EP| 4k 4
N° 43.
Parcpffsâlil le 15 cle chaque
mois. 15 Décembre 1927.Abonnements. .
V
t.ance V.
France V. 35 fr.
Etranger. 50 fr.
Adresser lemoulant des Abonnementshl'Institut
Le Numéro. France.. . 3 f 50 Etranger. 5f »
duPin.—C. C. Bordeaux 9237
BULLETIN
Llbii/hTUT DU
Sous le contrôle de l'institut des Recherches
agronomiques
et rattaché à la Faculté des Sciences de Bordeaux
Z.^3
r SOMMAI
REPages I. Articles originaux
G I 7 Aperçu sur les ressources forestières du Maroc, parM. G. Dupont 273 E 1 10 Sur la Composition et l'Utilisation du
bois d'Arganier, par M. Antonio da
Costa Cobrau 289
II. Documentation
Cil30-47 Documentation sur les Essences de Téré¬
benthine. Terpèneset dérivés 281 DU 65-69 Documentation sur les Constituants soli¬
desdes Résines etleurs dérivés 287
Pages EU64 JLa fabrication de l'Alcool éthylique à
partir des déchets de bois, par W.
Kressmann, traduit par Richard et
Faucounau 290
Eli65-66 Documentation sur les dérivés chimiques
du Rois 292
GII 84 Importance de la concentration en Ions H dans la fabrication du papier, par
M. Lussauo 293
J
MODE DE CLASSIFICATION DE NOS DOCUMENTS
A. Généralités.
B. Récolte et traitement des résines.
C. Essences de térébenthine, terpènes et dérivés.
D. Constituants solides des résines et leurs dérivés.
E. Dérivés chimiquesdu bois.
F. Cellulose de bois.
G. Documents divers.
Adresser la
Correspondance
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J. CANOUET
LE
BOUSCAT-BORDEAUX (Gironde)
n° 43 Paraissant le 15 de chaque mois. 15 Déeembre Î927,
BULLETIN
DE
L'INSTITUT DU PIN
Sous le contrôle de l'Institut des Recherches
agronomiques
et rattaché à la Faculté des Sciences de
Bordeaux
G. !„ 7
APliiRÇTJ
SUR LES
parG. DUPONT
Professeur à la Faculté des Sciences de Bordeaux.
Pour le voyageur
qui
secontente de parcourir le
Maroc par
les grands itinéraires de
seslignes d'auto¬
cars, ainsi d'ailleurs que pour
beaucoup de colons
•européens,
ce paysest
un pays sansarbres. La rai¬
son de cette opinion
erronée est
queles grandes
voies du Maroc traversent des
régions
engénéral
absolument déboisées.
Si le voyageur,
partant de Casablanca,
sedirige
vers Rabat, c'est à perte
de
vuela plaine de la
Chaoueia, couverte de palmiers
nains (doum)
ou dedéfrichements récents,qui s'offre à
sa vue,plaine
dont la monotonie n'est
coupée
que parla silhouette
en
guenilles de quelque dattier, dominant quelque
haie de cactus ou d'aloës, ou par
l'apparition impré¬
vue d'une de ces vallées étroites au fond desquelles
s'égrènent les flaques d'eau d'un oued, encadrées
de bosquets
de lauriers-roses. Si le
voyageur pour¬suit sa route vers Meknès,
puis
versFez, Taza et Oudja, aussi bien
parla route du Sud (par Khemis-
set) que par
celle du Nord (par Petit-Jean et Mouley-
Indriss), à
peine traverse-t-il quelques pointes de la grande forêts de lalMamora dont il
nepeut soupçon¬
ner l'étendue,
puis c'est à
nouveau,à perte de
vue, l'immenseplaine couverte de pierres et de doums, puis des montagnes dénudées. Vers le Sud, de mê¬
me, que
l'on
prennela longue route qui,
parla côte
va vers
Mazagan, Safi et Mogador,
oubien celle qui
va vers Marrakech, à travers la
plaine désertique
de Ben Guérir,
qui voile le plus souvent
sanudité
absolue sous des mirages
du plus étonnant effet,
c'est tout le long
de la route, et partout où peut
atteindre la vue, cette absence d'arbres
qui frappe l'Européen et est
pourlui la caractéristique du pay¬
sage
marocain.
Et
cependant, du moins dans le Maroc Occidental,
la forêt peut
et doit
pousser :partout où les Euro¬
péens
sesont fixés, leur premier soin
aété de plan¬
ter des arbres, beaucoup
d'essences
:mimosas,
aca¬cias, eucalyptus,
poussent très bien à
peuprès-
par¬tout dans le Nord. L'arbre peut et
doit concourir
fortementàla
régénération de
cesol et à la richesse
de ce pays.
Les forêts existaient d'ailleurs jadis sur
une
grande partie du Maroc, mais,
pardes exploi¬
tations abusives, des incendies
multipliés, les indi¬
gènes,
que nedirigeait
aucunpouvoir éclairé, les
ont en
grande partie détruites ! Le service forestier français,
sousla conduite éclairée de
sondirecteur,
le conservateur
Boudy,
aentrepris
avecméthode et énergie, la restauration des forêts marocaines; c'est
une œuvre de longue
haleine, mais c'est
unedes
œuvresles
plus utiles
queles Français puissent faire
dans ce pays.
