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La propriété par étages aujourd'hui. Une alerte cinquantenaire

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La propriété par étages aujourd'hui. Une alerte cinquantenaire

FOËX, Bénédict (Ed.)

FOËX, Bénédict (Ed.). La propriété par étages aujourd'hui. Une alerte cinquantenaire . Zurich : Schulthess, 2016

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:88122

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(2)

La Faculté de droit de l’Université de Genève a organisé une

« Journée juridique et festive » pour célébrer les cinquante ans de la propriété par étages. Les exposés présentés à cette occasion ont permis non seulement de faire le point, mais également de se projeter dans l’avenir : des spécialistes chevronnés ont examiné les questions les plus actuelles du droit de la propriété par étages. Le présent ouvrage publie leurs contributions, à savoir :

– 50 ans de propriété par étages – un bilan, par M. Paul-Henri Steinauer, professeur à l’Université de Fribourg ;

– La jurisprudence récente, par M. Grégory Bovey, juge au Tribu- nal fédéral ;

– Les actes authentiques dans le domaine de la propriété par étages, par M. Michel Mooser, notaire et professeur à l’Univer- sité de Fribourg ;

– L’administrateur, la communauté et leur responsabilité, par M.

Denis Piotet, professeur à l’Université de Lausanne ;

– La communauté et les copropriétaires en procédure, par M.

Nicolas Jeandin, avocat et professeur à l’Université de Genève ; – La propriété par étages en droit public, par Mme Valérie Défago

Gaudin, professeure à l’Université de Neuchâtel ;

– La fin de la copropriété par étages, par M. Bénédict Foëx, pro- fesseur à l’Université de Genève ;

– Réflexions de lege ferenda – La propriété par étages a-t-elle déve- loppé des maladies d’enfance ?, par M. Amédéo Wermelinger, professeur à l’Université de Fribourg.

www.schulthess.com

La pr opr iét é par étages aujour d’hui

C G

Collection Genevoise

La propriété par étages aujourd’hui

Une alerte cinquantenaire

Grégory Bovey

Valérie Défago Gaudin Bénédict Foëx

Nicolas Jeandin Michel Mooser Denis Piotet

Paul-Henri Steinauer Amédéo Wermelinger Édité par

Bénédict Foëx

Droit de la propriété

C G

Collection Genevoise

ISBN 978-3-7255-8602-8

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La propriété par étages aujourd’hui

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C G

Collection Genevoise

Droit de la propriété

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La propriété par étages aujourd’hui

Une alerte cinquantenaire

Grégory Bovey

Valérie Défago Gaudin Bénédict Foëx

Nicolas Jeandin Michel Mooser Denis Piotet

Paul-Henri Steinauer Amédéo Wermelinger Édité par

Bénédict Foëx

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ISBN 978-3-7255-8602-8

© Schulthess Médias Juridiques SA, Genève · Zurich · Bâle 2016 www.schulthess.com

Diffusion en France : Lextenso Éditions, 70, rue du Gouverneur Général Éboué, 92131 Issy-les-Moulineaux Cedex

www.lextenso-editions.com

Diffusion et distribution en Belgique et au Luxembourg : Patrimoine SPRL, Avenue Milcamps 119, B-1030 Bruxelles ; téléphone et télécopieur : +32 (0)2 736 68 47 ; courriel : patrimoine@

telenet.be

Tous droits réservés. Toute traduction, reproduction, représentation ou adaptation intégrale ou partielle de cette publication, par quelque procédé que ce soit (graphique, électronique ou mécanique, y compris photocopie et microfilm), et toutes formes d’enregistrement sont strictement interdites sans l’autorisation expresse et écrite de l’éditeur.

Information bibliographique de la Deutsche Nationalbibliothek : La Deutsche Nationalbi- bliothek a répertorié cette publication dans la Deutsche Nationalbibliografie ; les données bi- alerte cinquantenaire, Collection Genevoise, Genève / Zurich 2016, Schulthess Éditions Ro- mandes.

(7)

Avant-propos

C’est peu dire que célébrer les cinquante ans de la propriété par étages n’était pas une entreprise risquée : la « ppe » (abréviation bien pratique, présentant chez nombre d’utilisateurs un côté presque affectueux) est fort appréciée – et pas seulement par les spécialistes de l’immobilier.

Loin de constituer une « mater rixarum » délaissée, la propriété par étages constitue une institution incontournable, peut-être même l’une des pièces maî- tresses de notre droit de la propriété immobilière. Si on peut lui faire un re- proche, c’est d’être à la fois un peu compliquée (notamment dans la détermi- nation des majorités nécessaires à la prise de décision en assemblée des copro- priétaires - mais l’on suspecte qu’elles ne sont pas toujours respectées dans la pratique…) et trop simple (en tant qu’elle n’impose pas la création d’un fonds de rénovation, par exemple).

S’il n’y a guère matière à polémique, il y a matière à réflexion. C’est pour- quoi la Faculté de droit a tenu à marquer le cinquantenaire de la propriété par étages par une « Journée juridique et festive », qui s’est tenue à l’Université de Genève le 3 février 2015 et a réuni près de 220 participants. Cet ouvrage com- prend les exposés qui ont été présentés à cette occasion, adaptés pour la publi- cation et enrichis d’un appareil critique. Nous remercions chaleureusement les auteurs de tout le travail qu’ils ont ainsi accompli.

Ce colloque a bénéficié de l’aimable soutien de la Société genevoise de droit et de législation, de l’Ordre des avocats de Genève, de la Chambre des notaires de Ge- nève et de la Chambre genevoise immobilière. Nous leurs en sommes fort recon- naissants ainsi qu’à toutes le personnes qui ont contribué à l’organisation du colloque : Mmes Nicole Crausaz, Francine Pinget et Esther Pralong, secrétaires au département de droit civil, ainsi que MM. Alexandre Alvarez et Edouard Benoit, assistants à la Faculté de droit de l’Université de Genève, lesquels ont également collaboré, de façon efficace et compétente, à la publication du pré- sent ouvrage.

BÉNÉDICT FOËX

(8)
(9)

Sommaire

Avant-propos ... 5 Sommaire ... 7 Table des abréviations ... 9

PAUL-HENRI STEINAUER,Professeur à l’Université de Fribourg

50 ans de propriété par étages – Un bilan ... 15

MICHEL MOOSER,Notaire, professeur à l’Université de Fribourg

Les actes authentiques dans le domaine de la propriété par étages ... 33

DENIS PIOTET,Professeur à la Faculté de droit, des sciences criminelles et

d’administration publique de l’Université de Lausanne

L’administrateur, la communauté et leur responsabilité ... 67

NICOLAS JEANDIN,Avocat, professeur à l'Université de Genève

La communauté et les copropriétaires en procédure ... 81

GRÉGORY BOVEY,Juge au Tribunal fédéral

Jurisprudence récente ... 99

VALÉRIE DÉFAGO GAUDIN,Professeur à l’Université de Neuchâtel

La propriété par étages en droit public ... 123

BÉNÉDICT FOËX,Professeur à l’Université de Genève

La fin de la propriété par étages ... 147

(10)

AMÉDÉO WERMELINGER,Professeur titulaire à l’Université de Fribourg Réflexions de lege ferenda – La propriété par étages a-t-elle

développé des maladies d’enfance ? ... 163 Table des matières ... 187

(11)

Table des abréviations

ACST Arrêt de la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice de Genève

AJP Aktuelle juristische Praxis al. alinéa(s)

ARE Office fédéral du développement territorial art. article(s)

