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3. CADRE METHODOLOGIQUE

3.2 C OLLECTE DES DONNÉES

Afin de comprendre ce qui favorise les apprentissages chez les apprentis en terme de facteur, dans quelle mesure il peut y avoir évolution d’un savoir, d’une connaissance, d’un statut ou d’un état, et enfin dans quelle mesure une formation en alternance offre la possibilité d’une remobilisation et d’une articulation des savoirs entre eux, deux types de données ont été retenus. D’abord, des données d’enregistrement audio d’entretiens pédagogiques entre l’apprenti(e) et son formateur de terrain. Ensuite, des données de type « enregistrement audio d’entretiens d’autoconfrontation » entre l’apprenti et le chercheur.

Cette opération de récolte des données a été réalisée deux fois pour chaque apprenti et à des moments différents. La première opération de récolte a eu lieu en début d’année scolaire (août-septembre 2013) et la seconde opération a eu lieu 3 à 4 mois plus tard (décembre 2013 et janvier 2014). Ainsi planifiées, ces observations ont permis de dresser une comparaison dans le temps des éventuelles transformations de l’activité de travail racontée et de la transformation éventuelle des connaissances, états, statuts, etc. Par ce dispositif en deux temps et partant du postulat que l’apprentissage est un processus qui se déploie dans le temps, l’objectif était d’identifier les indices de transformation relatifs aux tâches et à l’activité de travail entre l’entretien 1 et l’entretien 2.

3.2.1 Les données d’enregistrement audio d’entretiens pédagogiques

Ce type de données a été recueilli au moyen d’un dictaphone (enregistreur) prêté à l’apprenti(e), qui était chargé(e) de l’allumer lors des deux entretiens pédagogiques avec son/sa formateur/trice. Ce dispositif a été choisi car il évite une présence physique du chercheur qui pourrait, par sa présence, biaiser les entretiens. De plus, ces entretiens se déroulent le plus souvent lors de moments occasionnels sur le terrain. Il suffisait alors de fournir l’enregistreur au formateur et à son apprenti(e) pour qu’ils l’utilisent dès qu’ils planifiaient un entretien pédagogique. L’apprenti et le formateur ont reçu comme seule consigne de mener un entretien pédagogique comme ils ont l’habitude de le faire en temps normal. Il n’y avait pas de limite de temps, ni de thématiques spécifiques à aborder.

Enregistrer ce type d’entretien a servi à récolter le matériel nécessaire pour mener les entretiens d’autoconfrontation entre l’apprenti et le chercheur.

3.2.2. Les données d’enregistrement audio d’entretiens d’autoconfrontation

A la suite de chaque entretien pédagogique, un entretien d’autoconfrontation avec l’apprenti(e) et le chercheur, portant sur l’entretien pédagogique, a été réalisé. Ces entretiens d’autoconfrontation ont été effectués environ une semaine après chaque entretien pédagogique. Cette semaine d’intervalle a servi à l’analyse préalable des données issues de l’entretien pédagogique. Cette analyse préalable a ensuite permis la création de la trame2 de l’entretien d’autoconfrontation. Concrètement, les entretiens d’autoconfrontation ont pris une forme hybride puisqu’il s’agissait de sélectionner les passages les plus pertinents durant les séances d’entretien avec le formateur, puis de questionner l’apprenant de façon ouverte sur chacun des passages. L’entretien d’autoconfrontation s’est alors mu à travers l’utilisation de techniques propres à l’entretien d’explicitation de Pierre Vermersch, dans le but d’aider l’apprenant à verbaliser et donner le maximum d’informations en lien avec la séquence écoutée. Pour mieux comprendre la nature de ce type d’entretien hybride réalisé, faisons un bref détour sur ce que ces notions d’autoconfrontation et d’explicitation recoupent : l’entretien d’autoconfrontation ainsi que l’entretien d’explicitation sont des méthodes visant à favoriser les mécanismes de prise de conscience des apprentissages chez les professionnels par l’adoption d’une posture réflexive (Filliettaz, 2008a). Elles ne contribuent pas seulement à

2 Voir annexe 2) trames des entretiens d’autoconfrontation

poser des mots sur ses propres actions, mais permettent également, par l’utilisation du langage adressé à autrui, de réaliser « au sens fort du terme », ses activités (Clot, 1999).

