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Ce travail a comme but l’étude des faits lexicaux et il est orienté essentiellement sur la problématique qui concerne le rôle de la motivation sémantique dans la création lexicale. On se réfère à la motivation sémantique comme à l’une des composantes fondamentales du processus de désignation. On se base, en particulier, sur la proposition de Guiraud (1986 [1967]) selon laquelle le signe linguistique naît motivé pour qu’il puisse être compris, de manière spontanée, par tous les membres d’une communauté linguistique. En effet, lorsqu’il s’agit de nommer un nouveau référent, on puise dans les ressources du système linguistique même si l’on est aussi influencés par les représentations que les locuteurs se font de la réalité (Guiraud 1986 [1967]). Cet auteur considère les signes comme étant le produit de l’histoire (Guiraud 1986 [1967] : 260) et il affirme leur dépendance de la nature des choses nommées, des besoins des locuteurs, des circonstances culturelles, sociales, politiques, etc. Alinei s’est aussi occupé de ces aspects mais de manière plus approfondie (1982 ; 1983 ; 1986 ; 1996 ; 1997 ; 2009) et il affirme que la motivation implique forcément la convergence de plusieurs disciplines différentes, telles que la linguistique, l’anthropologie, l’ethnologie et l’histoire des religions. Comme on le montrera ci- après, différents auteurs ont donné leur contribution à l’interprétation et à la définition de la notion de motivation sémantique.

Dans la Grèce antique, Platon se questionnait déjà sur l’existence d’une relation entre langue et réalité et ce questionnement est pris en considération dans son ouvrage, Cratyle, qui présente un dialogue entre trois personnages : Cratyle, Hermogène et Socrate. Le partisan de l’analogie, Cratyle soutient l’existence d’une relation naturelle entre les noms et les choses et aussi le fait que sans cette relation les noms ne seraient ni authentiques ni justes ; le nom reflète la chose et la relation qui les unit est nécessaire. On retrouve à l’exact opposé Hermogène qui représente la pensée sophiste et considère par conséquent l’attribution d’un nom à une chose comme étantarbitraire : un nom est « juste » s’il est accepté de manière conventionnelle par tous ceux qui l’utilisent. Socrate qui joue le rôle de l’arbitre entre les deux, doit aussi déterminer lequel des deux a raison : il rejette le caractère absolu du nom et essaye de trouver le juste milieu. Il s’adresse d’abord à Hermogène en affirmant que les mots sont justes puisqu’ils désignent des réalités objectivement distinctes et, pour le démontrer, il fait l’exemple des mots et des syllabes qui imitent l’essence de chaque objet, en affirmant que les mots primitifs sont le reflet fidèle de

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la réalité qu’ils désignent. Il s’adresse ensuite à Cratyle, dont il partage le point de vue naturaliste, qui affirme que le nom imite la chose désignée, mais Socrate admet aussi le fait que l’aspect conventionnel ne peut pas être écarté dans le processus de dénomination.

Aristote donne aussi sa contribution au débat autour de la nature du signe linguistique en le considérant comme le résultat de deux relations distinctes : l’une purement conventionnelle entre sons (phoné) et (páthema) sens et l’autre de ressemblance entre le sens et l’objet désigné (De Cuypere, 2008 : 322). Bien qu’elles soient le fruit de réflexions développées dans un cadre philosophique, les observations de Platon et d’Aristote portent a priori sur des questions qui ont caractérisé la discussion qui a eu lieu par la suite autour du signe linguistique et elles se rapprochent des perspectives post-saussuriennes qui sont caractérisées par l’orientation vers une relation entre le signe et l’objet désigné que Saussure semble avoir rejetée.

