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Outils stochastiques

3.3 Calculs des tenseurs de corrélations

3.3.1 Corrélations Pression-pression

Du fait des contraintes expérimentales, les méthodes de calcul des corrélations spatio-tem-porelles, mises en œuvre dans cette étude, possèdent un caractère particulier. Bien que le nombre de capteurs de pression utilisés soit important (jusqu’à 56 microphones), il reste insuffisant pour obtenir des mesures de pression simultanées sur l’ensemble d’une surface entourant le jet. C’est pourquoi le calcul des corrélations pression-pression est fractionné et est réalisé par “morceaux” en utilisant les mesures de pression issues d’expériences distinctes. Dans cette partie, le processus expérimental est brièvement décrit puis la démarche mise en place pour le calcul des corrélations est détaillée.

3.3.1.a Moyens expérimentaux

Afin de prendre en compte la contribution azimutale du champ de pression proche des jets, cette étude est menée dans l’espace bidimensionnel (x, θ). Les corrélations spatio-temporelles Rpp(x, x, ∆θ, τ ) ont ainsi été calculées sur une surface entourant le jet.

Ce calcul nécessite la mesure simultanée des pressions sur l’ensemble de cette surface. Si l’on considère des points de mesures espacés de 10 mm dans la direction longitudinale sur une dis-tance couvrant une fois et demi la longueur du cône potentiel, soit x/D∈[0 :6] dans le cas du jet subsonique, pour 18 positions angulaires, ce calcul nécessite l’utilisation de plus de 550 mi-crophones et l’utilisation d’autant de voies d’acquisition. Le coût d’une telle installation serait exorbitant (à titre indicatif, le coût d’un microphone conditionné est de l’ordre de 1500 Eu-ros). C’est pourquoi les données nécessaires aux calculs de ces corrélations sont obtenues par l’intermédiaire d’une série de plusieurs configurations de mesures.

FIG. 3.1 – Dispositif expérimental d’antennes linéique et azimutale de microphones couplées pour configuration cylindrique sur jet subsonique

Ces mesures sont réalisées à l’aide de deux antennes de microphones. La première antenne, linéique, est alignée avec l’axe du jet, inclinée ou non en fonction du type de configuration réalisée (conique ou cylindrique). De position fixe, elle permet d’accéder à la répartition lon-gitudinale des pressions dans la direction de l’écoulement. La deuxième antenne, de forme circulaire, est placée dans un plan normal à l’axe du jet et permet d’accéder à la répartition azi-mutale de pression en différente position longitudinale. L’utilisation conjointe de ces antennes permet l’acquisition de l’ensemble des données nécessaires à l’estimation de toutes les corréla-tions sur la surface décrite par la position des microphones. Une photographie de ces antennes de microphones en configuration cylindrique autour du jet subsonique est donnée en figure3.1.

3.3.1.b Détails des calculs

Tous les calculs de corrélations pression-pression sont réalisés à partir d’une approche spec-trale. En considérant les définitions3.9 et3.12, les interspectres de pression, exprimés en den-sité spectrale d’énergie, sont estimés par la moyenne d’ensemble du produit des transformées de Fourier temporelle des pressions réalisées sur un intervalle de temps de taille T :

Spp(x, x, ∆θ ; ω) = 1

T hbp(x, 0 ; ω)bp(x, ∆θ ; ω)iT

où c(.) désigne la transformée de Fourier dans la direction temporelle. La variable T est la di-mension des blocs sur lesquels sont réalisées les transformées de Fourier. Sa valeur est fixée à T =4096dt, où dt est l’intervalle de temps, inverse de la fréquence d’échantillonnage de l’acqui-sition des mesures. h.i désigne l’opérateur de moyenne d’ensemble qui est appliqué à l’ensemble des blocs de dimension T constituant les signaux.

Prise en compte des symétries De par la symétrie azimutale supposée du jet, la séparation azimutale ∆θ pourra être portée par le point de référence :

Spp(x, x, ∆θ ; ω) = 1

T hbp(x, ∆θ ; ω)bp(x, 0 ; ω)iT

Chaque série de mesures, correspondant à une position longitudinale x de la couronne de microphones, conduit aux calculs des interspectres pour une position longitudinale de référence donnée.

