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(2e Série)
Paraissant le 15 de chaque mois. 15 Octobre 1932.Abonnement France. 35 fr.
auBulletin (unanj j Etranger. 50 fr.
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Le Numéro.
BULLETIN
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France... 3f 50 Étranger. 5f >
L'INSTITUT DU PIN
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agronomiques
et rattaché à la Faculté des Sciences de Bordeaux /'O
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I. Articles originaux
SOMMAIRE
Pages A I 62 Le Commerce etl'Industrie du bois des
Landes, parM. Paul Duboscq 217
D I 53 La Colophane, huiles de résines, appli¬
cation diverses, par M. L. Dulou... 228
G I 20 La culture du cLêne-liège. La fabrica¬
tion desbouchons, son écoulement,
parM.Laboille-Moresman 233
Pages G I 21 Etat actuel de la question du pavage en
bois,par M. Boutteville 238
II. Petite Documentation
B II 16-17 Petite Documentation 240
J
fïODH DH CIlHSSIplCHTIOR DE (SOS DOCUJWEHTS
Généralités.
B. Récolte et traitement des résines.
C. Essences de térébenthine, terpènes etdérivés.
D. Constituants solides des résines et leurs dérivés.
/ Articles originaux.—IIDocumentation.
E. Dérivés chimiques du bois.
F. Cellulosëde bois.
G. Documentsdivers.
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BULLETIN
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L'INSTITUT DU PIN"
Sous le contrôle de l'Institut des Recherches agronomiques
et rattaché à la Faculté des Sciences de Bordeaux
A i 62
LE COMMERCE
ET
L'INDUSTRIE du BOIS des LANDES1"
Par M. Paul DUBOSCQ
Président duSyndicat des Exportateurs de Poteaux de Mines du Portde Bordeaux et de ses Annexes
La vie de la forêt de pins maritimes dans le Sud-
Ouest de la France est déjà longue, son existence
remonte très anciennement dans l'Histoire, sans doute dans la préhistoire. Quand arrivèrent les Ro¬
mains en Aquitaine, ils trouvèrent que les Gaulois
tiraient déjà partie de la forêt, mais ce n'était pas
une exploitation. Pas la suite, l'invasion des Bar¬
bares, les incursions des Normands, les passages des Maures, la domination anglaise en apportant le
trouble et l'agitation dans ce pays ne facilitèrent
pas les possibilités d'exploitation. Colbert eut vrai¬
semblablement l'intuition des ressources que pou¬
vait offrir la région, encore celle-ci n'était-elle qu'in¬
complètement boisée et sommairement connue.
Puis, la Révolution, les guerres du Premier Empire
(1) De nombreux renseignements contenus dans ce rapport ont été fournis par :
MM. L. Dalbusset et P. Thébeaux (Syndicat des Exportateurs de Poteaux de Mines du Port de Bordeaux et de ses Annexes);
R. Brun (Syndicat des Fabricants de Caisses du Sud-Ouest); R. Duboscq et L. Salefran (Syndicat des Négociants et Exploi¬
tants forestiers de Bordeaux et du Sud-Ouest);
Bernadet, G, Lacave, R. Mondiet et Neurisse (Union Syndicale -des Négociants en Bois du Sud-Ouest).
Rapport présenté au Congrès de la Forêt et de sesIndustries, Bor¬
deaux, juin 1932.
éloignèrent les habitants de la Gascogne du souci
de l'exploitation forestière.
La Révolution pensa créer une large voie de navi¬
gation intérieure reliant l'Adour à la Garonne.
C'était une idée heureuse qui, réalisée, eût apporté
de grandes facilités à l'industrie et au commerce des Bois qui n'étaient encore qu'en gestation. Leurs premières manifestations d'existence ne datent que de 1850. Ils se développèrent largement depuis lors.
C'estce développement, c'estleur situation actuelle,
ce sont leurs besoins, leurs aspirations, ce sont les
moyens de leur permettre de mener une vie plus
active que nous allons envisager ici.
Nous examinerons successivement les grandes productions de la forêt landaise. Peut-être certains y trouveront-ils la révélation d'une situation qu'ils apprécient imparfaitement. Ce sera pour eux, assu¬
rément un prétexte impérieux de se joindre à nous et d'appuyer nos revendications.
