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N° 33. (2e Série) Fi.ruissarit le 15 de chaque mois. 15 Septembre 1932
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auBulletin (un an; [ Etranger. 50 fr.
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Le Numéro.
BULLETIN
DE
France... 3f 50 Étranger. 5f »
L'INSTITUT DU PIN
Sous le contrôle de l'institut des Recherches agronomiques
et rattaché à la Faculté des Sciences de Bordeaux
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I. Articles originaux
SOMMAIRE
Pages
A I 58 Les possibilités de la Forêt du Sud-Ouest
parM. P. Buffault (fin) 193
A I 60 Les Travaux d'entretienet derégénération,
par M. Louis de Lapasse 196
A I 61 Organisation de la lutte contre le feu, par
M. Dubourg 201
Pages B I 26 De la localisation des huiles essentielles et
des poix-résines dans les pins, par
parM. Pigoulevsky 206
G I 19 Les bois de mine à destination des mines du Nord et du Pas-de-Calais, par
M. Rabouille 211
IL Petite Documentation
D II249 Petite Documentation 216
IVIODH DE CLASSIFICATION DE NOS DOCUMENTS
J
A. Généralités.
B. Récolte et traitement des résines.
C. Essences de térébenthine, terpènes etdérivés.
D. Constituants solides des résines et leurs dérivés.
/ Articles originaux.— II Documentation.
E. Dérivés chimiquesdubois.
F. Cellulose de bois.
G. Documents divers.
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L'INSTITUT DU PIN
Sous le contrôle de l'Institut des Recherches agronomiques
et rattaché à la Faculté des Sciences de Bordeaux
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A i 56
lis possimuiÉs ne la Forai do S.o.
Par Pierre BUFFAULT
Conservateur des Eauxet Forêts à Bordeaux (suite) (*)
Les coupes faites pendant la guerre, principale¬
ment celles des armées alliées, ont été massives localement et ont pu troubler l'économie forestière
des communes sur le territoire! desquelles elles
étaient assises: mais dans l'ensemble de la région
elles n'ont pas dépassé les ressources ni compro¬
mis l'avenir et elles ont imposé la régénération de
vieux bois qui aurait dû être entreprise bien plus
tôt. On a souvent coupé alors des pins de 80 ans
en même temps que des pins de 50 et 60 ans. Il en
reste encore et même quelques-uns de 100 ans. La régénération dans les forêts particulières est, pour l'ensemble, bien plus en retard encore que dans les
forêts de l'Etat.
Maintenant, les exploitations se ralentissent de¬
puis 1931 et sans doutepour quelque temps, en rai¬
son de la crise économique. Elles sont moins inten¬
sives : les menus bois, les houppiers ne trouvent plus de débouchés. La production de la forêt lan¬
daise est plutôt appelée à baisser momentanément.
Le gemmage a été notablement intensifié et déve¬
loppé, surtout depuis 1922 environ jusqu'en 1930,
non seulement dans la région landaise, mais encore
(*)Voir Bulletin n°32, Août 1932.
en Périgord et dans les Charentes. Mais l'année
1931 et ses cours très bas ont réduit la production qui déjà avait diminué du fait d'un moindre ren¬
dement de la main-d'œuvre, la somme de travail
fournie par le résinier ayant fortement faibli.
La statistique forestière de 1905-1912 évaluait
comme suit la production ligneuse globale des six départements du Sud-Ouest envisagés dans ce rap¬
port :
Gironde 1.502.548 m3.
Landes 1.904.118 —
Lot-et-Garonne 221.949 —
Total 3.628.615 m3.
dont 2.155.400 m3 ou 59,4% de bois d'œuvre et 1.473.215 m3 ou 46,6 % de bois de feu.
Dordogne 490.643 m3
Charente 201.647 —
Charente-Inférieure 266.709 —
Total 958.999 m3.
dont 196.600 m3 ou 20,5 % de bois d'œuvre et 726.399 m3 ou 79,5 % de bois de feu.
Le bois d'œuvre comprend le sciage (pin de ser¬
vice) et les poteaux (pin d'industrie).
