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Les aides financières publiques à la recherche sont censées permettre aux investisseurs privés de recouvrir une partie de leurs dépenses de R&D. Ces aides peuvent être accordées sous forme de subventions publiques (Coriat et Orsi, 2003 ; Duguet et Lelarge, 2004 ; David et al., 2000) (en amont / au cours de la recherche) ou encore de récompenses publiques ex post (Hall et Van Reenen, 2000 ; Coriat et Orsi, 2003 ; Duguet et Lelarge, 2004 ; Pénin, 2005) (en aval). Parmi les compensations financières accordées à l’activité de R&D industrielle, figurent aussi les avantages fiscaux ayant pour objet d’atténuer les coûts de la R&D en vue de l’accroitre (Hall et Van Reenen, 2000 ; Coriat et Orsi, 2003 ; Duguet et Lelarge, 2004).

Dans le cadre d’un système de récompense ex post, l’Etat verse des rémunérations financières directement aux inventeurs pour leurs contributions dans l’amélioration du bien-être social. En vertu de cette récompense, l’invention tombe immédiatement dans le domaine public et est donc accessible à tous sans contre partie. Au niveau de l’économie, le système de récompense ex post de la R&D a l’avantage de combiner incitation à l’innovation privée et diffusion de ses résultats dans l’économie, ce qui alimente davantage le stock de connaissance disponible pour tous les éventuels inventeurs.

Au niveau de l’inventeur, ce système a l’avantage de l’épargner d’avoir lui-même à récolter commercialement la récompense sur ses recherches22 (Polanyi, 1944, p.65), ce qui peut ne pas être réalisable si l’inventeur ne dispose pas des capacités de production

21 L’analyse du génome humain dans la fin des années 1990 a été conduite en concurrence entre le NIH et une grande firme privée (Celera). Il peut en découler que la recherche publique évince la recherche privée de Celera. [Human Genome Research Institute (2000), “International Human Genome Sequencing Consortium Announces ‘Working Draft’ of Human Genome”, news release, June 26, 2000, available at

www.nih.gov/news/pr/jun2000/nhgri-26.htm.].

22 La récompense de la recherche est un mécanisme bien ancré dans le temps. En 1714, le gouvernement britannique a promis une récompense de 10.000 livres sterling à la première personne qui réussit de mettre en place un instrument ou une méthode qui permet de mesurer la longitude. La récompense a été remise à John Harrison pour l’invention du chronomètre de marine (Horrobin, 1986). De même, Nicolas Appert a reçu en 1810 une récompense de 12.000 francs français suite à l’invention de la conserve appertisée (Wright, 1983). Dans la société contemporaine, le prix Nobel représente un système de récompense semblable.

et financières requises pour la commercialisation de son invention. Par ailleurs, ce système se révèle efficace particulièrement dans le cas d’innovations cumulatives où les résultats des recherches antérieures sont des éléments fondamentaux pour pouvoir mener des recherches plus poussées dans le domaine.

Par ailleurs, les différents arrangements institutionnels (investissement publics en R&D, brevets, politique industrielle et de l’innovation, subvention, récompense, avantages fiscaux, etc.) influencent significativement mais de façon différenciée la nature et le domaine de la R&D à entreprendre. Ainsi, dans le secteur pharmaceutique, les dépenses de recherche s’effectuent davantage pour répondre à des besoins esthétiques (obésité, vieillessement, etc.) qu’à des besoins pathologiques (e.g. le paludisme). Alors que les modèles d’incitations sous forme d’une intervention indirecte de l’Etat ont pour conséquence de favoriser les intérêts privés (inventeurs), ceux qui incombent à une intervention publique active sont de nature à privilégier plutôt les intérêts sociaux ; c’est ainsi qu’un système de récompense ex post tend à promouvoir la connaissance et a création dans des activités à fort bénéfice social plutôt qu’à fortes opportunités de profitabilité purement économique.

