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ET ÉCONOMIQUES , FACTEUR DE COHÉRENCE SUR LES TERRITOIRES

3.1.1. Caractérisation du travail en réseau

Avant de pouvoir aborder plus dans le détail la question de la coopération des acteurs touristiques et économiques sur un territoire, il apparaît d’abord comme essentiel d’apporter des explications plus précises sur les différents termes qui existent aujourd’hui pour parler d’actions collectives résultant de l’instauration d’une dynamique locale. Il apparaît en effet comme important dans le cadre de notre travail de choisir le terme le plus approprié à une mise en réseau des parties prenantes initiée par un acteur public. L’intérêt

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de cette section est au final, en comparaison avec l’analyse réalisée dans le mémoire de première année, de choisir le terme qui semble ici le plus pertinent pour le cas de mise en réseau aujourd’hui étudié. Avec l’apport de nouvelles ressources et définitions, certaines des explications présentées l’année dernière sont donc révisées et adaptées.

De manière générale, il est possible d’affirmer que le rassemblement d’individus autour d’une finalité commune permet aux différents acteurs impliqués de parvenir à des objectifs ne pouvant être accomplis par un seul acteur. L’expression “l’union fait la force”195 prend

alors tout son sens. Ce genre d’approche de travail est généralement caractérisé par des relations horizontales entre les parties prenantes, mais aussi l’absence de hiérarchie et une non-concurrence dans les actions qui sont menées. Le travail collectif se fonde au final sur un partage d’intérêts communs à tous, mais il peut prendre différentes formes et dénominations. L’usage de ces termes étant bien souvent utilisé à tort, il convient donc d’exposer la portée de chacun d’entre eux.

Tout d’abord, l’expression de mise en réseau, ou réseau d’acteurs, apparaît comme être le terme le plus générique et général employé pour ce genre de démarche. Il peut ainsi être utilisé pour qualifier diverses formes d’actions collectives de travail et refléter entre les parties prenantes autant des relations verticales qu’horizontales. On pourrait définir ce terme comme “l’action d’initier un mode d’organisation des acteurs qui favorise l’action

collective” (Leudihac, 2018, p.56). Dans l’ensemble, cette notion rapporte au final au fait

de participer à une œuvre collégiale où les personnes concernées -qui partagent un même objectif- vont s’associer et se répartir le profit196 de façon équitable.

Comme le souligne Granier François dans la Revue Sociologies Pratiques, parue en 2005, la notion de réseau est devenue dans le monde des entreprises véritablement omniprésente, et s’inscrit parfaitement dans le contexte de transition organisationnelle qui s’opère aujourd’hui. Ce genre d’initiative serait, selon lui, source d’avantages pour les responsables des structures, tant dans le domaine public que privé197. Celles-ci permettraient en effet de

195 “C'est en s'alliant et en associant nos forces que l'on peut vaincre. Ce proverbe s'emploie pour souligner la nécessité

de rester uni pour lutter ou combattre.”. L’internaute. L’union fait la force [en ligne]. Disponible sur :

http://www.linternaute.com/proverbe/19/l-union-fait-la-force/. (Consulté le 20-06-2019).

196 On retrouve des profits d’ordre financiers, matériels ou encore immatériels (visibilité, notoriété, amélioration de l’image, etc.)

197 “Le réseau met en avant des qualités qui constituent les leitmotivs de nombre de responsables d’entreprises ou de

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répondre à une double exigence : “à la fois [de rationaliser] l’usage des ressources rares

[mais aussi de reconnaître] la diversité des contributions des acteurs” (Granier, 2005, p.25).

