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Analyse du changement de politique étrangère : le Brésil comme étude de cas

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Academic year: 2021

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Analyse du changement de politique étrangère : le

Brésil comme étude de cas

Thèse

Mamadou Lamine Sarr

Doctorat en science politique

Philosophiæ doctor (Ph. D.)

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Analyse du changement de politique étrangère :

le Brésil comme étude de cas

Thèse

Mamadou Lamine Sarr

Sous la direction de :

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iii

Résumé

Cette thèse porte sur un phénomène encore marginal dans l’analyse de politique étrangère, à savoir le changement de politique étrangère. En effet, l’analyse des raisons qui conduisent un État à donner une nouvelle orientation à sa politique étrangère, ainsi que les modalités par lesquelles elle s’effectue, demande davantage de contributions et cette thèse en est une. Dans cette thèse, nous considérons que théoriquement, l’analyse du changement de politique étrangère se fait sur deux éléments : le contexte et les perceptions des décideurs.

En se basant sur le cas du Brésil, cette thèse pose la question suivante : qu’est-ce qui a conduit le gouvernement du président Lula da Silva à partir de 2003, à réorienter sa politique étrangère, plus précisément celle envers l’Afrique ? Notre hypothèse suggère que la réorientation de la politique africaine du Brésil à partir de 2003 s’explique davantage par les différences de perceptions entre chefs d’État que par des éléments de contexte. Pour le président Cardoso, l’insertion du Brésil dans le système international passait surtout par la consolidation des relations avec les puissances occidentales, alors que pour Lula da Silva, cette insertion nécessitait un renforcement de la coopération Sud-Sud avec l’Afrique comme point d’ancrage. La vérification de cette hypothèse est axée sur une analyse de contenu des discours présidentiels.

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iv

Abstract

This thesis deals with a still marginal phenomenon in foreign policy analysis, namely the foreign policy change. Indeed, the analysis of the reasons that lead a State to give a new orientation to its foreign policy, as well as the modalities by which it is carried out, requires more contributions and this thesis is one of them. In this thesis, we consider that, theoretically, the analysis of foreign policy change is made on two elements: the context and the perceptions of the decision-makers.

Based on the case of Brazil, this thesis asks the following question: what led the government of President Lula da Silva from 2003, to reorient its foreign policy, specifically that towards Africa? Our hypothesis suggests that the reorientation of Brazil's African policy from 2003 is explained more by differences in perceptions among heads of state than by elements of context. For president Cardoso, the insertion of Brazil in the international system was mainly through the consolidation of relations with the Western powers, while for Lula da Silva, this insertion required a strengthening of South-South cooperation with Africa as a point of reference. The verification of this hypothesis focuses on a content analysis of presidential speeches.

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v

Resumo

Esta tese trata de um fenômeno ainda marginal na análise de política externa, a saber, a mudança na política externa. De fato, a análise das razões que levam um Estado a dar uma nova orientação à sua política externa, bem como os formatos possíveis desta mudança, requer mais contribuições e essa tese é uma delas. Nesta tese, consideramos que, teoricamente, a análise da mudança da política externa é feita com base em dois elementos: o contexto e as percepções dos tomadores de decisão.

Com base no caso do Brasil, esta tese faz a seguinte pergunta: o que levou o governo do presidente Lula da Silva, a partir de 2003, a reorientar sua política externa especificamente para a África? Nossa hipótese sugere que esta reorientação da política externa do Brasil a partir de 2003 se deve mais por diferenças de percepções entre chefes de estado que por elementos de contexto.. Para Fernando Henrique Cardoso, a inserção do Brasil no sistema internacional se deu principalmente pela consolidação das relações com as potências ocidentais, enquanto que para Lula da Silva, essa inserção exigiu um fortalecimento da cooperação Sul-Sul com a África como ponto de referência. A verificação desta hipótese se concentra em uma análise de conteúdo dos discursos presidenciais.

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vi

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Resumo ... v

Table des matières ... vi

Liste des tableaux ... ix

Liste des figures ... x

Liste des abréviations ... xii

Remerciements ... xv

INTRODUCTION ... 1

CHAPITRE 1 : L’ÉTUDE DU CHANGEMENT DANS LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE BRÉSILIENNE ... 8

1.1. Introduction ... 8

1.2. La Politique étrangère du Brésil sous Lula da Silva : entre autonomie et insertion internationale ... 9

1.3. L’Afrique dans le calcul stratégique du Brésil de Lula da Silva ... 14

1.4. Un intérêt pour l’étude du CPE ... 19

1.4.1. L’analyse de politique étrangère (APE) : à la recherche d’une théorie de politique étrangère ... 20

1.4.2. L’étude du changement de politique étrangère (CPE) : un chantier à poursuivre 24 a) Modèles à liste de contrôle ... 27

b) Modèles structurels ... 29

c) Modèles cycliques ... 30

d) Modèles perceptionnistes ... 32

1.5. Question spécifique de recherche ... 36

1.6. Conclusion ... 39

CHAPITRE 2 : CADRE ANALYTIQUE DE LA RECHERCHE ... 42

2.1. Introduction ... 42

2.2. Hypothèse de recherche ... 42

2.3. Cadre opératoire ... 45

2.3.1. La variable dépendante : la réorientation de la politique africaine du Brésil . 45 2.3.2. La variable indépendante : la vision du leader ... 48