Je voudrais, dans ce
qui
vasuivre, présenter
d'abord les forêts
qui subsistent
encore auMaroc,
dire ce que
l'on fait
pourles
sauveret les accroître
et
indiquer enfin les profits
quel'industrie maro¬
caine peut
retirer de leur exploitation rationnelle.
274 BULLETIN LE L'INSTITUT LU PIN — N° 43 - Lècembre 192?
Les
forêts
existantes.Malgré
les dévastations, il existe encore au Maroc des forêts assez vastes. Si le voyageur, ou mêmebeaucoup
de colons lesignorent,
c'est que ces forêtssont loin des routes, loin des centres habités, et
qu'elles
sont, encore, engénéral,
lerefuge
de ces tribus berbères qu'aucun pouvoir n'ajamais
sou¬mises et que nous ne pouvons que lentement
paci¬
fier.
On évalue la
superficie
des forêts existantes à 2.000.000hectares,
mais il est vrai quebeaucoup de
ces forêts ne sauraient être comparées à celles de
nos pays; si celles de cèdres sont de belles et hau¬
tes futaies, celles de
thuyas
sont à l'état de taillis, et les forêtsd'arganiers
sont de vastes déserts où de loin en loin se dresse le tronc tourmenté d'un de ces arbres.Au point de vue des essences, on peut classer les surfaces couvertes comme suit :
Chêne
liège
250.000; hectares.Cèdre 200.000 —
Chêne vert 400.000i —
Thuya
450.000 —Arganier
5*00.000 —Divers
(genévriers, pins,
essences secondaires) 200.0:00 —
Chacune de ces essences forme en
général
des massifs distinctshomogènes,
en sorte qu'à chacune correspond unerégion
particulière du Maroc. On peut, à ce point de vue,distinguer
dans le pays lesrégions
suivantes :1° La
région
deplaines
et de plateaux du Maroc occidental, où l'on rencontre surtoutle chêneliège;
2° La
région
duMoyen-Atlas
et du Grand-Atlas central, habitat du chêne-vert et du cèdre;3° La
région
de l'Atlas occidental, qui est surtout celle duthuya;
4° Enfin, la
région
du Sous dont l'arbre caracté¬ristique
estl'arganier.
Nous étudierons dans cet ordre ces régions si dif- férentes
d'aspect
et leurs forêtscaractéristiques.
I. — Les
régions
duchêne-liège.
Les forêts de
chêne-liège,
qui s'étendent surplus
de 250.00ùhectares, sont toutes situées sur le vaste
plateau qui,
des premières pentes duMoyen-Atlas,
aboutit à
l'Atlantique
entre Casablanca et Kénitra.Le
chêne-liège
forme plusieurs massifs distinctsd'inégale importance,
mais leplus
grand (et leplus
connu des massifs forestiers marocains) est la forêt de la Mamora. Cette forêt est, en effet, aux portes de Rabat; elle forme un
rectangle
grossier dont le petit côté, parallèle à la côte entre Rabat et Kénitra,a 30 à 40 kilomètres, et le grand côté, qui va de la mer a l'Oued Beht a plus de 60 kilomètres. Sa
superficie est de 130.000 hectares; c'est dix fois la forêt de
(Fiontainebleau,
ou la moitié de l'ensemble des forêtsalgériennes.
Cette forêt est constituée dechênes-liège
et depoiriers
sauvages. Cette forêt n'a jamais été exploitée d'unefaçon méthodique;
elle était dévastée inconsidéremment par les charbon¬niers marocains et non entretenue; le service fores¬
tier, qui a entrepris l'œuvre de restauration ration¬
nelle de la forêt, a dû prévoir un
long
programmed'aménagement
:démasclage
des arbres assezjeu¬
nes pour pouvoir produire du
liège
etrecépage
des vieux arbres.A l'heure actuelle, les forêts de
chênes-liège du
Maroc produisent peu de
liège. Rappelons
en effet que l'écorce naturelle de l'arbre(liège
mâle), trop peuélastique,
ne peut être utilisée que parquelques,
industries spéciales : confection debriques,
de car¬reaux isolants, fabrication de
calorifuges
et de lino¬léum,de etc. Le véritable
liège
commercial est leliège
reproduction.,Le
démasclage
consiste à enlever l'écorce natu¬relle pour provoquer la production du
liège.
Ce dé¬masclage
doitse faire, normalement, quand l'arbrea 70 ou 80centimètres de tour,c'est-à-dire,
au Maroc,vers
l'âge
de 25 ans. La première récolte deliège
se fera
lorsque
sonépaisseur
atteint 27 centimè¬tres, c'est-à-dire, 8 à 10 ans
après
ledémasclage.
Un arbre donne de 8 à 15'
kilogrammes
deliège
àchaque
récolte.Le
démasclage
n'aguère
commencé, au Maroc,, que pendant la guerre;beaucoup
d'arbres sont trop, vieux et doivent être coupés pourrégénérer
la forêt parrecépage.
Plus d'un million d'arbres sont àrecé- per dans la seule forêt de la Mamora. En consé¬quence, la production en
liège
du Maroc est encorefaible (1.500 tonnes environ, valant 2.4Û0.000 francs
en 1916), mais progressivement cette
production,
s'accroîtra; elle pourra êtredécuplée
quand la forêtaura atteint sa
pleine production.
Le Maroc devien¬dra, de ce fait, un centre producteur de
liège
d'une très grosseimportance.
