• Aucun résultat trouvé

A l’égard des copropriétaires individuellement

1. Tâches volontaires assumées

Comme on l’a déjà relevé (cf. supra II.C.1 i.f.), l’administrateur peut assumer une tâche pour le compte d’un ou de plusieurs copropriétaires d’étages et

38 Cf. aussi ATF 106 II 183, c. 2, JdT 1982 I 211.

39 Cf. infra III.C.

40 Cf. WERMELINGER (note 6), n. 69-72 ad 712r CC et les références.

delà de ses obligations légales ou réglementaires : même s’il est souvent fac-tuellement difficile de démêler ce qui relève de l’administration de l’immeuble d’une prérogative relevant de l’aménagement d’un ou de plusieurs lots, la so-lution est juridiquement claire : l’administrateur n’agit alors plus que volontai-rement comme mandataire ou fondé de procuration, et non plus comme or-gane de la communauté. Il n’engage qu’une responsabilité de représentant vis-à-vis des tiers, et de mandataire à l’égard du copropriétaire ainsi représenté.

2. Tâches légales et réglementaires assumées, ès-qualité

La question juridique est plus délicate lorsque l’administrateur, par ses actes ou omissions illicites, engendre dans la gestion ou l’administration légale et réglementaire un dommage à charge des copropriétaires. Pour certains au-teurs, l’administrateur répond alors du dommage selon les règles sur la res-ponsabilité dans l’exécution d’un contrat avec effet protecteur avec les tiers41 ou encore, à défaut, selon les règles sur la liquidation du dommage par un tiers42.

La théorie de la responsabilité contractuelle à l’égard du tiers protégé par le mandant a été évoquée par le Tribunal fédéral, lequel n’a pas jusqu’ici toute-fois pris position définitivement sur son application en droit suisse43. La doc-trine est extrêmement divisée sur les conditions de sa réception en Suisse44.

L’idée que la perte patrimoniale d’une tierce personne, intéressée à la pres-tation, mais non partie au contrat, doit être réparée sur une base contractuelle, indépendamment de l’existence d’un « effet protecteur », est encore plus

41 FELLMANN (note 21), p. 150-151.

42 FELLMANN (note21), p. 151-153 et les références.

43 ATF 120 II 112, c. 3, JdT 1995 I 202 ; ATF 121 III 310, JdT 1996 I 359 ; ATF 130 III 345, JdT 2004 I 207.

44 Plutôt favorables : Ernst A. KRAMER, Commentaire bernois, Allgemeine Einleitung, 1986, n. 145 s. ; Eugen BUCHER, Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, Zurich 1988, p. 484 s. ; Wolfgang WIEGAND, Commentaire bâlois, OR I, 2011, n. 9 ad 97 ss CO ; Claire HUGUENIN, Obligationenrecht, Zurich 2014, n. 1567 ss, p. 464 ss ; Walter YUNG, Responsabilité contractuelle envers les tiers lésés, in « Études et articles », Genève 1971, p. 315 ss ; Hans Peter WALTER, Vertrauenshaftung im Umfeld des Ver-trages, RSJB 1996, p. 290 ; Peter GAUCH /Walter R.SCHLUEP /JörgSCHMID/SusanEMMENEGGER, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, Tome II, Zurich 2014, n. 3918, p. 365. Plutôt critiques, Olivier CHAPUIS, Die Haftung wegen Ausbleibens der Erfüllung in Sinne von Art. 97 Abs. 1 OR : ein Begriff im Wandeln ?, PJA 2005, p. 661 ; Vito ROBERTO, Deliktsrechtlicher Schutz des Ver-mögens, PJA 1999, p. 521-522 ; Peter GAUCH, Der Werkvertrag, Zurich 2011, n. 860 ss, p. 348 ss.

Opposés à l’institution : A. KOLLER, Die Haftung des Liegenschaftsschätzers gegenüber einer ver-tragsfremden Dritten, DC 2004, p. 20-21 ; Luc THÉVENOZ, Commentaire romand, CO I, 2012, n. 48 ad 97 CO ; Ingeborg SCHWENZER, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, Berne 2012, n. 87.05, p. 553 s ; Pierre ENGEL, Traité des obligations en droit suisse, Berne 1997, p. 22-23 ; Hein-rich HONSELL, Die Haftung beim Auskunft und Gutachten, insbesondere gegenüber Dritten, Fest-schrift P. Nobel, Berne 2005, p. 945 ss ; Paul PIOTET, Le débiteur qui viole son obligation peut-il de-voir indemniser un tiers (Drittschadensliquidation) ?, Berne 1994, n. 98 ss, p. 32 ss.

cutée en Suisse45. Le principe n’en demeure pas moins en l’état que cette théo-rie n’est pas sujette à une réception générale46.

