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Formant un ensemble hétérogène, les instituts et formations inscrits avant tout dans le champ économique, s'adressent à des cadres ou dirigeants en poste et sont dits le plus souvent de "perfectionnement". Ils peuvent être en concurrence tant avec des entreprises qu’avec des écoles dans la mesure où ils vendent un service (des formations) à des particuliers et des entreprises. Caractérisés par une grande diversité et un faible degré d'institutionnalisation comme "secteur d'activité" (même si ces formations existent bien

1

Le CAPET "gestion des entreprises et des collectivités" est créé en 1951 (Décret du 9 février 1951) parallèlement à l’institution des Brevets de techniciens (1952) décernés dans les collèges techniques. Suite à la réforme Berthouin (qui en 1959 élève la scolarité obligatoire à 16 ans), les collèges techniques se transforment en lycées techniques et une agrégation des techniques économiques de gestion dite "TEG" (Arrêté du 1er octobre 1962) est créée alors que les BT sont renommés BTS (Brevets de techniciens supérieurs) . Cf. INSEE, Annuaire rétrospectif de la France, 1948-1988, pp. 199-203.

avant la loi de la formation continue en 1971), on ne dispose pas sur eux de données statistiques précises. Leurs frontières sont difficiles à cerner (par exemple, un service de formation dans une société de conseil est difficilement identifiable) et il n'existe pas de réglementation spécifique concernant ces formations privées (elles ne sont pas comptabilisées par une quelconque institution et le seront seulement lorsque la formation à la gestion deviendra un enjeu social plus large)1.

Issues d'initiatives variées et non réunies en réseaux, ces formations sont liées à des fractions du patronat plus ou moins influencées par des modes d'organisation importés des Etats-Unis (l'OST des années trente, la productivité des années cinquante) et par des traditions patronales en particulier chrétiennes ou consulaires. Prenant la forme d'instituts privés ou de cycles de formations, ces organismes ont des rapports différenciés à l'Etat et à l'univers scolaire : les instituts ne sont pas nécessairement reconnus par l'Etat, ni leurs certificats ou diplômes visés par l'Education nationale. Néanmoins le fort taux de diplômés de l'enseignement supérieur suivant leur formation (les titres étant recommandés mais rarement obligatoires) leur procure une certaine légitimité scolaire. En se situant dans une position de formation "postscolaire", ils peuvent se passer d'une reconnaissance scolaire formelle tout en s'appuyant indirectement sur cette légitimité2. Le critère de sélection mis en avant est celui de l'expérience professionnelle. Si les femmes n’en sont pas formellement exclues, elles ne sont pas mentionnées dans les présentations des formations et leur présence est certainement proportionnelle à leur poids dans le monde des affaires3.

En France, configuration nationale où la reconnaissance par l'Etat des instituts de formation ou des diplômes procure une légitimité recherchée, y compris au pôle entrepreneurial, il n’existe pas à notre connaissance d’institut directement issu d'une entreprise comme le CEI (Centre d'études industrielles) à Genève ou comme de nombreuses institutions en Italie. Des "écoles-entreprises" existent au début des années

1 Ce n'est qu'au début des années 1980 que "l'enquête annuelle d'entreprise" est mise en place pour

le secteur des services. Cf. Jean-Pierre GRANDJEAN, "Le système statistique d'entreprises", Courrier des

statistiques, n° 78, août 1996, pp. 5-14.

2 Comme le remarque justement G. Scarfo Guellab à propos des écoles italiennes. Cf. Grazia

SCARFO GUELLAB, La transformation du système d'enseignement italien, op. cit.

3

A titre indicatif, précisons que la part de femmes parmi les industriels est de 14, 9 % en 1954 et de 15,8 % en 1982, parmi les ingénieurs elle est de 2, 1 % (1954) et 6, 7 % (1982), parmi les cadres administratifs supérieurs elle est de 8, 6 % (1954) et 22, 2 % (1982). Cf. Michel GOLLAC, Baudouin SEYS, "1954-1982 : les bouleversements du paysage social", art. cit, p. 157. Sachant qu’entre 1965 et 1980, le taux d’activité des femmes (de 25 à 54 ans) passe de 43 % à 63 %. Cf. Margaret MARUANI, Emmanuèle REYNAUD, Sociologie de l’emploi, Paris, La découverte, 1999, p. 13.

1960 mais elles concernent avant tout la formation d'ouvriers et non la formation de cadres ou dirigeants1.