2.4. Méthodologie ... 51

2.4.1. Stratégie de vérification : étude de cas simple ... 51

2.4.2. Collecte des informations : observation documentaire ... 53

2.4.3. Méthode d’analyse : analyse de contenu ... 54

2.4.4. Procédure de l’analyse ... 57

a) Choix des unités ... 58

b) La règle d’énumération ... 59

c) Catégorisation... 59

(7)

vii

2.5. Conclusion anticipée ... 67

2.6. Conclusion ... 68

CHAPITRE 3 : LA RÉORIENTATION DE LA POLITIQUE AFRICAINE DU BRÉSIL69 3.1. Introduction ... 69

3.2. Relations Brésil-Afrique : un bref rappel historique... 70

3.3. Un engagement diplomatique sans précédent ... 75

3.3.1. Lula, « l’Africain » ... 75

3.3.2. Une présence diplomatique de premier plan ... 82

3.4. Le commerce : pilier de la politique africaine sous Lula da Silva ... 86

3.4.1. Des échanges commerciaux en hausse ... 87

3.4.2. L’Afrique dans le commerce du Brésil... 94

3.5. Coopération au développement : la coopération technique comme instrument d’engagement en Afrique ... 100

3.6. Conclusion ... 105

CHAPITRE 4 : DIPLOMATIE PRÉSIDENTIELLE ET POLITIQUE ÉTRANGÈRE AU BRÉSIL ... 107

4.1. Introduction ... 107

4.2. Le concept de la diplomatie présidentielle ... 108

4.3. La diplomatie présidentielle : un véritable outil diplomatique en Amérique latine 110 4.4. Le présidentialisme brésilien ... 112

4.5. L’évolution de la diplomatie présidentielle brésilienne depuis 1985 ... 116

4.6. Conclusion ... 130

CHAPITRE 5 : LES DIFFÉRENCES DE PERCEPTION ET LA DIPLOMATIE PRÉSIDENTIELLE DU BRÉSIL ... 131

5.1. Introduction ... 131

5.2. Les discours et leur contexte ... 132

5.3. Les perceptions des présidents par rapport aux différentes thématiques ... 134

5.3.1. Économie et commerce ... 137

5.3.2. L’insertion internationale ... 143

5.3.3. La coopération et l’intégration régionale... 147

5.3.4. Les inégalités économiques et sociales ... 149

5.3.5. La coopération internationale ... 152

5.3.6. Les droits de l’homme et la démocratie... 154

5.3.7. Institutions, organisations et forums internationaux... 156

5.3.8. La paix et la sécurité internationale ... 160

5.3.9. L’environnement et le développement durable ... 163

5.4. Conclusion ... 165

CHAPITRE 6 : L’AFRIQUE DANS LA DIPLOMATIE PRÉSIDENTIELLE DU BRÉSIL ... 170

6.1. Introduction ... 170

6.2. Un intérêt diversifié de la politique étrangère brésilienne pour les régions du monde 171 6.3. L’Afrique, une région particulière dans la diplomatie brésilienne ... 174

(8)

viii

6.3.2 L’Afrique selon Lula da Silva ... 182

6.3.3 L’Afrique selon Dilma Rousseff ... 191

6.4. Conclusion ... 196

CONCLUSION ... 204

BIBLIOGRAPHIE ... 212

(9)

ix

Liste des tableaux

TABLEAU 1: LES DIFFÉRENTS TYPES DE RESTRUCTURATION ... 27

TABLEAU 2: LES SOURCES DU CHANGEMENT DE POLITIQUE ÉTRANGÈRE ... 33

TABLEAU 3: VARIABLES DÉPENDANTES ET INDICATEURS ... 48

TABLEAU 4: RÉGIONS ET THÉMATIQUES ... 50

TABLEAU 5:VISION CENTRALISÉE ET DÉCENTRALISÉE ... 51

TABLEAU 6:LISTE DES THÈMES ... 63

TABLEAU 7:LES VARIABLES ET LES VALEURS DE NOS CAS ... 67

TABLEAU 8: NOMBRE DE VOYAGES DES PRÉSIDENTS BRÉSILIENS DANS LE MONDE (1995 À 2016) ... 77

TABLEAU 9: VISITES DES PRÉSIDENTS BRÉSILIENS EN AFRIQUE ... 79

TABLEAU 10: VISITES DE CARDOSO EN AFRIQUE ... 80

TABLEAU 11: VISITES DE LULA DA SILVA EN AFRIQUE ... 81

TABLEAU 12: VISITES DE DILMA ROUSSEFF EN AFRIQUE ... 82

TABLEAU 13: LES 19 AMBASSADES BRÉSILIENNES EN AFRIQUE À PARTIR DE 2003 ... 83

TABLEAU 14: LES PAYS AFRICAINS AYANT OUVERT UNE AMBASSADE AU BRÉSIL À PARTIR DE 2003 ... 85

TABLEAU 15: ÉCHANGES COMMERCIAUX BRÉSIL/AFRIQUE (1995-2002)($USFOB) ... 88

TABLEAU 16: ÉCHANGES COMMERCIAUX BRÉSIL/AFRIQUE (2003-2010)($USFOB) ... 88

TABLEAU 17: ÉCHANGES COMMERCIAUX BRÉSIL/AFRIQUE (2011-2016)($USFOB) ... 89

TABLEAU 18: PRINCIPALES DESTINATIONS DES EXPORTATIONS BRÉSILIENNES ($USFOB) ... 92

TABLEAU 19: PRINCIPALES ORIGINES D’AFRIQUE DES IMPORTATIONS BRÉSILIENNES ($USFOB) ... 93

TABLEAU 20: LE PÉTROLE DANS LES IMPORTATIONS BRÉSILIENNES EN PROVENANCE D’AFRIQUE (1997-2016) 94 TABLEAU 21: QUELQUES GRANDES ENTREPRISES OPÉRANT EN AFRIQUE ... 99