ATA Arrêt du Tribunal administratif ATF Arrêt du Tribunal fédéral

BGE Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts BJM Basler Juristische Mitteilungen

BN Der Bernische Notar

BO Bulletin officiel

BR Baurecht

c. considérant(s)

CC Code civil suisse, du 10 décembre 1907 (RS 210) CCfr Code civil français

CdDR Cahiers des droits réels et de la propriété

CEDH Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, du 4 novembre 1950 (RS 0.101)

cf. confer

ch. chiffre(s)

CO Code des obligations (Loi fédérale complétant le Code civil suisse [Livre cinquième : Droit des obligations], du 30 mars 1911) (RS 220)

cons. considérant(s) consid. considérant(s)

CPC Code de procédure civile, du 19 décembre 2008 (RS 272)

(12)

cpr. comparer

Cst. féd. Constitution fédérale de la Confédération suisse, du 18 avril 1999 (RS 101)

DC Droit de la construction

DEFR Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche

éd. édition / éditeur(s) édit. éditeur(s) ég. également

etc. et caetera

FF Feuille fédérale

GBV Grundbuchverordnung

HK Handkommentar

i. f. in fine

ibid. ibidem IN initiative

JDC Journées suisses du droit de la construction JdT Journal des Tribunaux

KPG Kantonale Planungsgruppe Bern

LAAL Loi vaudoise concernant l’aliénation d’appartements loués, du 11 décembre 1989 (RS VD 840.13)

LAT Loi fédérale sur l’aménagement du territoire, du 22 juin 1979 (RS 700)

LATC Loi vaudoise sur l’aménagement du territoire et les cons- tructions, du 4 décembre 1985 (RS VD 700.11)

LAVAL Loi neuchâteloise limitant la mise en vente d’appartements loués, du 22 mars 1989 (RSN 846.0)

LC Loi valaisanne sur les constructions, du 8 février 1996 (RSVS 705.1)

LCAP Loi fédérale encourageant la construction et l’accession à la propriété de logements, du 4 octobre 1974 (RS 843)

(13)

LCI Loi genevoise sur les constructions et les installations di- verses, du 14 avril 1988 (RSG L 5 05)

LDFR Loi fédérale sur le droit foncier rural, du 4 octobre 1991 (RS 211.412.11)

LDIP Loi fédérale sur le droit international privé, du 18 décembre 1987 (RS 291)

LDTR GE Loi genevoise sur les démolitions, transformations et réno- vations de maisons d’habitation (mesures de soutien en fa- veur des locataires et de l’emploi), du 25 janvier 1996 (RS GE L 5 20)

LDTR VD Loi vaudoise concernant la démolition, la transformation et la rénovation de maisons d'habitation, ainsi que l'utilisation de logements à d'autres fins que l'habitation, du 4 mars 1985 (RS VD 840.15)

LEx Loi fédérale sur l’expropriation, du 20 juin 1930 (RS 711) LFAIE Loi fédérale sur l’acquisition d’immeubles par des per-

sonnes à l’étranger, du 16 décembre 1983 (RS 211.412.41) LGL Loi genevoise générale sur le logement et la protection des

locataires, du 4 décembre 1977 (RSG I 4 04)

LGZD Loi genevoise générale sur les zones de développement, du 29 juin 1957 (RSG L 1 35)

LIA Loi fédérale sur l'impôt anticipé, du 13 octobre 1965 (RS 642.21)

LIFD Loi fédérale sur l’impôt fédéral direct, du 14 décembre 1990 (RS 642.11)

lit. / litt. litera(e)

loc. cit. loco citato

LOG Loi fédérale encourageant le logement à loyer ou à prix mo- dérés, du 21 mars 2003 (RS 842)

LP Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 11 avril 1889 (RS 281.1)

LPA Loi genevoise sur la procédure administrative, du 12 décembre 1985 (RSG E 5 10)

(14)

LPA-VD Loi vaudoise sur la procédure administrative, du 28 octobre 2008 (RSV 173.36)

LPE Loi fédérale sur la protection de l'environnement, du 7 octobre 1983 (RS 814.01)

LTF Loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (RS 173.110)

n. numéro(s) (marginal[aux])

nn. numéros, notes marginales n° numéro(s)

NB Le notaire bernois

no / nos numéro(s)

not. notamment

OAIE Ordonnance sur l’acquisition d’immeubles par des per- sonnes à l’étranger, du 1er octobre 1984 (RS 211.412.411) OEPL Ordonnance sur l'encouragement à la propriété du loge-

ment au moyen de la prévoyance professionnelle, du 3 octobre 1994 (RS 831.411)

OIA Ordonnance sur l'impôt anticipé, du 19 décembre 1966 (RS 642.211)

ORF Ordonnance sur le registre foncier, du 23 septembre 2011 (RS 211.432.1)

p. page p. ex. par exemple(s)

PA Loi fédérale sur la procédure administrative, du 20 décembre 1968 (RS 172.021)

phr. phrase(s) PJA Pratique juridique actuelle

PL projet de loi

PLQ plan localisé de quartier pp. pages PPE Propriété par étages Prof. Professeur

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RDAF Revue de droit administratif et de droit fiscal RDS Revue de droit suisse

réf. référence(s) rés. résumé

RJN Recueil de jurisprudence neuchâteloise RNRF Revue suisse du notariat et du registre foncier RO Recueil officiel du droit fédéral

RPG Raumplanungsgesetz

RS Recueil systématique du droit fédéral RSG Recueil systématique du droit genevois

RSI Règlement genevois d’application de la loi sur les construc- tions et les installations diverses, du 22 février 1978 (RSG L 5 05.01)

RSJ Revue suisse de jurisprudence

RSJB Revue de la société des juristes bernois RSN Recueil systématique du droit neuchâtelois RSV Recueil systématique du droit vaudois RSVS Recueil systématique du droit valaisan RVJ Revue valaisanne de jurisprudence

s. et suivant(e)

SGS BS Übersicht Systematische Gesetzessammlung Basel-Stadt

SJ Semaine judiciaire

SJZ Schweizerische Juristen-Zeitung spéc. spécifiquement

SRL Systematische Rechtssammlung Luzern

ss et suivant(e)s

sv. et suivant(e)

SVIT Schweizerischer Verband der Immobilienwirtschaft T. Tome

T. f. Titre final

TF Tribunal fédéral

(16)

Tit. fin. Titre final

USPI Union suisse des professionnels de l’immobilier Vorb. Vorbemerkung(en)

VRG Verwaltungsrechtspflegegesetz des Kantons Zürich WRFG Wohnraumförderung

ZBGR Schweizerische Zeitschrift für Beurkundungs- und Grundbuch- recht

ZBJV Zeitschrift des Bernischen Juristenvereins ZGB Zivilgesetzbuch

ZSR Zeitschrift für schweizerisches Recht

ZK Zürcher Kommentar

(17)

50 ans de propriété par étages – Un bilan

PAUL-HENRI STEINAUER1 Professeur à l’Université de Fribourg

I. Bref historique

L’histoire est bien connue. Alors même que la propriété par étages existait, sous des formes diverses, dans presque tous les cantons, elle avait mauvaise réputation dans la Suisse du XIXe siècle et elle ne fut pas reprise dans le Code civil de 1907. Le ton avait été donné dès 1889 par EugenHUBER qui, dans le troisième volume de son System und Geschichte des Schweizerischen Privatrechtes, a écrit à la deuxième phrase déjà du passage consacré à la propriété par étages : « Die Gesetze erwähnen diese Verhältnisse dabei regelmässig als eine aus früherer Zeit übernommene lästige Erbschaft, die möglichst rasch liquidiert werden sollte » (un encombrant héritage du passé, qui devrait être liquidé le plus vite possible !)2.