Quelle que soit leur forme (subventions, primes, récompenses ex post, etc.), l’efficacité des aides publiques à la R&D dépend des capacités de l’Etat (institution de financement) à collecter l’information nécessaire pour évaluer les opportunités de l’innovation (Gallini et Scotchmer, 2002 ; Lévêque et Ménière, 2006). Ainsi, pour que les subventions soient efficaces (génératrices d’incitation à l’innovation), il est impératif que l’Etat puisse à la fois, identifier les domaines d’innovation rentables pour la société et les investisseurs (inventeurs, firmes, etc.) ayant les capacités de mener des recherches prometteuses dans ce domaine et s’assurer qu’une fois subventionnés, ces investisseurs fournissent tout de même les efforts nécessaires pour mener à bien l’activité de R&D.

De même, l’octroi de récompense ex post stipule que l’Etat fasse l’estimation du coût et du bénéfice social de l’innovation à récompenser afin de l’évaluer à sa juste valeur. En l’absence d’une information suffisante et fiable à propos de ces éléments, les systèmes de récompenses et de subventions publiques à la R&D se révèlent inefficients ce qui

induit une persistance de la défaillance du marché et donc un sous-investissement (sous- consommation de l’) en innovation.

En effet, quand la récompense est supérieure au surplus social ceci signifie que l’invention impose un coût supérieur au bénéfice qu’elle génère. A contrario, quand la récompense est inférieure au surplus social qu’elle procure, certaines innovations profitables pour la société ne seraient pas entreprises. Ainsi, ce n’est que lorsque la récompense attribuée pour une invention est équivalente au surplus social qu’elle génère qu’un trade off entre l’intérêt privé et l’intérêt social peut être atteint.

Ce trade off étant difficile à réaliser, remet en question l’efficacité d’une intervention publique directe dans la R&D comme « unique » mécanisme pour stimuler la R&D. D’autres instruments indirects peuvent les compléter en tant que dispositifs d’incitation à l’innovation privée.

1.2.1.2- L’institution d’un cadre légal et réglementaire incitatif à la

R&D pharmaceutique

En parallèle aux actions publiques directes en faveur de la R&D publique et/ou privée, l’intervention de l’Etat peut être indirecte et s’exprimer par le biais d’un cadre légal et réglementaire incitatif à l’investissement dans la recherche et l’innovation. Les mécanismes envisagés dans cette perspective s’articulent autour de politiques industrielle et de l’innovation favorables à l’accumulation de la connaissance et de la technologie et de systèmes législatifs (systèmes de brevets) permettant l’appropriation des bénéfices des innovations par les inventeurs. A ce niveau de l’étude nous nous concentrons sur les systèmes de brevet23.

Le terme brevet (en anglais « Patent »), provient du Latin : « litterae patentes », signifiant « lettres ouvertes ». Traditionnellement, les lettres contenant des droits spéciaux étaient scellées de l’extérieur ; une fois utilisée, la lettre perd sa valeur. A contrario, les lettres ouvertes sont scellées de l’intérieur et donc le droit spécial peut être utilisé plusieurs fois sans que sa valeur ne diminue. Par analogie, le droit de brevet

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est un « patent right » ou « open right », d’où la possibilité de l’exploiter plusieurs fois (Van Dijk, 1994).

Le brevet est un droit de propriété industrielle fortement exclusif (Schmidt et Pierre, 1997 ; Chavanne et Burst, 1998). De par sa caractéristique d’être « opposable à tous », il permet à son titulaire de bénéficier d’un monopole temporaire de 20 ans sur son invention. En vertu de ce monopole, l’inventeur dispose du droit d’interdire l’exploitation, – pour des fins commerciales telles que l’utilisation, la fabrication, la vente, l’importation pour objectif de commerce, etc. – de son invention sans sa préalable autorisation (ADPIC, Art.28, Parag.1a). Le brevet constitue donc un outil de protection des inventions (pendant une période déterminée), contre les risques de son exploitation par des concurrents établis ou éventuels.

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