Au début du XXe siècle, Saussure aborde la question de la nature du signe linguistique et de l’arbitraire qui le caractérise en affirmant que « le signe linguistique unit non une chose et un

nom mais un concept et une image acoustique » (Saussure, 1967 [1916] : 98-100) ; ces deux

facettes, nommées signifiant et signifié, sont indissociables, mais le lien qui les unit est arbitraire, tout comme le signe lui-même. Il continue en affirmant aussi que sur la base de ce principe les langues et, par extension, tous les moyens d’expression, sont basées sur une convention, une habitude collective et qu’il n’y a donc pas de relation entre le mot et la réalité qu’il exprime. Ce principe saussurien affirmant le caractère immotivé du signe linguistique est à la base de sa théorie et pour en prouver la véracité il met en avant le fait que les langues ont des mots différents pour exprimer les concepts: l’idée de ʻsœrʼ n’est liée par aucune relation interne à la séquence de sons [sœr], elle pourrait tout aussi bien être représentée par n’importe quelle autre et cet exemple donne une explication sur l’existence de différences entre les langues et de l’existence même de langues différentes (Saussure, 1967 [1916] : 100). Cependant, Saussure (1967 [1916] : 183) revient sur son principe en affirmant qu’ « il n’existe pas de langue où rien ne soit motivé » et il accepte, avant tout, le fait que les onomatopées soient à un certain degré motivées, même si elles représentent un phénomène secondaire de la langue. Il fait aussi remarquer à ce propos le fait qu’une fois introduites dans la langue « elles sont plus ou moins entraînées dans l’évolution

phonétique, morphologique etc. que subissent les autres mots : preuve évidente qu’elles ont perdu quelque chose de leur caractère premier pour revêtir celui du signe linguistique en général, qui est immotivé » (Saussure, 1967 [1916] : 102). Saussure met cependant un peu en sourdine son

principe fondamental d’arbitraire en distinguant deux degrés : l’arbitraire relatif et l’arbitraire absolu ; il admet, donc, que « le signe peut être relativement motivé » (Saussure, 1967 [1916] : 181) lorsqu’il y a une relation associative entre les éléments qui le constituent et au cas où le locuteur ait la possibilité d’analyser un signe par l’intermédiaire d’autres signes. Ainsi, le numéral

80 vingt est immotivé, tandis que dix-neuf est partiellement motivé en raison du fait que le locuteur

reconnaît l’association de dix et de neuf ; de même, poire est immotivé et son dérivé poirier est relativement motivé: cet auteur perçoit l’arbitraire relatif comme étant lié au système morphologique des langues, et notamment aux éléments formatifs transparents de la grammaire qui rendent le signe « relativement motivé » et il précise, par conséquent, que « les éléments d’un

signe motivé sont eux-mêmes arbitraires » (Saussure, 1967 [1916] : 182).

Pierce (1978 : 149) définit le signe comme iconique car il peut « représenter son objet

principalement par sa similarité, quel que soit son mode d’être » et il distingue trois typologies

d’icônes : image, diagramme et métaphore. Contrairement à Saussure qui prenait surtout en considération la relation interne entre le signifié et le signifiant, Peirce considère la relation entre le signe iconique et le référent. Mais, certains auteurs envisagent une association entre ces deux approches théoriques: Jakobson (1987 : 420), Kleiber (1993 : 106), Van Langendonck (2007 : 398) et Polis (2008 : 49) considèrent la motivation relative saussurienne comme étant comparable à l’iconicité diagrammatique de Peirce, car la structure diagrammatique représente une classification systématique de signes qui ne ressemblent pas nécessairement à leurs référents mais dont les relations mutuelles reflètent les relations entre leurs référents. Ainsi, si l’on considère le fait que le diagramme reproduit certaines relations entre les parties d’une chose, la motivation relative exprime un rapport syntagmatique issu des relations liées au système morphologique. Kleiber (1993 : 106) et Polis (2008 : 37) ajoutent aussi une considération ultérieure à propos de l’iconicité de type « image » de Peirce : étant donné qu’elle se réfère à des signes dont la forme présente une ressemblance directe avec le référent qu’elle exprime, elle pourrait donc être illustrée dans le cas du signe linguistique au moyen des onomatopées.

