du caractère fier et belliqueux des autochtones qui se méfient du Blanc et ne manquent pas une occasion de lui manifester leur mépris. Le docteur Preuss, un botaniste qui vit depuis peu parmi les missionnaires pour effectuer des recherches, écrit en janvier 1891 :

« Relations with the natives are satisfactory, although a little caution is

required, given the rough character and forward behaviour of the populations.

[…] They busy themselves enthusiastically with hunting and palavers, and

wage wars with their neighbours at every opportunity. In their relations with the white man they are impudent and unashamed in their confidence in their superior numbers, and they make continual vexations for him, although they are quite glad to have him, or rather his tobacco and his cloth, in the village. They have not as yet learnt his power. »12

Justement la puissance du Blanc est sur le point de se déchaîner. Les troubles inter villages provoqués par Kuva Likenye tentant de maintenir son influence menacée par la présence occidentale dans la région, sont prétexte inespéré pour entreprendre la conquête trop longtemps différée du Mont Cameroun. L’esprit indépendant des Wakpe gêne les desseins coloniaux, avides de donner forme à leur propre conception de la mise en valeur des terres volcaniques.

Le 3 novembre 1891, le Gouverneur en exercice von Schuckmann réunit 150 hommes des troupes africaines coloniales sous le commandement du commandant von Gravenreuth et de quelques officiers allemands. Lestée – outre le matériel offensif nécessaire à ce genre d’expédition – d’une mitrailleuse Maxim, la colonne s’ébranle vers Buea dans l’intention de mettre un terme à la résistance mokpe, officiellement qualifiée de menace pour la paix régionale. Tout en se heurtant à une résistance armée meurtrière13, la troupe parvient à rallier Buea, décime le cheptel et incendie les maisons rencontrées. Le retour sur Victoria, médiatisé comme un succès par les autorités, ressemble par bien des aspects à une retraite précipitée, sous le harcèlement incessant des tireurs wakpe embusqués.

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« Les relations avec les indigènes sont satisfaisantes, bien qu’une certaine prudence soit de mise, compte tenu de leur caractère rude et leur comportement effronté. Ils s’enthousiasment pour la chasse et les palabres, et font la guerre avec leurs voisins à tout bout de champ. Ils sont insolents et impudents avec l’homme blanc, confiants dans leur supériorité numérique ; ils le contrarient continuellement bien qu’ils soient tout de même contents de l’avoir au village, ou plutôt son tabac et ses vêtements. Ils ne connaissent pas encore sa puissance. » Notes du Dr Preuss, in Deutsches Kolonialblatt, T. II, 1891, p. 517, traduites de l’allemand à l’anglais par Ardener (1996 : 80).

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Gravenreuth et trois soldats noirs perdent la vie au cours de ces combats, selon les sources coloniales. Dibussi Tande évoque quant à lui une version mokpe faisant état de six morts allemands dont les crânes reposent actuellement dans une châsse secrète au village de Wondongo (« Bakweri armed resistance to German colonialism, 1891-1894 », article publié sur le site internet http://www.blccarchives.org).

L’année 1892 se déroule sans nouveau heurt pour les gens de Buea qui ne voient reparaître aucun Occidental. C’est en décembre qu’une délégation de Victoria se présente à Kuva Likenye proposant la signature d’un traité de paix, suivie par une visite du Gouverneur Zimmerer alors en exercice. L’accueil, d’abord froid selon le rapport, change subitement pour devenir chaleureux lorsque la population constate que les hommes ne sont pas armés.

On peut s’interroger sur la période d’accalmie de trois ans qui suit le premier choc frontal. Kuva Likenye est à l’apogée de son pouvoir. Fort du sentiment d’avoir vaincu les colons, il affermit sa position sur le versant Wouri et Buea rayonne d’un feu éphémère.

Mais le développement des plantations de Douala et de Bimbia, plus récemment, accroît le besoin de main-d’œuvre. Conjointement, les vues allemandes sur les sols riches du Mont Cameroun se précisent, encouragées par les résultats admirables des plantations Monté Café déjà en fonctionnement sur l’île volcanique portugaise de São Tomé (Michel, 1969). Le témoignage du Docteur Preuss, qui a séjourné plusieurs mois à Buea avant les combats, est sans ambiguïté : les sols sont exceptionnels. Le climat frais, comparativement à celui de la côte, permet de faire pousser admirablement nombre de fruits et légumes européens telles les endives, les pommes de terre ou la laitue. Preuss constate de la même façon qu’ignames et macabo sont de très belle qualité14.

A mesure que le pouvoir colonial allemand s’affermit sur la côte et dans les régions soumises de l’intérieur, l’isolement de Kuva va grandissant. Les routes se construisent, affaiblissant les défenses naturelles du site.

Des visiteurs de plus en plus nombreux font irruption à Buea et les potentiels agricoles de la zone accaparent les esprits. Au début de l’année 1894, le Gouverneur Leist, succédant à Zimmerer, se déplace en personne accompagné du vice-consul Spengler. Désormais les priorités vont clairement à ce que peut produire la terre et les gens du Mont Cameroun ne constituent plus qu’une éventuelle cause de retard dans l’accomplissement des stratégies décidés en hauts lieux. Comme le rapporte Ardener :

« Spengler’s subsequent report on this trip was the go-ahead for the

plantation industry on the mountain. His eyes were on the soil, crops and geological formations : he hardly noticed the people. […] Spengler’s report in general was highly favourable to the idea of plantations, and espacially for cocoa and coffee. »15

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In Deutsches Kolonialblatt, T. II, 1891. 15

« Le rapport de Spengler concernant ce voyage donna le feu vert à l’industrie de plantation sur la montagne. Il n’avait d’yeux que pour le sol, les cultures et les formations géologiques : il remarqua à peine les habitants. […] Le rapport Spengler fut globalement très favorable à l’idée des plantations, particulièrement pour le cacao et le café. » (Ardener, 1996 : 106).

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Il faut maintenant trouver un prétexte suffisant pour justifier l’intervention armée qui permettrait de sécuriser le processus d’accaparement des terres de Buea. Les tentatives désespérées de Kuva Likenye pour résister à la pression des missionnaires et aux termes désavantageux du traité de paix qu’il a signé, dans l’espoir de voir la situation s’améliorer, sont perçues et traduites à Victoria comme autant d’effronteries inacceptables. Le protectorat allemand s’est entre temps doté d’une force militaire puissante, la Schutztruppe, capable d’en découdre définitivement avec les hommes de Kuva Likenye16. Le Gouverneur donne l’ordre à son commandant, von Stetten, d’installer une garnison permanente à Buea.

Le 22 décembre 1894, sept officiers blancs, cent quatre vingt dix soldats noirs et soixante quatre porteurs, entament l’ascension des derniers mètres qui les séparent de la barricade. Ils n’y