PREMIERE PARTIE
I. — BOIS RONDS
Les bois de mines.
L'industrie et le commerce des Poteaux de mine bruts ou pelés sans écorce sont l'une des branches principales de l'activité économique dans la région
forestière du Sud-Ouest peuplée de pins maritimes.
La croissance de ces arbres étant rapide, les tiges
nombreuses et serrées, tantdansles plantations que
218 BULLETIN LE L'INSTITUTLU PIN — N°84 - Octobre 1982
dans les semis, réclamentau fur et à mesure de leur développement plus d'air et plus de lumière. Il faut
donc pratiquer des « éclaircissages » successifs. On parvient ainsi à former le peuplement définitif,
constitué par des « pins de place », c'est-à-dire par les arbres qui seront conservés jusqu'à la fin de la période d'exploitation résinière du massif.
Ces éclaircissages doivent être méthodiquement poursuivis; le développement normal de la forêt en
dépend. Ils ne donnent tout d'abord que des pro¬
duits de peu de valeur utilisés en majeure partie
comme bois de chauffage (bourrées, bois de boulan¬
gerie appelé faissonnats) ou pour la fabrication des piquets de vigne. Entre sa vingtième et sa trentième année, l'arbre atteint une grosseur suffisante pour permettre la préparation des « Etais » ou « Poteaux
de mines », destinés à éta}rer les galeries dans les
mines de charbon.
Cette conception sylvicole est faite de tradition,
mais aussi d'expérience. Si les poteaux de mine ont
été les premiers produits de la forêt de pins mari¬
times, c'est que dans cette région où n'existaient guère que des chemina de sable, les transports
étaient fort difficiles.
Les propriétaires cherchaient le revenu de leurs
forêts par le gemmage. Ils abattaient les jeunes sujets qui produisaient soit des bois de chauffage,
soit des poteaux de mine et gardaient les arbres
d'une plus forte grosseur pour les résines, le plus longtemps possible.
Dès cette époque, la forêt produisait deux sortes
de poteaux de mines : les « poteaux bruts » et les
« poteaux pelés ».
Poteaux bruts.
Les mines anglaises du Pays de Galles, en raison
de leur sous-sol, n'utilisent en grande partie que des poteaux revêtus de leur écorce; c'est en vue de
cette fourniture qu'est faite la fabrication des bois
dénommés « poteaux bruts », c'est-à-dire non écor-
cés et livrés tels qu'ils sont débités en forêt.
La fabrication est des plus facile et ne demande guère une main-d'œuvre très .spécialisée, puisqu'il
suffit une fois l'arbre abattu et ébranché, de le tronçonner en billes de deux longueurs suivant
le diamètre de la coupe. En effet, les bois de mines
utilisés par les Anglais ne comportent en général
que les longueurs suivantes :
Bois de 2 mètres (6 pieds et demi approximati¬
vement), diamètre 9 à 20 centimètres;
Bois de 2 m. 75 (9 piedsapproximativement), dia¬
mètre 12,5 à 25 centimètres.
Exceptionnellement et pour une quantité qui ne
dépasse guère 3 à 5» %, les mines anglaises utilisent
des bois de 4 mètres (13 pieds), diamètre : 17 à
33 centimètres. Enfin, pour des usages exception¬
nels, certaines mines utilisent des dimensions spé¬
ciales telles que des bois de 1 m. 38 (diamètre 9 à
15 centimètres) et des bois de 2 m. 30 (diamètre 10 à 18 centimètres), mais cela représente un ton¬
nage peu important.
Approvisionnement. — L'approvisionnement de
ces bois provient de trois sources :
1° Des éclaircissages comme nous l'avons déjà dit;
2° Des coupes rases d'arbres encore jeunes n'ayant pas atteint une dimension suffisante pour les bois d'industrie. Ces coupes rases étant prati¬
quées par certains propriétaires ou exploitants, soit
pour réaliser plus tôt une coupe mal venue, soit
en vue d'un programme d'exploitation spécial;
3° De la partie supérieure des arbres exploités en
bois d'industrie, cette partie étant trop mince pour les sciages et pouvant, lorsqu'elle ne comporte pas trop de nœuds, convenir parfaitement à la fabrica¬
tion des poteaux bruts.