Sans se hasarder à donner des chiffres dont on ne peut mesurer l'approximation, il est permis de
résumer comme suit les possibilités de la forêt du
Sud-Ouest.
Celle-ci peut, sans compromettre son avenir,
fournir annuellement les 3 millions de mètres cu¬
bes de bois débités essence pin, qu'elle est réputée
\94 BULLETIN DE L'INSTITUT DU PIN — N° 33 - Septembre IB32
produire, et les 190 millions de litres de gemme qu'elle livre aux usines de la région.
Ses futaies de chêne landaises, surtout celles de la région de l'Adour, peuvent continuer à donner
annuellement leurs 11.000 à 15.000 mètres cubes pour les traverses de chemin de fer et les bois de
wagon, auxquels s'ajoutent les mètres cubes four¬
nis par les chênes du Périgord.
Les taillis de châtaignier pourront, dès que l'état
du marché le permettra, reprendre leur production
de cercles et d'échalas, etavec desarbres de réserve
dans ces taillis on pourrait faire revivre l'ancienne
industrie de merrain de châtaignier du Périgord.
Les châtaigneraies, elles, n'alimenteront encore les usines que si l'on persuade à leurs propriétaires
de les aménager et d'en reconstituer les parties exploitées, surtout avec des plants japonais. Le
manque de bois de cette essence atteindra non seu¬
lement l'industrie des extraits tanniques, mais en¬
core celle naissante de la pâte à papier faite avec les copeaux ayant fourni le tannin.
Pour le bois de pin, l'industrie des poteaux de
mine, qui voit son débouché en Angleterre se ré¬
duire considérablement, par l'effet de diverses cau¬
ses dont la concurrence de certains pays étrangers,
doit chercher à obtenir un écoulement suffisant
vers les mines françaises en développant les mar¬
chés qu'elle a déjà pu obtenir de ce côté.
Pour le bois de cette essence, la caisserie offre
un débouché considérable qui est loin d'être utilisé
comme il devrait l'être.
La papeterie, qui est arrivée à utiliser le bois de pin maritime, offre pour le Sud-Ouest un débou¬
ché intéressant, susceptible de prendre plus de développement.
Dans la forêt landaise, une quantité considérable
de menus bois et déchets se perd et pourrait être
utilisée. Ce sont les petits bois d'éclaircie, les pro¬
duits des débroussaillements, les rémanents d'ex¬
ploitations, les souches. Leur transformation par carbonisation serait une excellente utilisation, sur¬
tout si l'emploi des appareils à gazogène au gaz pauvre, au « gaz des forêts », se généralise. On car¬
boniserait tous ces bois, même les souches qu'il
faut arracher pour qu'elles ne servent pas de nids
aux hvlobes. On aurait ainsi un excellent carbu¬
rant pour les tracteurs et moteurs des exploitations
forestières. Quel avantage pour le propriétaire fo¬
restier de pouvoir produire lui-même, chez lui, avec
les produits de son sol, le gaz qui fera fonctionner
ses tracteurs et ses machines !
Aujourd'hui, l'industrie construit des gazogènes
à bois, des machines et tracteurs à gazogène, des
fours à carboniser portatifs qui ne comportent pas de risques d'incendie.
Et la fabrication du charbon roux, du bois tor¬
réfié, carburant parfait pour les gazogènes, pourra, étant réalisée industriellement, ouvrir un vaste débouché aux exploitations forestières de la ré¬
gion.
Le procédé de récolte de la gemme, procédé en¬
core primitif, est à transformer, perfectionner,
pour améliorer leproduit récolté et réduire les frais
de main-d'œuvre. On étudie en ce moment le pro¬
cédé Bellini qui est peut-être susceptible de réali¬
ser cette transformation.
Les ressources dont on vient d'essayer de donner
une idée répondent-elles aux besoins ?
Aux besoins actuels de la région ?
Oui.
Aux besoins de la France en général ? Non, puis¬
que la consommation exige, en temps normal, un gros appoint d'importation.