L’entretien d’autoconfrontation simple est une méthode d’analyse de l’activité qui consiste à confronter une personne à sa propre activité en vue de susciter le déclenchement de commentaires. Par cette méthode, la personne est incitée à produire un discours à propos des démarches adoptées dans la réalisation des tâches filmées/écoutées. Le but est de découvrir les processus cognitifs liés à la description de l’activité. L’autoconfrontation est guidée par un chercheur et c’est face à ce chercheur que la personne décrit sa situation de travail (Clot, 1999). Une telle méthode se déroule en deux temps : le premier est relatif aux enregistrements vidéo de la personne en situation, le second fait référence à la personne confrontée à sa propre situation filmée et dont le dispositif favorise chez la personne concernée l’explicitation des données filmées et la production d’un discours. Pour ce faire, le chercheur sollicite systématiquement la production de commentaires (Clot et al., 2001).

L’entretien d’explicitation est une technique élaborée par Pierre Vermersch qui « consiste en un guidage de l’élucidation de l’action vécue du sujet par le sujet lui-même, qu’on cherche à placer dans la meilleure posture cognitive pour le faire » (Clot, 1999, p. 149). La personne est invitée à retrouver quels ont été les déclencheurs sensoriels qui lui permettront d’accéder au vécu de l’action. L’entretien d’explicitation a pour but d’accompagner la personne dans cette prise de conscience, en vue de passer d’un plan implicite à un plan explicite, où la personne prend conscience des démarches précises accomplies pour agir, apprendre, comprendre (Balas-Chanel, 2002). Les objectifs de cette méthode sont multiples ; il peut s’agir d’utiliser l’entretien d’explicitation en vue d’extraire du savoir utile pour la recherche. Pour le pédagogue, il peut s’agir de comprendre quel a été le raisonnement de l’élève dans une tâche.

Il peut s’agir pour l’élève de s’auto-informer, afin de prendre conscience de ses démarches personnelles, de telle sorte que celles-ci deviennent explicites et lui permettent de développer ses propres stratégies d’apprentissage (Balas-Chanel, 2002).

Ce type de collecte des données a été choisi pour deux raisons. La première repose sur le postulat selon lequel l’entretien d’autoconfrontation favorise le développement de la personne. Ce point de vue se rattache dès lors au but de « développement-formation ».

Utiliser cet outil semblait judicieux car il favorise généralement les interactions, perspective dans laquelle nous nous situons, et permet dans une certaine mesure l’élaboration ou la

conscientisation des apprentissages. La deuxième raison est que ce type d’entretien permet de rechercher un enrichissement de l’information dans le sens où, par un questionnement ouvert et/ou orienté vers l’action de l’apprenti, on peut obtenir plus aisément un maximum d’informations et d’indices sur le ressenti, le vécu de la tâche, les facteurs d’apprentissage, les stratégies d’apprentissage utilisées, l’utilisation de différents types de savoir et leur articulation dans le discours.

Le tableau ci-dessous récapitule l’ensemble des données empiriques recueillies dans le cadre de la recherche.

Tableau 1 : les principales données de la recherche

Aline Clara Gabriel

Age 18 21 23

Orientation professionnelle

Personnes âgées Enfants Handicap

Institution d’accueil EMS B. CHUV Institution E.

polyhandicap Année de formation lors

de la recherche 2ième Fin de 1ière et 2ième année 2ième

Type d’entretien avec le

formateur Ponctuel Structuré ; 1 fois par

semaine Tous les trimestres et

sinon ponctuel Temps écoulé entre

l’intervention 1 et l’intervention 2

3 mois et demi 5 mois 3 mois

Temps moyen écoulé entre l’entretien pédagogique et l’entretien

d’autoconfrontation

1 à 2 semaines 1 à 2 semaines 1 à 2 semaines

Durée de l’entretien pédagogique 1

19 minutes 38 minutes 25 minutes

Durée de l’entretien pédagogique 2

24 minutes 1 heure 18 minutes

Durée de l’entretien d’autoconfrontation 1

50 minutes 1 heure 1h15

Durée de l’entretien d’autoconfrontation 2

1 heure 1 heure 1h30