La main-d'œuvre employée pour la fabrication
de ces bois n'est pas la même suivant qu'il s'agit
de bois d'éclaircissage ou de coupes rases.
Les éclaircissages ayant lieu pendant la période
de non résinage (novembre à mars), le propriétaire
utilise en général son personnel résinier pour l'ex¬
ploitation et le transport de ces arbres, et c'est
pour cela qu'en grande partie il dirige lui-même l'exploitation, vend ses bois une fois tronçonnés
aux négociants, soit rendus en gare, soit rendus
dans les ports.
Toutefois, certains propriétaires vendent les pins
sur pied aux négociants exploitants forestiers, mais
en général, ils demandent de réserver le travail de coupe et de transport à leurs métayers ou ouvriers gemmeurs, ceci afin de les occuper pendant la pé¬
riode de non résinage et de leur procurer un sup¬
plément de salaire indispensable surtout dans les
moments où, comme actuellement, le prix de la
gemme est peu élevé.
BULLETIN DE L'INSTITUT BU PIN — N°34 - Octobre 1932 219
Les pins provenant de l'exploitation des gros ar¬
bres sont naturellement façonnés par les ouvriers qui font le chantier du négociant qui exploite.
Enfin les bois provenant des coupes rases sont exploités par une main-d'œuvre qui, en général,
est utilisée toute l'année àce genre de travail, puis¬
que les coupes rases s'exploitent en toutes saisons,
et composée en grande partie d'ouvriers étrangers (principalement d'Espagnols), la main-d'œuvre lo¬
cale n'étant pas suffisante.
Après leur abattage, les bois sont tronçonnés aux dimensions usuelles (2 mètres, 2 m. 75 et 4 mètres)
et transportés par des muletiers en gare où, après
pesage, ils sont livrés sur les terrains de stockage
ou chargés directement sur wagon à destination du port expéditeur.
Toutefois, depuis la concurrence très vive faite
par le camion aurail, à la faveur des élévations suc-
. cessives des prix de transport par fer, il s'est créé
en forêt, au bord des routes, de nombreux dépôts
où les bois stockés sont pris par camions et menés
directement dans les ports.
De ce fait, il y a donc trois sortes de ventes de poteaux bruts :
1° Vente directe par le propriétaire de ses bois
sur pied aux négociants exploitants forestiers;
2° Vente des bois sur bascule dans les ports ou dans les dépôts en forêt;
3° Vente des bois rendus sur wagons Docks ou camions Docks.
En raison de l'intérêt que le propriétaire a à ex¬
ploiter lui-même et à transporter ses bois en gare pour utiliser sa main-d'œuvre, il résulte que près
des deux tiers de la production des bois bruts est
constituée par une infinité de petites livraisons
effectuées par les propriétaires; un tiers seulement provenant des exploitations faites directement par les négociants exploitants forestiers.
Les communes, elles-mêmes pour la plupart,
bien qu'elles vendent leurs bois d'éclaircissages par
adjudications, conservent pour les habitants de la
commune les travaux de coupe et de transport, le prix de vente s'entendantpour marchandise rendue
en gare.
Les transactions de ce commerce « poteaux
bruts » entre les propriétaires, les exploitants fores¬
tiers et les exportateurs s'effectuent principalement
dans les marchés qui ont lieu à jour fixe dans les
diverses régions : le lundi à Bordeaux, le samedi à
Dax et à Lesparre et le mardi à Mont-de-Marsan.
