• Aucun résultat trouvé

Les aménités correspondent à des flux générés par les actifs du territoire 1.La distinction entre stock et flux

Réflexions préliminaires sur le concept

2. Les caractéristiques économiques du concept d’aménité

2.3. Les aménités correspondent à des flux générés par les actifs du territoire 1.La distinction entre stock et flux

Selon Glaeser (2000), les aménités ne sont pas des biens, mais des flux dont les individus bénéficient sans contrepartie monétaire directe en étant simplement présents sur le territoire. Un rapport publié par la région Rhône-Alpes explique que « l’aménité n’est pas un bien public en tant que tel, mais

35

l’agrément qui peut naître de la fréquentation de ce type de bien »26. Mollard et al. (2014) opèrent également cette distinction entre stock et flux quant aux aménités environnementales. Ils expliquent que ces dernières sont liées à un stock de biens collectifs, comme une forêt par exemple, et que

l’aménité correspond au flux d’utilité dont les individus peuvent bénéficier en fréquentant la forêt. Il apparait donc nécessaire de distinguer l’aménité de sa source. La première possède une nature de flux tandis que la seconde a une nature de stock. Mollard et al. (2014) qualifient ces sources d’aménités de

« stock d’offre d’aménités » et cette formulation est cohérente avec l’idée d’une aménité qui n’est pas

produite (Gyourko et Tracy, 1991) parce que le flux d’utilité en lui-même n’est pas produit, mais généré

par la source d’aménités. Si on prend l’exemple du climat, il correspond à un ensemble de conditions

atmosphériques observées sur un territoire (pression atmosphérique, taux d’humidité, vitesse du vent,

etc.), ces conditions constituent le stock, tandis que l’aménité correspond au flux de bien-être retiré de

l’existence de ce stock.

2.3.2. Application au domaine culturel

Dans le domaine culturel, la distinction entre stock et flux est également pertinente pour mieux

comprendre le concept d’aménité culturelle. Le stock de culture peut être caractérisé à l’aide de la

typologie de Scott et Leriche (2005) qui opèrent une distinction entre biens culturels mobiles et immobiles. Les biens mobiles ne sont soumis à aucune contrainte temporelle ou géographique dans leur

consommation et sont souvent immatériels. Il s’agit de la musique enregistrée, du cinéma, du livre ou d’objets d’art. Les biens culturels immobiles sont contraints dans leur consommation sur le plan temporel ou géographique. Il s’agit de biens immeubles appartenant au patrimoine, ou d’infrastructures

de diffusion telle que les théâtres, les salles de concert ou de spectacle ou encore d’événements

ponctuels comme les festivals27 ou des performances artistiques de rue.

Ces biens culturels immobiles proposent dans certains cas des biens et services marchands comme les spectacles au théâtre ou les projections de films. Ils contribuent aussi à créer des dynamiques et des valeurs symboliques au sein des villes qui façonnent leur atmosphère (Trip, 2007). Cette dernière peut constituer une aménité dans la mesure où elle peut générer du bien-être chez les habitants de la ville et en attirer de nouveaux.

26 Rapport intitulé « Les aménités environnementales, facteurs de développement durable des territoires », Rhône-Alpes Tourisme, 2012,

https://www.monatourisme.fr/wp-content/uploads/2012/12/les_amenites_environnementales_facteurs_de_dd_des_territoires_-_2012.pdf

27 Des cas de festivals itinérants existent, mais ils restent contraints dans les moments et les lieux de consommation, ils ne sont simplement pas associés à un territoire spécifique.

36 Le stock duquel est issue l’aménité n’est donc pas toujours un bien collectif28. Les équipements culturels et les activités culturelles présents sur le territoire peuvent être des biens privés. Les politiques de régénération urbaine fondées sur la culture consistent à implanter des actifs culturels, en particulier des biens culturels immobiles, dans le but de créer des aménités culturelles, c’est-à-dire des ambiances, des atmosphères et une identité imprégnées par la culture. Les aménités culturelles correspondent alors à

un flux qui s’apparente à une externalité issue d’un stock d’actifs culturels présents sur le territoire. La notion d’actif plutôt que de biens culturels immobiles parait ici plus juste dans la mesure où l’on se situe dans l’optique d’une création de valeur territoriale (les aménités) à partir des biens qui y sont présents. Par ailleurs, la notion de bien apparait réductrice si l’on considère que les équipements, les performances de rue ou les infrastructures ponctuelles tels que les festivals peuvent contribuer à créer des aménités.

La Figure 2 schématise les développements qui ont été menés jusqu’à présent dans la section 2. Une situation dans laquelle un territoire offre un certain nombre d’actifs culturels y est décrite. Ces actifs offrent des services marchands ou non marchands29, mais contribuent également à créer une ambiance, une identité et une atmosphère dans la ville. Ces éléments correspondent à des flux non marchands qui sont seulement disponibles sur le territoire. Ils génèrent de l’attractivité lorsque les individus extérieurs au territoire y associent une valeur positive. Trois catégories d’agents peuvent consommer les services proposés par les actifs culturels ou être impactées par les aménités produites : les habitants de la ville, les navetteurs30 et les touristes. Le schéma est ici simplifié, puisque les consommateurs des services culturels et les bénéficiaires des aménités culturelles ne sont pas nécessairement les mêmes groupes de personnes. Les personnes qui bénéficient des aménités ne sont donc pas nécessairement les financeurs des actifs producteurs de ces aménités. Nous revenons sur ce point dans les sections 3 et 4 du chapitre.

28 Le terme de bien collectif est utilisé comme traduction de « public good » afin d’éviter les confusions entre nature du bien et producteur.

29 Dans le cadre de la comptabilité nationale, si les ressources propres ne couvrent pas au moins 50% des coûts de production comme un bibliothèque publique ou un musées public par exemple, on considère le service rendu comme non marchand.

30 Les navetteurs sont les individus qui effectuent régulièrement le trajet entre le lieu de résidence et le lieu de travail. Dans le contexte de cette thèse, il s’agirait d’individus qui résident à l’extérieur de la ville et travaillent en son sein où les aménités sont présentes. La question est de savoir s’ils perçoivent et profitent de la même manière des aménités culturelles de la ville.

37

Figure 2 : schéma du concept d’aménité culturelle

(Source : auteur)

La Figure 2 amène à se questionner sur la différence entre le concept d’aménité et celui d’externalité. Dans la mesure où les aménités sont des flux non marchands issus d’un stock, le qualificatif d’externalité apparait approprié. Certains auteurs ne dissocient d’ailleurs pas ces deux concepts (Mollard et al. 2014).

Dans ce cas, comment expliquer qu’une partie de la littérature ait recours à une terminologie différente ?