Le
liège
n'est d'ailleurs pas le seulproduit
de lan forêt. Sa carbonisation fournit en effet un excellent, charbon. Or, le charbon de bois estpratiquement
le seul combustible
domestique
connu desindigènes
dans les villes du Maroc, le charbon de
chêne-liège,
dur et dense,
jouit, près
d'eux, d'une faveur touteBULLETIN DE L'INSTITUT BU PIN — N° 43 - décembre 192? 275
spéciale; c'est
pour se procurer ce charbon que lesindigènes
saccagent sans scrupules lesforêts. Au¬
jourd'hui, les charbonniers utilisent uniquement les
bois abattus pour
le
recépage. Le poirier
sauvageconcourt aussi pour
la fabrication
ducharbon. On
consomme annuellement 120.000 tonnes environ de charbon de bois au Maroc. Cette consommation
pourrait être
accrueconsidérablement
parl'emploi
du charbon de bois dans les
gazogènes.
Du
chêne-liège du (Maroc,
onretire enfin du tan¬
nin; c'est dansle liber que se trouve
cette matière et
on la récolte sur les arbres abattus; la
production
annuelle est environ de 500 tonnes; elle est utilisée dans les tanneries marocaines.
II. — Le
Moyen-Atlas.
Les
forêts de cèdre et de chêne vert.
—Le centre
forestier le
plus important du Maroc
estle fameux
nœud
hydrographique du Moyen-Atlas, duquel
sor¬tent les
grands oueds marocains
:l'Oum
erR'bia,
l'Oued el Abid, la
Moulouya, le Sebou, l'Oued Beth,
pays
des Beni-Mti
r,des Beni-Mguild, des Zaïans,
des Chleuhs du Tabla, berbères
superbes et indé¬
pendants.
Grâceà l'humidité, à laneige
qui les
couvrelong¬
temps, ces
massifs forestiers sont puissants et den¬
ses. Quand les
conditions politiques seront deve¬
nues meilleures et que
la sécurité qui règne dans
le Maroc du Nord
régnera dans cet admirable
pays, il deviendra certainement le centre touristiquele plus fréquenté du Maroc
enété;
sespaysages/par
leur fraîcheur et la
puissance de leur sylve, peuvent
rivaliser avec les plus
beaux coins du Massif Cen¬
tral ou des
Vosges.
Quand le voyageur,
partant de Meknès, après
avoir escaladé la falaise rocheuse d'El
Hajeb et
parcouru
le plateau désolé qui fait suite, arrive
brusquementun peu
avant le poste militaire de Ito,
au-dessus des falaises
qui dominent la haute vallée
du
Tigrira, il
nepeut retenir
sonadmiration devant
le
spectacle merveilleux et si
rare enAfrique qui
s'offre à sa vue; vers, l'Ouest, à 250 ou
300 mètres
au-dessous du
plateau, la vallée s'étend à perte de
vue, une vallée tourmentée
où les pitons géométri¬
ques
de volcans éteints et des aiguilles de rochers
rouges
surgissent de champs de lave étrangement
mêlés de
prairies vertes et de champs d'orge. En
arrière, la vallée estdominée de
ci, de là,
parla cime
de
quelque ancien volcan, et recouverte
parla ma¬
jestueuse forêt de cèdres et de chênes verts.
De suite
après Asrou,
aufond de la vallée, la
route
pénètre dans la forêt. Tout d'abord (vers 1.800
mètres d'altitude, on nerencontre que
le chêne
vert,en futaie très dense,
parfois
presqueimpénétrable;
ce n'est que vers
1.5tOO mètres
quele cèdre apparaît mélangé
auchêne
vert et auchêne zéèn
; rare d'abord, le cèdre devient deplus
enplus abondant
à mesure que
l'on s'élève;
il domine au-dessus de1.700 mètres et subsiste seul aux hautes altitudes
(jusqu'à 2.500; mètres). Le chêne
vert atteint30 mè¬
tres de hauteur et 2 mètres de tour. Son bois est lourd et résistant, il sert pour le
charronnage,
et,depuis quelques années,
comme traverses deche¬
min de fer (40.000 traverses en 1925-26). Il
produit
enfin, parcarbonisation,
unexcellent charbon,
sur¬tout consommé à Fez et à Meknès.
Le cèdre de l'Atlas (Cedrus Atlantica), très voisin du cèdre du Liban, est un arbre
magnifique; il
at¬teint 40 mètres de hauteur et 8; mètres de circonfé¬
rence, sa croissance est assez rapide. Il a été, de
tout temps, exploité par les
indigènes
commebois
de construction; son bois est, en effet, clair, rési¬
neux et Gdorant,
grossièrement débité
etéquarri à
la hache par les
indigènes,
il est transportéà Fez
ou àMeknès et largement
utilisé
dans les construc¬tions. Le baume dont il est
imprégné lui
donnela propriété précieuse d'être imputrescible
etd'avoir
une durée presque
illimitée. Malheureusement,
son défaut de résistancemécanique oblige à multiplier
les
pièces qui doivent supporter les charges.
Les forêts de cèdres de l'Atlas ont de tout temps
été dévastées par
les incendies allumés
parles ber¬
gers
désireux d'accroître les pâturages,
ou parles pratiques barbares des bûcherons eux-mêmes qui,
pour abattre les gros
arbres, allumaient à leur pied
de grands
feux, entretenus jusqu'à
ce quel'arbre
tombe.