Outre qu’elle était perçue comme une source de fréquents litiges, la pro- priété par étages apparaissait surtout comme incompatible avec un registre foncier moderne tel que le nouveau code devait l’introduire sur la base de la mensuration cadastrale3. Au demeurant, elle était très peu répandue en Suisse, sauf dans le canton du Valais et, dans une moindre mesure, au Tessin4. Bref, pour les auteurs du Code civil, la propriété par étages était moribonde et il suffisait d’attendre qu’elle disparaisse de sa belle mort.

Conformément aux art. 17 et 45 du Titre final du Code civil, les propriétés par étages de l’ancien droit furent certes maintenues et simplement mention-

1 Je remercie M. Valentin PICCININ et Mme Camille JOYE-YERLY, assistants à la Faculté de droit de Fri- bourg, de l’aide qu’ils m’ont apportée lors de la préparation de la cette contribution.

2 Eugen HUBER, System und Geschichte des Schweizerischen Privatrechtes, T. III, Bâle 1889, p. 241.

3 HUBER (note 2), loc. cit. Voir aussi le Message du Conseil fédéral à l’appui d’un projet de loi modifiant le livre quatrième du code civil (Copropriété et propriété d'étages), du 7 décembre 1962, Feuille fé- dérale 1962 II 1445 ss (cité : Message 1962), en particulier p. 1446 sv.

4 Message 1962 (note 3), p. 1446 sv.

(18)

nées au registre foncier, mais si l’une d’elles s’éteignait pour une cause quel- conque, il n’était pas possible de la rétablir ou d’en constituer une autre.

Les anciennes propriétés par étages résistèrent cependant vaillamment, au point que, peu à peu, le droit cantonal qui les régissait et qui ne pouvait plus être révisé est apparu inadapté. On a alors commencé à chercher des solutions pour convertir les anciennes propriétés par étages en des institutions compa- tibles avec le nouveau droit fédéral. C’est ainsi que, notamment en Valais, nombre de propriétés par étages furent transformées en copropriétés assorties de servitudes conférant à chaque copropriétaire le droit exclusif d’utiliser et d’administrer un étage, naturellement à ses frais5.

Parallèlement, a commencé à se manifester d’une façon plus générale, dès les années 1940, le besoin d’une forme de maîtrise partagée de certains im- meubles. Il s’agissait de faciliter la réalisation des bâtiments plus grands et d’attirer des occupants en leur offrant un statut de propriétaire. Plutôt que d’opérer par des copropriétés assorties de servitudes d’utilisation, les promo- teurs eurent recours, en Suisse romande surtout, à des sociétés d’actionnaires- locataires : l’immeuble était acquis par une société anonyme immobilière, dont les actions étaient divisées en divers lots donnant le droit exclusif de louer un appartement dans l’immeuble6. La formule avait certes des avantages, notam- ment quant à la possibilité de transférer la maîtrise de l’appartement hors re- gistre foncier, par simple transfert d’actions; mais l’actionnaire-locataire n’avait évidemment pas de droit réel sur l’immeuble, pas plus qu’il ne pouvait constituer de droit de gage immobilier sur sa « part » de l’immeuble7.

Entre-temps, l’Italie avait adopté plusieurs lois spéciales sur la propriété par étages entre 1934 et 1938 et introduit, en 1942, une réglementation d’ensemble de l’institution dans son Code civil. De son côté, la France avait, en 1938, remplacé l’ancien art. 664 du Code Napoléon, qui ne régissait que très sommairement les frais d’entretien dans les copropriétés immobilières, par une

5 Voir Message 1962 (note 3), p. 1448 sv. Cette solution, au demeurant expressément prévue à l’époque par la loi valaisanne d’application du Code civil, a été admise par le Tribunal fédéral (ATF 81 II 598, cons. 2), non sans que surgissent de nouveaux problèmes tels que l’application dans ce type de cas du droit de préemption légal des copropriétaires (art. 682) ou du droit de chaque copropriétaire de demander en tout temps le partage de la copropriété (art. 650; voir ATF 81 II 598, cons. 3; 77 II 235, cons. 2). Une fois la propriété par étages introduite dans le Code civil, le Tribunal fédéral a toutefois considéré que la servitude complétant la copropriété n’était pas conforme au droit et que la structure globale ainsi mise en place était nulle (ATF 113 II 146, cons. 3

= JdT 1987 I 612; 103 II 176, cons. 2 = JdT 1978 I 333).

6 Message 1962 (note 3), p. 1451 sv.

7 Message 1962 (note 3), p. 1451. Des avantages fiscaux ont été accordés entre 1995 et 2003 (art. 207 al. 4 LIFD) en vue de favoriser la conversion des sociétés d’actionnaires locataires en pro- priétés par étages. L’opération a eu un succès certain (Amédéo WERMELINGER,Das Stockwerkeigen- tum, Art. 712a-712t ZGB, commentaire zurichois, T. IV 1 c, Zurich 2010, Vorb. n. 115).

(19)

loi réglant le statut de la copropriété des immeubles divisés en appartements8. L’Autriche avait aussi adopté, en 1948, une loi concernant la propriété sur les appartements et les locaux commerciaux, alors que l’Allemagne se dotait en 1951 d’une loi sur la propriété d’appartements et le droit d’habitation perma- nent.9

Dans les années 1950, plusieurs études scientifiques10 et deux interventions parlementaires11 ouvrirent la voie à une révision du Code civil. En 1955, le Pro- fesseur PeterLIVER fut chargé de faire ce qu’EugenHUBER avait pu éviter en son temps vu le peu d’intérêt pratique qu’avait alors la propriété par étages : trouver une construction juridique permettant d’intégrer cette forme particu- lière de propriété immobilière partagée dans notre système de droits réels et de registre foncier. L’avant-projet de 1957 du Professeur LIVER fut affiné par une petite commission d’experts et permit au Conseil fédéral, après une pro- cédure de consultation, de soumettre au Parlement, le 7 décembre 1962, un projet de révision du Code civil relatif à la copropriété et à la propriété par étages. La révision fut votée le 19 décembre 1963 et la propriété par étages fit son entrée dans le Code civil le 1er janvier 196512. L’évolution de l’habitat ur- bain et du marché de l’immobilier ainsi que les insuffisances des solutions al- ternatives à une véritable propriété par étages avaient eu raison des réticences du législateur de 1907.

II. Objectifs et développement

Le Message de 1962 explique que le but de politique économique recherché par la réintroduction de la propriété par étages était de « faciliter au plus grand nombre possible de familles l’acquisition de leur appartement »13. En effet, l’augmentation de la grandeur des bâtiments et du nombre d’étages dans les zones urbaines a pour conséquence qu’un particulier est rarement à même

8 Cette loi a elle-même été remplacée par la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Pour le texte de l’ancien art. 664 CCfr, voir, par exemple, WERMELINGER (note 7), Vorb. n. 28.

9 Voir notamment Message 1962 (note 3), p. 1458 ss; Arthur MEIER-HAYOZ /Heinz REY,Das Stockwerk- eigentum, Art. 712a – 712t ZGB, commentaire bernois, T. IV/1/5, Berne 1988, Vorb. n. 52 ss.