Les symétries détaillées dans la section3.2.2sont imposées aux interspectres :

– La symétrie hermitienne est inhérente aux calculs dans le domaine spectral ;

– La réciprocité est imposée en ne considérant, pour chaque essai, que les microphones de l’antenne linéique situés en aval de la couronne de microphones ;

– La symétrie azimutale est imposée en décomposant les interspectres en série de cosinus et donc en occultant sa partie impaire, i.e. non symétrique.

En effet, cette dernière propriété se traduit par la parité des interspectres dans la direction azi-mutale. Ils se décomposent donc en une série de cosinus dans cette direction :

Ψpp(x, x; mθ, ω) = 1

Z π −π

Spp(x, x, ∆θ ; ω) cos(mθ∆θ)d∆θ

Filtrage des interspectres Le processus d’obtention fractionnée des interspectres entraîne toutefois quelques problèmes. En effet, les mesures provenant d’essais différents, le tenseur final, malgré l’imposition des diverses symétries, n’est pas forcément défini positif. Or, l’uti-lisation d’outils tels que l’estimation stochastique nécessite ce caractère. Cette propriété, qui se traduit par des valeurs propres strictement positives du tenseur des interspectres, doit donc

être exactement vérifiée. Une approche est alors menée pour résoudre ce problème, basée sur la POD (§3.1.2) qui est utilisée ici comme un outil de filtrage et non d’analyse. Les valeurs propres du tenseur des interspectres sont donc calculées pour chaque fréquence et chaque mode azimutal par la résolution de l’équation de Fredholm :

Z

D

Ψpp(x, x; mθ, ω)φ(n)(x ; mθ, ω)dx = λ(n)(mθ, ω)φ(n)(x ; mθ, ω)

Certaines des Npod valeurs propres obtenues peuvent alors être négatives. Le tenseur est donc reconstruit en n’utilisant que les N+≤ Npodvaleurs propres strictement positives :

e Ψpp(x, x ; mθ, ω) = N+ X n=1 λ(n)(mθ, ω)φ∗(n)(x ; mθ, ω)φ(n)(x ; mθ, ω). (3.15)

La notation f(.) est utilisée ici pour préciser l’estimation des interspectres ainsi obtenus. Celle-ci sera omise dans les autres chapitres.

Un retour au domaine physique est réalisé afin d’obtenir le tenseur des corrélations spatio-temporelles. Le tenseur des interspectres exprimé en fonction de la séparation azimutale ∆θ est obtenu par sommation de la série de cosinus :

e Spp(x, x, ∆θ ; ω) = +M 2 X mθ=−M2 e Ψpp(x, x ; mθ, ω) cos(mθ∆θ)

où M est le nombre de positions azimutales.

Le tenseur des corrélations spatio-temporelles eRpp est obtenu par transformée de Fourier inverse de ces derniers dans la direction temporelle, en tenant compte de la pondération induite par le calcul dans le domaine spectral (Bendat et Piersol [18]) :

e Rpp(x, x, ∆θ, τ ) = T T − τ 1 2π Z +Fe2 Fe2 e Spp(x, x, ∆θ ; ω)ejωt

où Feest la fréquence d’échantillonnage des acquisitions.

Il est à noter que l’annulation des valeurs propres négatives des interspectres (éq.3.15) n’est pas sans conséquence sur les données. Ce traitement a pour effet d’augmenter le niveau global d’énergie. En effet, si l’on compare la variance σp(x) obtenue sans ce traitement à celui obtenu en appliquant le filtrage eσp(x)= eRpp(x, x, ∆θ = 0, τ = 0), une variation de l’ordre de quelques pourcents est observée (fig.3.2).

3.3.2 Corrélations Pression-vitesse

Au cours de cette étude, les corrélations entre le champ de pression proche du jet et son champ de vitesses ont été mesurées. Les moyens expérimentaux mis en place pour obtenir ces corrélations sont ici succinctement décrits. Les détails de la procédure de calcul sont ensuite présentés.

FIG. 3.2 – Répartition longitudinale de la modification de variance de pression en champ proche du jet subsonique induite par l’annulation des valeurs propres négatives des interspectres

3.3.2.a Moyens expérimentaux

Le calcul des corrélations spatio-temporelles de pression en champ proche du jet avec le champ de vitesse nécessite la connaissance simultanée de ces deux grandeurs. Pour se faire, les pressions sont mesurées à l’aide d’une antenne de microphones placée dans le plan de l’axe du jet. Inclinée de 9 degrés par rapport à ce dernier, de manière à suivre l’expansion du jet, elle peut être placée au plus près de la frontière du jet avec le milieu ambiant. Les mesures de vitesse sont réalisées par vélocimétrie laser à effet Doppler (LDV) deux composantes (fig.3.3). Les composantes longitudinale et radiale de la vitesse sont mesurées simultanément en un point. Un maillage des points de mesures est alors constitué de profils de plusieurs points, dans le plan de l’axe du jet contenant l’antenne. L’ensemble de ces profils couvre l’intégralité de la zone de mélange du jet.