L'œil est attristé constamment par
la
vuede
ces espacesdénudés, laissés
parl'incendie dans la
mer¬veilleuse forêt. L'un des
premiers soucis de l'Admi¬
nistration desEaux et Forêts a été d'interdire l'aba- tâge par
le feu,
enmême temps
quele
pacagedans
les forêts incendiées ou en
exploitation, jusqu'au
moment où le
repeuplement est obtenu. Le résultat
de ces sages mesures a
été la disparition à
peuprès complète des incendies dans les régions soumises
à l'autorité
française.
Heureusement, et contrairement à ce
qui
se pas¬se au Liban, la forêt de cèdres de
l'Atlas
serepeuple
d'elle-même et lé mécanisme de ce
repeuplement
est assez curieux pour
être signalé. Les graines de
cèdres ont besoin d'ombre et d'humidité pour ger¬
mer. L'ensemencement sur le terrain nu laissé par l'incendie, ne donnerait aucun
résultat; heureuse¬
ment que,
même dans les forêts d'altitude, où le
276 BULLETIN LE L'INSTITUT BU PIN — N° 43 -Bécembre 192?
cèdre seul se montre, vit à son ombre, à l'état de buisson, le chêne vert. Quand t'incendie est
passé,
les souches de chêne donnent des
rejets
qui,grâce
au soleil que n'arrêtent plus les branches d'arbres
plus
grands, poussent rapidement. Au bout de quel¬ques années, une jeune forêt de chênes verts vient ainsi remplacer la (forêt de cèdres
disparue.
Mais àl'ombre de ces
jeunes
arbres, lesgraines
de cèdre, apportées par le vent des forêts voisines, trouvent les conditions convenables pour lagermination,
dejeunes
cèdresapparaissent
donc qui,rapidement, dépassent
de leur tête la cime des chênes protec¬teurs —
quelques
années encore et les cèdres cou¬vrent à leur tour de leur ombre les chênes verts
qui,
eux, repassent à l'état de vie ralentie
jusqu'au jour
où l'incendie ou
l'abataige
vient à nouveau les libérer.La forêt de cèdres
produit,
nous l'avons dit, du bois d'oeuvre. En 1925-26, les bûcherons ontexploité
70.000 madriers de cèdre, valant 4 millions de francs. Des exploitations
européennes
fonctionnent depuisquelques
années à Aïn-Leuh (tr. source des planches); ellesexploitent
les arbres sous les direc¬tives du service des Eaux et Forêts en vue d'une
régénération méthodique
de la forêt. Quand le cèdreest
trop
vieux, en effet, son tronc n'est plus sainet il cesse d'être utilisable pour la construction.
Parmi les
géants
de laiforêt, il faut souvent en abat¬tre deux ou trois avant de trouver un tronc sain valant la
peine
d'être débité et transportéjusqu'à
Meknès ou Fez. C'est donc un
problème particulier
qui se pose auxexploitants
: comment utiliser ces masses de bois quelaisse l'exploitation
derrièreelle dans la forêt de cèdres ?
La carbonisation du cèdre, en vue de la fabri¬
cation du charbon seule, n'est pas intéressante : le charbon de cèdre est très
léger
et friable, les consommateurs ne l'achètentqu'à
unprix
assez inférieur à celui du charbon dechêne-liège,
et peu rémunérateur pour lesexploitants,
par suite dej'éloignement
des paysproducteurs.
Au contraire, une industrie
indigène
assez floris¬sante est celle du goudron de cèdre. Le goudron,
produit
parla
distillation du bois de cèdre, est cons¬titué surtout par le baume contenu dans le bois.
Ce baume (l'huile de cèdre)' est au point de vue
chimique,
extrêmement voisin de celuique l'on peutextraite des
Junipérus
(huile de cade); le goudronde cèdre a donc des
propriétés thérapeutiques
très voisines de celles de l'huile de cade. Aussi les indi¬gènes l'emploient-ils
abondamment et couramment pour une fouled'usages
médicaux, en même temps que pourl'imprégnation
de leurs toiles de tentes.Le
goudron
de cèdre a, enconséquence,
une assez, grosse valeur au Maroc et faitl'objet
d'une indus¬trie locale assez active. Les
indigènes
quiprati¬
quent cette fabrication n'utilisent pas
n'importe quel
bois, mais seulement les vieilles souches de cèdre et en particulier les souches des très gros ar¬bres abattus par
le
feu. Dans ces souches, comme dans celles de pins, il seproduit après l'abatage
une
prolifération
desproduits
résineux; la propor¬tion d'huile de cèdre, qui
était
de 3 à 4 % dans le bois fraîchement abattu, s'élève à 6 ou 8 %. etpeut- être plus, dans les souches vieilles. C'est donc cebois «gras » que
les goudronniers
chleuhs recher¬chent pour leur industrie. Avec des instruments
primitifs,
ils détachent des copeaux de bois gras dela souche restée en
place;
ilsdisposent
ces copeauxen une sorte de petite meule
n'ayant
pasplus de
1 mètre de diamètre, au-dessous de
laquelle
un plancherimperméable
conduit legoudron d'écoule¬
ment vers un petit réservoir
disposé dans
le sol.Sans doute ce procédé primitif pourrait être de
beaucoup perfectionné,
parl'emploi
de meules mé¬talliques
mobiles oud'appareils
de distillation en vase clos. Cesprocédés
de carbonisationpourraient
porter non seulement sur les souches, mais encore sur les déchets abondants del'exploitation.