TABLEAU 22:COOPÉRATION BRÉSILIENNE POUR LE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL (COBRADI)(EN $US VALEUR COURANTE)2005-2013 ... 102

TABLEAU 23: PAYS AYANT SIGNÉ LEUR PREMIER ACCORD DE COOPÉRATION TECHNIQUE AVEC LE BRÉSIL .... 104

TABLEAU 24: LES RÉGIMES POLITIQUES DES AMÉRIQUES ... 113

TABLEAU 25: VOYAGES PRÉSIDENTIELS PAR RÉGION DE FERNANDO HENRIQUE CARDOSO (1995-2002) ... 122

TABLEAU 26:VOYAGES PRÉSIDENTIELS PAR RÉGION DE LULA DA SILVA (2003-2010) ... 125

TABLEAU 27: VOYAGES PRÉSIDENTIELS PAR RÉGION DE DILMA ROUSSEFF (2011-2016) ... 129

TABLEAU 28: POURCENTAGE DES DISCOURS DES PRÉSIDENTS À TRAVERS LES RÉGIONS ... 132

TABLEAU 29:POURCENTAGE DE DISCOURS DES PRÉSIDENTS SELON LES OCCASIONS ... 133

TABLEAU 30 : POURCENTAGE DE DISCOURS DES PRÉSIDENTS SELON LE TYPE ... 134

TABLEAU 31: NOMBRE DE DISCOURS PAR PRÉSIDENT MENTIONNANT L’AFRIQUE SELON LES OCCASIONS ... 175

(10)

x

Liste des figures

FIGURE 1: FLUX COMMERCIAL ENTRE LE BRÉSIL ET L’AFRIQUE ENTRE 1995 ET 2016 ... 87

FIGURE 2: PROFIL DES PRODUITS BRÉSILIENS EXPORTÉS VERS L’AFRIQUE ENTRE 1995 ET 2016 ... 89

FIGURE 3: ÉVOLUTION DES PRODUITS BRÉSILIENS EXPORTÉS VERS L’AFRIQUE (1995-2002) ... 90

FIGURE 4: ÉVOLUTION DES PRODUITS BRÉSILIENS EXPORTÉS VERS L’AFRIQUE (2003-2010) ... 91

FIGURE 5: ÉVOLUTION DES PRODUITS BRÉSILIENS EXPORTÉS VERS L’AFRIQUE (2011-2016) ... 91

FIGURE 6: PART DE L’AFRIQUE DANS LE COMMERCE DU BRÉSIL SOUS CARDOSO (1995-2002) ... 95

FIGURE 7: PART DE L’AFRIQUE DANS LE COMMERCE DU BRÉSIL SOUS LULA DA SILVA (2003-2010) ... 96

FIGURE 8: PART DE L’AFRIQUE DANS LE COMMERCE DU BRÉSIL SOUS DILMA ROUSSEFF (2011-2016) ... 96

FIGURE 9: PART DE L’AFRIQUE DANS LES EXPORTATIONS ET IMPORTATIONS DU BRÉSIL (1995-2016) ... 97

FIGURE 10: NOMBRE D’ACCORDS DE COOPÉRATION TECHNIQUE SIGNÉS AVEC L’AFRIQUE (1995-2010) ... 104

FIGURE 11 : POURCENTAGE DE CITATION DES THÉMATIQUES DANS L’ENSEMBLE DU CODAGE ... 135

FIGURE 12 :POURCENTAGE DE CITATION DES THÉMATIQUES PAR PRÉSIDENT ... 136

FIGURE 13 : POURCENTAGE DE CITATIONS DES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA THÉMATIQUE « ÉCONOMIE ET COMMERCE » PAR PRÉSIDENT ... 137

FIGURE 14 :POURCENTAGE DE CITATION DE SOUS-THÈMES SIGNIFICATIFS DE LA THÉMATIQUE ÉCONOMIE ET COMMERCE PAR PRÉSIDENT ... 139

FIGURE 15 :POURCENTAGE DE CITATION DES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA THÉMATIQUE « INSERTION INTERNATIONALE » PAR PRÉSIDENT ... 143

FIGURE 16 : POURCENTAGE DE CITATION DE SOUS-THÈMES SIGNIFICATIFS DE LA THÉMATIQUE « INSERTION INTERNATIONALE » PAR PRÉSIDENT ... 144

FIGURE 17 :POURCENTAGE DE CITATION DES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA THÉMATIQUE « COOPÉRATION ET INTÉGRATION RÉGIONALE » PAR PRÉSIDENT ... 147

FIGURE 18 :POURCENTAGE DE CITATION DES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA THÉMATIQUE « LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS ÉCONOMIQUES ET SOCIALES » PAR PRÉSIDENT ... 149

FIGURE 19 :POURCENTAGE DE CITATION DES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA THÉMATIQUE « COOPÉRATION INTERNATIONALE » PAR PRÉSIDENT ... 152

FIGURE 20 :POURCENTAGE DE CITATION DES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA THÉMATIQUE « DÉMOCRATIE ET DROIT DE L’HOMME » PAR PRÉSIDENT ... 154