En Italie dans les années 1960, toutes les écoles de gestion qui forment le plus souvent des candidats déjà diplômés (titulaires de la Laurea) sont privées. Les relations avec l'Etat sont perçues comme une marque d'un faible prestige (les diplômes ne sont pas reconnus par l’Etat) alors que l'inscription dans l’univers entrepreneurial est déterminante. Les rapports à l'université sont plus diversifiés : alors que l'IPSOA de Turin, première Business School italienne fondée par les entreprises Olivetti et Fiat en 1952 se situe en dehors du système académique, l'ISIDA de Palerme, la CUA de Vincenza et la SAA de Turin créées à la fin des années 1950 sont des instituts autonomes liés à une université2.

En revanche, certaines organisations patronales (interlocutrices des autorités étatiques) sont légitimes pour réaliser ou initier de la formation aux affaires. Et la formation constitue pour elles un enjeu de premier plan : c’est affirmer qu’être patron ou dirigeant nécessite des compétences plus qu’un héritage. C’est essentiellement le patronat chrétien qui s’intéresse à la formation des dirigeants au début des années 1960 : le CRC (Centre de recherche des chefs d'entreprise) créé en 1953 sous le patronage du CNPF, le Centre français du patronat chrétien (CFPC) qui a initié l'Ecole des chefs d'entreprises en 1944 et le Centre des jeunes patrons créé en 19383. La crédibilité des formations proposées est directement liée au prestige de ces organisations patronales. C'est net dans le cas du CRC où réaliser une formation est une façon de se rapprocher des grands patrons "éclairés" qui développent leur pensée dans un club de réflexion ouvert à certains hauts-fonctionnaires et universitaires et prennent position sur les "grands débats de société"1. Ce service proposé permet à la fois de diffuser la "philosophie" du club à un cercle plus large — mais néanmoins limité —, parallèlement aux Cahiers du CRC. Si le CRC propose une aide à la "réflexion personnelle" en cercle fermé dans une propriété en région parisienne (cf. Document 3), c’est sous une forme moins institutionnalisée et avec moins de prestige mais la même ambition de patronat "progressiste" à l’échelle régionale que le Centre des jeunes patrons propose à ses adhérents (dirigeants de PME) des cycles

1

Sur les ouvriers qualifiés, cf. Nicolas HATZFELD, "L'école d'apprentissage Peugeot (1930-1970) : une formation d'excellence", Formation-emploi, n° 27-28, 1989, pp. 115-128.

2 Pour une analyse approfondie de l'espace de la formation en gestion italien, cf. Grazia SCARFO

GUELLAB, La transformation du système d'enseignement italien, op. cit., pp. 47-98.

3

Cf. Henri WEBER, Le parti des patrons : le CNPF, 1946-1986, Paris, Le Seuil, 1991, pp. 150-154.

de formation courts dans différentes villes2. Dans les deux cas, les échanges entre "pairs" (dirigeants) sont valorisés même si les savoirs "modernes" d’administration des entreprises sont intégrés3. La certification scolaire des formations n’est pas recherchée et seul le label patronal compte.

Les instituts de formation peuvent également être adossés à une organisation professionnelle. C’est le cas dans le secteur bancaire et sur un autre mode, des organisateurs-conseil. Le Centre d’études supérieures de banque a été créé en 1941 à Paris par l’Association professionnelle des banques. Réservé aux "employés supérieurs de banque présentés par leur établissement bancaire en vue d’occuper des postes de direction ou d’encadrement", cet institut privé propose des cours, conférences et travaux pratiques organisés sur deux ans et axés sur les études économiques et financières et sur les études bancaires. Le diplôme délivré aux élèves ayant obtenu les deux certificats de formation est strictement lié à l’association bancaire4

. Les prestations de formation offertes par les conseillers en organisation regroupés en association touchent tous les secteurs professionnels et sont davantage reconnues par l’Etat. L'Ecole d'organisation scientifique du travail (EOST), créée en 1934 à Paris au sein du CNOF (Comité national de l'organisation française) qui réunit à l’origine les disciples de Frederic W. Taylor et de Henri Fayol, obtient la reconnaissance par l’Etat en 19575

. La crédibilité du CNOF (et de son école) se fondent sur un passé riche, sur des ressources internationales et une position d'interlocuteur privilégié du mouvement de la productivité dans les années 1950. Cet héritage les met dans une situation ambiguë au milieu des années 1960 dans la mesure où l'OST et plus largement les techniques d'organisation restent dominantes tout en étant

1

Marcel Demonque, PDG des Ciments Lafarge, intervient par exemple dans un débat sur l’université initié par la revue Esprit, cf. "Faire l’université. Dossier pour la réforme de l’enseignement supérieur", Esprit, n° 5-6, mai-juin 1964, pp. 710-711.