Mais,cette industrie devrait alors
envisager
l'utilisation rationnelle du charbon de cèdrequi,
nous l'avons dit, est peu prisé pourles
usages locaux. Sans douteun gros
débouché
pourle charbon
de cèdre pourrait être trouvé dans son emploi pour lesgazogènes après agglomération.
Nous
indiquerons plus loin
quel'emploi
du boisde cèdre en
papeterie
nous semble duplus
vifinté¬
rêt. D'autre part,
enfin,,
depetites
installations reti¬rent des sciures de cèdre, par la vapeur d'eau, cette
essence de cèdre
qui l'imprègne
etpossède
des pro¬priétés pharmaceutiques précieuses.
En résumé, la forêt de cèdres, outre sion intérêt
touristique de premier
ordre, doit êtreregardée
comme le grand
réservoir
de bois du protectorat —par une
exploitation
rationnelle, par sonrepeuple¬
ment et son extension, elle est
capable
defournir
annuellement un tonnage
élevé
deproduits ligneux
ou de dérivés.
III. — L'Atlas oriental et la
forêt
dethuya.
Le
thuya
se rencontre un peu partout au Maroc,mais il ne forme des massifs
homogènes
quedans
le Grand-Atlas, où il constitue de vastes boisements, soit à l'état pur, soit en
mélange
avec le chêne vert à l'est, avecl'arganier, à
l'ouest. Lamajeure partie
BULLETIN DE L'INSTITUT DU PIN — N° 48 - Décembre 192? 277
dela
région
couverte par cette forêt est encore habi¬tée par les tribus dissidentes (Ida ou Tanan), mais
une
piste de
caravanes assezsûre,
mais très dure,unissant Teroudont à Marakech, par
Bigoudine
etImin' Tanout, permet
de
la traverser dans toutesa
largeur
enutilisant
la longuedépression de
l'oued salé d'Aït IMoussi et le col de Tizi Maachou.
Pour
l'Européen
hypnotisé parle
motde forêt,
nette traversée est une assez forte
déception,
carsi
le
thuya
est normalement un arbre élevé atteignant15 mètres de hauteur avec une circonférence de 1
a 2 mètres, dans cette
région où
seul il pousse sur les flancsabrupts
etbrûlés des montagnes, il
nedépasse
que rarement2 mètres de haut. Le thuya produit
unerésine très claire
etdure, la
san-daraque, dont la valeur
est assezélevée (8 à 10 fr.
le kilo) et dont la récolte constitue à peu
près le
seul
produit d'échange de
ce pays.Aussitôt
qu'untronc de
thuya
atteint7 à 8 centimètres
dediamè¬
tre, il devient la
proie de l'indigène qui,
pour en retirer laprécieuse sandaraque, le blesse à mort.
Cette résine, en effet, s'écoule du tronc du
thuya
quand on entaille cetronc. Lesindigènes produisent
ces blessures avecdes haches
grossières
et,de
tempsen temps,
allongent
cesplaies
pour provoquerde
nouveaux écoulements. Un arbre
plus âgé pourrait
sans doute supporter assez
longtemps
cerégime
et
produire beaucoup plus de résine, mais le
man¬que
d'organisation et la
concurrencepoussent le
résinier chleuh à
exploiter les arbres qu'il
rencon¬tre dès
qu'ils
sontsusceptibles de produire
un peu de résine. Il en résulte quela forêt
esteffroyable¬
ment
saccagée
et ne peutguère dépasser le stade
d'un taillis. Les
plus beaux thuyas
que nousavions
vus,nous lesavonsrencontrés
près
deTamanar,
sur la route deMogador à Agadir. Grâce à la protec¬
tion, très relative d'ailleurs, d'un marabout, des
thuyas ont
pu, sur unpetit
espace,atteindre 4
ou•5 mètres, mais en dehors de cette zone
sacrée, la
forêt reprend
l'aspect d'une brousse
nedépassant guère la hauteur d'un homme. Malgré cette exploi¬
tation inconsidérée, cette forêt fournit annuelle¬
ment
plus de 500 tonnes de
gomme,valant plus de
4 millions de francs. En dehors de la résine, le
thuya fournit
unbois très recherché
enébénisterie
:ce bois,
appelé
« arar » parles indigènes, est très
dur, bien veiné et odorant;
il prend
unbeau poli
et est
imputrescible
:il est utilisé
pourla confection
de ces
jolis meubles qui
sefabriquent dans la ré¬
gion
deMogador. Les indigènes emploient égale¬
ment les
perches de thuya (perches de 1 à 3 mètres
grossièrement équarries)
pourleurs contractions;
sces
perches, mises côte à côte et recouvertes de
paille
et depisé,
constituent lesplanchers
des éta¬ges ou
soutiennent
le sol des terrasses.Le thuya fournit
également,
parcarbonisation,
du charbon et du
goudron, charbon dur
ettrès
re¬cherché, et
goudron qui
concurrencecelui du cèdre.