Benveniste (1966 : 49) revient aussi sur la question de l’arbitraire du signe et il observe que le concept de ʻ réalité ʼ est mal appliqué dans l’interprétation de Saussure et il affirme, en revanche, que le lien entre signifiant et signifié est avant tout nécessaire et que ces deux facettes du signe linguistique sont étroitement liées et ne laissent pas deplace à l’arbitraire (Benveniste, 1966 : 51) : « l’esprit ne contient pas de formes vides, de concepts innomés » (Benveniste, 1966 : 50). Selon l’interprétation de cet auteur, l’arbitrarité caractérise plutôt la relation entre le signe et la réalité désignée car « ce qui est arbitraire c’est que tel signe, et non tel autre, soit appliqué à

tel élément de la réalité, et non à tel autre » (Benveniste, 1966 : 52).

La vision de Ullmann (1959 : 102), n’est en revanche pas différente de celle de Saussure car il accepte comme évident le fait qu’un grand nombre de mots soient purement conventionnels. Il reprend l’argument saussurien en affirmant que si les langues étaient motivées, elles auraient les mêmes termes pour exprimer les mêmes notions. L’auteur distingue, ainsi, deux typologies de signes : ceux purement conventionnels et les naturels, ces derniers se basant sur un lien

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intrinsèque entre signifiant et signifié. Les signes naturels renvoient à trois types de motivations : phonique lorsque le mot imite l’impression acoustique du référent ; morphologique, par dérivation ; sémantique, par le réemploi de mots déjà existants pour désigner de nouveaux concepts (Ullmann, 1959 : 103). Tout comme cela se produit dans le schéma saussurien, Ullmann (1959 : 104) caractérise lui aussi la motivation phonique comme une motivation absolue et les deux autres typologies comme des motivations relatives ; en revanche, la motivation sémantique et celle morphologique sont exposées, selon cet auteur, « à tous les hasards de l’évolution

linguistique » et que « […] pour raisons diverses, des mots transparents peuvent devenir opaques et des mots opaques peuvent devenir (ou redevenir) transparents » (Ullmann, 1959 : 115).

Une vision diachronique identique du signe linguistique nous est proposée dans la classification des mots de Wartburg (1963 : 139) qui fait la distinction entre : les mots directement motivés par les sons ; les mots motivées soit par leur structure morphologique soit par leur valeur sémantique ; les mots arbitraires ou opaques. Dans la première de ces trois catégories classificatoires, Wartburg inclut les formes évoquant aussi bien des « impressions acoustiques » que des « impressions visuelles » ; les mots composés et dérivés sont motivés par leur structure morphologique, tandis que les mots tels que punaise sont motivés par leur valeur sémantique, ce qui revient à dire que l’aspect morphologique de l’insecte à corps aplati motive par sa ressemblance le « petit clou à tête plate et ronde » ; et en dernier lieu, les mots arbitraires ou opaques « ne doivent leurs sens qu’à la tradition » (Wartburg, 1963 : 140). Cet auteur ajoute une observation ultérieure en affirmant une certaine « dynamique » des mots qui peuvent passer au cours de l’histoire d’une catégorie à l’autre, en perdant ainsi leur fondement original (Wartburg, 1963 : 140). Il explique aussi le fait que les raisons qui sous-tendent ces changements de catégorie des mots sont représentées « […] par l’évolution phonétique ou par le jeu des modifications

morphologiques ou comme le résultat d’un changement de sens […] » relâchant « […] les rapports que les mots entretiennent avec leur continu représenté. Ils deviennent aussi, suivant l’expression de Saussure, de simples formules, des signes arbitraires » (Wartburg, 1963 : 144).

La perception dynamique et diachronique du signe linguistique est au cœur de la réflexion de Guiraud et elle élargit, de fait, la vision synchronique et plutôt statique du signe saussurien, même si l’on remarque également chez Saussure des indices d’une vision diachronique lorsqu’il affirme que

« […] à l’intérieur d’une même langue, tout le mouvement de l’évolution peut être marqué par un passage continuel du motivé à l’arbitraire et de l’arbitraire au motivé ; ce va et vient a souvent pour résultat de déplacer sensiblement les proportions de ces deux catégories de signes » (Saussure, 1967 [1916] : 183).

