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Évolution des contextes de travail

Chapitre 2 - Tertiarisation de l’économie et des entreprises

1. Évolution socioéconomique du secteur tertiaire

1.1 Tendance générale

Pour un pays donné, l’évolution des questions de travail peut avoir pour origine l’évolution même des secteurs d’activité et plus précisément des métiers exercés par la population active. La progression du secteur tertiaire, avec le développement des activités de service, a particulièrement transformé la cartographie des emplois en France (Broussole, 2016). Selon l’Insee (Institut National de la Statistique et des Études Économiques), le secteur tertiaire recouvre un vaste champ d’activités qui s’étend du commerce à l’administration, en passant par les transports, les activités financières et immobilières, les services aux entreprises et services aux particuliers, l’éducation, la santé et l’action sociale.

Il est composé du :

- Tertiaire principalement marchand (commerce, transports, activités financières, services rendus aux entreprises, services rendus aux particuliers, hébergement-restauration, immobilier, information-communication) ;

- Tertiaire principalement non-marchand (administration publique, enseignement, santé humaine, action sociale).

Le périmètre du secteur tertiaire est de fait défini par complémentarité avec les activités agricoles et industrielles, secteurs primaire et secondaire.

Force est de constater que depuis maintenant plus de 50 ans, le secteur tertiaire progresse régulièrement, que ce soit en France, en Europe ou plus généralement dans les pays industrialisés (Braibant, 2015), et ces 15 dernières années, cette tendance concerne aussi les pays émergents. Si la période d’entre-deux-guerres et d’après guerres marque un tournant

incontournable dans le développement industriel européen et surtout français, le secteur tertiaire a progressivement entamé son développement à partir des années 1960.

Comme le montre la figure 2 (supra), en 1962, le secteur tertiaire représentait 42 % des emplois, le secteur secondaire 37 % et en 2017, plus des ¾ des emplois (75,9 %) le sont dans le tertiaire, les secteurs secondaire et primaire ayant perdu respectivement 17 et 18 points (Insee, 2019a). En 2017, la France figure parmi les pays européens où le poids du secteur tertiaire est le plus élevé (Insee, 2019b) : il y est supérieur de 4 points à la moyenne de l’Union européenne (UE). Les poids de l’agriculture et de l’industrie-construction y sont en revanche plus faibles, inférieurs de 1,6 et de 3,4 points respectivement, en regard de la moyenne de l’UE (figures infra).

En contrepartie, comme dans un mouvement de balancier, en 1980, la France comptait plus de 5,1 millions d’emplois manufacturiers alors qu’elle en compte 3,1 millions en 2008. Entre 1980 et 2008, la France a donc perdu presque 2 millions de ces emplois (Guillou et Nesta, 2012), soit une diminution de 38%.

Dans ce contexte, la création d’emplois dans le secteur des services a été importante depuis plus d’un demi-siècle. Par exemple, entre 1978 et 2008, 150 000 emplois ont été créés chaque année dans les services marchands, pendant que 60 000 ont été détruits dans l’industrie (Schreiber et Vicard, 2011). Et cette tendance s’est maintenue, voire accélérée puisqu’en 2017, les services principalement marchands gagnent 227 000 emplois nets mesurés en équivalent temps plein, soit une hausse de 3,1 % après + 2,2 % en 2016. Au quatrième trimestre 2019, l’emploi salarié augmente de 68 600 dans les services marchands,

Figure 4 : Évolution de l’emploi salarié par secteur d’activité

Figure 3 : Emploi total par grand secteur dans l’UE en 2017

soit +0,5 %, après +0,3 % au trimestre précédent. Sur un an, ce secteur porte la grande majorité des créations nettes d’emplois salariés : +201 000, soit davantage qu’en 2018 (+126 000) (figure infra). Toujours en 2017, malgré le ralentissement du pouvoir d’achat, la consommation des ménages en services accélère (+ 2,0 % en volume, après + 1,7 %), contrairement à celle de biens (Insee, 2019b).

1.2 Une progression inégale

Cette tendance à l’augmentation de la consommation des services et des emplois dans ce secteur, masque néanmoins des nuances qu’il nous faut souligner. En effet, ce secteur d’activité englobe un vaste panel de métiers qui ont évolué différemment.

Depuis le début des années 1980, les métiers du secteur tertiaire ont été les créateurs d’emplois les plus importants, plus particulièrement ceux du domaine de la santé et de l’action sociale, culturelle et sportive et ceux des services aux particuliers (Dares, 2017, figure 6). Entre 1980 et 2014, 5,3 millions d’emplois ont été créés dans le secteur des services portant le nombre d’emplois du secteur à 19,8 millions sur un total de 25,8 millions d’emplois, tous secteurs confondus. Plus précisément, les métiers du domaine de la santé et de l’action sociale, culturelle et sportive ont doublé en trente ans et occupent en 2014 plus de 2,6 millions de personnes. Ce domaine regroupe, entre autres, les aides-soignants,

Figure 6 : Évolution de l’emploi par domaine professionnel entre 1982-1984 et 2012-2014 (en milliers) Figure 5 : Contribution des principales branches d’activité à l’évolution de la valeur

les infirmiers, les sages-femmes, les médecins, les professions paramédicales, ainsi que les professionnels de l’action sociale, culturelle et sportive.

Dans le même sens, les métiers du domaine des services aux particuliers ont augmenté, sur la même période, de 1,03 million. En 2014, plus de 3 millions de personnes occupent un poste dans ce secteur, soit 12 % de l’emploi total. On comptait ainsi en 2014, 1 million d’aides à domicile, aides ménagères et assistantes maternelles, trois fois plus qu’au début des années 1980 (figure 7). Dans ce même mouvement, nous noterons aussi une progression du nombre de cadres des services administratifs, comptables et financiers et des cadres commerciaux de 683 000. Cette tendance peut s’expliquer au moins par deux raisons, la première concerne le développement de politiques d’entreprise orientées clients et la seconde a trait à une volonté de professionnalisation de la fonction de management qui touche les entreprises de tous les secteurs d’activité. Entre 2003 et 2018, la part des cadres a progressé de 3,18 points pour atteindre 18,4 % de la population en emploi (figure 8, Insee, 2019c), soit près de 5 millions de personnes. Cette tendance devrait encore s’accentuer dans les années à venir (Apec, 2020 ; Di Pasquale, 2020). Enfin, deux autres domaines ont aussi progressé plus largement que les autres. Il s’agit de celui de l’informatique et des télécommunications, porté par la diffusion des technologies de l’information et de la communication (TIC), et du domaine de la gestion et de l’administration des entreprises.