Le transport de la forêt au port d'embarquement
s'effectue de différentes manières :
1° Dans les contrées voisines des ports, les bois
sont livrés directement par des charrettes ou des
camions et déchargés, après pesage, sur les terrains
des docks;
2° La plus grande partie des bois des régions éloignées sont amenés par des muletiers, en gare et expédiés ensuite par fer. Toutefois, comme nous l'avons signalé, depuis ces derniers; temps des
camions vont charger en forêt jusqu'à une cin¬
quantaine de kilomètres des ports;
3° Certains bois arrivent par voie d'eau, ce qui
constitue une façon très pittoresque d'achemine¬
ment. En effet, les poteaux de mines produits dans
les environs de certaines rivières sont groupés en radeau et flottés jusqu'au point où ils sont ensuite,
soit embarqués sur chalands appelés « gabarres »
sur la Garonne, soit chargés sur wagon à Lamothe
suivant que les bois sont flottés sur le Ciron qui
débouche à Barsac, ou sur la Leyre qui coule le long de la gare de Lamothe. Ce mode de trafic tou¬
tefois diminue sensiblement et les statistiques des
livraisons des bois livrés par gabarres sont très net¬
tement en décroissance et tendent à disparaître. A Bayonne, depuis un an, elles ont totalement dis¬
paru et il est probable qu'il en sera de même à
Bordeaux d'ici quelques années.
Les statistiques ci-après établies pour les arriva¬
ges de « poteaux bruts » à Bordeaux démontrent
que la diminution du trafic n'a pas été la même
pour les différentes Compagnies de chemins de fer.
Arrivages
poteaux de mines à la gare de Bordeaux-Docks
en provenance des divers réseaux Trafic de 1929, 1930, 1931.
Années Midi
Economi¬ Voies ferrées des
Landes
(Orlal P.-O. Etat ques
(Gironde)
tonnes tonnes tonnes to'nres tonnes tonnes 1929.. 176.257 155.488 45.655 834 29.598 11.770 1930.. 131.678 169.581 39.939 608 22.056 10.416 1931.. 82.657 186.687 22.042 964 5.035 4.474
Si d'autre part on examine les arrivages d'autre
source (camions, charrettes, gabarres), dont la plus
220 BULLETIN 1)E L'INSTITUT BUPIN — N°34 - Octobre 1982
grosse partie provient des livraisons faites par camion, on s'aperçoit qu'elles ont été :
En 1929 de 123.000 T. contre 418.000 T. de wagons.
En 1931 de 131.000 T. — 373.000 T.
En 1931 de 112.000 T. — 220.000 T. —
soit donc proportionnellement de plus en plus
forte par rapport au chiffre total des expéditions
par fer.
Les bois, suivant les régions de provenance sont dirigés sur les divers ports d'embarquement.
Les bois de la région du Médoc sont expédiés par Pauillac, ceux de la Charente, de la Charente-Infé¬
rieure et de la Dordogne, par Blaye et La Trem- blade, les environs du bassin d'Arcachon par Arca-
chon, la région de Morcenx, Mont-de-Marsan et
Dax par Bayonne.
Tous les autres bois en provenance des Landes,
de la Gironde et du Lot-etGaronne, sont exportés
par Bordeaux. Enfin, à titre d'indication, nous
signalons que les bois de la région de Bretagne s'exportent par Nantes, Saint-Nazaire, Lorient, Hennebont, Morlaix, Vannes, Quimper.
La moyenne annuelle, avant guerre, des expor¬
tations par port était sensiblement la suivante : Bordeaux et ports de la Gironde .... 350.000 T.
Bayonne 125.000 T.
Divers autres ports de France 100.000 T.
Les statistiques des quatre dernières années 1928, 1929, 1930 et 1931 ont été les suivantes :
1928 1929 1930 1931
Bordeaux 394 50C 523.000 496.500 322.000
Blaye 58.500 63.000 65.500 40.000
Pauillac 40.600 42.000 46 600 15.000
La Tremblade 4.750 4.500 3.200 3.8')0
Arcaehon 56.600 51.200 37.500 31.500
Bayonne 171 200 140.200 97.600 48.700 Total 726.2C0 823.900 746.900 461.000 A iilre indicatif-.
Ports de Bretagne 111.000 56 500 33.600 15 820 Total 837 150 880.400 780.500 476.800 Il faut ici signaler les difficultés que présente
l'établissement de statistiques minutieuses. En An¬
gleterre, les poteaux sont comptés non à la tonne
mais au « load ». Or, le « load » est calculé à cinq
sixième de la tonne, sauf à Swansea où il n'est pris
que pour les quatre cinquièmes.
Comme ces chiffres le démontrent, c'est par le port de Bordeaux que se fait la plus grosse partie
des exportations.
