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Besoins non répondus et améliorations proposées par les patients

Chapitre 5. Résultats

5.1 Résultats : Besoins et interventions selon les personnes aux prises avec l’épilepsie

5.1.4 Besoins non répondus et améliorations proposées par les patients

Plusieurs des problématiques rencontrées par les patients épileptiques persistent malgré le suivi offert. L’identification de ces besoins qui sont non répondus ou partiellement répondus a permis aux patients de réfléchir à des pistes de solutions ou à des améliorations qui pourraient être apportées au suivi actuel. Le Tableau 8 présente une liste des besoins non répondus, identifiés par les patients.

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Tableau 8: Liste des problématiques non résolues ou partiellement résolues (patients)

Problématiques ou inconforts

Mode physiologique :

- Effets secondaires de la médication

- Limitations physiques

Mode concept de soi :

- Restrictions concernant le mode de vie, le choix d’emploi, le droit de conduire, les loisirs, les

sports, etc.

- Mauvaise adhérence aux traitements

- Symptômes dépressifs

- Gêne par rapport à leur condition de santé

- Anxiété face au caractère imprévisible des crises

- Perte d’autonomie, de liberté, d’indépendance

- Difficulté d’acceptation de leur condition

- Espoir/incertitude

Mode fonction des rôles :

- Difficulté d’employabilité

- Problèmes financiers

- Discrimination, jugements, stéréotypes, incompréhension des gens

Mode d’interdépendance :

- Absence d’un réseau social

- Manque d’empathie des professionnels

- Suivi postopératoire chaotique et insuffisant

- Méconnaissances du rôle des professionnels

- Consultation de sites internet pour obtenir de l’information complémentaire

Améliorations reliées au mode physiologique proposées par les patients

Les patients ont émis des propositions afin de mieux résoudre ou mieux prendre en charge les problématiques non résolues. Premièrement, concernant les effets secondaires des médicaments, un patient propose d’encourager les personnes épileptiques à faire de l’activité physique, à faire de la relaxation, de la méditation ou de la visualisation.

« J’ai toujours fait beaucoup d’exercices moi. En tous cas, j’ai pensé que l’exercice diminue les effets secondaires. […] Ce qui m’a beaucoup aidée aussi, c’est que je fais du yoga, de la méditation et de la visualisation. » Patient 3

Ensuite, un autre patient mentionne qu’il serait profitable de faire un suivi des patients qui ont des effets secondaires ou qui ont récemment subi un changement dans leur médication.

« La phrase magique, elle est là. S’il y a quelque chose, j’attends ton appel. On se sent tenu par la main, il y a quelqu’un qui m’accompagne. Elle le sait que je suis dans une phase qui est plus ou moins bonne. Qu’elle le sait que je peux l’appeler. C’est rassurant. Tu le sais que pendant ces deux prochaines semaines-là, tu as accès. Elle va connaître ton cas. Tout de suite, elle va réagir. Ce n’est pas grand-chose, mais ça fait une différence. Peut-être qu’il y a d’autres

mondes qui se sont sentis comme ça. Je suis au courant de ce qui se passe, empêche-toi pas de m’appeler ou n’attends pas. Il y en a qui peuvent mal feeler, mais qui vont attendre les deux semaines de peur d’avoir l’air fatiguant. » Patient 4

Concernant les limitations physiques, la majorité nous mentionne l’importance de bien connaître les stimuli, propres à chacun, qui risquent de déclencher des crises. Les patients croient que l’infirmière devrait accorder une attention particulière aux déclencheurs spécifiques à chaque patient et adapter son enseignement en conséquence.

Améliorations reliées au mode concept de soi proposées par les patients

Maintenant, voici quelques interventions suggérées par les patients pour favoriser l’intégration spirituelle et psychique de ces personnes. Pour la plupart des problématiques issues du mode d’adaptation concept de soi, les patients ont proposé une intervention, soit l’enseignement. L’infirmière pourrait donner davantage d’information lors du diagnostic, mais aussi ponctuellement aux patients et à leurs proches. Certains patients mentionnent même le désir de participer à des séances d’information de groupe avec l’infirmière. L’infirmière devrait débuter l’enseignement avec les croyances et les connaissances du patient, pour ainsi éviter qu’il demeure certaines incompréhensions.

« […] quand on m’a dit diagnostiqué, on m’a expliqué c’était quoi l’épilepsie, mais on n’a pas fait l’éventail de tout ce que c’était. Il a fallu que je le découvre par moi-même, avec ce qui venait autour. Par exemple à propos de comment le monde réagissent, on ne me l’avait pas dit. La médication que tu avais un éventail de médicaments qui était infini, que tu pouvais combiner. Ça on ne m’avait pas expliqué. Je pensais que c’était une tylenol, puis on en parle plus […] J’aurais aimé le savoir. J’aurais peut-être bien aimé avoir une journée, comme on fait là aujourd’hui, on s’assoit ensemble, qu’on m’explique un peu c’est quoi, un peu comme un petit cours, je ne sais pas, que tu peux venir avec ta blonde et conjoint. Je me l’imagine. Avec un mannequin, comme au RCR, faire un atelier, on est 6-7 conjoints ou proches et on explique ce qu’est l’épilepsie et comment réagir avec le mannequin, comment déplacer, le crayon c’est tu bon, les doigts dans la bouche lors d’une crise. Je pense que ça, au début, ça aurait rassuré ma blonde, que plus que de l’apprendre. » Patient 4

Pour ce qui est des symptômes psychologiques ressentis par les personnes épileptiques, ces derniers suggèrent d’avoir davantage accès à d’autres professionnels ou organismes lorsque leur situation le nécessite.