2 Néanmoins P. Bernoux montre bien l’ambiguïté du registre de la formation qui peut être conçue

dans une optique strictement moralisatrice se référant à la tradition chrétienne du CJD et pas nécessairement "progressiste" ; ce flou permet de rassembler les adhérents. Cf. Philippe BERNOUX, Les

nouveaux patrons. Le Centre des jeunes dirigeants d'entreprise, Paris, Editions ouvrières, 1974, pp. 46-50.

3 Les savoirs de gestion en tant que tels sont probablement davantage pris en compte à l’Ecole des

chefs d’entreprises qui organise des cours par correspondance. Précisons que le CRC, le CJP (devenu Centre des jeunes dirigeants en 1968), le CFPC (devenu Les entrepreneurs et dirigeants chrétiens en 2000) organisent toujours à l’heure actuelle des formations (mais plus dans le cadre de l’Ecole des chefs d’entreprise qui disparaît en 1980, dans le cas du CFPC).

4

Cf. Denise FLOUZAT, L'étudiant économiste. op. cit., pp. 291-293. Ce centre de formation existe toujours aujourd’hui.

5 Le CNOF, créé en 1926 est une association reconnue d’utilité publique qui, selon sa propre

présentation "participe au progrès économique et social accompli par les entreprises françaises : en favorisant à leur intention, l’étude et la diffusion des méthodes d’organisation, de direction et de gestion". Cf. la revue du CNOF, CNOF, "Spécial EOST, n° 8-9, 1965, p. 6.

progressivement banalisées1. Certes l’EOST a intégré les "sciences humaines appliquées" et ne se centre plus sur la seule industrie, mais cet institut privé qui s’adresse (sous forme de cours par correspondance parallèlement aux conférences parisiennes) à tous les échelons de la hiérarchie grâce à des cycles de formation variés devient moins central (cf. Document 4)2. La CEGOS (Commission générale d'organisation scientifique créée en 1926), qui propose parallèlement aux "sections d’échanges d’expérience" réservées à ses adhérents et aux activités de conseil, des cycles courts de perfectionnement et de formation dans les différents domaines de gestion, a davantage marqué le tournant en intégrant plus tôt les techniques de "gestion des hommes" puis l'informatique dès le début des années 19603.

D’autres instituts de formation sont plus directement liés à l’Etat. Deux instituts parisiens ont été créés par le Commissariat général à la productivité et sont administrés sous un mode paritaire : l'Institut de contrôle de gestion (ICG) et l’Institut d’études supérieures des techniques d’organisation (IESTO). Créé en 1956, l’ICG a pour objet de promouvoir les méthodes de gestion prévisionnelle auprès des chefs d’entreprise, des experts-comptables et des cadres4. La formation relativement pointue (cf. Document 5) dure deux ans à raison de sessions de deux jours une fois par mois durant 9 mois. A partir de 1960, sont organisés des cours par correspondance puis des sections locales de l’ICG sont progressivement implantées dans toute la France puis à l’étranger5. Quant à l’IESTO

créé en 1955 et mis en place à l’initiative de l’Association française des conseillers en

1 Cf. Odile HENRY, "Le conseil, un espace professionnel autonome ?", Entreprises et histoire,

art. cit.

2 En 1969, l’EOST se transforme en "Centre français de management". Cf. "Qu’est-ce que le

centre français de management ?", Avenirs, n° 207-208, novembre 1969, p. 181.

3 La CEGOS, qui prend un statut associatif en 1948, crée à partir de 1955 des filiales

commerciales. En 1963-64, les stages et sessions représentent 30 % des recettes de la CEGOS. En 1967, la CEGOS est composée de plusieurs départements dont Sété-CEGOS (conseil en recrutement), IDET (Institut pour le développement économique et technique), CEGOS-informatique, Eurinvest (filiales en Europe), Makrotest-France (études de marché), Hommes et techniques (édition et revue). Cf. Antoine WEEXTEEN, Le conseil aux entreprises et à l'Etat en France. Le rôle de Jean Milhaud (1898-1991) dans

la CEGOS et l'ITAP [Institut technique des administrations publiques], Thèse de doctorat d’histoire sous la

direction de P. Fridenson, Ecole des hautes études en sciences sociales, 1999, pp. 532-550.