10 Voir notamment Peter LIVER, Stockwerkeigentum – Umwandlung und Neubegründung, RNRF 1954, p. 3 ss et 65 ss; Henri SATTIVA, Recherches sur la propriété par étages, sa prohibition et son remplacement en droit suisse, thèse, Lausanne 1954; Hans-Peter FRIEDRICH, Die Wiedereinführung des Stockwerkeigentums in der Schweiz, RDS 1956, p. 1a ss; Guy FLATTET, La propriété par étages, RDS 1956, p. 591a ss.

11 Postulat COTTIER, du 30 mars 1951, et Interpellation MEILI, du 8 juin 1955. Voir Message 1962 (note 3), p. 1452 ss.

12 Le droit suisse de la propriété par étages n’a pas été repris en Turquie. Mais ce pays a adopté, en 1965 également, une loi spéciale sur la propriété par étages. Le concept juridique diffère de celui du droit suisse, en ce que chaque propriétaire d’étage est propriétaire de son domaine exclusif et co- propriétaire du domaine commun.

13 Message 1962 (note 3), p. 1455.

(20)

d’en être seul propriétaire et que, faute de pouvoir répartir la propriété entre de nombreux propriétaires, de tels immeubles ne peuvent guère être acquis et construits que par des sociétés immobilières ou des propriétaires institution- nels : le particulier doit se contenter d’être locataire de son logement. La même constatation peut être faite pour les personnes et les sociétés qui, pour leurs activités professionnelles, ont besoin de locaux en ville.

Le Message est très prudent sur les chances de succès de la nouvelle insti- tution. Il constate certes que, dans les pays voisins de la Suisse, les formes ana- logues à la propriété par étages ont connu un grand succès, mais relève que la crise du logement et l’état de ces pays au sortir de la guerre n’étaient guère comparables à la situation en Suisse. C’est pourquoi le Message fait le pronos- tic que « la propriété par étages ne supplantera pas l’immeuble locatif dans les villes et dans les autres centres économiques. Elle s’implantera plutôt dans les zones suburbaines où se construisent des immeubles commerciaux, et surtout pour répondre aux besoins précédemment couverts par la construction de vil- las familiales. Or c’est là aussi le but essentiel de la propriété par étages. Il est toutefois improbable qu’on assiste chez nous à une extension aussi rapide et généralisée que celle qui s’est produite à l’étranger à l’époque de la grande crise du logement »14.

Seule une étude beaucoup plus approfondie que celle qu’il a été possible de faire pour préparer cette contribution permettrait de porter un jugement objectif sur ce pronostic. Pour ma part, je peux faire les constatations suivantes.

A. Un fort développement

La propriété par étages n’a effectivement pas supplanté les immeubles locatifs dans les villes, mais elle est aujourd’hui bien implantée en Suisse et a connu un fort développement durant les vingt-cinq dernières années. Les bilans dressés par Hans-PeterFRIEDRICH15 et dans le commentaire MEIER-HAYOZ/REY16 une vingtaine d’années après l’entrée en vigueur de la révision montrent que, comme on pouvait d’ailleurs s’y attendre, l’implantation de la propriété par étages ne s’est pas faite du jour au lendemain. Mais le développement de l’institution a par la suite été plus rapide, ainsi que l’indiquent les chiffres donnés dans le commentaire WERMELINGER de 201017 et les résultats du dernier recensement fédéral de la population.

14 Message 1962 (note 3), p. 1460 sv.

15 Hans-Peter FRIEDRICH, Vingt ans après, la propriété par étages a-t-elle fait ses preuves ?, RJN 1985, p. 10 ss (cf. aussi Hans-Peter FRIEDRICH, Hat sich das Stockwerkeigentum bewährt ?, RNRF 1986, p. 65 ss).

16 MEIER-HAYOZ/REY (note 9), Vorb. n. 20 sv.

17 WERMELINGER (note 7), Vorb. n. 13 ss.

(21)

A ma connaissance, il n’existe toutefois pas de statistiques permettant de chiffrer la progression du nombre total de propriétés par étages dans toute la Suisse. Les recensements des bâtiments et des logements montrent cependant une forte progression du nombre de résidences principales acquises en pro- priété par étages18 :

Cette évolution est corroborée par une analyse faite par l’Office du registre foncier de Fribourg, aussi bien pour le nombre total des unités d’étages que pour celui des immeubles (biens-fonds et droit de superficie) en propriété par étages19 :

18 Voir Communiqué de presse de l’Office fédéral de la statistique du 28 mars 2013 sur le relevé struc- turel du recensement fédéral de la population 2010 ; WERMELINGER (note 7),Vorb.n. 14 ; Hans- Rudolf SCHULZ / PeterWÜRMLI, Logement 2000, Etude détaillée du recensement des bâtiments et des logements, Conditions de propriété et utilisation des bâtiments et des logements, édité par l’Office fédéral du logement en collaboration avec l'Office fédéral de la statistique, 2005, p. 13 ss. Pour la période 1990-2000, la part des logements principaux en propriété par étages dans l’ensemble de la Suisse a doublé, passant de 4 % à 8 % (Frohmut W. GERHEUSER, Logement et conditions d’habitation, Evolution de 1990 à 2000, édité par l’Office fédéral de la statistique, 2004, p. 32).

L’accroissement des logements en propriété par étages pour cette période représente 49 % du nombre total de logements créés ; à titre de comparaison, l’accroissement des logements de loca- taires est, lui, de 24 % (GERHEUSER (note 18), p. 25 sv.). L’essor de la propriété par étages touche toutes les régions de Suisse. En 2000, le Valais restait le canton où le nombre de propriétés par étages dans l’ensemble des résidences principales était le plus important ; il était suivi par les can- tons des Grisons, de Zoug et de Nidwald (voir GERHEUSER (note 18), p. 33 ainsi que WERMELINGER (note 7),Vorb. n. 15).

19 Les statistiques du canton de Fribourg font aussi apparaître qu’en moyenne, il y a 8,4 unités d’étages par immeuble en propriété par étages. Cela montre qu’en moyenne, dans ce canton, les bâtiments en propriété par étages sont relativement petits.

12 358

58 515

122 456

237 716

373 500

0 50 000 100 000 150 000 200 000 250 000 300 000 350 000 400 000

1970 1980 1990 2000 2010

Propriété par étages

Résidences principales des propriétaires

(22)

Ces tableaux donnent une bonne idée de la progression du nombre des propriétés par étages, mais pas du nombre total d’unités d’étages au plan suisse. En effet, les chiffres pris en compte dans le premier tableau ne concer-

0

2 514

7 158

12 934

19 062

23 536

0 5 000 10 000 15 000 20 000 25 000

1970 1980 1990 2000 2010 2014

Propriété par étages

Total des unités PPE dans le canton de Fribourg

0

172

624

1 436

2 259

2 796

0 500 1 000 1 500 2 000 2 500 3 000

1970 1980 1990 2000 2010 2014

Propriété par étages

Total des immeubles en PPE dans le canton de Fribourg

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nent que les unités d’étages qui sont utilisées par leur propriétaire comme ré- sidence principale. Il faut cependant y ajouter les nombreux appartements en propriété par étages qui servent de résidences secondaires à leurs propriétaires et/ou sont loués, voire restent inoccupés. AmédéoWERMELINGER a ainsi pu estimer que, en 2000, les appartements en propriété par étages servant de rési- dences principales à leurs propriétaires ne représentent qu’un peu plus de 40 % de tous les appartements en propriété par étages20. Il est ainsi vraisem- blable que l’on approche actuellement du million d’unités en propriété par étages en Suisse21.

B. Une structure juridique adaptable à de nombreux besoins La propriété par étages permet de répondre à des besoins beaucoup plus va- riés que ceux décrits dans le Message de 1962.