Ici encore, au moins dans la
partie soumise
ànotre autorité, l'Administration forestière a entre¬
pris la
restauration
dela forêt
parle recépage des
vieux arbres
saccagés
etl'interdiction de résinàge
des
jeunes rejets. Cette interdiction doit être
pour¬suivie, pensons-nous,
jusqu'à l'âge où l'arbre
ades
chances de
pouvoir être résiné
commele pin, d'une façon continue,
sans que cetraitement
provoqueson
dépérissement. Mais cet âge
nedoit
pasêtre
inférieur à 20 ans, il ne saurait donc être
question
de
généraliser immédiatement
ces mesuresqui ôte-
raient à
beaucoup d'indigènes leur seul
moyen d'existence; il faut échelonner le recépage etla régénération de la forêt
sur unepériode de temps
assez longue,
mais
on peutespérer
que,menée à
bien avec méthode et
énergie, elle dotera
ce pays d'une vraie forêt dont le revenu, en résine et enbois, peut
être escompté très élevé.
IV. — Le Sous et
l'Arganier.
La
région
duSous, située
ausud du Grand-Atlas,
entre cette haute chaîne et celle moins élevée, mais
encore bien peu connue de
l'Anti-Atlas,
est encore fermée auxEuropéens.
Elledoit certainement à
ce fait, et aussi au voyage
historique de la Pan¬
thère à
Agadir, la renommée dont elle jouit. En
réalité, lamajeure partie du Sous
neserait qu'un
horrible désert où nul être vivant ne
pourrait sub¬
sister si un arbre
singulier, spécial
au payset qui
ne semble pas
pouvoir s'acclimater ailleurs,
ne ve¬nait assurer, aux habitants, assez nombreux, de ces
régions,
unevie, malgré tout précaire. Nous
avons visité ce payspendant l'été de 1927. A cette époque,
il
n'y avait pratiquement
pasplu depuis quatre
ans.Les hordes affamées des « hommes bleus »
qui, quittant leur
paysde liberté allaient
versle Nord,
vers le rouini dont on ne
peut souffrir la domina¬
tion mais
qui,
toutde même fournit des grains quand la faim plane
surle désert;
cesbandes qui,
passant
l'Atlas,,
vonttomber
commedes sauterelles
sur les moissons abondantes du Nord,
témoignaient
du nombre élevé des habitants que
recèlent
cesrégions
encoremystérieuses du Sud. Si l'on excepte
les abordsimmédiats de deux
maigres oueds (l'oued
Sous et l'oued Massa) ou
quelques oasis fortifiées
comme celle de Tiznit, le pays, au
moins pendant
les
fréquentes années de sécheresse,
neprésente
278 BULLETIN DE L'INSTITUT BU PIN — N° 43 -décembre 192?
aucune 'culture; en
beaucoup d'endroits,
ilprend
tout à fait
l'aspect
saharien avec les plaines infi¬nies de sable rouge et de cailloux, traversées par
les
pistes quejalonnent
despierres
et, de loin en loin,les ossements blanchis de
quelque
chameau tombélà. La seule
plante
vertequi
pousse naturellementsur le sol de ce désert est
l'euphorbe
cactoïde,dont les touffes
étranges
couvrent en certains en¬droits de
grandes étendues.
Cetteplante
est d'ail¬leurs très redoutée des indigènes car elle secrète
un latex doué de
propriétés
vésicantes. Peut-êtrece latex, très abondant, serait-il
susceptible
de cer¬taines
applications.
L'arbre-providetïce
de cetterégion
estl'arganier.
Cet arbre
(argania sideroxylon,
de la famille dessapotacées)
est certainement leplus curieux
du Maroc; il pousseuniquement
dans le Sous et dansla
région
du Sud deMogador. C'est
un arbre d'as¬pect
très pittoresque,
toujours vert, à feuillesépi¬
neuses, au tronc extrêmement tourmenté, souvent formé de tiges entrelacées et soudées ensemble, aux branches horizontales, fortes, basses et très éten¬
dues, il
rappelle
assezl'aspect
detrès vieux
oliviers.Ses fruits,,
également,
ressemblent à de grossesoli¬
ves : une
pulpe
verte assez épaisse recouvre un noyau très dur contenant lui-même une amandeoblongue, amère,
riche en huile.On commence à rencontrer
l'arganier
au Sud de Sali; il devient abondant au Sud deMogador,
maisses forêts sont, dans cette
région, très
dévastéespar les charbonniers; il est là plus ou moins mé¬
langé
authuya
et au,genévrier
dePhénicie.
Dansle couloir étroit entre l'Atlas et la mer, par lequel
se
glisse
lapiste d'Agadir, l'arganier existe
encore mêlé souvent augenêt,
à la lavande, et àl'euphorbe
cactoïde, mais battu parles
vents, il prend ici l'as¬pect en parasol retourné de nos
pins des
dunescô-
tières. C'est le Sous
qui
estle
véritablehabitat
del'arganier.
Il recouvre, à l'état il est vrai souvent trèsdispersé,
toute cetterégion;
toute la partie oc¬cidentale de l'Anti-Atlas et les
parties basses de
l'Atlas sont peuplées
d'arganiers qui atteignent à
certains endroits 6 ;à 8 mètres de haut, et couvrent
une surface d'un diamètre souvent double ou
triple.