4 En 1961, les membres titulaires du Conseil d'administration de l'ICG représentent le CNPF, la

Chambre de commerce de Paris, l'Association française pour l'accroissement de la productivité, le Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables et comptables agréés, la Société française de recherche opérationnelle, la Fédération des compagnies des chefs comptables, la Confédération générale des cadres, la Confédération française des travailleurs chrétiens et l'Association "Amicale des anciens élèves de l'Institut". In, Association des anciens élèves de l'Institut de contrôle de gestion, Annuaire ICG, 1961, p. 30.

5 L’ICG devient en 1980 l’IFG (Institut français de gestion). Il a été "rejoint" en 1997 par le

CNOF. Le statut actuel de l’IFG est celui d’une "Société par actions simplifiée" (site internet : IFG-France.com).

organisation scientifique et du CNOF1, il a la particularité de s’adresser "aux administrations ou entreprises qui désirent spécialiser un ou plusieurs de leurs cadres dans l’étude des problèmes d’organisation" et "aux cabinets d’organisateurs-conseils soucieux de donner une solide formation à leurs jeunes collaborateurs, et d’une manière plus générale à tous ceux qui désirent exercer la profession de conseil en organisation"2. Intégré au Conservatoire national des arts et des métiers (CNAM) où il existe toujours, cet institut propose au début des années 1960 des études d’une durée de 16 semaines suivies d’un stage pratique de 4 mois et qui sont sanctionnées par un diplôme reconnu par l’Etat. Signalons en outre que les Centres régionaux de productivité, s’ils ont apporté de nouveaux moyens à des organismes existants, ont parfois mis en place des cycles de formation qui portent tant sur la gestion commerciale que sur le contrôle de gestion ou encore les relations humaines ou les techniques d’approvisionnement3

.

Les Chambres de commerce  établissements publics à caractère administratif dont les membres sont élus par les représentants des entreprises d’une circonscription  ont également initié des formations en gestion visant des cadres et dirigeants en poste4. A Paris, les autorités consulaires ont créé en 1930 le Centre de perfectionnement dans l'administration des affaires (CPA) puis en 1953, le Stage d’étude de la gestion des entreprises (STEGE). A Lyon, c’est le Centre lyonnais d’étude de la gestion des entreprises (CLEGE) qui apparaît en 19595. Le CPA, établissement reconnu par l’Etat jouit d’une grande notoriété dans les années 1960. Avec le soutien de la Harvard Business School, ce centre a, dès sa création, importé la "méthode des cas" et l’a adaptée en France en s’appuyant sur le Bureau de recherches industrielles et commerciales, organe de création de cas puisés dans les entreprises françaises6. Le STEGE et le CLEGE  moins

1 Cf. Antoine WEEXTEEN, Le conseil aux entreprises et à l'Etat en France. op. cit., p. 482. 2 Cf. Denise FLOUZAT, L'étudiant économiste. op. cit., pp. 281-284.

3 Cf. AN, 930 277, art. 125, CGP, Rapport du Groupe IV, pp. 30-31. 4

A partir de 1960, les chambres de commerce s'intitulent "chambre de commerce et d'industrie" (CCI). Cf. Pierre PUAUX, Les chambres de commerce et d'industrie, Paris, PUF, 1998, 128 p. Néanmoins, par commodité et pour ne pas alourdir le texte, nous utiliserons parfois simplement les termes "chambre de commerce".

5

Cf. Denise FLOUZAT, L'étudiant économiste. op. cit., pp. 272-274 ; "Le Centre de perfectionnement dans l’administration des affaires" et "Le centre lyonnais d’étude de la gestion des entreprises. CLEGE", Avenirs, n° 207-208, novembre 1969, pp. 157-163. Le CLEGE a aujourd’hui disparu ou a changé de nom.