1. Logement ou usage commercial

Comme le signale déjà l’art. 712b, l’immeuble en propriété par étages peut être affecté à des logements et/ou à un usage commercial. La propriété par étages peut être mise en œuvre pour l’habitat urbain mais convient aussi pour les ré- sidences secondaires en zones touristiques22. Elle permet de fixer le statut des locaux annexes, tels que les caves et les combles, qui peuvent être intégrés aux unités d’étages. Des solutions adéquates ont aussi pu être trouvées pour les places de parc et les garages : lorsque le garage forme un local séparé, il peut être constitué en une unité distincte ou être rattaché à une unité principale;

lorsqu’il s’agit simplement de places marquées sur le sol, celles-ci peuvent faire l’objet d’attribution par le règlement de la propriété par étages ou par la voie de servitudes si elles sont situées sur des parties communes de l’immeuble; mais il est aussi possible d’affecter une ou plusieurs unité(s) d’étage(s) à des garages souterrains et de répartir les places de parc qu’elles

20 WERMELINGER (note 7),Vorb. n. 16, qui se fonde sur l’étude de SCHULZ/WÜRMLI (note 18).

21 Selon l’étude du Crédit Suisse « Marché immobilier 2014, Structures et perspectives », mars 2014, p. 15, les faibles taux d'intérêts hypothécaires auraient permis de stimuler la construction de plus de 20'000 logements en propriété par étages en 2011. Cette étude relève toutefois que, depuis, la construction de logements en propriété par étages marquerait le pas, notamment en raison d’une certaine saturation et des nouvelles directives de financement restreignant l'utilisation des avoirs de la prévoyance professionnelle en vue de l’accès à la propriété d’un logement. Un certain frein de- vrait aussi résulter de la limitation du nombre de résidences secondaires par commune (cf. l’art. 75b Cst. féd. et la législation d’exécution).

22 Certains appartements de vacances sont en outre détenus en « time sharing », ce qui permet de répartir la maîtrise réelle de l’immeuble en un nombre encore plus grand de personnes (copropriété spatio-temporelle, multipropriété). La part d’étage appartient alors en copropriété ordinaire à plu- sieurs personnes, dont l’utilisation de l’appartement dans le temps est fixée par le règlement de la copropriété. Voir notamment Christine MERMOUD, Le temps partagé dans la jouissance de la proprié- té par étages - Etude de la copropriété spatio-temporelle sur une part d’étage, thèse, Ge- nève/Zurich/Bâle 2008 ; WERMELINGER (note 7),Vorb.n. 137 ss.

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offrent par la voie d’une copropriété ordinaire ou par l’intermédiaire de servi- tudes.

2. Horizontale, verticale ou mixte

La propriété par étages peut être horizontale ou verticale et permet de trouver une structure juridique adéquate aussi bien lorsque le bâtiment comprend vraiment une unité par étage que lorsqu’il y a plusieurs unités sur un étage et/ou une unité sur plusieurs étages (duplex, triplex, etc.). Elle peut être utili- sée lorsque les unités d’étages sont constituées de villas contiguës, voire de villas séparées mais ayant des infrastructures communes. Il est possible d’avoir sur un même immeuble une propriété par étages mixte comprenant plusieurs bâtiments ayant chacun plusieurs unités. Il est possible de constituer sur un même immeuble des sous-communautés pour répondre aux besoins particuliers de certains propriétaires d’étages (par exemple, une exploitation hôtelière, d’un côté, et des logements privés, de l’autre)23. Il est possible, à cer- taines conditions restrictives toutefois, de jumeler des propriétés par étages, c’est-à-dire de gérer ensemble des propriétés par étages d’immeubles conti- gus24.

3. Sur un bien-fonds ou un droit de superficie

La propriété par étages peut être constituée sur un bien-fonds, mais aussi – ce qui peut surprendre – sur un droit de superficie (voir art. 712b al. 2 ch. 2 et 712d al. 2 ch. 2). Dans le second cas, le propriétaire d’étages n’est cependant que le cotitulaire du droit de superficie, dont la durée est limitée par la loi à un maximum de cent ans. Comme tout superficiaire, il n’est donc qu’un (co)propriétaire temporaire de la construction réalisée sur l’immeuble d’autrui : la propriété par étages disparaitra à l’extinction du droit de superfi- cie. Cela est conforme à notre droit immobilier et ne soulève pas de problème particulier, … pour autant que chacun soit bien conscient de la situation juri- dique qui est la sienne. Or, le risque est à cet égard plus grand pour le proprié- taire d’étage que pour le superficiaire unique. Le propriétaire d’étage doit bien comprendre que, dans ce cas, il acquiert une « propriété » qui diffère de celle de tous ceux dont la part d’étage porte sur un bien-fonds. Quoi qu’il en soit, des voix se font aujourd’hui entendre pour résoudre les difficultés que pour-

23 Pour plus de détails, voir notamment WERMELINGER (note 7), Art. 712l n. 151 ss ; MEIER-HAYOZ/REY (note 9), Art. 772b n. 86 ss ; Paul-Henri STEINAUER, Questions choisies en rapport avec la propriété par étages, RVJ 1991, p. 295 ss.

24 Pour plus de détails, voir Amédéo WERMELINGER, La propriété par étages « jumelée » : créativité admissible de la pratique ?, RNRF 2006, p. 369 ss, qui relève à juste titre que la réglementation mise en place ne peut priver chacune des communautés de propriétaires d’exercer les droits que lui confère la loi, notamment quant à la modification de son propre règlement de propriété par étages et quant au choix de l’administrateur.

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rait poser la prolongation du droit de superficie constitué en propriété par étages25.

4. Constituée avant ou après la construction

La propriété par étages peut être constituée par contrat ou, ce qui est large- ment le plus fréquent, par la volonté unilatérale d’un promoteur, qui vend en- suite des parts d’étages (art. 712d). Elle peut être constituée après, mais aussi avant la construction du bâtiment. En effet, l’art. 712e prévoit certes que l’acte constitutif indique la délimitation des unités d’étages, mais il n’exige pas que celles-ci existent déjà matériellement. Le Conseil fédéral en a conclu qu’il pou- vait autoriser la constitution de la propriété par étages avant la construction du bâtiment, moyennant tout de même certaines précautions, dont une men- tion correspondante au registre foncier (art. 69 ORF, qui reprend en substance l’ancien art. 33c ORF). Cette possibilité a le grand avantage de pouvoir associer par anticipation les propriétaires au financement de la construction. Elle pré- sente cependant aussi pour ces propriétaires des risques très importants, qui – il est vrai – ne semblent pas se concrétiser souvent en pratique26. Le sérieux des promoteurs et des entrepreneurs et une vérification de la faisabilité financière du projet par les banques expliquent sans doute ce phénomène réjouissant, jusqu’au jour peut-être où quelques scandales retentissants mettront un point d’interrogation sur la réglementation de cette faculté ou, en tout cas, en mon- treront les lacunes.

5. Aussi pour des apparthôtels

La propriété par étages permet aussi de contribuer au financement de la réali- sation d’hôtels, en particulier par des personnes à l’étranger. La part d’étage, correspondant à une chambre ou une suite dans un hôtel, est alors mise à la disposition de l’exploitant de l’hôtel, sous réserve d’une période de l’année où son propriétaire peut l’occuper; ce dernier n’est pas non plus libre dans l’aménagement de son unité d’étage, qui doit correspondre au besoin de l’exploitation hôtelière. Les apparthôtels sont régis par la loi sous l’angle de l’acquisition d’immeubles par des personnes à l’étranger (voir les art. 8 ss LFAIE, précisés par plusieurs dispositions de l’OAIE, qui, à certaines condi- tions, légitiment ainsi cette forme de propriété par étages); du point de vue du

25 Voir le postulat no 14.3832 du Conseiller national Andrea CARONI, du 25 septembre 2014, intitulé Fünfzig Jahre Stockwerkeigentum. Zeit für einen Gesamtschau ; Amédéo WERMELINGER, Die Verlän- gerung des Baurechts bei Stockwerkeigentum, in Mélanges Steinauer, Berne 2013, p. 663 ss.