Quant aux besoins futurs, ils sont modernisés,
étant en dépendance des transformations et du per¬
fectionnement des industries et des conditions éco¬
nomiques.
Mais un avenir très vaste est réservé à la forêt landaise par la chimie dans la voie de la distilla¬
tion du bois, et des produits résineux dans la fabri¬
cation des sous-produits et dérivés venant s'ajouter
à la production actuelle et en quelque sorte sim¬
pliste des bois débités, des poteaux de mine, de
l'essence de térébenthine et de la colophane. Et il importe essentiellement pour l'économie de la ré¬
gion et même pour l'économie générale que ces transformations chimiques soient effectuées dans
le pays même, à proximité de la forêt productrice
de la matière première.
La forêt landaise traverse actuellement une crise
économique extrêmement grave — qui n'est que
partie ou incidence de la crise économique géné¬
rale.
Faire des pronostics sur sa durée, son aggrava¬
tion ou son atténuation, est impossible.
BULLETIN DE L'INSTITUT DU PIN — N° 33 - Septembre t932 195
Il faut avant tout ne pas désespérer et garder
confiance en soi et en l'avenir et présenter et faire
valoir des produits irréprochables de forme et de qualité. Il faut que propriétaires, exploitants, in¬
dustriels, négociants s'entendent entre eux pour se -défendre et se soutenir mutuellement. C'est ce
qu'ont compris les clairvoyants fondateurs de la
Fédération des Produits résineux français et du
bois de pin des Landes et ce que mettent en prati'
que les adhérents de cette Fédération; et c'est ce qui doit résulter des travaux de ce Congrès dont
l'Association nationale du Bois est le promoteur.
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196 BULLETIN DE L'INSTITUT DU PIN — N° 83 - Septembre 1932
Ai 60
Les Travaux d'Entretien
et de Régénération
Par M. Louis de LAPASSE (*) Inspecteur des Eaux et Forêts à Bordeaux
L'exploitation de la forêt landaise soulève une série de problèmes divers, parmi lesquels ceux qui
sont relatifs à son entretien et à sa régénération
sont des plus importants. Il s'agit en effet de per¬
mettre au capital forestier de fonctionner dans les
meilleures conditions, de le renouveler rapidement quand il a été réalisé, de le rétablir quand il a été
détruit par les ennemis qui le guettent.
La solution est difficile à trouver dans les con¬
ditions économiques et sociales actuelles, au mo¬
ment où la main-d'œuvre toujours peu abondante
dans la région forestière du Sud-Ouest, dont la po¬
pulation est clairsemée, tend de plus en plus à s'éloigner des travaux pénibles, qui exigent de for¬
tes dépenses d'énergie musculaire. La forêt perd
ainsi beaucoup de ses serviteurs, et cependant elle exige des travaux considérables pour être bien exploitée. Il n'y a dès lors qu'un moyen, c'est de
mettre à la disposition de la main-d'œuvre des ou¬
tils et des machines qui décuplent sa puissance de production, c'est en somme d'industrialiser les mé¬
thodes d'exploitation forestière.
Nous allons donc examiner successivement les divers travaux que nécessitent l'entretien et la ré¬
génération des futaies de pin maritime, les condi¬
tions dans lesquelles on les exécute actuellement,
et celles dans lesquelles on devrait les effectuer pour répondre complètement au but poursuivi et
donner entière satisfaction au propriétaire qui fait
des sacrifices pécuniaires quelquefois importants
pour les entreprendre.
Notons d'abord que la forêt de pin maritime de¬
puis sa naissance jusqu'à sa mort, et même avant
sa naissance, exige pour sa création, son évolution,
sa réalisation, des travaux nombreux parmi les¬
quels il en est certains qu'il semble actuellement
(*) Communication faite au Congrès de la forêt et de ses indus¬
tries, Bordeaux, juin 1932.
impossible de faire faire à l'aide d'appareils de mo¬
toculture.