Cela tient d'abord à ce qu'il est alimenté par une
région forestière beaucoup plus importante que les
autres ports et aussi à ce que son outillage pro¬
cure aux exportateurs des avantages importants.
D'autre part, et c'est une des principales raisons,
la majorité des vapeurs qui viennent décharger des
charbons se rendant dans ce port, l'armateur est
évidemment amené à rechercher un fret en sortie
sur place et consent par suite des conditions meil¬
leures.
Il n'est pas sans intérêt de signaler le perfection¬
nement de l'outillage. Le travail se faisait, il y a
quelques années encore, sans appareils automati¬
ques : par « élinguées » de 8 à 900 kilos, les mâts
de charge hissaient les poteaux le long des flancs
du navire, d'une façon très primitive.
L'outillage actuel pour le chargement des navi¬
res de poteaux de mines est extrêmement moderne,
le port autonome a}<ant installé sur la plupart des postes des grands appareils mécaniques qui ren¬
dent le travail beaucoup plus rapide, plus économi¬
que et moins fatigant pour l'ouvrier. Ces appareils
ont, en outre, l'avantage d'être munis de pesons
automatiques qui fonctionnent sans presque retar¬
der les opérations de chargement et qui permet¬
tront de ce fait, lorsque la crise économique aura
pris fin, de retourner aux conditions normales d'avant-guerre, qui pour ce commerce étaient vente
fob sur poids embarqué.
Conditions de vente. — Les ventes faites avec les mines anglaises sont actuellement régies par un accord fait à Paris, le 28 novembre 1924, entre le Syndicat des Importateurs anglais « Cardiff and
Bristol Channel Pitwood Importers Association
Ltd » et le Syndicat des Exportateurs de poteaux
de mines de Bordeaux et de ses annexes. Les con¬
ditions principales sont les suivantes :
Les ventes sont faites et livrées fob dans les ports d'embarquement, mais le règlement s'effectue sur le poids débarqué en Angleterre d'après certificat
de la Compagnie des Docks du Canal de Bristol,
sans déduction de déchet de route.
Les poteaux doivent être de qualité saine, loyale
et marchande et usuelle pour les mines, l'écorce
devant être adhérente. Les cargaisons sont compo-
BULLETIN DE L'INSTITUT DU PIN — N°34 - Octobre 1932 221
sées en poids, sauf accord particulier, comme suit :
50 % de bois de 2 mètres de longueur avec un diamètre de 9 à 20 centimètres.
50 % de bois de 2 m. 75 de longueur avec un dia¬
mètre de 12,5 à 25 centimètres.
Les diamètres s'entendent au petit bout, sous écorce.
Au cas de vente de poteaux de 4 mètres, ceux- ci doivent avoir 17 à 33 centimètres de diamètre (toutefois, en principe, les Anglais n'acceptent que
des bois de 20 à 30). Naturellement bien que ceci
ne soit pas spécifié dans la charte de vente, les
bois
doivent être de fraîche coupe, sciés d'équerre aux
deux extrémités, les nœuds étant bien abattus.
Prix de revient. — Les prix de revient des po¬
teaux bruts ont été très variables pendant ces der-4
nières années. A la faveur des demandes considé¬
rables faites pendant la période 1920-1926 les
prix
ont monté considérablement. Cela d'abord en rai¬
son de la cherté de la yie qui augmentait sans
cesse, ensuite parce que ce commerce étant
très
florissant, les augmentations ont été suppor¬
tées sans discussion et enfin parce que la main-
d'œuvre manquant, les exploitants ont sans cesse
fait monter les cours pour se procurer le personnel qui leur était nécessaire.
C'est ainsi que, comme on peut le voir, par le
lableau ci-dessous, les frais qui s'élevaient à 8 fr. 70 avant-guerre (1914) ont atteint, en moyenne,
45
fr.en 1924 et 67 francs en 1931.
Frais de laforêt àlagare.
Fraisde lagareauxports.