26 Voir notamment Frédéric KRAUSKOPF, Erwerb von Stockwerkeigentum vor Erstellung des Gebäudes – Klippen bei der vertraglichen Gestaltung, in Luzerner Tag des Stockwerkeigentums 2011, Berne 2011, p. 115 ss ; Franz WERRO, La propriété par étages sur plan, Journées du droit de la construc- tion 2011, p. 63 ss ; Amédéo WERMELINGER, La vente d’une part-terrain – état des lieux, Not@lex 2010, p. 39 ss ; Hubert STÖCKLI, Stockwerkeigentum ab Plan, in Schweizerische Baurechtstagung 2009, p. 1 ss. Voir aussi le Postulat CARONI cité en note 25.

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droit civil, les droits laissés au propriétaire d’étage doivent cependant être as- sez étendus (notamment quant à la durée de l’usage et à l’aménagement de l’unité d’étage) pour que la structure de la propriété par étages ne soit pas dé- tournée de son but 27.

III. Régime juridique

A. La réglementation légale

1. Hiérarchie des normes

Comme le montre déjà l’art. 712a al. 1, la propriété par étages est une forme particulière de copropriété immobilière. Le texte français de la loi n’utilise d’ailleurs pas (sauf dans l’art. 712g al. 4 introduit en 2012) l’expression « pro- priétaire(s) d’étage(s) », mais toujours le terme « copropriétaire(s) »28. Le titu- laire d’une part d’étage n’est donc pas propriétaire de son unité d’étage, mais copropriétaire de l’ensemble de l’immeuble, y compris de sa propre unité d’étage et de celles des autres. La réglementation légale de la propriété par étages est ainsi d’abord constituée des règles des art. 646 à 651a relatives à la copropriété, dans la mesure où ces règles peuvent concerner des immeubles et où les règles spéciales des art. 712a ss n’y dérogent pas. S’appliquent ainsi à la propriété par étages, notamment, les dispositions sur les actes d’admi- nistration et les travaux de construction (ce que rappelle l’art. 712g al. 1), sur les actes de disposition (art. 648), sur l’opposabilité à certains tiers du règle- ment d’administration et d’utilisation (art. 649a) et sur l’exclusion de la com- munauté (art. 649b et 649c).

A ces règles, s’ajoutent les règles spéciales des art. 712a ss, qui définissent en particulier les prérogatives propres et les devoirs de chaque propriétaire d’étage, les modalités de la détermination de son unité d’étage ainsi que, de manière relativement détaillée, l’organisation de la communauté des proprié- taires. La délimitation des unités d’étages et de la quote-part que chacune re- présente doivent figurer dans l’acte constitutif (art. 712e al. 1).

En outre, l’art. 712g al. 3 permet à chaque propriétaire d’étage d’exiger l’établissement d’un règlement d’administration et d’utilisation. Dès lors que

27 Pour plus de détails, voir notamment WERMELINGER (note 7), Vorb. n. 123 ss ; Eric RAMEL, Le régime des apparthôtels dans la loi fédérale du 16 décembre 1983 sur l’acquisition d’immeubles par des personnes à l’étranger, thèse, Lausanne 1990 ; Urs RASCHEIN, Die Rechtsausübung der Stockwerkei- gentümergemeinschaft mit besonderer Berücksichtigung von Gewährleistungsanprüchen und des Sonderfalles Aparthotel, thèse, Zurich 1996 ; Fabian WÄGER / Erich RÜEGG, Das Konzept « Hôtel- Wohnen » und die Lex Koller, BR/DC 2013 99 ss.

28 Il en va de même du texte italien, alors qu’en allemand, le législateur utilise « Stockwerkeigen- tümer ».

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presque toutes les propriétés par étages sont dotées d’un règlement dès leur constitution, la règle permet surtout de faire compléter un règlement lacunaire sur un point important29. En réalité, le règlement est un élément essentiel pour le bon fonctionnement de la propriété par étages. Il est souvent établi sur la base de modèles qui ont fait leurs preuves, mais il doit être au besoin adapté aux spécificités de la propriété par étages qu’il régit. Surtout pour les proprié- tés par étages complexes, on ne peut assez souligner le soin avec lequel le rè- glement doit être rédigé.

Les propriétaires peuvent aussi établir un règlement de maison, comme le signale l’art. 712s al. 3. A quoi il faut encore ajouter que, selon l’art. 649a al. 1, les décisions prises par l’assemblée lient les acquéreurs de parts et constituent ainsi des normes supplémentaires régissant la communauté.

Ces divers types de normes doivent évidemment être hiérarchisés. En par- ticulier, les dispositions légales sont le plus souvent de droit impératif et, lors- qu’elles ne le sont pas, ne peuvent parfois être écartées qu’à l’unanimité (voir l’art. 712g al. 2) ou à une majorité qualifiée30. Au total, chaque propriété par étages fait donc l’objet d’un appareil normatif complexe, parce qu’il doit équi- tablement tenir compte des intérêts de chaque propriétaire et de ceux de la communauté qu’ils forment. Néanmoins, la complexité de la réglementation semble globalement bien maîtrisée en pratique, sans doute parce que la plu- part des propriétés par étages sont gérées par des administrateurs profession- nels.

2. Le droit transitoire

L’introduction de la propriété par étages dans le Code civil a permis au législa- teur, en fermant un œil sur certaines exigences de l’art. 712b, de soumettre au droit fédéral les propriétés par étages antérieures à 1912 (art. 20bis T.f.). Le lé- gislateur a également donné aux cantons la possibilité de soumettre à la nou- velle loi les propriétés par étages de l’ancien droit qui, entre-temps, avaient été inscrites comme copropriétés assorties de servitudes d’utilisation (art. 20ter T.f.); comme la validité de cette construction juridique était contestée31, cette règle a suscité de nombreuses controverses, en tout cas sur le fondement dog- matique de l’inscription de ces copropriétés comme propriétés par étages du nouveau droit. Finalement, les concessions faites par les autorités entre 1912 et 1965 pour faciliter l’inscription au registre foncier des anciennes propriétés par

29 Voir WERMELINGER (note 7), Art. 712g n. 131.

30 Voir l’analyse détaillée de WERMELINGER (note 7), Art. 712g n. 32 ss et 75 ss.

31 Voir supra note de bas de page 5.

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étages de droit cantonal n’ont cependant pas empêché de soumettre au nou- veau droit l’ensemble des propriétés par étages de l’ancien droit32.

3. Les révisions

Le droit de la propriété par étages a fait l’objet de deux révisions mineures, en 2001 et en 2011, en vue de supprimer dans le Code civil des précisions procé- durales qui figuraient désormais dans la loi sur les fors, respectivement dans le Code de procédure civile33. La révision de 2012 fut plus importante et porta sur trois questions :

- Un point technique, d’abord : l’introduction de plus de souplesse dans la définition des quotes-parts (art. 712e al. 1).