Aussi, concernant le sentiment de perte d’autonomie rapporté par les patients, ceux-ci proposent de participer plus activement dans l’autogestion de la maladie. Par exemple, pour favoriser l’autonomisation des patients, un des participants propose que l’infirmière intègre dans son suivi des outils pour accroître l’implication les patients, comme un calendrier des crises.

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« J’avais fait un code 1-2-3. 1 c’était juste comme une distorsion de la réalité, 2 c’était un petit peu plus fort et 3 quand je perdais le contact, comme je vous dis, mais je pouvais continuer à marcher. J’avais fait ça, une gradation. » Patient 3

Améliorations reliées au mode fonction des rôles proposées par les patients

Concernant les problématiques au niveau de la fonction des rôles, certaines suggestions ont aussi été faites par les patients. Les patients ont affirmé avoir de la difficulté à maintenir un réseau social satisfaisant. La plupart ont mentionné le désir de partager et d’échanger avec d’autres personnes épileptiques. Selon eux, cela pourrait les aider à combler leur besoin d’interdépendance et, par le fait même, faciliter leur processus d’acceptation de la maladie.

« Je suis allé voir sur les forums. Vive internet des fois. Ça fait peur plus que d’autres choses, mais au moins ça te donne un aperçu de ce que d’autres mondes vivent un peu avec le même problème que toi. » Patient 4

Améliorations reliées au mode d’interdépendance proposées par les patients

Ces derniers suggèrent aussi que les professionnels fassent preuve de plus d’empathie et d’une attitude exempte de jugement. Ceux-ci devraient aussi démontrer une ouverture d’esprit et être attentifs aux besoins des patients. Une des personnes épileptiques mentionne aussi que les professionnels devraient faire preuve de plus de franchise, même si cela peut parfois être décourageant. Quelques patients aimeraient aussi recevoir plus de documentation écrite ou de références fiables pour obtenir de l’information complémentaire. Certaines recommandations des patients touchent le volet entourant la chirurgie dans les cas d'épilepsie réfractaire. Les patients rencontrés ayant subi cette chirurgie ne se souvenaient pas avoir rencontré l’infirmière en préopératoire, mais seulement une fois l’opération réalisée. Ils aimeraient donc avoir l’opportunité de voir l’infirmière au moins une fois ou lui parler, simplement pour établir un contact avec celle qui procédera au suivi. Les patients ayant subi cette chirurgie ont aussi affirmé qu’il serait bénéfique d’avoir plus d’information, de conseils et de préparation avant la procédure chirurgicale. Un patient suggère que le suivi postopératoire soit plus rigoureux et plus élaboré, selon les besoins de chaque patient. Selon eux, l’infirmière devrait être en mesure de procéder à une évaluation complète du patient en postopératoire, de répondre aux besoins et aux questions des patients épileptiques opérés, ainsi que de faire les références nécessaires en cas de besoin.

« Mais quand j’étais allée passer la semaine à l’hôpital, là j’avais remis au neurologue un petit truc. Il y avait des petites choses, suggérer aux gens d’apporter des vêtements qui boutonnent à l’avant, parce que là enlever son linge, avec ces fils là, ce n’est pas toujours évident. C’est compliqué parce qu’il faut débrancher ça quelques secondes. Avoir aussi un masque pour les yeux, comme il y a la caméra et la boule infrarouge, on a toujours ça. Moi j’avais mon vélo et mes écouteurs. J’avais pris des notes pendant que j’étais là et je lui avais remis une liste. C’est vrai que quand on est là, il faut se changer les idées. Sinon aussi, je pensais aux gens qui subissent cette opération-là. Commencer à se mettre à la méditation, dans l’année qui précède puis faire les exercices. Moi je me dis les gens qui ne font pas de trucs, être toujours couchés

comme ça au début. Les premières semaines, j’étais toujours couchée sur ce côté-là. À un moment donné, faut faire de simples exercices. » Patient 3

Pour conclure, les patients ont soumis plusieurs suggestions afin que le suivi réponde mieux à leurs besoins. Voici quelques exemples concernant : 1) le mode physiologique, soit la promotion de l’activité physique, de la méditation et de la visualisation, ainsi que la mise en place d’un suivi plus strict pour les patients ayant récemment subi un changement dans leur médication, 2) le mode concept de soi, notamment l’amélioration de l’enseignement offert, l’accès à d’autres professionnels et l’accroissement de l’implication des patients, 3) en lien avec le mode fonction des rôles, soit d’offrir des opportunités d’échanges avec d’autres personnes épileptiques et 4) en lien avec le mode d’interdépendance, de pouvoir bénéficier de plus de documentation et d’un suivi plus rigoureux dans certains cas spécifiques. De plus, certains patients ont exprimé le désir de bénéficier d’un suivi plus rapproché, selon l’évolution de leur condition et la stabilité de leur état. Ces interventions sont d’ailleurs toutes reprises dans la composition du suivi infirmier proposé au terme de ce mémoire.