Malgré cette observation, Saussure ne change pas son idée globale selon laquelle la motivation est accidentelle. Pourtant, l’approche dynamique du signe établie par Guiraud réorganise les notions de « motivé » et d’ « arbitraire » qui étaient jusqu’ici opposées : dans la

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vision guiraudienne ces notions représentent les états successifs de l’évolution du signe (Dalbera, 2006a : 20). Le signe naît motivé, mais une fois introduit dans le système linguistique, il est utilisé par convention, indépendamment de sa motivation (Guiraud, 1986 [1967] : 253). Par conséquent, à partir du moment où l’usage du signe est assuré par convention au sein d’une communauté, à cause des modifications au niveau phonétique, morphologique et culturel, « la motivation tend à

s’obscurcir et le signe ne fonctionne plus que comme pure association mémorielle » : il peut alors

paraître arbitraire (Guiraud, 1986 [1967] : 255). Une fois démotivé, le signe peut entrer dans de nouvelles relations au niveau du sens ainsi qu’à celui de la forme, des relations limitées par la structure du « système lexicogénique » (Guiraud, 1986 [1967] : 259). Guiraud ajoute en outre que

« la démotivation est […] une nécessité inhérente la nature du langage et à son fonctionnement. Motivé le signe aurait un sens univoque, comme c’est le cas des taxinomies scientifiques, et le lexique serait figé en un code sans ouverture au-delà de la signification immédiate de chaque mot » (Guiraud, 1986 [1967] : 259).

En suivant la perspective de cet auteur, Dalbera a ensuite développé davantage le rôle de la remotivation dans le processus d’évolution du signe, que l’on illustrera un peu plus loin. Guiraud considère que le processus de création d’un signe est à la fois morphologique et sémantique :

« […] morphologique, ceci est clair, puisqu’il y a dans tous les cas filiation de forme entre le mot et son étymon, les deux ayant un formant signifiant commun. Mais la dérivation est en même temps sémantique, puisqu’elle consiste à désigner un concept d’après un autre […] » (Guiraud, 1986 [1967] : 256).

L’approche d’Alinei converge avec celle de Guiraud lorsqu’il affirme que la création lexicale consiste en une sorte de « recyclage de signes » ; en effet, tout comme Guiraud (1986 [1967] : 254) avait affirmé que « créer un nouveau mot c’est faire passer un mot déjà existant

dans un autre paradigme », Alinei (1982 ; 1996 ; 2009) confirme aussi la réutilisation de lexèmes

préexistants et déjà connus pour désigner un nouveau référent. Ce recyclage de matériaux déjà connus sert à garantir l’acceptation d’un nouveau signe par une communauté (Alinei, 1982 : 43) ; l’importance de la « fonction publicitaire » représente, selon cet auteur, un aspect essentiel de la motivation qu’il explique de la façonsuivante :

« trade-marking new words through motivation builds in the very structure of the new words historical depth ; […] every new word […] has the newly proposed functional meaning, but it is necessarily based on an old word, which serves as an identification mark and at the same time tells us something basic about the new meaning. This helps us understand why we need motivation in introducing the new word, but not after the word has become current »1 (Alinei, 1982 : 44).

C’est donc la fonction publicitaire de la motivation qui assure la notoriété du signe dans la communauté qui l’adopte et qui explique le fait que la motivation, une fois accomplie cette

1 Marquer les nouveaux mots moyennant la motivation permet de construire la vraie structure de la profondeur historique des nouveaux mots ; […] chaque nouveau mot […] possède la signification fonctionnelle nouvellement proposée, mais elle est nécessairement basée sur un vieux mot qui sert comme marque d’identification et, en même temps, nous dit des choses fondamentales à propos de la nouvelle signification. Ce fait nous aide à comprendre pourquoi nous avons besoin de la motivation au moment de l’introduction d’un nouveau mot, mais nous n’en n’avons plus besoin dès que le mot est devenu courant (N.T.).

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fonction, soit reléguée au second plan et puisse même éventuellement arriver à être supprimée (Alinei, 1996 : 9). Le processus d’obscurcissement de la motivation est donc lié à des circonstances historiques (changements phonétiques ou sémantiques) tout en n’étant cependant pas obligatoire, mais il produit la distinction entre les lexèmes opaques et les transparents (Alinei, 1996 ; 2009).