- Un changement relatif à la fin de la propriété par étages, ensuite : l’art. 712f al. 3 ouvre notamment à chaque propriétaire d’étage le droit d’exiger la dissolution de la propriété par étages lorsque le bâtiment est soumis à cette forme de propriété depuis plus de cinquante ans et est en si mauvais état qu’il ne peut plus être utilisé conformément à sa destination; les autres propriétaires peuvent toutefois éviter la dissolution en désintéressant le demandeur (art. 712f al. 4). La règle fera sans doute encore couler beau- coup d’encre, notamment quant à sa relation avec l’art. 647 al. 2 (voir à ce sujet ci-après la contribution de BénédictFOËX). Pour ma part, j’y vois sur- tout un signe annonciateur des difficultés que ne manqueront pas de susci- ter les propriétés par étages vieillissantes.

- Enfin, l’art. 712g al. 4 (comme l’art. 647 al. 1bis) introduit la nouveauté la plus intéressante sur le plan dogmatique : le propriétaire d’étage auquel une disposition du règlement d’administration et d’utilisation accorde un droit d’usage particulier des parties communes de l’immeuble a un droit de veto contre la modification de cette disposition. Ainsi, en plus des droits personnels (par exemple, au titre d’un bail) et, surtout, des servi- tudes (par exemple, de parking) qu’il pouvait acquérir sur les parties communes, le propriétaire d’étage peut obtenir un droit d’usage particu- lier réglementaire, bénéficiant d’une protection comparable à celle d’un droit réel, mais accordé à une majorité qualifiée. Même ainsi renforcés, ces droits d’usage particulier doivent être soigneusement distingués des droits exclusifs sur l’unité d’étage au sens des art. 712a et 712b, car ils ne confè- rent pas le droit d’aménager l’espace commun sur lequel ils portent. Il

32 Sur ces questions, voir notamment ATF 113 II 146, cons. 4 = JdT 1987 I 612 ; Eduard BROGLI, Das intertemporale Stockwerkeigentumsrecht der Schweiz am Beispiel des Kantons Wallis, thèse, Fri- bourg 1985 ; Denis PIOTET, Sur le moment de la reconversion de propriétés par étages originaires qui avaient été transformées en application de l’ancien droit transitoire, JdT 1988 I 155 ; MEIER- HAYOZ/REY (note 9), Vorb. n. 87 ss ; WERMELINGER (note 7), Vorb. n. 113 ss.

33 Voir l’art. 712l al. 2, modifié par la loi sur les fors, et l’art. 712c al. 3, modifié par le Code de procé- dure civile.

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reste que, vu la protection renforcée dont il bénéficie désormais, cet ins- trument devrait évidemment être utilisé avec plus de prudence à l’avenir34!

Outre ces trois révisions venues à chef, il faut signaler l’abandon, après la procédure de consultation, du projet d’introduire dans le Code civil, à côté de la propriété par étages, une « petite propriété du logement » (appelé aussi

« droit de volume »), qui aurait conféré à son titulaire une forme spéciale de droit de superficie sur son logement. L’idée de faciliter l’accès à la propriété du logement était certes louable, mais la voie choisie ne répondait pas à un réel besoin et n’a pas été jugée viable d’un point de vue pratique35. Par ailleurs, le projet de révision de la loi sur la poursuite pour dette et la faillite destiné à faciliter les procédures d’assainissement prévoyait la suppression du droit de rétention du bailleur et, par conséquent, aussi du droit de rétention de la communauté (art. 712k)36. Le Parlement n’a cependant pas donné suite à cette proposition.

B. La jurisprudence

Acquérir une vue d’ensemble de la jurisprudence sur la propriété par étages n’était pas possible dans le cadre de la préparation de cette contribution. Je me suis donc limité à la jurisprudence du Tribunal fédéral.

Depuis 1965, le Tribunal fédéral a rendu une petite soixantaine d’arrêts publiés relatifs à la propriété par étages et, de 1999 à 2014, environ 170 arrêts non-publiés. La plupart des litiges avaient trait au fonctionnement de la pro- priété par étages : actions en contestation des décisions de l’assemblée (art. 712m), en révocation de l’administrateur (art. 712r al. 2), en modification des quotes-parts (art. 712e al. 2), en constitution d’une hypothèque légale (712i) ou en garantie pour les défauts, conflits liés à la répartition interne des frais et des charges communs (art. 712h) ainsi qu’à la constitution ou l’exercice d’un droit d’usage particulier37.

On peut constater que la jurisprudence du Tribunal fédéral n’est pas parti- culièrement abondante, du moins si on la rapporte au nombre d’unités d’étages en Suisse. La jurisprudence n’a pas non plus dû résoudre des pro-

34 La nouvelle règle s’applique aussi aux droits d’usage particulier réglementaires accordés sous l’ancien droit (art. 3 et 17 al. 2 T.f.) ; voir TF, 5A_44/2014, cons. 3.3.1 (passage non publié dans ATF 140 III 561) ; Denis PIOTET, Le droit transitoire de la révision du Code civil du 11 décembre 2009 et la pratique notariale, NB/BN 2010, p. 226 ; WERMELINGER (note 7), Art. 712g n. 10 et 178.

35 Message 2007, FF 2007 p. 5020 et 5026.

36 Message 2010, FF 2010 p. 5907 ss.

37 Voir en outre Valentin PICCININ, La propriété par étages en procès, thèse Fribourg, Ge- nève/Zurich/Bâle 2015.

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blèmes fondamentaux liés à la conception même de la propriété par étages. Il y a certes des litiges, comme il est normal pour une structure juridique qui con- duit de nombreuses personnes à vivre ensemble dans un même bâtiment et à gérer en commun leur immeuble. Mais la propriété par étages ne paraît de loin pas être la source de perpétuelles disputes que l’on a parfois dépeinte.

C. La doctrine

La propriété par étages a fait l’objet de nombreuses publications, à la hauteur de l’importance qu’elle a prise dans la vie juridique. Je m’en tiendrai ici à celles qui traitent spécifiquement de la propriété par étages, sans mentionner celles qui abordent de façon plus générale la copropriété ordinaire. Je me limiterai par ailleurs aux ouvrages.

Parmi les nombreuses publications parues à la suite de la révision de 1965, on peut citer l’ouvrage d’Henri MAGNENAT, La propriété par étages (1965) et celui de Hans-Peter FRIEDRICH, Das Stockwerkeigentum, Reglement für die Ge- meinschaft der Stockwerkeigentümer (1972), ainsi que les thèses de Max MONTCHAL, La propriété par étages et par appartements (1964), PeterSTUDER,Zur Willensbildung in der Gemeinschaft der Mit- und Stockwerkeigentümer (1964), Hansjörg FREI, Zum Aussenverhältnis der Gemeinschaft der Stockwerkeigentümer (1970), RetoMENGIARDI, Die Errichtung von Beschränkten dinglichen Rechten zu- gunsten und zulasten von Miteigentumsanteilen und Stockwerkeigentumseinheiten (1972), MoritzOTTIKER, Pfandrecht und Zwangsvollstreckung bei Miteigentum und Stockwerkeigentum (1972), FritzSCHMID,Die Begründung von Stockwerkeigentum (1972), Christoph MÜLLER, Zur Gemeinschaft der Stockwerkeigentümer (1973), Kurt MÜLLER, Der Verwalter von Liegenschaften mit Stockwerkeigentum (3e éd.

publiée en 1975), Patrice MICHAUD, L’organisation de la communauté des propriétaires par étages (1975), Rolf H. WEBER, Die Stockwerkeigentümergemein- schaft (1979) et Jean-FrançoisLAURENT, Les gages grevant la propriété par étages (1980).