« Le développement des compétences individuelles et collectives est chaque jour

davantage à l’ordre du jour des entreprises, des organisations, des associations, des collectivités territoriales, en particulier dans les régions, les départements, les bassins d’emploi. Il en va particulièrement d’un savoir-faire qu’elles doivent maîtriser : le travail en réseau. » (Guy Le Boterf, 2010, p.6)

Sur un territoire, ce style d’approche s’organise à travers une consolidation réciproque des stratégies des différents acteurs en présence. Quand un réseau est organisé, il s’agit au final de chercher à construire de la convergence, du lien et de l’échange entre les parties prenantes qui partagent un ou plusieurs enjeux communs. Ce genre d’initiative permettrait au final d’organiser des rapports bénéfiques entre les membres du réseau et l’entité collective créée198. La Revue Espaces n°347 parue en 2019, Réseaux d’acteurs du tourisme

et design de services, nous permet de confirmer ce point : “un réseau qui fonctionne permet de relier l’échelon individuel et l’échelon collectif et à ce titre être source de développement et d’innovation. Il peut ainsi servir de base pour structurer un territoire et créer des stratégies de développement”. En définitive, quelle que soit la forme d’organisation

adoptée pour ce travail collectif, la mise en réseau va être favorable à l’émergence d’actions de mutualisation199. Toutefois, il est important de signaler qu’on retrouve dans

certains cas de mise en réseau la présence de la notion de concurrence200.

La notion de partenariat est définie quant à elle par le dictionnaire Larousse comme un “système associant des partenaires sociaux ou économiques, et qui vise à établir des

relations d’étroite collaboration”201. Il semble par le biais de cette définition que ce concept

s’assimile et se confonde avec le terme de collaboration. Il se trouve en fait qu’un partenariat serait une notion plus générique pour décrire une relation dans laquelle au

performant pour remplacer les appareils identifiés comme des univers formalisés, statiques et anonymes.” (Granier, 2005,

p.23)

198 Correspondant à la somme des parties prenantes. 199 Partages d’expérience, de bonnes pratiques.

200 Les acteurs vont dans ce cas préférer ne pas tout partager avec les autres membres du réseau, et ainsi garder certaines de leurs “bonnes idées”, en considérant qu’il est plus prudent de maintenir un temps d’avance vis à vis des autres professionnels membres, qui demeurent avant toute chose leur concurrent.

201 Dictionnaire Larousse. Définition partenariat [en ligne]. Disponible sur : http://www.larousse.fr. (Consulté le 15-07- 2019)

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moins deux personnes ou acteurs, ayant des objectifs conciliables, se concertent au vu de réaliser quelque chose ensemble qu’ils n’auraient jamais pu réaliser seuls202.

Afin de clarifier ce terme, il est possible de le comparer avec celui de réseau. D’après Guy Lévêque, du Centre d’Expérimentation Pédagogique de Florac203, “s’il est possible

d’adhérer à un réseau, il ne l’est pas d’adhérer à un partenariat, car il faut au contraire le construire” (Lévêque, 2001, p.2). On comprend donc que la notion de partenariat implique

une relation plus complexe, la rencontre entre au moins deux projets d’acteurs n’ayant pas forcément l’habitude de travailler ensemble. D’après ce même auteur, il paraît de même pertinent de partir du principe qu'un “partenariat n’a aucun sens s’il n’est pas basé sur un

projet”. Il ne s’agirait donc pas d’une fin en soi, mais plus d’un moyen à un moment précis

de mettre en place un projet avec des relations plus ou moins directes entre les différentes parties prenantes. Les relations de chaque acteur doivent alors être qualifiées et on va chercher à clarifier les différents positionnements afin de s’accorder sur une stratégie de façon claire et précise. Au final, Guy Lévêque souligne l’importance de ne pas confondre le terme de partenariat avec celui de collaboration.

Le terme de collaboration est défini de façon générale dans le dictionnaire Le Petit Robert (1995) comme “un travail en commun ; un travail entre plusieurs personnes qui génère la

création d’une œuvre commune”. Du latin cum, qui signifie “avec” et de laborare qui veut

dire “travailler”, ce mot désigne donc bien l’action de travailler en commun avec une ou plusieurs autres personnes au vu d’apporter un résultat. La dimension collective semble ici centrale, puisque les ressources, les risques et les prises de décisions vont être partagés dans le but d’atteindre cet objectif commun204.

« Le travail collaboratif n’engage pas de répartitions des actions à proprement

dit, mais s’accorde plus à un travail collectif où les missions et la finalité sont communes à tous. La responsabilité et les actions se retrouvent ainsi collectives et incombent donc à chacun des membres. » (Leudihac, 2018, p.54).