Selon Alinei (2009 : 62), le processus de création lexicale s’articule en deux phases : une phase créative et une autre d’usage. La motivation intervient seulement pendant la création du signe pour garantir le fait qu’il soit accepté par la communauté : la motivation a la fonction de générer le signe ; en revanche, lors de la phase de l’usage, le signe fonctionne indépendamment de sa motivation : « we ʻnameʼ things genetically, but we ʻuseʼ words functionally »2 (Alinei 1982 : 44). Si la motivation a seulement une « fonction génétique », elle n’est pas un aspect permanent de la nature du signe, parce qu’elle est susceptible de s’obscurcir ; c’est une espèce de « cordon ombilical » du signe c’est-à-dire un instrument représentatif et communicatif transitoire, grâce auquel le tout dernier signe arbitraire peut être adopté et appris immédiatement par tous et, quand il disparaît, il laisse ses traces dans le mot, de même que le cordon ombilical laisse une trace sur le corps humain (Alinei, 2009 : 64).

Ce rôle de médiateur attribué par Alinei à la motivation avait été déjà reconnu par Guiraud (1986 [1967] : 255), mais cet auteur l’exprime en termes de système et en passant par l’intermédiaire de l’étymon :

« La motivation intègre l’étymon dans la signification ; elle fait passer le sens par l’étymon qui constitue un troisième terme, médiateur entre le signifiant et le signifié, fonctionnant comme un relais à la fois signifiant et signifié. Son rôle est de renvoyer le signe à un signe de puissance en le référant au modèle qu’il actualise : chant + eur renvoie chanteur à dans + eur, saut + eur, etc. ; maroufle « chat » renvoie maroufle au modèle maraud, marpaut, marlou « homme grossier ». Dans les deux cas le procès est identique […] mais dans le premier cas le modèle est morphologique et sémique dans le second ».

Étant donné la grande importance qu’Alinei attribue à la motivation dans la phase de création du signe, il a proposé de fonder un secteur autonome en linguistique pour l’étude de la motivation. Il suggère, ainsi, de remplacer le terme motivation, considéré comme ambigu, par celui d’icônyme (= ʻicôneʼ + ʻnomʼ), c’est-à-dire « nom-icône », « nom motivant » et, par conséquent, de nommer la nouvelle discipline consacrée à son étude icônymie (Alinei, 1996 : 9). Les propositions de Guiraud et Alinei convergent avec celle de Dalbera (2006a : 20) ‒ à propos de la réélaboration de signes préexistants afin de créer des nouvelles formes lexicales ‒ lorsqu’il affirme que « la création lexicale ne s’opère pas ex nihilo. Elle présuppose l’existence

de matériaux linguistiques préalables ». Pourtant, cette conception de la création lexicale ne nous

donne cependant aucune explication sur la façon dont les premiers signes ont été créés et Dalbera

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(2006a : 20) ajoute aussi que la création d’un signe n’est pas une simple association entre une séquence phonique quelconque et un concept. Selon cet auteur, la création lexicale naît d’un besoin communicatif d’une communauté et le processus de dénomination qui en découle est l’effort pour répondre à ce besoin :

« Lorsqu’une communauté rencontre sur son chemin quelque chose de nouveau (objet, idée, besoin, jeu, peu importe) elle se trouve, pour pouvoir en parler, dans la situation de devoir le nommer. Ce nouveau venu cet à nommer, quel qu’il soit, fait l’objet d’une certaine perception par la communauté qui, spontanément, le situe par rapport à des éléments familiers ou simplement connus ; ce rapport établi par la communauté peut évidemment être de nature fort diverse, activant les ressorts de ressemblance ou de contiguïté, et étant assorti éventuellement de la mise en évidence d’un trait discriminatoire saillant voire prototypique. » (Dalbera, 2006a : 21)

Selon la perspective alinéienne, dans la phase de création du signe le choix de ce type de trait se produit toujours à l’intérieur du champ associatif du référent à nommer, et le plus souvent, à l’intérieur de son champ conceptuel (Alinei, 1997 : 19). Puisque les processus métaphoriques sont également impliqués lors de la création lexicale, on peut comprendre que le choix du trait