Dans ce nombre, nous signalerons l'abatage des
arbres, d'un diamètre même plus gros que celui des pins de la forêt landaise (habituellement 30 à
50 cm.). Parmi ceux-ci nous citerons :
1° La scie à grumes qui travaille horizontale¬
ment pour couper les arbres sur pied, et aussi ver¬
ticalement pour séparer l'arbre de sa souche après qu'il a été d'abord arraché tout entier.
2° La scie à chaîne dont chaque maillon cons¬
titue un petit rabot qui circule très rapidement à
travers le bois.
Ces appareils sont mus généralement par des
moteurs à essence. Ce dernier générateur d'énergie
en forêt constitue un non-sens forestier et il est en même temps trop coûteux en matière d'industria¬
lisation forestière. Il en est de même des bêches
coupantes pneumatiques faites pour sectionner les
racines des arbres.
Toutes ces machines ont été essayées dans la
forêt landaise, notamment lors de la grande mani¬
festation qui eut lieu en 1926 à Labouheyre. Elles
n'ont pas résisté à la critique des usagers.
C'est que le pin maritime est d'un abatage facile,
même avec un simple passe-partout maniépar deux
hommes. Il a un bois tendre dans lequel la scie
avance rapidement. De plus, et ceci est une consi¬
dération d'ordre général, les appareils mécaniques
ne peuvent réellement pas dispenser de l'interven¬
tion de rabatteur professionnel. Il faudra toujours
le concours de cette main-d'œuvre spécialisée, que les progrès de l'outillage pourront sans doute éco¬
nomiser, mais non remplacer très largement.
Donc, laissant de côté la question de l'abatage
des piquadars, nous examinerons plutôt les opéra¬
tions forestières pour lesquelles la machine fournit
actuellement à l'homme un secours précieux qui augmente beaucoup sa puissance de travail. Nous envisagerons successivement les travaux d'entre¬
tien et de régénération.
Travaux d'entretien.
La forêt de pin maritime, composée sur plusieurs
centaines de milliers d'hectares de cette seule es¬
sence à l'état pur, repose sur un sol siliceux où la
couverture vivante du sol est constituée par une flore assez pauvre au point de vue du nombre d'es-
Septembre 1932
sences, mais souvent très abondante et envahis¬
sante. A cet égard il faut distinguer la région des
dunes située tout le long du littoral sur une lar¬
geur de quelques kilomètres seulement, et la ré¬
gion de la lande, à l'intérieur du pays, de beau¬
coup la plus importante.
Dans les dunes, si l'on en excepte toutefois, les
îlots qui subsistent des dunes anciennes, le sol est
pauvre; boisé depuis peu, cent ans au maximum,
il n'a pas encore été enrichi par la succession
dé
nombreuses générations de pins; de plus étant val¬
lonné, il est naturellement beaucoup plus propre que celui de la lande; il en reste que la couverture végétale et les morts-bois sont peu abondants;
l'ensemble de la forêt est naturellement beaucoup plus propre que celui de la lande; ce n'est guère qu'une ou deux fois au cours d'une génération que le parterre des coupes a besoin d'être débroussaillé, principalement quelques années après la coupe
rase, lorsque des ajoncs ou des genêts, dont les graines ont gardé dans le sol leur faculté geriiii-
native, se développent tout à coup grâce à l'air et
à la lumière dont ils sont alors inondés.
A ce moment, il faut intervenir dans les jeunes
coupes pour1 dégager les semis qui risqueraient
d'être étouffés, mais il y a là un travail de nettoie¬
ment qui ne peut être confié à des machines, mais
seulement à une main-d'œuvre expérimentée. Plus tard, la nécessité du débroussaiilement ne se fait pas assez sentir pour que cette question prenne ici
une importance capitale.
Il n'en est pas de même à l'intérieur du pays landais; dans la lande plate, à la surface vingt fois plus étendue que celle des dunes. Ici, sur un sol plus riche et généralement plus humide, les morts-
bois se montrent beaucoup plus envahissants, au
point que le débroussaiilement de la forêt à ces divers âges constitue un des principaux problèmes
que les propriétaires forestiers, soucieux d'une
bonne culture de leurs bois, aient à résoudre.