FIGURE 21 : LES POURCENTAGES DE CITATION DES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA THÉMATIQUE « INSTITUTIONS, ORGANISATIONS ET FORUMS INTERNATIONAUX » PAR PRÉSIDENT ... 157

FIGURE 22 : POURCENTAGE DE CITATION DES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA THÉMATIQUE « PAIX ET SÉCURITÉ INTERNATIONALES » PAR PRÉSIDENT ... 160

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xi

FIGURE 23 :POURCENTAGE DE CITATION DES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA THÉMATIQUE

« ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE’... 164

FIGURE 24:POURCENTAGE DE CITATION DES DIFFÉRENTES RÉGIONS DANS L’ENSEMBLE DES DISCOURS ... 171 FIGURE 25: POURCENTAGE DE CITATIONS DES RÉGIONS PAR PRÉSIDENT ... 172 FIGURE 26:ÉVOLUTION DANS LE TEMPS DU POURCENTAGE DE CITATION DE L’AFRIQUE (PAR RAPPORT À

L’AMÉRIQUE DU SUD) ... 173 FIGURE 27:CARTE CONCEPTUELLE DIMENSIONNELLE DES RÉGIONS ET DES THÉMATIQUES POUR CARDOSO .. 177 FIGURE 28: POURCENTAGES DE COOCCURRENCE DE L’AFRIQUE AVEC LES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE

L’INSERTION INTERNATIONALE POUR CARDOSO ... 178 FIGURE 29 : LES POURCENTAGES DE COOCCURRENCE DES SOUS-THÈMES DU MERCOSUR ET DE LA COOPÉRATION INTERRÉGIONALE AVEC LES RÉGIONS(HORS AMÉRIQUE DU SUD) POUR CARDOSO ... 180 FIGURE 30: LES POURCENTAGES DE COOCCURRENCE ENTRE LES DROITS DE L’HOMME ET LA DÉMOCRATIE AVEC

L’AFRIQUE ET L’AMÉRIQUE DU SUD POUR CARDOSO ... 181 FIGURE 31:CARTE CONCEPTUELLE DIMENSIONNELLE DES RÉGIONS ET DES THÉMATIQUES POUR LULA DA SILVA

... 182 FIGURE 32: POURCENTAGES DE COOCCURRENCE DE L’AFRIQUE AVEC LES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA

THÉMATIQUE INSERTION INTERNATIONALE POUR LULA DA SILVA ... 183 FIGURE 33: POURCENTAGES DE COOCCURRENCE DE L’AFRIQUE AVEC LES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA

THÉMATIQUE ÉCONOMIE ET COMMERCE POUR LULA DA SILVA ... 185 FIGURE 34: LES POURCENTAGES DE COOCCURRENCE DES SOUS-THÈMES DU MERCOSUR ET DE LA COOPÉRATION

INTERRÉGIONALE AVEC LES RÉGIONS (HORS AMÉRIQUE DU SUD) POUR LULA DA SILVA ... 187 FIGURE 35: POURCENTAGES DE COOCCURRENCE DE L’AFRIQUE AVEC LES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA

THÉMATIQUE COOPÉRATION INTERNATIONALE POUR LULA DA SILVA ... 188 FIGURE 36:: POURCENTAGES DE COOCCURRENCE DE L’AFRIQUE AVEC LES PRINCIPAUX SOUS-THÈMES DE LA

THÉMATIQUE LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS ÉCONOMIQUES ET SOCIALES POUR LULA DA SILVA ... 189 FIGURE 37:CARTE CONCEPTUELLE DIMENSIONNELLE DES RÉGIONS ET DES THÉMATIQUES POUR DILMA

ROUSSEFF ... 191 FIGURE 38: POURCENTAGE DE COOCCURRENCE DE LA THÉMATIQUE ÉCONOMIE ET COMMERCE AVEC LES

RÉGIONS POUR DILMA ROUSSEFF ... 193 FIGURE 39: LES POURCENTAGES DE COOCCURRENCE DES SOUS-THÈMES DU MERCOSUR ET DE LA COOPÉRATION

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Liste des abréviations

ABC : Agence brésilienne de coopération

ACDI : Agence canadienne de développement international AIEA : Agence internationale de l’énergie atomique

ALBA : Alliance bolivarienne pour les Amériques APE : Analyse de politique étrangère

APEX : Agence brésilienne de promotion des exportations et des investissements ASA : sommet Amérique du Sud-Afrique

ASPA : sommet Amérique du Sud-Pays arabes BASIC : Brésil, Afrique du Sud, Inde et Chine

BNDES : Banque nationale de développement économique et social BRICS : Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud

CAMEX : Chambre de commerce extérieur du Brésil CARICOM : Communauté caribéenne

CEA : Commission économique des Nations unies pour l'Afrique CEDEAO : Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest CEE : Communauté économique européenne

CELAC : Communauté des États latino-américains CFP : comparative foreign policy

COBRADI : Coopération brésilienne pour le développement international CPE : Changement de politique étrangère

CPLP : Communauté des pays de langue portugaise

CREDEN : Chambre des Relations extérieures et de la défense nationale CREON : Comparative Research on the Events of Nations

DC : Département culturel du ministère brésilien des Relations extérieures DEAF : Département pour l’Afrique du ministère des Relations extérieures FMI : Fonds monétaire international