6

Sur le travail de réappropriation de la méthode harvardienne par le CPA dans le cas de la gestion commerciale, cf. Marie-Emmanuelle CHESSEL, La publicité. Naissance d’une profession 1900-1940, Paris, CNRS Editions, 1998, pp. 60-80 et "The Introduction of Harvard Business School Methods in France : The Centre de Préparation aux Affaires in the 1930's" in TIRATSOO Nick, Gourvish Terry (eds.),

The Business School in European Perspective, London School of Economics, Business History Unit,

sélectifs que le CPA qui, en dehors des conditions d’âge et d’exercice de responsabilité souligne l’importance des diplômes et sélectionne sur entretien  ont repris cette formation "active". Le directeur du CPA en 1969, Orly Collet, présente ainsi dans la revue Avenirs cette méthode de travail qui constitue l’originalité de l’institut et qui est souvent utilisée à titre complémentaire par de nombreuses institutions de formation en gestion :

"Les cas, étudiés individuellement, puis en groupes d’études, et enfin discutés en amphithéâtres sous la direction d’hommes d’affaires particulièrement compétents, sont des problèmes, non pas imaginaires, mais réels, de la vie des Entreprises. Cette méthode est particulièrement propre à développer l’aptitude des participants au travail en groupe, aux échanges, à la communication. Elle est spécifiquement orientée vers l’action et doit les conduire à l’élaboration des décisions à partir de :  l’approche méthodique des problèmes,

 la mise en évidence des données significatives,

 la recherche et la confrontation des solutions possibles".

(…) Matériellement, le cas est un document de travail constitué de quelques pages à plusieurs centaines de pages qui peut être "homogène ou comporter des notes, des annexes de toutes sortes, des documents généraux, pièces comptables, contrats, tableaux, graphiques, etc. (…) Leur discussion porte sur une dizaine de séances [d’une heure chaque soir]"1

.

Cette méthode, telle qu’elle est utilisée au CPA avec un groupe d’une douzaine de personnes dont le caractère empirique séduit de nombreux dirigeants d’entreprise tout comme le rôle d’"animateur" joué par le professeur, lui-même "homme d’affaire particulièrement compétent", n’est pas sans rappeler celle du CRC. Visant des dirigeants "hautement expérimentés", le plus souvent diplômés de grandes écoles, ces instituts innovent avec des formules où l’on ne forme pas le dirigeant mais où il se perfectionne lui-même grâce à une dynamique collective créée autour de lui et grâce à sa "réflexion personnelle" et sa "capacité de synthèse". A l’opposé, se situent des formations spécialisées dans une technique, une fonction ou un domaine circonscrit, visant davantage de jeunes voire de futurs cadres, comme le Centre d’études supérieures des banques, l’Institut de contrôle de gestion ou l’Institut d’études supérieures des techniques d’organisation. Les méthodes utilisées sont des cours réalisés par des praticiens ou des professeurs de l’enseignement technique, des travaux pratiques (au CESB et à l’ICG) ou

1

Cf. Orly COLLET, "Le Centre de perfectionnement dans l’administration des affaires", Avenirs, n° 207-208, novembre 1969, p. 159.

des stages dans le cas de l’IESTO. Entre ces deux types de formation se situent sans doute les cycles "supérieurs" de l’EOST qui s’appuient sur des cours magistraux faits par des professeurs d’université, et des "personnalités" de l’industrie, du commerce, de l’agriculture, des administrations publiques et de nombreux organisateurs conseils.

Au début des années 1960, la fragmentation de "l’offre de formation" en administration des entreprises (pourtant largement centralisée dans la capitale) correspond à l’hétérogénéité des publics auxquels elles se destinent (selon leurs statuts, leurs spécialités, leurs secteurs d’activités, etc.). Les contenus enseignés (ou "présentés" dans le cas du CRC) vont des plus formalisés  le contrôle de gestion, la recherche opérationnelle , aux plus littéraires avec la psycho-sociologie appliquée aux entreprises. Mais le contenu, c’est aussi le mode de formation : du plus scolaire (avec des cours et des exercices) au plus "mondain" c’est-à-dire le moins formalisé, le moins autoritaire, le plus lié aux acquis incorporés des stagiaires ou mieux des "sessionnaires" (la méthode des cas, la discussion animée)1. Dans ces instituts et cycles de formation qui dépendent plus ou moins directement d’une organisation patronale et qui sont parfois reconnus par l’Etat, la légitimité à former à l’administration des entreprises est liée soit à la pratique des affaires, soit à l’exercice d’une activité de conseil aux entreprises : les savoirs sont avant tout dans les entreprises. Cette conception est partiellement reprise dans les écoles de commerce et d’ingénieurs.

Les écoles de commerce et d’ingénieurs, pôle scolaire du champ