Nous ne croyons pas nécessaire d'exposer dans
tous ses détails la question du débroussaiilement, qui a été si souvent traitée. Nous rappellerons sim¬
plement que la nécessité de l'enlèvement de cette végétation abusive se fait sentir :
1° Dans les coupes rases, soit quelquefois avant l'abatage des pins, soit plus souvent après celui-ci,
afin de faciliter ou même de rendre possible la régénération naturelle ou artificielle;
2° Dans les jeunes semis pour permettre leur développement dans de bonnes conditions, sans
menace d'étouffement par cette végétation de sous- bois, à la croissance très rapide;
3° Dans les peuplements plus âgés ou adultes
pour favoriser la croissance des pins qui ont be¬
soin de toutes les matières nutritives qui se trou¬
vent dans le sol, pour améliorer le rendement en gemme des pins qui subiront mieux l'action des
rayons solaires, pour faciliter le travail du résinier qui peut circuler plus facilement entre les arbres,
enfin et surtout, pour diminuer les risques d'in¬
cendie, car le sous-bois constitue le principal ali¬
ment du feu et augmente beaucoup les difficultés
de lutte contre lui.
Donc, le débroussaiilement est une opération très
utile à bien des points de vue; il devient absolu¬
ment nécessaire lorsqu'il s'agit de procéder à la régénération artificielle de la forêt.
La nature du sous-bois à détruire varie avec la nature et la profondeur du terrain. Tantôt ce sont
des fougères ou des touffes d'ajoucs ou de grandes bruyères à balais (brandes), qui domineront. Ail¬
leurs, ce sont des petites bruyères ou de la callune qui formeront un tapis épais et continu, qui absor¬
bera l'humidité du sol et sur lesquelles ne pourront venir que des pins maigres et chétifs. Enfin, en d'autres endroits, ce sera la molinie bleue qui for¬
mera un feutrage épais de 20 centimètres qui en¬
travera toute régénération et constituera un ali¬
ment redoutable pour le feu lorsqu'elle sera des¬
séchée à la fin de l'hiver et en été.
Quelles sont les ressources qui s'offrent actuel¬
lement aux sylvicultéiirs qui veulent débroussail¬
ler ?
En raison de la nature de ce travail, des étendues de forêt considérables sur lesquelles il doit par¬
fois porter, on ne peut guère compter sur la main- d'œuvre; quand on peut l'employer, le rendement
en est généralement insuffisant et fait ressortir
un prix à l'hectare qui varie évidemment avec la
densité du sous-bois à détruire, mais qui actuelle¬
ment, dépasse souvent deux ou trois cents francs
l'hectare.
Dans l'ensemble, il faut avoir recours à des dé- broussaillements actionnés par des tracteurs. Ces appareils écrasent le sous-bois et le hachent plus
ou moins; leur fonctionnement est interdit du lor avril au 15 mai et du 15 juillet au 15 septembre
198 BULLETIN DE L'INSTITUT DU PIN — N° 83 - Septembre 1932
en raison des dangers d'incendie que présente alors l'emploi des tracteurs.
L'efTet de ces lourds rouleaux métalliques est va¬
riable suivant la nature de la broussaille. C'est dans la grande brande qu'il est le plus marqué.
Mais d'une façon générale, le résultat acquis n'est
que temporaire; les végétaux détruits le sont dans
leurs tiges, mais non dans leurs racines, et ils ne tardent pas à repartir du pied, si bien qu'au bout,
d'une durée de 3 à 5 ans, l'opération du débrous-
saillement est à recommencer.