Fraisdesports Total
Quant, à la suite de la baisse de la livre sterling,
en septembre 1931, les cours des bois bruts se sont
effondrés et que par suite de l'avantage résultant
de la dépréciation de leur monnaie, les Portugais
et les Finlandais ont pu avantageusement concur¬
rencer les bois français sur le marché du Pays de Galles, les exportateurs du Sud-Ouest de la France
se sont aussitôt efforcés de comprimer tous leurs
frais en vue d'adapter le prix de revient de leur
marchandise aux conditions nouvelles du marché anglais. C'est grâce aux efforts conjugués de tous
les intéressés que ce prix a pu ainsi être diminué
d'une vingtaine de francs par tonne et qu'il n'est plus actuellement que de 48 francs environ.
Débouchés. — Depuis 1870 les mines galloises
ont manifesté pour les poteaux bruts français une préférence très nette qui s'est encore affermie pen¬
dant la guerre alors que les bois de la Baltique
n'arrivaient plus dans le canal de Bristol.
Les premières exportations ont eu lieu par
le
port de Bordeaux. A l'origine elles se
faisaient
pardes petits voiliers de 200 à 400 tonneaux qui
char¬
geaient presque uniquement par gabarres en
rade
devant les Quinconces et ce n'est que vers 1886 que l'on vit apparaître desvapeurs chargeant 1.000 ton¬
neaux. Le volume des exportations sur l'Angleterre qui, dès 1874 atteignit 100.000 tonnes, progressa
à partir de 1880 pour atteindre
200.000
tonnes en1885.
Puis la progression devint d'autant plus forte
que d'autres ports et Bayonne principalement se
mettent à exporter et, dès 1892, le tonnage atteint
500.000 tonnes dont 414.000 tonnes pour le port
de Bordeaux.
C'est sur ces bases que l'exportation se maintient jusqu'en 1918. Puis, lapériode d'après-guerre
ayant
été très favorable, les exportations augmentent et atteignent près d'Un million de tonnes en
1923
(687.000 T. rien que pour Bordeaux).
Malheureusement la grève des charbonnages an¬
glais de 1926 met fin à cette progression.
Toutefois
les chiffres cités plus haut prouvent que les ton¬
nages des années 1928, 1929 et
1930 furent
encoretrès importants (800.000 tonnes
environ) et
que cen'estqu'à partir de 1931 que, pour la
première fois,
les exportations n'ont pas atteint
500.000 tonnes
(461.000 tonnes exactement).
Depuis cette époque, la situation n'ayant
cessé
d'empirer pour les raisons que nous avonsindi¬
quées, il est à craindre que nos exportations
de 1932
atteignent à peine 256.000 tonnes.
Toutefois les mines anglaises ne furent pas les
seuls débouchés pour les bois de mines bruts.
A
plusieurs reprises, en effet, deslivraisons furent
faites en Espagne (Association Patronal de
Mine-
ros Asturianos).
De même, en France, il est arrivé, notamment pendant la guerre, que des mines
françaises telles
que principalement les mines de
Maries, Bruay,
1914 1924 1931 1932
2.95 16 » 24 » 16 »
3.75 19 » 28 » 19 »
2 » 10 » 15 » 13 »
8.70 45 » 67 » 48 »
222 BULLETIN DE L'INSTITUT BUPIN — N°34 - Octobre 1932
Blanzy, Saint-Etienne, ont consommé des poteaux
bruts provenant des Landes. Il faut toutefois recon¬
naître que ces livraisons n'ont guère été importan¬
tes et qu'elles n'ont jamais représenté plus de 5 %
des livraisons faites en Angleterre.
Il n'est pas inutile dans un travail de documen¬
tation comme celui-ci de donner un aperçu des prix
dans le passé. Voici depuis 1886 les cours généraux
F. O. B. :
1866 12 schillings.
1887-1893 10 —
1899 10/12 —
1902 13 —
1905- 14 —
1907 15 —
"
1909 14 —
1914 16 —
1919 30/50 —
1920 25/45
1921 24/30 —
1922 . 20/26 —
1925 18/20 —
1927 21/22 —
1930 20/22 —
1931 17/19 —
Poteaux pelés.
Les mines françaises utilisent presque exclusive¬
ment des bois pelés, c'est donc en vue de cette four¬
niture que se fait la fabrication des bois écorcés.