FOCAC : Forum sur la coopération sino-africaine IBSA : Inde,Brésil et Afrique du Sud

IIRSA : Initiative d'intégration de l'infrastructure de la région sud-américaine IPEA : Institut de Recherche Économique Appliquée

IPRI : Institut de recherche de relations internationales

MDIC : ministère brésilien du Développement, de l’Industrie et du Commerce extérieur MERCOSUR : Marché commun du Sud

MINUSTAH : Mission des Nations unies en Haïti MPLA : Mouvement de libération de l’Angola MRE : Ministère des Relations extérieures du Brésil NSA : Agence nationale de sécurité américaine OEA : Organisation des États américains OIC : Organisation internationale du café OMC : Organisation mondiale du commerce ONU : Organisation des Nations unies

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xiii PMDB : Parti du mouvement démocratique brésilien PT : Parti des Travailleurs

RI : Relations Internationales

SACU : Union douanière d’Afrique australe

SWAPO : Organisation du peuple du Sud-ouest africain UA : Union africaine

UE : Union européenne

UNASUR : Union des nations sud-américaines

UNAVEM : Mission de vérification des Nations unies en Angola ZLEA : Zone de libre-échange des Amériques

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Mon fils, pourquoi entamer une chose que tu ne peux finir ? À moins que ce ne soit pour la connaissance.

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xv

Remerciements

J’aimerais avant tout remercier le Bon Dieu (Al-Hamdoulillah) et son prophète Mohammad (PSL).

Je tiens à remercier mon directeur de thèse, Monsieur Gordon Mace, sans qui cette thèse n’aurait jamais abouti. Ses conseils, ses critiques constructives, son soutien, sa patience ont été déterminants pour aider son pire étudiant à terminer cette thèse. Je ne le remercierai jamais assez. Merci beaucoup Monsieur Mace.

Mes remerciements vont aux membres de mon jury. Je remercie Monsieur Jean Crête d’avoir accepté d’être membre de mon jury de soutenance. Ses conseils, ses commentaires constructifs et sa disponibilité ont été essentiels dans la réalisation de cette thèse. Je tiens à remercier Monsieur François Gélineau d’avoir également accepté de siéger dans ce jury. Ses encouragements, son soutien pendant les moments difficiles ainsi que ses commentaires m’ont aidé à traverser les nombreuses péripéties de la thèse. Mes remerciements s’adressent aussi à Monsieur Jean Daudelin d’avoir accepté d’être membre de mon jury. Ses commentaires ont été constructifs et instructifs. Je remercie le président de mon jury, Monsieur Éric Montigny.

Je tiens à remercier tous les professeurs du département de science politique qui m’ont enseigné et dont le soutien, les conseils et les encouragements m’ont beaucoup aidé tout au long de ma thèse. Je pense notamment à M. Érick Duchesne, M. Louis Bélanger, M. Marcel Filion, M. Jonathan Paquin, M. Marc-André Bodet, etc. Je tiens aussi à rendre hommage à M. Carl Grenier qui nous a quittés et dont j’ai eu la chance d’être son étudiant.

Je tiens à remercier également l’ensemble du personnel actuel et ancien du département de science politique et des Hautes études internationales (HEI) pour leur appui, leur disponibilité et leur professionnalisme. Je tiens particulièrement à remercier Mme Amélie Tremblay, Mme Suzanne Bégin, Mme Virginie Robitaille, Mme Annie Gagnon, Mme Diane Gosselin, Mme Pauline Curien, Nicolas Diotte, Gabriel Coulombe, Daniel Navarro.

Cette thèse doit beaucoup à mes amis et collègues doctorants avec qui j’ai partagé les difficultés, les peines et les joies de la thèse. Mes remerciements vont à Brice Bado, Nicolas Falomir Lockhart, Fiacre Zoungni, Seyive Wilfried Affodegon, Anatole France Pitroipa, Hanen Khaldi, Ana Maura, Cyprien Bassamagne Mougnok. Les nombreuses discussions avec chacun d’eux ont été des sources de réflexion et d’inspiration. Je leur souhaite le meilleur pour leur thèse et leurs autres projets de vie.

Mes remerciements vont à mon ami et frère, Souleymane Diallo qui m’a accueilli à Québec alors qu’il n’était qu’étudiant, ainsi qu’à sa merveilleuse femme, Khadidiatou Baldé. Je ne les remercierai pas assez pour leur appui, leurs prières et leurs encouragements. Je ne peux

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xvi

pas oublier mon grand frère et ami Balla Diop dont les nombreux conseils m’ont aidé à tenir dans les moments les plus sombres de la thèse et dont les connaissances en analyse qualitative ont été déterminantes. Je remercie également sa femme Ndeye Khady Diop pour ses prières et sa générosité. Il en est de même pour Souleymane Ndoye et sa femme Bineta Gaye et leurs merveilleux enfants.

Cette soutenance n’aurait pas été possible sans l’appui, les prières et les encouragements de mes ami(e) s. Merci à vous : Moustapha Fall (mon jumeau), Khadidja Sow, Binetou Ka, Astou Fall, Iba Der Diop, Oumar Ba, Abibatou Ba, Seydou Tall, Adji, Mame Aminata Ndaw, Pape Meissa Sall, Clara Fall, , Andy Faye, Bineta Faye, Hawa Niang, Momar Ndiaye, Marcel Faye (mon ami et frère), Henriette Gomis, Serigne Mohammed Diop, Ndeye Dieynaba Ndiaye, Pape Camara, Marianne Ouattara Peters, Ousmane Lô, Moumy Lô, Alioune Sène, Assane Sène, Bassirou Gueye, Saliou Ndiaye, Serigne Diop, Modou Senghor, Melphys, Thierno Diop etc.