202 Chambres de Métiers et de l’Artisanat. Etablir un partenariat [en ligne]. Disponible sur : http://www.cm- larochelle.fr/etablir-partenariat.pdf (Consulté le 12-06-2019).

203 Lévêque Guy. Réseaux et partenariats [en ligne]. Disponible sur : http://clef.viabloga.com/files/P5_reseaux_partenariat.pdf (Consulté le 04-06-2019).

204 Chambres de Métiers et de l’Artisanat. Etablir un partenariat [en ligne]. Disponible sur : http://www.cm- larochelle.fr/etablir-partenariat.pdf (Consulté le 12-06-2019).

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Ce mot renvoie en effet à l’idée “d’aide, d’appui, de concours, de participation”, et rapporte ainsi à un acte, une pratique ou encore un accord ponctuel qui va être établi sur une période limitée. L’article publié par Pascal Choteau205 nous permet de préciser le fait que

le travail d’équipe qui va être mené va s’élaborer autour d’un projet qui de façon globale n’appartiendra pas toujours à tout le groupe. Cet auteur affirme qu’on “collabore souvent

aux projets des autres sans en avoir l’initiative ni la gestion de leur développement”. Ainsi,

le “faire ensemble” n’est pas nécessairement mis en valeur puisqu’il est possible de collaborer à un projet d’une autre personne en “faisant avec”.

Le schéma ci-dessous nous permet d’illustrer clairement ce point. On peut voir clairement que chaque membre va travailler sur une même tâche au profit du collectif.

Figure 12 : L’organisation d’une tâche collaborative

Source : Outils-réseaux. Travailler en réseau, usages et outils [en ligne]. Disponible sur http://outilsreseaux.org/ContenuCooperationCollaboration (Consulté le 23-05-2019).

Dans ce cadre, pour que le travail collectif soit qualifié de collaboratif, il est nécessaire que chacun des membres fasse preuve d’initiative mais aussi d’imagination, en gardant une vision solidaire. Ce genre de démarche permet au final une souplesse importante et offre aux acteurs une grande liberté d’action206. Néanmoins, dans le cadre d’un travail

en réseau regroupant de multiples acteurs tant privés que publics, ce genre d’organisation semble rencontrer certaines limites. En effet, puisqu’aucune répartition

205 Pascal Choteau. Différence entre coopération et collaboration [en ligne]. Disponible sur : https://humanitesnumeriques9.wordpress.com/2017/01/06/difference-entre-cooperation-et-collaboration/ (Consulté le 06-07-2019).

206 Outils-réseaux. Travailler en réseau, usages et outils [en ligne]. Disponible sur http://outilsreseaux.org/ContenuCooperationCollaboration (Consulté le 23-05-2019).

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des tâches n’est clairement définie, l’atteinte des objectifs à travers différentes actions inhérentes à ceux-ci peut paraître compliquée à mettre en œuvre si aucune distribution du travail n’est faite en fonction de la volonté mais aussi des compétences et ressources dont dispose chacun des membres.

Au final, le terme de coopération207 est défini généralement comme “l’action de participer

(avec une ou plusieurs personnes) à une œuvre ou à une action commune”208. Du latin cum,

“avec”, et operare qui veut dire “faire quelque chose”, “agir”, on comprend ainsi la nuance avec le terme collaborer. Le travail coopératif se définirait comme une véritable interaction entre les membres, et ne consisterait donc pas seulement à échanger et communiquer209.

D’après Pascal Choteau, ce terme intègre véritablement le fait de mener une “œuvre

commune”, d’élaborer ensemble une réalisation collective. La coopération engage donc

une “responsabilité mutuelle et permanente” et permet de réunir des acteurs qui sont indépendants et responsables à travers un ou plusieurs intérêts communs. Les parties prenantes vont œuvrer ensemble afin de trouver des solutions novatrices permettant de répondre à un besoin partagé ne pouvant être réalisé individuellement. Comme l’exprime l’auteur, “la coopération est le lieu où des liens se créent par un engagement mutuel vers

un objectif commun”. Cette affirmation suppose au final d’établir des bases de travail

partagées et des responsabilités endossées par chacun. Il s’agit d’une “organisation

collective du travail dans laquelle la tâche à satisfaire est fragmentée en sous-tâches”

(Piquet, 2009, p.7). Le schéma ci-dessous illustre bien ce point, puisqu’on voit clairement différents groupes de travail désignés et organisés, avec chaque membre qui occupe un rôle défini, permettant au final d’atteindre l’objectif collectif.

