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1. Notion

9 L'acte authentique est un acte établi en la forme authentique28. Celle-ci est la forme solennelle selon laquelle une personne autorisée à cet effet par un can-ton confectionne, selon la procédure prescrite par ce cancan-ton, un document écrit consignant des déclarations de volonté ou la constatation de faits29.

10 La forme authentique répond à plusieurs buts, qui ont comme point commun la sécurité du droit : l'expression claire de la volonté des parties et la constata-tion correcte de certains faits, la protecconstata-tion des parties et des tiers ainsi que la gestion facilitée des registres publics30. Ces buts sont atteints par la conjugai-son de deux facteurs :

11 1° l'officier public auquel est conférée la compétence d'instrumenter ces actes est tenu par de nombreuses obligations légales31 (qui ont pour fonde-ment le droit fédéral et le droit cantonal, la délimitation entre ceux-ci étant largement controversée32) ; ce sont notamment les obligations de renseigner, de véracité, de clarté ou le secret professionnel ;

24 BOESCH, Vor Art. 712a-t, n. 8 ; SCHMID/HUERLIMANN-KAUP, p. 264, n. 1053 ; WERMELINGER, HK, n. 1 ad art. 712l.

25 STEINAUER, p. 460, n. 1302.

26 STEINAUER, p. 461, n. 1305.

27 Pour les détails, voir en particulier WEBER, pp. 144 ss.

28 MOOSER, p. 2, n. 3.

29 MOOSER, p. 1, n. 2 et réf.

30 MOOSER, p. 1, n. 2 ; pour les détails, pp. 287 ss, nn. 427 ss.

31 Pour les détails, MOOSER, pp. 83 ss, nn. 139 ss.

32 Pour les détails, voir notamment MOOSER, pp. 16 ss, nn. 24 ss.

12 2° la forme authentique suppose le respect d'une procédure solennelle : la

« procédure d'instrumentation ». Celle-ci est pour l'essentiel régie par le droit cantonal (art. 55 al. 1 T.f.), dans le respect d'exigences minimales de droit fédéral. Elle comprend la prise de connaissance de l'acte (qui s'ob-tient par la lecture, soit sous forme de lecture personnelle, soit sous forme de lecture par le notaire), son approbation et sa signature par les parties et le notaire; cette procédure est régie par le principe de l'unité de l'acte.

13 Le fait qu'un acte juridique soit couvert par la forme authentique a plusieurs effets33. On se limitera à rappeler ici que, conformément à l'art. 9, l'acte authen-tique bénéficie d'une force probante accrue.

14 La forme authentique, en tant que forme écrite qualifiée, n’est exigée que pour certains actes juridiques. Ces cas sont exclusivement définis par le droit fédéral. Le législateur l'a imposée dans tous les domaines du droit privé, en particulier dans le domaine des droits réels (immobiliers) : cette forme est exi-gée pour les transferts de propriété (art. 657) ou la constitution de droits réels limités, tels que des servitudes foncières (art. 732) ou personnelles (art. 746 al. 2), les charges foncières (art. 783 al. 3) ou les gages (art. 799 al. 2). Dans le domaine de la propriété par étages, il l'a expressément prévue pour l'acte cons-titutif (art. 712d).

15 Le législateur fédéral a laissé aux cantons le soin de définir « les modalités de la forme authentique » (art. 55 al. 1 T.f.). Il appartient à ces derniers de dési-gner les personnes autorisées à instrumenter des actes authentiques34. Les can-tons ont mis en place des formes d'organisation en fonction de considérations historiques et des traditions. On distingue principalement les systèmes inspi-rés du notariat latin (notariat indépendant) du notariat d'Etat ; certains cantons n'ont par ailleurs pas de corps notarial organisé35. Tous les cantons romands (et quelques cantons alémaniques) ont aménagé un système de notariat indé-pendant.

16 Généralement, l'activité des notaires indépendants ne se limite pas à l'ins-trumentation d'actes authentiques. Elle comporte un rôle actif de conseil : le notaire est fréquemment amené à guider les parties dans la recherche de la solution la plus favorable.

33 Pour les détails, MOOSER, pp. 294 ss, nn. 441 ss.

34 MOOSER, p. 24, n. 45.

35 MOOSER, p. 36, n. 55.

2. Nature

17 Pour l'essentiel, on distingue deux catégories d'actes authentiques. Ceux-ci consistent dans la transcription, dans l'acte, des déclarations des parties ou dans la constatation, par le notaire, d'une certaine situation. On parle généra-lement des actes de déclaration, respectivement des actes de constatation36. La distinction, importante du point de vue didactique et quant à ses consé-quences, n'est pas toujours aisée, du fait qu'un même acte peut avoir les deux contenus ; elle fait par ailleurs l'objet de critiques. Dans le domaine des actes de constatation, il n'y a pas de parties à l'acte. Cela a notamment une influence en termes d'obligation de renseigner (qui n'existe fondamentalement que pour les actes de déclaration) ou de la procédure applicable (les actes de constata-tion n'étant en particulier pas régis par le principe de l'unité de l'acte).

18 Les actes de constatation sont par exemple les certificats d'héritiers ou les légalisations ; mais ce sont également, dans un domaine plus proche des actes pris par des propriétaires dans le domaine de la propriété par étages, des pro-cès-verbaux d'assemblées générales ou de conseils d'administration37.

19 L'acte constitutif de la propriété par étages est un contrat (ou une déclaration unilatérale)38 et contient à ce titre la manifestation de volonté des proprié-taires39. C'est donc un acte de déclaration. Cela ressort du texte de l'art. 712d (« un contrat par lequel les propriétaires conviennent » ; « une déclaration du propriétaire »). Il en va du reste de même de l'acte constitutif d'une société anonyme (cf. art. 629 al. 1 CO : « les fondateurs déclarent »).