FIG. 3.3 – Dispositif expérimental d’antennes linéique et système LDV (tête de réception à gauche) sur jet supersonique

Les mesures de vitesses et de pressions étant assurées par deux systèmes d’acquisitions dis-tincts, une synchronisation de ces moyens de mesures est nécessaire. Une voie supplémentaire

du système d’acquisition dédié aux mesures de pression est donc consacrée à l’acquisition d’un signal de synchronisation issu du système d’acquisition LDV. La procédure de détermination de cette synchronisation est détaillée en annexeA.3.

3.3.2.b Détails des calculs

Le principe de la LDV est de mesurer la vitesse d’une particule portée par l’écoulement. Pour se faire, l’écoulement est ensemencé et une mesure de la vitesse est obtenue lorsqu’une particule traverse le volume de mesure. L’échantillonnage temporel des mesures obtenues par ce procédé est alors aléatoire (annexe A.2). De ce fait, les méthodes classiques de calculs de corrélations, dans le domaine temporel ou spectral, ne peuvent pas être utilisées.

Une méthode mise en place par F. Ricaud [171] a donc été employée. Pour cette méthode de calcul, les corrélations spatio-temporelles sont calculées dans le domaine physique. L’infor-mation de retard est portée par les mesures de pression, régulièrement échantillonnées, et la formulation de ces corrélations peut alors prendre la forme suivante :

Rup(Xldv, Xm, τ ) = 1 Nldv Nldv X tk=1 u(Xldv, tk)p(Xm, tk+ τ ),

où Xldv et Xm sont respectivement les points de mesures de vitesses par LDV et de mesures de pression par microphones. Cette moyenne est réalisée sur l’ensemble des Nldv événements de mesures de vitesses au point Xldv. Les valeurs fluctuantes sont classiquement définies par la valeur du signal à laquelle est retirée sa moyenne, soit pour la vitesse :

u(Xldv, tk) = u(Xldv, tk) − U(Xldv), et pour la pression :

p(Xm, tk) = p(Xm, tk) − P (Xm).

La valeur moyenne de la vitesse est définie par sa moyenne d’ensemble :

U (Xldv) = hu(Xldv, tk)iNldv.

La valeur moyenne de la pression est définie par la moyenne des mesures de pression utilisées pour le calcul des corrélations, soit :

P (Xm) = * 1 T Z T /2 −T /2 p(Xm, tk+ τ )dτ + Nldv

où [−T/2 : T/2] défini l’intervalle des retards τ considérés.

Les interspectres pression-vitesse sont alors obtenus par transformation de Fourier de ces corrélations dans la direction temporelle, soit :

Sup(Xldv, Xm, ω) = Z T /2

−T /2

Rup(Xldv, Xm, τ )e−jωτ

3.3.3 Conclusions

Les procédures de calculs présentées ici ont été appliquées pour le calcul des corrélations pression-vitesse et pression-pression dans le cadre de jets supersonique et subsonique.

Concernant le calcul des corrélations pression-vitesse, on notera que, du fait de la propriété d’ergodicité, la formulation employée est exacte. Elle ne fait appel à aucune technique d’esti-mation pour ré-échantillonner le signal LDV comme cela peut être le cas, par exemple, dans les techniques d’estimation de spectre par l’utilisation de sampling and old sur ce type de mesure.

Le calcul des corrélations pression-pression s’est heurté à des difficultés liées aux contraintes expérimentales. La procédure par “morceaux” employée pour leur détermination nous a conduit à une perte d’énergie et l’obtention d’un tenseur global vérifiant bien l’ensemble des propriétés physiques mais n’étant finalement pas exactement vérifié par tous les essais ayant été combinés pour son calcul.

Cela nous a amené à considérer un traitement particulier afin de compenser les pertes d’éner-gie liée à l’imposition de la définition positive de ce tenseur de corrélation. Il s’agit d’une pro-cédure de renormalisation des données faisant l’objet du paragraphe suivant.