Je remercie ma famille qui m’a toujours soutenu dans mes études. Je suis éternellement reconnaissant envers mon cousin Lamine Senghor qui m’a accueilli et soutenu en France, envers mes sœurs Amy et Yandé et mon frère, Mindor. Je remercie ma merveilleuse mère, Mariama Senghor qui a tant sacrifié pour ma réussite et mon bonheur. Son amour, ses prières, ses encouragements, sa compréhension ont été les fondements de ma vie et de cette thèse. Je suis éternellement reconnaissant envers ma merveilleuse femme, Ndeye Aichatou Ndaw, pour son soutien indéfectible et son amour.

Cette thèse est dédiée à mon défunt père, Babacar Sarr. Sa disparition lors de ma première année de thèse a été une difficile épreuve pour moi. Il a tout sacrifié pour la réussite de mes études et il a toujours été la source d’inspiration de cette thèse. La soutenance de cette thèse est le plus petit hommage que je puisse lui rendre, car je ne pourrai jamais être assez reconnaissant envers lui. Mon vieux lion je t’aime. Cette thèse est également dédiée à mes neveux Mohammed Diouf et Mohammed Mbayang Sall qui nous ont quittés trop jeunes en 2018.

(17)

INTRODUCTION

Dans l’étude des Relations internationales (RI), l’analyse de politique étrangère (APE) (ou FPA pour Foreign policy analysis) occupe une place prépondérante. Nombreux sont les centres, les revues, les études dédiés à l’APE et la littérature se caractérise par une richesse en matière d’approches théoriques. Cependant, cette littérature s’est davantage concentrée sur l’étude du processus décisionnel en matière de politique étrangère et des acteurs qui y interviennent. Si les années 1960 ont vu l’intérêt grandissant pour l’APE comme objet d’étude, ce n’est que dans les années 1980 que les chercheurs se sont intéressés au changement de politique étrangère (CPE) en analysant les facteurs externes (internationaux) et internes (nationaux) qui amènent les dirigeants d’un État à changer la politique étrangère de leur pays.

On peut citer les travaux précurseurs de Robert Gilpin avec son livre War and Change in world politics (1981), de Kalevi Holsti avec son livre Why Nations Realign : foreign policy restructuring in the postwar world (1982) ou encore de Kjell Goldmann avec son ouvrage Change and stability in foreign policy : the problems and possibilities of Détente paru en 1988. Avec la fin de la guerre froide que les grandes théories classiques des RI n’ont pas réussi à prédire, la littérature sur le CPE s’est développée notamment au plan théorique comme nous le verrons dans la prochaine section.

Toutefois, les avancées théoriques dans l’étude du CPE n’ont pas été suivies de façon significative par un développement des études empiriques et quand elles existent, elles portent davantage sur les pays occidentaux. Ainsi, à l’image de l’APE, l’analyse du CPE porte davantage sur les pays occidentaux, au détriment des pays du Sud. C’est à cette première lacune que notre étude tente d’apporter une contribution en s’intéressant au changement de la politique étrangère du Brésil à partir de 2003.

Il est de plus en plus apparent que, soucieux de s’affirmer davantage sur l’échiquier international, tant dans le domaine politique que dans le domaine économique, les pays émergents et en particulier les pays BRICS se dotent d’une véritable politique diplomatique internationale (Trépant, 2008). Ainsi, l’hémisphère sud semble être une zone d’influence où

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ces pays cherchent à s’implanter et le continent africain en est une parfaite illustration. Cour arrière des anciennes puissances coloniales, l’Afrique représente depuis quelques décennies et plus particulièrement depuis le début des années 2000 une zone de forte rivalité politique et économique entre les puissances traditionnelles et les puissances émergentes. Un exemple frappant est la concurrence commerciale que se livrent les États-Unis et la Chine en Afrique. Ses inépuisables ressources naturelles, son vaste marché intérieur (plus d’un milliard d’habitants) son appui politique et stratégique non négligeable font entre autres de ce continent une priorité pour les puissances actuelles.

La première décennie du 21e siècle a vu l’émergence politique et surtout économique du Brésil sur la scène internationale. La question qui nous intéresse à cet égard concerne la réorientation de la diplomatie brésilienne à l’égard des pays du Sud et en particulier à l’égard de l’Afrique avec l’arrivée au pouvoir du président Luis Inácio « Lula » da Silva en 2003. En effet, cette élection s’est traduite par une volonté affichée du nouveau gouvernement de nouer et de développer des relations solides avec les pays du Sud, diversifiant ainsi ses partenaires et se donnant une stature internationale pour garantir davantage son autonomie par rapport aux puissances occidentales traditionnelles et en particulier par rapport aux États-Unis. C’est ce que Vigevani et Cepaluni (2007) ont appelé « l’autonomie à travers la diversification ».

