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Oncologie : Article pp.61-62 du Vol.2 n°1 (2008)

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LIVRES ET VIDE´OS

Maman a une maladie grave

He´le`ne Juvigny, Brigitte Labbe´, illustrations d’Olivier Latyk, e´dition Milan jeunesse, 2007

Je conseillerais ce livre pour les enfants a` partir de sept ans et jusqu’a` treize ans. Le propos est clair : un garc¸on sait que sa me`re est tre`s malade, elle a un cancer. Il s’interroge sur ses propres re´actions et celles de toute sa famille. Les illustrations sont simples et explicites, le ton est agre´able, au style direct, pre´cis et rigoureux. C’est un peu un livre a` deux voix : l’histoire est raconte´e avec beaucoup de dialogues, des notes en langage parle´ expliquent (a` la premie`re personne du pluriel) les re´actions de Hugo, le he´ros de l’histoire :

« Quelquefois, on de´teste les gens qu’on aime. Nous pensons qu’ils nous oublient, et qu’ils vont meˆme nous abandonner.

On pense qu’ils auraient duˆ faire attention de ne pas tomber malades, et qu’ils se fichent qu’on soit triste ou malheureux.

Alors c¸a met tre`s en cole`re ». Les re´actions e´motionnelles de Hugo sont tre`s re´alistes et justes : tout d’abord la perspicacite´

de l’enfant a` remarquer les changements de comportements de la famille qui souhaite au contraire adoucir la ve´rite´ ou du moins en atte´nuer les conse´quences traumatisantes : tout le monde est gentil, parle en chuchotant, veut a` tout prix lui faire plaisir... Cette fac¸on de vouloir le rassurer bloque Hugo dans sa solitude et meˆme sa cole`re. Hugo qui, de`s les premie`res lignes, a demande´ « Maman, est-ce que tu vas mourir ? » et auquel elle a re´pondu qu’elle ferait tout pour se soigner (mais pas qu’elle n’allait pas mourir). Ce maintien de

l’hypothe`se la pire a largement inquie´te´ Hugo qui devant l’injonction qui lui e´tait faite de ne pas s’inquie´ter s’est dit

« Il se passe quelque chose de tre`s grave. »

Le petit garc¸on s’accroche cependant a` sa vie « normale ».

Il insiste, alors qu’on lui dit que Maman est tre`s fatigue´e, pour qu’elle vienne le chercher a` l’e´cole et « fasse tout comme une maman normale ». Les adultes sont e´tonne´s mais croient qu’Hugo n’a pas compris ce qui se passait pour sa me`re.

Commentaire off de Hugo « Quelquefois, sans faire expre`s, on oublie tout : la maladie, les traitements, les cheveux de Maman qui tombent, sa fatigue... On fait comme si tout cela n’existait pas. On n’en parle pas, on n’y pense pas ».

Les deux auteurs, Brigitte Labbe´ qui est e´crivaine et He´le`ne Juvigny, formatrice-consultante dans le secteur de la sante´ et vice-pre´sidente de JALMALV (Paris-Ile-de- France), ont tre`s bien vu les difficulte´s des enfants a`

accepter la re´alite´. D’une part Hugo se de´fend de cette re´alite´, mais d’autre part Hugo n’a pas les moyens cognitifs ni psychiques d’inte´grer ce qui se passe pour sa me`re. C’est pourquoi, il est relativement passif face a` ses propres re´actions et ne re´alise qu’apre`s coup la signification de ce que la maladie de sa me`re entraıˆne. Ainsi, la tristesse.

Hugo met un certain temps avant de la reconnaıˆtre, d’autant qu’il est ambivalent face aux changements lie´s a` la maladie. Comme dans le divorce, les enfants peuvent s’engouffrer dans certains be´ne´fices secondaires (Papa n’est plus la` pour m’interdire la te´le´, je peux meˆme me coucher avec Maman dans son lit), seulement le re´sultat de l’absence est aussi l’envahissement par l’angoisse, la solitude et le sentiment de manque. « C’e´tait mieux avant » constate-t-il et de commenter « Pas la peine de faire semblant de ne pas voir la tristesse. Pas la peine de croire qu’elle va partir. Quand elle est la`, elle s’installe. Elle est comme une petite voix qui pre´vient qu’on a besoin de quelque chose. Si on l’e´coute, on va trouver de quoi on a besoin (...) ». La cole`re, l’envie de re´agir, de rompre le cercle du malheur sont tre`s bien mises en sce`ne par les auteurs : Hugo a lance´ son ballon de foot droit sur le vase pre´fe´re´ de sa me`re... Malheureusement, ce passage a` l’acte qui l’a bien de´foule´ entraıˆne une culpabilite´ tre`s pe´nible.

Hugo n’arrive plus a` s’endormir car il redoute la sanction

Psycho-Oncologie (2008) 2: 61–62

©Springer 2008

DOI 10.1007/s11839-008-0069-x

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-pson.revuesonline.com

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la pire : l’abandon de sa me`re. La crainte de la mort de sa me`re lui fait redouter une solitude totale, disparition des proches, du monde. Ce ve´cu me´lancolique n’est pas explicite dans le livre, mais pour l’avoir rencontre´ chez de nombreux enfants, il est perceptible au travers du discours de Hugo. L’agressivite´ de Hugo pour sa me`re est e´galement aborde´e dans l’ouvrage : il a honte d’elle et de son absence de cheveux et de sourcils (la perruque, c’est encore pire !), il se sent diffe´rent de ses amis. Dans le marchandage qu’il tente d’exercer sur lui-meˆme Hugo se retrouve dans un souci obsessionnel de faire plaisir a` sa me`re. Il de´cide de se priver d’invitation chez une amie pour « re´parer » les conse´quences de son agressivite´ vis-a`-vis de sa me`re. Il a besoin de parler avec son pe`re pour comprendre et accepter qu’il n’est pas coupable (et donc tout-puissant) sur la maladie, qu’il peut cependant s’amuser et prendre du plaisir sans pour autant risquer d’aggraver l’e´tat de sa me`re.

La conclusion est tre`s juste : il arrive encore a` Hugo de pleurer, mais apre`s ces phases difficiles, Hugo a compris qu’il pouvait parler de ce qui lui arrivait, le chagrin, les maux de ventre, l’absence de sa me`re. Il a aussi pris conscience de ce qu’il ressentait et il l’accepte.

Le livre se conclut par une page ou` le petit lecteur peut e´crire ou dessiner ce qu’il aimerait dire a` Hugo ou a` ses parents ou aux docteurs et aux infirmie`res.

Ce livre facilite certainement le dialogue et il me semble surtout aider les enfants a` prendre conscience de ce qui leur arrive et de ce qu’ils ressentent. C’est un livre que je conseillerais aux enfants dont la maman est malade, mais comme toujours a` discuter apre`s avec un proche de la famille ou un soignant qui a aussi fait la de´marche de le lire et d’y re´fle´chir.

Marie-Fre´de´rique Bacque´

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