207 Ce concept apparaît dans l’ouvrage Le travail en réseau, plus-values et contraintes, comme le maître mot du travail en réseau.

208 Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales. Coopération [en ligne]. Disponible sur : https://www.cnrtl.fr/definition/coop%C3%A9ration (Consulté le 24-06-2019)

209 “Nous parlons de coopération lorsque plusieurs entreprises autonomes entrent en relation pour coordonner de manière

plus ou moins formelle, leurs actions dans le temps, dans un but de création de valeur. Cette interaction n’implique ni la prise de participation, ni la formalisation de la relation, sans pour autant exclure ces possibilités.” (Geindre, 2005, p.76).

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Figure 13 : L’organisation d’une tâche coopérative

Source : Outils-réseaux. Travailler en réseau, usages et outils.

Cette organisation hiérarchique qu’induit le travail coopératif implique aussi une programmation dans le temps qui engage donc des délais mais aussi une distribution des rôles en fonction d’une coordination rigoureuse. Les interactions sont dans ce cadre très fortes et vont se concentrer sur l’organisation et le suivi de la progression du travail, ce qui permet d’établir un sentiment de dépendance mutuelle entre les acteurs. Chacun verra ainsi sa responsabilité engagée mais ce seulement sur les missions qui lui ont été confiées. “Travailler en réseau suppose de travailler en « coopération » et pas seulement de

juxtaposer son rôle à celui des autres acteurs.” (Vilan, Nowak, Severs, et al., 2010, p.8)

A noter que Pascal Choteau souligne le fait que la coopération va engendrer des stratégies visant à résoudre des difficultés et contraintes survenues, permettant ainsi la création de compétences propres au-delà de l’objectif déterminé.

En fin de compte, la différence entre collaboration et coopération “résiderait dans les

relations existantes entre les différentes parties prenantes et dans la façon de répartir les rôles de chacun” (Leudihac, 2018, p.54). Comme l’écrit Pascal Choteau, “si on peut aisément collaborer au projet d’un autre, en « travaillant avec », on ne peut coopérer qu’à un projet commun, pour « faire ensemble »”. La coopération engage effectivement de répartir les

tâches et responsabilités entre les parties prenantes et n’exige donc pas obligatoirement un travail collectif entre tous les acteurs. Alors que la collaboration vise à atteindre un résultat défini, la coopération va davantage chercher à construire un processus de

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réalisation. De ce fait, il semblerait que la coopération constitue la première étape d’un réseau pour arriver à terme à une collaboration. Dans le cadre de la construction d’un réseau d’acteurs, démarche longue à mettre en œuvre, le terme de coopération semble effectivement plus approprié que celui de collaboration qui semble plus adapté seulement une fois que la dynamique du réseau est organisée et que chaque acteur a trouvé sa place et s'investit suffisamment.

Au final, la coopération semble donc être dans le cadre de notre travail de recherche le terme le plus adapté à utiliser du fait du genre de mise en réseau ici étudié. Ce dernier induit en effet la mobilisation de plusieurs types d’acteurs, publics et privés, avec différents niveaux d’implication afin de les encourager à construire un réseau d’acteurs. Chaque membre de ce réseau pourra choisir les actions sur lesquelles il souhaite travailler, et son rôle sera défini en fonction de ses capacités et de ses compétences. L’adoption de cette démarche coopérative permettra au final d’initier et construire un réseau d’acteurs sur de bonnes bases, permettant d’instaurer une dynamique collective mobilisatrice génératrice de retombées positives.

3.1.2. Les enjeux et finalités d’une coopération des parties

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