Des années 1960 marquées par la vague d’indépendance des États africains, aux années 1990, le mot qui pourrait qualifier la nature des relations entre l’Afrique et le Brésil est discontinuité. En effet, entre les années 1960 et les années 1980, les relations afro-brésiliennes étaient certes plus intenses que pendant la première moitié du 20e siècle, mais elles étaient plutôt axées sur le commerce que sur la diplomatie (Saraiva, 2010 ; De Grandsaigne, 1989 ; White, 2010). Les années 1990 sous la présidence de Fernando Henrique Cardoso seront marquées par un certain éloignement entre le Brésil et l’Afrique notamment à cause de la volonté brésilienne de se rapprocher davantage des pays développés (White, 2010). La présidence Lula da Silva (2003-2011) marquera le nouvel engagement du Brésil en Afrique avec une politique africaine mieux affirmée d’un Brésil émergent.

En effet, sous la présidence Lula da Silva, la politique étrangère « active et fière » (Almeida, 2004a) du Brésil a fait de l’Afrique sa deuxième priorité de politique internationale (Patriota,

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2011 : 64) ce qui constitue en soi une nouveauté. Au-delà donc des liens historiques et culturels qui unissent le Brésil au continent africain, le renforcement des relations diplomatiques, commerciales ainsi que de la coopération en matière de développement avec l’Afrique a illustré la nouvelle dynamique des relations afro-brésiliennes, les anciennes colonies lusophones du continent servant de points d’ancrage1. C’est donc dans ce contexte général qu’il semble intéressant de porter un regard sur l’intérêt du Brésil, première puissance économique de l’Amérique latine, pour l’Afrique.

La littérature sur la politique africaine du Brésil s’est beaucoup intéressée aux dimensions de la réorientation de la politique africaine du Brésil à partir de 2003. Si elle souligne assez bien le calcul stratégique brésilien dont le principal objectif est d’assurer l’insertion internationale du Brésil au niveau politique et économique (Ribeiro, 2007; de Freitas Barbosa et al., 2009; Leite, 2011; Penha, 2011; Saraiva, 2002; White, 2010; Kourliandsky, 2014), la littérature n’a pas abordé de façon satisfaisante le lien entre cette réorientation et les perceptions des principaux décideurs brésiliens en matière de politique étrangère.

Trois principales raisons justifient notre intérêt pour l’étude du CPE. Tout d’abord, à l’image de l’APE, le CPE constitue un champ d’études récent qui par conséquent ne demande qu’à être approfondi. L’avantage de s’intéresser à un domaine d’études récent réside dans les nombreuses opportunités de maîtrise des connaissances qu’il offre et les multiples perspectives de recherche qu’il ouvre au cours de son développement.

La deuxième raison est relative à l’appel lancé par plusieurs chercheurs d’apporter une plus grande précision par rapport à l’objet d’étude en matière de politique étrangère. En effet, en spécifiant que l’on s’intéresse au changement de la politique étrangère d’un pays, on précise davantage notre variable dépendante, c’est-à-dire le véritable phénomène que l’on souhaite analyser et son lien avec des sources de changement possible. Il s’agit donc de répondre aux

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critiques souvent émises à l’encontre de nombreuses études de politique étrangère quant à leur véritable objet d’étude.

La troisième raison qui est liée aux deux premières, porte sur l’importance de développer les études empiriques sur le CPE. En effet, si des efforts ont été entrepris dans la littérature pour fournir un cadre théorique à l’étude du CPE comme nous l’avons vu supra, il n’en reste pas moins que des efforts doivent être faits dans l’application des modèles théoriques à des cas empiriques (Gustavsson, 1999; Huxsoll, 2003; Alden et Aran, 2012). Il est vrai qu’il existe un certain nombre d’études empiriques sur le CPE (Hallenberg, 1984; Moon, 1985; Hagan, 1989; Volgy et Schwarz, 1991 ; Rosati et al., 1994; Jian, 1996; Gustavsson, 1998; 1999; Oldfield, 1998; Ataman, 1999; Barnett, 1999; Kleistra et Mayer, 2001 ; Rynhold, 2007; Eidenfalk, 2009; Möller et Bjereld, 2010; Yang, 2010; Doeser, 2011; Brommesson et Ekengren, 2012; Sposito, 2013). Toutefois, ces études restent marginales, ce qui fait du CPE un sujet à explorer davantage (Eidenfalk, 2009; Doeser, 2011; Alden et Aran, 2012).

Notre choix du cas de la politique africaine du Brésil s’explique par trois principales raisons qui répondent à autant de lacunes. Premièrement, il s’agit pour nous d’apporter une modeste contribution pour réduire ce que Robert Gilpin a appelé « le biais occidental » (1981 : 6), c’est-à-dire la grande domination occidentale, en particulier celle des États-Unis dans l’étude des relations internationales (Acharya et Buzan ; 2010) et dans l’APE. En effet, comme le souligne à juste titre Morin (2013) « À l’image des relations internationales dans leur ensemble, l’APE s’est développée dans les universités américaines et c’est, aujourd’hui encore, aux États-Unis que se situe son centre de gravité » (2013 : 237-238). De plus, « c’est encore aux États-Unis que l’on retrouve la majorité des centres de recherches, des revues scientifiques, des bases de données et des conférences annuelles consacrés à l’APE » (Morin, 2013 : 238). Ceci conduit indubitablement à un amalgame entre l’analyse de la politique étrangère en général et l’analyse de la politique étrangère américaine, même si de plus en plus d’études s’intéressent aux politiques étrangères d’autres pays en essayant de prendre en compte leurs spécificités (Prémont, 2011 ; Morin, 2013).