Cette fabrication est évidemment beaucoup plus
délicate que celles des bois bruts, car elle s'étend à
un très grand nombre de dimensions, qui exigent
soit une précision très stricte du diamètre au fin bout, soit des circonférences très attentivement res¬
pectées.
On peut assigner aux bois pelés les mêmes sour¬
ces d'approvisionnement qu'aux bois bruts, tout au moins en ce qui concerne les bois d'éclaircissage et
les bois de coupes rases car ceux provenant des
extrémités de bois d'exploitations sont naturelle¬
ment impropres à cette fabrication parce que trop
noueux.
Certaines exploitations se font d'une façon mixte, partie en poteaux bruts, partie en poteaux pelés, l'exploitant forestier lors du marquage des bois fai¬
sant réserver pour être pelés ceux des arbres qui
conviennent le mieux à cette exploitation.
Jusqu'à ces derniers temps, les poteauxpelés des¬
tinés presque uniquement aux mines du Centre de
la France ne réclamaient que des dimensions peu nombreuses et voisines des poteaux bruts; cela,
ainsi que la confusion créée par la fabrication si¬
multanée sur le même chantier de poteaux bruts et
de poteaux pelés, avait amené l'exploitant à procé¬
der à la fabrication d'une façon particulière à notre région.
Cette fabrication s'effectue généralement ainsi : L'ouvrier, après abatage et ébranchage, tronçonne
l'arbre en billes de différentes longueurs d'après le
marquage qui a été précédemment fait par un ouvrier spécial appelé marqueur. Ce n'est qu'après
ce tronçonnage qu'il écorce les diverses billes.
Les mines du Centre n'utilisent qu'un petit nom¬
bre de dimensions, nous l'avons dit; celles-ci sont déterminées par le diamètre au fin bout. Le système
de fabrication que nous venons d'esquisser ne pré¬
sente aucun inconvénient car dans les exploitations mixtes, les billes ne correspondant pas aux deman¬
des des mines françaises peuvent être utilisées soit
en poteaux bruts, soit en poteaux pelés, les plus
grosses allant au sciage, les plus petites aux usines
de pâte à papier.
Mais, par contre, pour la fabrication des bois pelés destinés aux mines du Nord de la France, il
est hors de doute que cette façon de procéder offre
de sérieux désavantages. C'est pour cela que le pro¬
cédé employé dans les autres exploitations françai¬
ses ou étrangères tend à se généraliser également
dans les Landes. Ce procédé consiste à faire écor-
cer l'arbre dans toute sa longueur sitôt après l'aba- tage et à le tronçonner ensuite aux longueurs con¬
venables,
Les houillères du Nord et du Pas-de-Calais utili¬
sant des dimensions plus variées (une centaine en¬
viron) leur spécification est basée sur le calcul de la circonférence prise au milieu du poteau; le pro¬
cédé précité est donc avantageux. Il présente tout
d'abord une simplification du marquage, qui néces¬
site autrement un très grand nombre d'ouvriers spécialistes pour ne pas retarder le travail du tron¬
çonnage et de l'écorçage des bois. De plus, ce mar¬
quage s'opère plus -facilement et supprime les
erreurs résultant d'une fausse appréciation de la
circonférence sous écorce. En outre, il permet une meilleure utilisation de l'arbre abattu, les fausses
BULLETIN BE L'INSTITUT BU PIN — N°34 - OctobrG 1932 223
coupes nécessaires pour redresser les bois étant plus faciles à déterminer. Mais surtout le principal avantage de ce procédé de fabrication est depouvoir
utiliser unemain-d'œuvre moins spécialisée. Or cela
est capital dans la forêt de Gascogne où, comme
nous l'avons déjà signalé, les propriétaires ont abso¬
lument besoin de réserver ce travail à leur main- d'œuvre, résiniers ou métayers.
La main-d'œuvre qui travaille aux poteaux pelés
est payée soit à l'arbre, soit au mètre cube, soit au mètre linéaire. C'est ce dernier mode qui est géné¬
ralement pratiqué avec comme base de salaire les prix suivants :
0 fr. 18 à G fr. 20 le mètre linéaire pour les bois
de 0 m. 10 à 0 m. 18 de diamètre au fin bout;
0 fr. 09 à 0 fr. 10 le mètre linéaire pour les bois
au-dessous de 0 m. 10 de diamètre au fin bout.