L'arganier,
avons-nous dit, estI'arbre-providence
de ce pays :
les chèvres
et les chameaux, les seulsanimaux
domestiques
dela région,
vivent en effet idel'arganier;
cen'est
pas undes points les moins
pittoresques; du pays quede voir des chèvres qui, grimpées
sur lesarbres,
en broutent les feuilles.Les chameaux se nourrissent des fruits, les arga-
nes, et dans les
déjections
de ces animaux, les in¬digènes
vontrechercher
et recueillir les noyaux;les femmesextraient de ceux-ci l'amande en les cas¬
sant entre deux pierres; ces amandes sont torré¬
fiées dans des plats de terre,
puis écrasées,
et pétriesavecde l'eau chaude; il s'en
sépare
une huilequi
estrecueillie par
décantation.
L'huiled'arganier
estpra¬tiquement la seule matière grasse que
les indigènes
aient à leur
disposition
dans le pays,; c'est doncpour eux un aliment de
première
nécessité, dont ilssont d'ailleurs très friands; c'est une huile de cou¬
leur ambrée, d'odeur et de
goût
assez forts quiré¬
pugnent aux
Européens.
Le rendement en huile est d'ailleurs très faible : l'huile constitue en effet 5'G% dupoids de l'amande,
mais seulement 6 °/i dupoids
du noyau et
1,1 %
dupoids
du fruit total.L'exploi¬
tation de
l'arganier à
ce point de vue ne présentedonc aucun intérêt pour
les Européens. Le
boisd'arganier
esttrès
dense et extraordinairement dur.Il n'est
guère utilisé
que parles charbonniers qui
en tirent un charbon lourd, d'excellente
qualité. La
distillation en vase clos de ce bois
pourrait donner
d'excellent charbon pour
gazogène.
Son bois
pourrait être
sans doute avantageuse¬ment utilisé en menuiserie. A ces titres,
l'arganier pourrait avoir
quelqueintérêt
aupoint
de vuein¬
dustriel, mais il ne faudrait pas que
les emplois-
industriels entraînent la dévastation des forêts d'ar¬
ganier, absolument indispensables
à la vie pour cesrégions déshéritées, privées d'eau,
etqui
ne peu¬vent
espérer être jamais irriguées,
carles massifs
montagneuxqui les encadrent
sontaussi
secs que laplaine.
A
l'arganier
estassocié,
dans une bonnepartie
du Sous, et dans la
région de Mogador,
uneplante
quin'est
pasà
proprementparler
unarbre, mais- plutôt
un arbusteépineux,
qui mérite une men¬tion pour son
intérêt industriel actuel
:cette
plante*est le tizra ou
faux
samac(rhus pentaphylla)
;c'est
un arbuste
épineux qui
nedépasse
pas3 à 4 mètres
de hauteur; son tronc,,qui
atteint 0
m.i50 à 0
m.60'
de diamètre, est d'un rouge
foncé; il contient
cou¬ramment 30% detannin. Cette richesse entanninl'a fait
exploiter intensément dès
avantla
guerre.Le
tizra était
répandu jusque dans le Maroc du Nord,
mais les boisements du Maroc oriental (chez les Beni-Snassen) ou ceux des environs de Rabat, où Je tizra vivait en
mélange
avecle chêne-liège,
ontété rapidement épuisés
parl'exploitation intensive. Au¬
jourd'hui,
cetteexploitation
sefait dans
larégion
de
Mogador.
Le port deMogador
estencombré
par d'énormes amas de ce bois à tannin; 10.000 tonnes- sont exportées annuellement, et on comptequ'à
cette allure toute la
région
seraépuisée
entizra'
avant deux ans. Le Sous seul offrira encore une pos-
BULLETIN DE L'INSTITUT BU PIN — N° 43 - décembre 192? 279
sibiliti
d'exploitation
qui sera, sans doute, assez ra¬pidement
épuisée elle-même. Le tizra étant d'une■croissance extrêmement lente, on ne peut espérer repeupler ses boisements et les soumettre à une ex¬
ploitation
rationnelle.Le développement possible des forêts du SViaroc»
Au Maroc, une sélection naturelle, assez rude, a
adapté,
nous l'avons vu, àchaque région,
laforêt
qui lui convient. Il semble quel'homme
doive suivrede
près
ces indications de la nature, s'il désire déve¬lopper les forêts.
Sonpremier rôle,
et le service desEaux et Forêts du Maroc l'a admirablement
compris,
est de
protéger la
forêt encore existante, de la re¬nouveler, la rajeunir et aider au
repeupleraient des régions dévastées.
Mais son deuxièmeobjectif
estde chercher à accroître les surfaces boisées. Sur les vastesétendues du Protectorat où l'on ne peut
espé¬
rer introduire aucune autre culture, il est du
plus
vifintérêt d'étendre laforêt, non seulement aupoint
de vue de l'intérêt local, mais encore et surtout pour retenir cette eau,
qui
enhiver ruisselle abondam¬
ment sur le sol rocailleux pour
aller enfler
démesu¬rément et en pure perte, les
oueds,
etqui fait
tantdéfaut au Maroc en été.
Dans tout le
plateau
duMaroc
occidental, c'estsans doute le
chêne-liège qui conviendrait
lemieux
pour
le reboisement, mais
il nesemble
pas, aupoint
de vue
économique, qu'il
yait
unvif intérêt à éten¬
dre ces forêts au delà de leur habitat actuel. Des
plantations excessives conduiraient
sansdoute, dans
l'avenir, à unesurproduction
enliège. Ce
qui man¬que surtout au
Maroc,
ce sontles bois
desciage.