Il y a là un "grave défaut, car le propriétaire peut
consentir une fois de temps en temps la dépense
élevée qu'entraîne actuellement le nettoiement de
la forêt; maisil ne peut gréver sa propriété de cette
lourde charge, si elle doit se répéter tous les trois
à cinq.ans
Il faudrait donc, pour que le débroussailîement
ne risque pas d'être abandonné parce que trop oné¬
reux, que les résultats obtenus soient plus durables
et que le sous-bois soit atteint non seulement dans
sa partie aérienne, mais aussi dans sa partie sou¬
terraine. Les débrous^ailleurs actuels devraient
être perfectionnés; le poids ne suffit pas, surtout
dans les ajoncs, les bruyères et la callune. Il faut
des appareils différents suivant la nature du ter¬
rain ou du sous-bois, qui travaillent superficielle¬
ment le sol, et après avoir coupé les tiges, section¬
nent les racines et extirpent les souches superfi¬
cielles pour éviter des rejets parfois plus vigou¬
reux que la plante détruite.
Certains constructeurs ont imaginé ainsi des dispositifs rotatifs attaquant les racines; mais
dans l'ensemble, les appareils réellement efficaces
et pas trop onéreux, sont encore à trouver. Sans
doute les progrès de la motoculture et de la méca¬
nique permettront-ils de mettre au point un maté¬
riel nouveau, capable de résoudre un problème qui
se présente encore actuellement à peu près au même point qu'il l'était il y a cinquante ans.
La motoculture paraissant insuffisante, du moins
pour le moment, on peut se demander si la ques¬
tion du débroussailîement ne pourrait être résolue
par des procédés chimiques, soit en modifiant la
nature du sol, soit en détruisant le sous-bois exis¬
tant. Au premier point de vue, la callune indique
un sol épuisé, la molinie un sol acide. Ne pourrait-
on arriver à la disparition de ces végétaux par des
apports d'engrais qui enrichiraient le terrain, lui enlèverait son acidité ?
En ce qui concerne le second point de vue, celui
de la destruction chimique du sous-bois, l'usage
de produits comme l'acide sulfurique, le chlorate
de soude, pourrait être préconisé si leur action sur les végétaux du sol landais s'avérait assez efficace.
L'acide sulfurique notamment est un produit de grande fabrication, qui est déjà employé en agri¬
culture pour la destruction des mauvaises herbes.
Ne pourrait-il être utilisé ? Nous signalons simple¬
ment à cet égard, que la Compagnie Bordelaise, des
Produits Chimiques, d'accord avec le Service des Eaux et Forêts, a entrepris ces derniers temps des
essais méthodiques dans la forêt domaniale de l'Hermitage, au cours desquels des pulvérisations
d'acide sulfurique à différentes doses ont été effec¬
tuées sur un garde-feu, dans une coupe à régéné¬
rer, et sous bois. Ces essais sont tout à fait récents,
et il est encore trop tôt pour qu'une conclusion puisse en être tirée.
L'entretien des forêts de la plaine landaise exige
encore d'autres travaux importants, notamment
ceux d'assainissement, au moyen de fossés ou cras- tes qui drainent l'eau beaucoup trop abondante
en hiver et au printemps. L'ouverture de ces fossés
est une charge qui grève la propriété boisée et qui cependant ne peut être éludée. N'est-ce pas au dé¬
faut d'assainissement que la plus grande partie de
la lande a dû de ne pouvoir être boisée avant la loi de 1857 ? Ce travail pourra sans doute être indus¬
trialisé au moyen de sortes d'excavateurs. Jusqu'à présent du moins, il faut avoir recours à la main- d'œuvre locale pour l'exécuter.
Travaux de régénération.
Au point de vue de la régénération, la région des
dunes présente encore une situation privilégiée,
car presque toujours le repeuplement s'y fait na¬
turellement. Si le forestier doit quelquefois inter¬
venir, les travaux de régénération sont facilités par la nature du terrain où le sable affleure presque partout et où les graines peuvent germer dans les
meilleures conditions.
Il n'en est pas de même dans la lande intérieure, où la couverture végétale abondante du sol et sou¬
vent l'excès d'humidité empêchent la régénération
naturelle. De sorte qu'il est indispensable de faire
3
Septembre 1932
•subir au terrain une préparation préalable pour Tenir ensuite, ou le semer, ou le planter. Le plus
souvent on a recours au semis, surtout lorsqu'il s'agit de régénération surde grandes surfaces. Dans
le semis par bandes alternes, procédé le plus em¬
ployé, la préparation du sol doit faire disparaître
les brandes, ajoncs, genêts, etc., qui le garnissent.