Si la fabrication des poteauxbruts s'effectue toute
l'année, celle des poteaux pelés se fait presque exclusivement pendant la période d'hiver (de no¬
vembre au 15 avril). En effet, les poteaux fabriqués
sur sève ne présentent pas les mêmes qualités : le
bois a mauvais aspect, sa résistance est moindre
ainsi que sa durée de conservation.
En outre, et cela présente un très grave inconvé¬
nient en raison des frais de transport dont cette
marchandise est grevée, les bois fabriqués sur sève
sèchent moins et leur densité reste toujours au- dessus de la normale.
La durée relativement courte de la période de
fabrication commande l'existence simultanée de chantiers nombreux et importants. Quand on con¬
sidère que la fabrication actuelle est de l'ordre de plus de 200.000 mètres cubes annuellement (y com¬
pris les bois de papeterie), que cette fabrication ne s'étend que sur les mois de non-résinage, décem¬
bre à février, on s'explique aisément l'importance
de la main-d'œuvre nécessaire, de 2.500 à 3.000 'ouvriers.
Une fois la fabrication terminée, les bois sont généralement disposés « en grille » sur chantiers.
Cette opération à laquelle on procède depuis peu de temps et qui est en voie de généralisation offre
de gros avantages quand elle est faite sitôt après l'écorçage des poteaux. Elle évite ainsi que le bois
reste au contact du sol, qui est souvent très humide l'hiver, et se détériore. En outre, cela permet par l'aération un séchage beaucoup plus rapide. Il est
indispensable, en effet, que les bois dont la densité
est de 1.100 kilos aumètre cube lors de leur abatage atteignent 575 à 600 kilos au maximum avant d'être transportés.
Ce n'est donc qu'une fois secs, àpartir de fin avril
ou début mai, que les transports commencent. Les poteaux sont apportés en gare par des muletiers;
ils sont après triage soit chargés directement sur wagons, soit mis à nouveau en réserve mais alors
en piles hautes, atteignant plusieurs mètres de hau¬
teur (généralement 4 à 5 mètres).
De même que pour le commerce des poteaux bruts, il y a de nombreux exploitants forestiers qui
revendent aux négociants, ceux-ci livrent directe¬
ment aux différentes mines. Toutefois ces derniers sont toujours eux-mêmes exploitants forestiers et
ils n'achètent généralement que les dimensions les plus usuelles, se réservant de faire dans leurs pro¬
pres exploitations les dimensions spéciales dont la
fabrication est plus délicate.
Ces négociants doivent parfois répondre à des
demandes de livraisons immédiates, adressées par les mines en dehors de leurs contrats. Pour satis¬
faire à ces ordres imprévus, ils ont des parcs de stockages importants, lesquels ont d'ailleurs une autre utilité. Les livraisons, résultant des contrats, sont échelonnées sur les douze mois de l'année, les
parcs de stockages permettent de faire face aux livraisons pendant la période d'hiver, avant que n'arrivent les bois de la nouvelle campagne pouvant
être expédiés.
Les dimensions généralement fabriquées sont les longueurs suivantes ; 1 m. '60, 1 m. 80, 2 mètres,
2 m. 20, 2 m. 40, 2 m. 50, 2 m. 75, 3 mètres et quel¬
ques longueurs plus grandes de 3 m. 50 à 4 m. 50.
Pour les mines du Centre, la classification au
petit bout ne comporte que deux ou trois classe¬
ments dans chaque longueur (0 m. 10 à 0 m. 12,
0 m. 12 à 0 m. 14, 0 m. 14 à 0 m. 17). Au contraire, pour les mines du Nord et du Pas-de-Calais, cha¬
que mine pour chaque longueur classe par circon¬
férence au milieu en des grosseurs allant jusqu'à
0 m. 05 de circonférence, soit six à sept classements
pour chaque longueur.
Débouchés. — La fabrication des poteaux pelés
dans le Sud-Ouest de la France est aussi ancienne sinon plus que celle des poteaux bruts. Elle re¬
monte, en effet, à 1868-1869.