Pour introduire dans le pays
des
essencessuscepti¬
bles de fournir ces
qualités
debois, il
y a unchoix
à faire,
qui fait l'objet de l'étude sérieuse
desservi¬
ces forestiers. Parmi les essences introduites au
Maroc, les diverses variétés
d'eucalyptus
etle mi¬
mosa semblent donner les meilleurs résultats. L'eu¬
calyptus
estsusceptible de fournir des bois d'oeuvre
ou de service,
qui
sont sansdoute de médiocre
va¬leur, mais sont d'une croissance extrêmement ra¬
pide.
iSa culture sur une
grande échelle permettrait d'envisager l'emploi de
cebois
enpapeterie
:l'euca¬
lyptus donne,
eneffet,
unepâte mécanique très éco¬
nomique
ettrès blanche,
avec unedépense réduite
de force motrice. Les mimosas poussent
également
très bien au Maroc; certaines variétés sont très re¬
cherchées par
Fin dûs trie' des matières tannantes.
Pour les boisements1 des
parties montagneuses* de
l'Atlas et du Rifï, il semble que l'on doit suivre de très
près
les indications, de la nature; la forêt de cèdreet de chênevert estpour le Marocune richesse inestimable; non seulement en doit aider à sa re¬constitution, mais on doit l'étendre à toutes les' ré¬
gions
où cette culture est possible.Malgré
sa fra¬gilité,
lebois
decèdre semble avoir, en effet,, des dé¬bouchés illimités; ce que la construction n'absorbe pas pourra être aisément absorbé par une industrie
papetière
locale; en fait avec le bois de cèdre une excellente cellulose à la soude; le rendement est élevé(49 %), et onobtient comme sous-produit,dans la proportion de 4 à 5 %, Vhuile de cèdre,produit
de haute valeur, susceptible de gros débouchés en
pharmacie et dans la confection de produits d'en¬
tretien. Le, enfin, que la papeterie ni la construc¬
tion ne pourraient absorber, pourrait être distillé,
en vue de la fabrication de
goudron
de cèdre et de charbon; ce dernier,aggloméré,
donnerait un excel¬lent combustible de
gazogène.
Il semble
possible
d'accroître considérablement la surface des forêts de cèdres dans tout leMoyen-
Atlas et 1e, Haut-Atlas, ainsi que dans le Riff.
Une essence paraît pouvoir être
également
assez fortementrépandue
dans ces mêmesrégions, c'est
le
pin d'Alep dont
on trouve d'assez importants peuplements dans laHaute-Moulouya.
Le pin
d'Alep
aété
essayéégalement
etparaît
bien réussir dans la
large région
de dunes mouvan¬tes qui entourent
Mogador.
Contrairement à cequ'on aurait pu
espérer,
le pinmaritime, qui réus¬
sit si bien dans les dunes françaises ou
portugaises,
n'a pu
jusqu'à
cejour
être introduit avec avantagedans cette
région. L'exploitation
au Maroc de largesforêts de
pin pourrait
apporter au paysdes
res¬sources intéressantes, au double point de vue de
la résine et du bois.
Le genevrier de Phénicie a donné de bons résul¬
tats pour le
peuplement
des dunes deMogador
; c'est là uneespèce intéressante
à la fois pourle
bois et pour les produits de distillation (huile de cade). Dans l'Atlas occidental et méridional, il sem¬
ble que l'on doive se contenter de
développer
la fo¬rêt de
thujm
qui y estadaptée,
mais nous avons vu que toute cette forêt doit êtrerégénérée
et que cetterestauration et
l'organisation
de sonexploitation
rationnelle demanderont de nombreuses années.
La
sandaraque
trouvera dans la confection des ver¬nis des débouchés
qui semblent devoir être très
vastes, et le bois de
thuya,
quand ilproviendra d'ar¬
bres plus gros et mieux
respectés,
trouveradans
l'ébénisterie des débouchés rémunérateurs.
Quant au Seus, il semble
qu'il
nesoit guère
pos-280 BULLETIN LE L'INSTITUT BU PIN — N° 43 -décembre 192?
sible ni désirable
d'y voir
pousser une autre es¬sence que
l'arganier.
En résumé, le Maroc
possède déjà des forêts
con¬sidérablement plus
étendues
quecelles de l'Algérie
et de la Tunisie; il tire de ces forêts, merveilleuse¬
ment
adaptées
au pays, des ressources importantes,malgré
quela plupart d'entre elles
aient été trouvées parl'Administration française
dans un état d'en¬tretien
déplorable.
La restauration de ces forêts, leur mise en valeur et leur exploitation méthodi¬que, en
même
temps' queleur développement aussi large
quepossible
sur les vastes territoires encoreincultes, sont de la plus
haute importance
pour l'avenir du Maroc, d'une part aupoint
de vue de larégulation
de sonrégime hydrographique, d'autre
part au pointde
vue de son avenir industriel.Les
Français
ont fait dans tous les domaines, auMaroc, une œuvre
splendide
que ne peuvent sedé¬
fendre d'admirer nos' ennemis eux-mêmes. Dans la question forestière comme ailleurs, l'œuvre des
Français
estdéjà considérable
et les résultats éton¬nants; sous
l'impulsion de chefs
et de cadres éner¬giques
etéclairés,
cette œuvre ne manquera pasde
se
développer
pour leplus
grandbien
du pays.VERRERIE SPÉCIALE POUR PHARMACIE ET CHIMIE
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