Entre 1980 et 2000, les ouvrages relatifs à la propriété par étages ont été moins nombreux. Outre le commentaire bernois d’Arthur MEIER-HAYOZ et HeinzREY, paru en 1988 et qui fait aujourd’hui encore autorité, on peut men- tionner les thèses de Pierre GIOVANOLA, Les obligations réciproques des proprié- taires d’étages et leurs sanctions (1986), Arthur MATHIS, Das Bauhandwerkerpfan- drecht in der Gesamtüberbauung und im Stockwerkeigentum (1988), Patrick BLOCH, Le fonds de rénovation dans la propriété par étages (1988), UrsBRETSCHGER, Stock- werkeigentum im zürcherischen Zivilprozess – Ausgewählte Fragen (1988), Martin HABS, La propriété par étages sur des maisons familiales en habitat groupé (1989), Amédéo WERMELINGER,L’utilisation de l’unité d’étage dans un immeuble en pro- priété par étages (1992) et Adrian VON SEGESSER, Stockwerkeigentum an Bau- rechtsparzellen (1997).

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L’intérêt de la doctrine pour la propriété par étages ne s’est pas démenti ces dernières années. On pense d’abord au volumineux commentaire des art. 712a à 712t d’Amédéo WERMELINGER, paru dans le commentaire zurichois (2010), ainsi qu’aux commentaires plus orientés vers la pratique publiés par ce même auteur et réédités récemment (Das Stockwerkeigentum, 2e éd., Zurich 2014, et La propriété par étages, 3e éd., Rothenburg 2015). Mais il faut égale- ment citer l’ouvrage de Heinz REY / Lukas MAETZKE, Schweizerisches Stock- werkeigentum (3e éd. parue en 2009) ainsi que les thèses de Kezia BAADER- SCHÜLE, Praktische Probleme der Nutzniessung an Stockwerkeigentums-Anteilen (2006), PascalWIRZ, Schranken der Sonderrechtsausübung im Stockwerkeigentum (2008), Christine MERMOUD, Le temps partagé dans la jouissance de la propriété par étages (2008), Christoph THURNHERR,Bauliche Massnahmen bei Mit- und Stock- werkeigentum (2010), Guy LANNEPATS,Le statut de la copropriété des immeubles bâtis – Eléments de comparaison en droit français et droit suisse (2010), et Valentin PICCININ, La propriété par étages en procès (2015).

La propriété par étages est également bien présente dans l’offre de forma- tion continue, notamment à Genève (Journées du droit de la propriété) et à Fribourg (Journées du droit de la construction). Elle a même l’honneur, depuis 2011, d’avoir chaque année une journée de formation qui lui est entièrement consacrée à Lucerne.

D. La propriété par étages au quotidien

Faute de pouvoir mener une analyse scientifique sur la manière dont la pro- priété par étages est perçue par ceux qui la vivent au quotidien, j’ai pensé qu’une petite enquête auprès de divers administrateurs professionnels de pro- priété par étages, en milieu urbain et dans les zones touristiques, pourrait peut-être donner une certaine image de la réalité de l’institution et des pro- blèmes rencontrés au jour le jour. Les lignes qui suivent ne doivent donc pas être prises pour plus que ce qu’elles sont : une synthèse subjective d’informations et d’avis fournis par quelques spécialistes de l’administration de propriétés par étages. En même temps, je dois relever une bonne conver- gence des opinions exprimées, qui peuvent être résumées par les constats sui- vants :

- L’institution de la propriété par étages fonctionne plutôt bien. Les proprié- tés par étages difficiles à gérer sont peu nombreuses (évaluées à environ 2 à 3 %) et, sous réserve de quelques actions en contestation de décisions de l’assemblée ou en inscription d’une hypothèque légale pour garantir des contributions, les litiges devant les tribunaux sont rares.

- Les problèmes rencontrés sont plus souvent liés à des querelles de per- sonnes qu’au fonctionnement même de la propriété par étages. La mise en place d’un règlement adapté à chaque propriété par étages et la tenue

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d’assemblées régulières (jouant parfois le rôle de « thérapies de groupe ») permettent de prévenir une grande partie des litiges.

- Les litiges sont plus fréquents dans les petites propriétés par étages, sur- tout dans les propriétés par étages composées de deux ou de trois per- sonnes. Proposition a même été faite d’imposer un nombre minimum de trois propriétaires pour limiter les risques de blocage ou de prévoir des règles légales spéciales pour de tels cas.

- L’exigence de l’unanimité pour certaines décisions est souvent probléma- tique, car il est rare que tous les propriétaires d’étages se mettent d’accord ou soient présents à l’assemblée, en particulier pour les résidences de va- cances.

- La constitution d’un fonds de rénovation est souvent prévue par les pro- priétaires par étages. Quelques administrateurs conseillent de contribuer chaque année à hauteur de 0.2 % de la valeur incendie (taux au demeurant proposé dans le modèle de règlement d’administration et d’utilisation de la Chambre vaudoise immobilière). Toutefois, le fonds ne suffit générale- ment pas à financer de grands travaux de rénovation, tels que le change- ment de la toiture ou l’isolation extérieure du bâtiment38. Les propriétaires doivent trouver des liquidités, ce qui a pour conséquence de retarder de manière importante les travaux. Malheureusement, aujourd’hui encore, il reste difficile de transformer des cigales en fourmis, même si une obliga- tion légale de constituer un fonds de rénovation pourrait améliorer la si- tuation.

- L’hypothèque légale garantissant les contributions des propriétaires d’étages est souvent utilisée comme moyen de pression. Selon certains administrateurs, la protection de la communauté mériterait d’être renfor- cée par l’octroi d’un privilège, comme en matière d’hypothèque légale des artisans et entrepreneurs.

Conclusion

Au total, il faut constater que, cinquante ans après son introduction dans le Code civil, la propriété par étages s’est bien implantée en Suisse et permet de répondre à des besoins très divers. Elle fonctionne globalement bien et le con- cept mis en place en 1965 a en ce sens fait ses preuves, même si – on l’a vu – certains problèmes demeurent et que des améliorations normatives peuvent être envisagées (voir ci-dessous la contribution d’Amédéo WERMELINGER).

38 Voir aussi StefanBRUNI /Christoph HANISCH /JürgINDERBITZIN, Erneuerungsfonds im Stockwerkeigen- tum – eine empirische Analyse für die Agglomeration Luzern, Studie im Auftrag des Bundesamtes für Wohnungswesen, Lucerne 2011, qui font également le constat que les fonds de rénovation ne sont en généralpas suffisants.

(33)

Toutefois, la propriété par étages est, et restera nécessairement, une pro- priété collective, avec son lot d’avantages et de désagréments, ses modes com- plexes de décisions et ses problèmes de personnes. Cela étant, le succès à long terme d’une propriété par étages me paraît tenir à quatre facteurs :

- un bâtiment de qualité,

- une réglementation bien adaptée,

- un administrateur (professionnel) compétent, et - un solide fonds de rénovation.

Comme un règlement peut toujours être révisé et un administrateur, révo- qué, ce sont finalement la qualité de la construction et les réserves financières de la communauté qui sont vraiment essentielles. Ces deux points ne peuvent pourtant que difficilement faire l’objet d’évaluations objectives, et en tout cas de telles évaluations n’existent pas actuellement au plan fédéral. Reste donc l’espoir que la clairvoyance et la prudence des propriétaires d’étages ont été, et sont encore, suffisantes. A l’aune de bâtiments, cinquante ans sont toutefois trop peu pour en juger : les décennies de vérité de la propriété par étages sont encore à venir.

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