Plutôt que de recourir à des constructions juridiques conflictuelles, pour ne pas dire discutables, il faut à notre avis retenir en l’espèce que c’est la loi qui fixe une obligation légale de l’administrateur « de prendre les actes d’administration nécessaires », ainsi que les « mesures urgentes requises pour empêcher ou réparer un dommage » (art. 712s al. 1 CC), de veiller à la gestion du bien-fonds et du bâtiment (art. 712s al. 3), comme encore de représenter tous les copropriétaires d’étages individuellement envers les tiers, en sus de la représentation de la communauté elle-même (art. 712t al. 3 CC). On ne peut ici objecter l’argument, en soi essentiel, de la relativité des conventions, l’obligation de gérer l’intérêt des copropriétaires individuellement par la pro-priété collective, au-delà de la représentation de la communauté comme telle pour ses avoirs, étant légalement imposée directement à l’administrateur. Il ne nous paraît pas non plus décisif que soit exclue une action directe du copro-priétaire d’étages dirigée contre l’administrateur en exécution de sa tâche lé-gale, les copropriétaires devant pour cela passer par le biais de la communauté (en principe par l’assemblée générale). Il suffit que l’on admette que l’obligation légale ainsi constituée est une conséquence indirecte du contrat d’organe de l’administrateur, pour qu’il en ait à répondre de l’exécution à l’égard des copropriétaires d’étages47.

Les devoirs légaux peuvent constituer des normes objectives de compor-tement, dont la transgression n’impose qu’une responsabilité extra contrac-tuelle : mais ils peuvent aussi générer de véritables obligations, dont la mau-vaise exécution se prête à l’application des art. 97 ss CO48. Et, à notre sens, la responsabilité de l’administrateur étant de nature contractuelle à l’égard de la communauté, elle doit être de même nature à l’égard des copropriétaires dont il doit légalement sauvegarder les intérêts.

Ainsi, à notre avis, même si les copropriétaires comme tels n’ont pas de moyen d’obliger l’administrateur à accomplir les tâches qui lui incombent qu’au travers des organes de la communauté, ils sont des créanciers quasi-contractuels pour le dommage que cet administrateur a pu leur causer par ses actes ou omissions illicites dans la gestion de la chose commune.

45 Cf. parmi de très nombreux auteurs, FELLMANN (note 20), p. 151 et 153 et les nombreuses réfé-rences ; P. PIOTET (note 44), n. 140 ss , p. 41 s et les nombreuses références ainsi que n. 144 ss, p.

43 ss.

46 ATF 123 III 204, JdT 1999 I 9.

47 A raison de leur quote-part, les dommages inhérents étant divisibles, et l’art. 70 al. 1 CO étant ap-plicable si tel ne pouvait pas être le cas.

48 KRAMER (note 44), n. 129 ad Allgemeine Einleitung, 1er ss CO ; Wilhelm SCHÖNENBERGER /PeterJÄGGI, Commentaire zurichois, 1973, n. 184 ad 1-67 CO ; Walter YUNG, Devoirs généraux et obligations, Mélanges W. Schönenberger, Fribourg 1968, p. 167.

Cette solution s’harmonise avec l’idée que la communauté ne répond d’actes ou d’omissions de l’administrateur qu’à l’égard des tiers, mais non en-vers les copropriétaires d’étages eux-mêmes ; les passifs à régler sur les avoirs

« résultant de la gestion » (art. 712l al. 1 CC) sont en réalité, comme nous l’avons déjà vu49, des pertes à essuyer par les copropriétaires eux-mêmes. Il se justifie ainsi de faire répondre contractuellement l’administrateur pour ses manquements dommageables envers les copropriétaires, au même titre que l’associé gérant d’une société de personnes doit répondre de ses manquements envers les membres de la société de personnes, la « quasi- » personne morale n’étant pas créancière à ce titre.

49 Cf. supra II.A.1.

La communauté et les copropriétaires en procédure

NICOLAS JEANDIN

Avocat, professeur à l'Université de Genève

I. Introduction

La communauté des copropriétaires s'entend à la fois dans la copropriété ordi-naire (art. 646 ss CC) et dans la copropriété par étages (art. 712a ss CC). Elle n'est toutefois pas réglementée dans la copropriété ordinaire (les art. 649a et 649b CC l'évoquent incidemment), contrairement à ce qui prévaut pour la PPE.

Seule la communauté des copropriétaires par étages sera prise en compte ici afin de respecter le caractère festif de la journée…

II. Caractéristiques de la communauté

Les art. 712g à 712l CC sont consacrés à l'administration et à l'utilisation de la PPE. Cette série de dispositions se ponctue par l'art. 712l CC dont la note mar-ginale s'intitule « exercice des droits civils » ce qui – on s'en doute – constitue un thème propre à avoir une incidence certaine sur le statut de la communauté des copropriétaires par étages en procédure.