20 Les actes authentiques relatifs aux décisions sociales (nn. 62ss), prises par l'assemblée de propriétaires d'étages une fois la propriété par étages consti-tuée, doivent également être considérés comme des actes de déclaration, non pas des actes de constatation. Ils consistent dans la modification du « contrat » (cf. art. 12 CO).

3. Contenu

21 Il faut distinguer le contenu de l'acte quant aux personnes (n. 22) et quant à son objet (n. 23).

36 MOOSER, p. 291, n. 434.

37 Pour les détails, sur ces questions, notamment MOOSER, pp. 458 ss, nn. 710 ss.

38 WERMELINGER, Commentaire, n. 23 ad art. 712d ; WERMELINGER, ZK, n. 3 ad art. 712d.

39 WERMELINGER, ZK, n. 44 ad art. 712d ; voir toutefois n. 61 ad art. 712d : « Obwohl der Begrün-dungsvertrag eine Vereinbarung darstellt, kann er materiell gesehen einem einstimmig gefassten Beschluss bzw. Rechtsgeschäft gleichgestellt werden ».

22 L'acte authentique doit contenir les déclarations de toutes les personnes dont la manifestation de volonté est nécessaire à la perfection de l'acte (art. 1 CO).

Dans les actes unilatéraux, seule la déclaration de celui qui s'engage doit être couverte par cette forme. Dans les contrats bilatéraux, l'acte doit couvrir les manifestations de volonté de chacune des parties qui s'engagent40. Celles-ci sont les « comparants » et sont présentes (ou représentées) devant le notaire au moment de l'instrumentation41. Elles se distinguent des personnes qui doivent simplement donner leur accord ou leur consentement pour que l'acte puisse déployer ses effets ; ce sont par exemple le conjoint (art. 169 CC et 494 CO), le créancier gagiste (pour le dégrèvement d'un immeuble) ou une autorité (par exemple l'autorité de protection de l'adulte, l'autorité compétente en matière de LDFR ou de LFAIE)42. Celles-ci ne sont pas parties à la procédure (et ne sont pas destinataires de l'obligation de renseigner imposée au notaire)43. La question de savoir qui sont les parties à l'acte se pose également dans le do-maine de la propriété par étages, tant en ce qui concerne la constitution de celle-ci (nn. 27ss) que sa modification (nn. 54ss).

23 D'une manière générale, le droit fédéral ne contient aucune règle précisant le contenu matériel de l'acte authentique ; il s'est contenté de prescrire cette forme sans préciser le contenu. Il appartient à la doctrine et à la jurisprudence de le faire44. Plusieurs théories s'affrontent. Elles ont un point commun : la né-cessité de faire figurer dans l'acte tous les éléments objectivement essentiels ; à défaut de ces éléments, l'accord des parties est affecté d'une lacune qui ne peut pas être comblée par voie judiciaire45. C'est la question de savoir s'il faut y in-tégrer les éléments subjectivement essentiels (et objectivement secondaires) qui est largement controversée. La conception du Tribunal fédéral46 (à laquelle adhère la doctrine majoritaire) est la suivante : la forme doit couvrir les élé-ments subjectivement essentiels, dans la mesure seulement où ils entrent natu-rellement dans le cadre du contrat en cause. L'exigence de forme ne doit donc pas être étendue à des éléments contractuels non couverts par le champ de protection de la norme, même si les parties au contrat estiment que ces points sont indispensables à leur accord47. L'application de ce principe soulève des questions délicates dans le domaine de la vente immobilière48. Elle intervient également naturellement en matière de constitution de la propriété par étages

(puisque l'acte est soumis au respect de la forme authentique ; cf. nn. 27 ss) et, lorsque cette forme est exigée (nn. 54ss), en cas de modification de celle-ci.

24 Du contenu matériel de l'acte, il faut distinguer le contenu formel. Celui-ci est déterminé principalement par le droit cantonal, pris en application de l'art. 55 al. 1 T.f. Le droit fédéral pose toutefois dans ce domaine certaines exigences minimales ; c'est ainsi que l'acte doit contenir par exemple le nom et la signa-ture du notaire et des parties ou les rapports de représentation. Le droit canto-nal peut exiger l'indication du lieu et de la date de l'instrumentation, la signa-ture des parties ou la description des immeubles concernés49.

4. Les avenants aux actes authentiques

25 Une modification conventionnelle d'un acte authentique prend générale-ment la forme d'un avenant (Nachbeurkundung). La question de la forme d'un tel acte est controversée. Dans la mesure où l'on est en présence d'une modifi-cation du contenu matériel d'un acte pour lequel la forme authentique est exi-gée, cette même forme doit en principe être respectée pour sa modification (art. 12 CO par analogie) : il doit y avoir parallélisme des formes. Ce principe connaît trois exceptions ; la forme authentique n'est pas nécessaire lorsque le droit cantonal prévoit un allègement de la forme (par exemple pour les modi-fications d'importance mineure), lorsqu'il s'agit de diminuer une charge impo-sée à une partie (art. 115 CO par analogie) ou lorsque les clauses modifiées ne constituent pas des éléments objectivement essentiels du contrat50.

26 Dans le domaine de la propriété par étages, les modifications apportées à la structure de celle-ci, principalement sous forme d'avenants à l'acte constitutif (pour lequel la forme authentique est exigée) remplissent rarement les condi-tions de l'exception. On peut ainsi constater, d'une façon générale, que ces mo-difications, apportées pendant la vie de la propriété par étages (nn. 54 ss), doi-vent reposer sur un acte authentique.

II. Au moment de l’assujettissement : l’acte constitutif