On peut soit débroussailler avec un tracteur dé- broussailleur, en passant au besoin deux fois dans
deux sens perpendiculaires, soit incinérer par le
feu. Cette dernière opération très économique, exige
de très grandes précautions et risque souvent par suite d'incendies involontaires de devenir plus coû¬
teuse que le débroussailleraient.
Une fois le terrain propre, il est labouré en ban¬
des parallèles sur une partie de sa surface qui est généralement le tiers. Chaque bande cultivée
alterne avec une bande inculte de largeur double.
Le débroussailleraient coûte actuellement 150 fr.
environ par hectare de propriété, le labour, à peu
près le même chiffre; la préparation du sol en¬
traîne donc pour le propriétaire une dépense im¬
portante de 300 francs par hectare, sans compter
celle du semis proprement dit.
Or, que se passe-t-il généralement dans ces tra¬
vaux de semis par bandes ? D'abord les charrues employées, qui sont munies soit de disques, soit
-de sacs, ne retournent pas toujours la motte; cela dépend de la nature du terrain, et de l'épaisseur de
la couverture végétale qui y est implantée.
Ensuite le débroussailleraient provoque dans les
bandes incultes une recrudescence de la végéta¬
tion telle que les jeunes semis situés dans les ban¬
des labourées sont parfois étouffés au bout de 3
ou 4 ans, si ces bandes ne sont pas assez larges.
Quelquefois d'ailleurs les semis à peine installés
«ont attaqués par des insectes, comme l'hylobe du pin qui ronge leur écorce et les tuent. Le proprié¬
taire peut ainsi éprouver de grandes difficultés pour régénérer sa forêt; ce sont les souches de l'ancien peuplement qui servent de lieu de ponte
de l'hylobe; et si l'on veut enrayer l'évolution et la propagation de cet insecte destructeur, il faut, soit arracher les souches, soit attendre plusieurs an¬
nées avant de procéder à la régénération de la fo¬
rêt.
Du reste, les souches sont souvent très gênantes
pour le labour par suite de l'obstacle qu'elles pré¬
sentent à l'avancement des charrues qui les ren¬
contrent.
11 faudrait donc pour effectuer les travaux de régénération dans de meilleures conditions qu'au¬
jourd'hui :
1° Disposer d'appareils de motoculture qui ef¬
fectuent des travaux de labour plus économique¬
ment et d'une façon plus parfaite. Actuellement les dépenses qu'ils entraînent ne peuvent être suppor¬
tées par les propriétaires que si la réussite est as¬
surée, les charrues doivent être améliorées et
adaptées aux diverses natures de terrains où elles peuvent être amenées à fonctionner. Un bon re¬
tournement de la motte sablonneuse est indispen¬
sable qui doit être suivi, si- c'est nécessaire, de l'émiettement de cette motte en vue de l'augmenta¬
tion de la proportion des graines susceptibles de
germer;
2° Labourer plutôt le terrain de façon telle que les bandes incultes et les bandes cultivées alter¬
nent avec elles soient toutes de même largeur. Cet aménagement du sol, qui a déjà été préconisé, per¬
mettrait en effet de labourer mécaniquement la
bande restée inculte pendant une génération de pins sans y rencontrer de souches, et toute la sur¬
face du terrain serait utilisée en deux générations.
La largeur des bandes pourrait être de la moitié
de la distance à laquelle doivent se trouver les pins
de place dans le futur massif, soit par exemple
3 mètres dans les sols riches et 4 mètres dans les sols pauvres;
3° Extraire au besoin les souches qui sont à la
fois si gênantes pour le labour et si dangereuses
pour la venue des jeunes semis. Et cela pose la question si importante du dessouchage, qui a don¬
né lieu dans la région landaise à de nombreuses discussions, mais qui n'a pas fait beaucoup de pro¬
grès, il faut le reconnaître, au cours de ces derniè¬
res années. Nous la résumerons ainsi :
Dans les régions où les jeunes semis sont atta¬
qués par les insectes, le propriétaire qui veut ob¬
tenir une régénération rapide de sa forêt est obligé
de dessoucher. Il lui faudra par conséquent, soit
abattre le pin avec sa souche, soit extraire cette dernière après abatage. Cette seconde
solution^em-
ble préférable, d'abord parce qu'il est très ^i4flèi.ïe-
de trouver des appareils pratiques qui précèdent
à l'extraction de la souche en même
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qu'ils200 BULLETIN DE L'INSTITUT DU PIN — N° 83 - Septembre IN32
abattent l'arbre, ensuite parce que le tronçonnage
du pin abattu dans ces conditions est plein de diffi¬
culté, le fût soutenu d'un côté par la souche et de
l'autre par la cime, portant à faux et coinçant le passe-partout. Le dessouchage doit être effectué
non pas au bout de plusieurs années, car ce ne sont
pas les souches grasses qui sont à rechercher, mais,
tout de suite après l'abatage afin de supprimer les
lieux de ponte des insectes et de ne pas retarder l'époque où la forêt redeviendra productive.
Il faut donc un appareil d'un prix peu élevé, ro¬
buste, pouvant être manié par des ouvriers non
spécialistes, et actionné par des animaux existant déjà dans les propriétés landaises. D'autre part, le desspuchage ne prendra réellement de l'extension
que s'il peut être rémunérateur pour le proprié¬
taire forestier. Celui-ci fait évidemment de nom¬
breux travaux, comme ceux de débrôussailtèmént, d'assainissement, de défense contre l'incendie, qui
ne lui rapportent rien directement. Mais il est cer¬
tain que si l'extraction des souches pouvait devenir payante, elle serait beaucoup plus couramment pratiquée.
Pour cela, outre le problème du dessouchage pra¬
tique se posent ceux du débitage et de l'utilisation pratique de la souche.
Le débitage semble ne pouvoir être réalisé que par un seul procédé : l'explosif. Encore, l'emploi
en est-il délicat, car on ne peut le confier à n'im¬
porte qui : il a l'avantage d'ameublir en même temps le sol autour de là souche à débiter.
L'utilisation du bois de souche peut être envisa¬
gée du côté de la papeterie, ou plutôt de la carbo¬
nisation sur le chantier même, au moyen de fours
métalliques portatifs avec ou sans récupération
du goudron. Il faudrait que dans le premier cas le prix de revient du bois soit inférieur à celui du poteau de mine pelé, et dans le second cas, à celui
du délignage, matière première d'un emploi com¬
mode pour le feu.
On voit que les progrès de l'industrialisation fo¬
restière trouvent amplement à s'exercer en matière
de dessouchage; sans doute pourront-ils arriver à
résoudre cette question difficile.
•Ce problème ne constitue d'ailleurs qu'un de
ceux que soulève la bonne exploitation de la forêt
landaise. Dans l'ensemble, ils sont nombreux et
importants en matière d'entretien et de régénéra¬
tion. De tous temps, les forestiers se sont ainsi
trouvés en présence de questions ardues, dont pe¬
tit à petit ils sont venus à bout. Autrefois, ce fu¬
rent .surtout la fixation des dunes, dans la région
du littoral et l'assainissement des landes dans l'in¬
térieur du pays landais. Aujourd'hui, les problèmes
ont changé; les premières questions résolues, d'au¬
tres ont suivi avec l'évolution des conditions éco¬
nomiques et sociales, celle de l'industrialisation
forestière notamment.
Nul doute que les efforts de tous les forestiers, théoriciens, praticiens et techniciens, heureusement conjugués, n'arrivent en matière d'entretien et de régénération de la forêt landaise, à apporter des
solutions qui permettront non seulement de main¬
tenir cette forêt, de la protéger, mais aussi d'amé¬
liorer son exploitation, de rendre celle-ci plus fa¬
cile et plus productive.
Avril 1932.
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