La deuxième raison de notre choix est liée à notre intérêt pour les relations entre l’Afrique et les pays émergents en particulier ceux du groupe des BRICS. Une question pourrait alors

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nous être posée : pourquoi le Brésil et pas la Chine ou l’Inde par exemple ? Ce choix s’explique par le fait que le retour du Brésil sur la scène africaine est plus récent que celui de la Chine et celui de l’Inde. En effet, c’est dès la fin des années 1990 que les deux puissances asiatiques ont commencé à redéfinir leurs stratégies par rapport à l’Afrique après des décennies d’éloignement (Gaye, 2006 ; Gazibo et Mbabia, 2010 ; Gazibo et Chantal, 2011 ; Ndiaye, 2013). Quant à lui, le Brésil a entamé la redynamisation de sa politique africaine au début des années 2000 avec la présidence Lula da Silva, politique qui comme nous le verrons par la suite, a constitué une véritable rupture par rapport aux décennies précédentes.

Cette récence est indubitablement liée à la troisième raison qui est la nécessité de développer la littérature sur la politique africaine du Brésil et plus particulièrement sur le changement qui s’est opéré à partir de 2003. En effet, la richesse de la littérature consacrée aux politiques africaines de la Chine et de l’Inde n’est plus à démontrer et elles font encore aujourd’hui l’objet de nombreux écrits. Ceci n’est pas le cas de la politique africaine du Brésil, notamment dans la littérature francophone, voire dans la littérature anglophone. Le Brésil est devenu un acteur majeur sur la scène internationale et l’Afrique poursuit son ouverture vers les puissances émergentes au détriment des grandes puissances coloniales d’antan. Si on ajoute à cela les liens historiques, culturels et raciaux qui unissent l’Afrique au Brésil comme avec nul autre pays des BRICS, il devient de plus en plus évident que l’analyse des relations afro-brésiliennes au 21e siècle revêt un caractère pertinent et constitue un domaine qui ne demande

qu’à être connu davantage.

Tous ces aspects nous amènent à penser que l’étude de la politique étrangère d’un pays émergent comme le Brésil par rapport à un continent en mouvement comme l’Afrique est pertinente à mener. D’abord parce que cela nous permettra de confronter la politique étrangère brésilienne à la richesse et à la diversité théoriques de l’analyse de politique étrangère et plus précisément de la littérature relative à l’étude du changement de politique étrangère. Ensuite, c’est une opportunité pour fournir une meilleure compréhension de la

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politique africaine du Brésil, et plus précisément son changement d’orientation observé dès 2003.

Au niveau théorique, notre thèse s’intéresse donc au phénomène du changement de politique étrangère d’un État à travers le cas de la réorientation de la politique africaine du Brésil à partir de 2003. Il s’agit de s’appuyer sur la littérature théorique pour déterminer les facteurs explicatifs qui ont conduit le gouvernement brésilien à impulser une nouvelle dynamique à ses relations avec le continent africain, notamment dans le domaine diplomatique, commercial et dans la coopération en matière de développement. Ainsi, nous nous interrogeons sur la place du leader – ici le chef de l’État – dans l’analyse de politique étrangère d’une période à une autre et dans le cas du Brésil qui nous intéresse, il s’agit pour nous de montrer que la différence de vision et de perception entre les présidents Cardoso et Lula est le principal facteur explicatif de la réorientation de la politique africaine du Brésil à partir de 2003.

Le premier chapitre est consacré aux revues de littérature empirique et théorique. La première porte sur la politique étrangère du Brésil – notamment sur celle relative à l’Afrique – tandis que la seconde revient sur les théories qui sont à la base de l’approche que nous avons adoptée. D’une part, ce chapitre nous permet donc de comprendre la manière dont la littérature décrit la réorientation de la politique africaine du Brésil et d’autre part, il présente la manière dont la théorie peut expliquer cette réorientation. Le deuxième chapitre qui est relatif au cadre d’analyse met en exergue la possible relation entre la réorientation de la politique africaine du Brésil et la vision du leader, et il jette les bases méthodologiques de notre recherche autour de l’analyse de contenu des discours présidentiels. Le troisième chapitre décrit l’évolution de la politique africaine du Brésil entre 1995 et 2016, soit entre les présidences de Cardoso, de Lula da Silva et de Dilma Rousseff. La comparaison des données relatives à la coopération diplomatique, commerciale et de développement permettra de confirmer ou non si l’arrivée de Lula da Silva a constitué une période d’inflexion importante. Dans le quatrième chapitre, il s’agira d’analyser l’évolution et les caractéristiques de la diplomatie présidentielle brésilienne depuis le retour à la démocratie en 1985 afin de comprendre le cadre institutionnel et politique faisant du chef de l’État brésilien un acteur primordial de la politique étrangère. Les deux derniers chapitres portent sur l’analyse des

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données — les discours présidentiels – et leur interprétation dans une perspective comparative afin de vérifier notre hypothèse sur la prééminence du changement de vision de politique étrangère du leader dans l’explication de la réorientation de la politique africaine du Brésil à partir de 2003.

En guise de conclusion, nous aborderons les principales contributions de notre recherche, ainsi que ses limites théoriques, analytiques et méthodologiques. Nous définirons par ailleurs les différents axes de recherche que notre travail permettra de dégager pour des études futures.

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CHAPITRE 1 : L’ÉTUDE DU CHANGEMENT DANS LA POLITIQUE

ÉTRANGÈRE BRÉSILIENNE

1.1. Introduction

Notre travail a comme point de départ un constat empirique simple : l’observation à travers la littérature de la réorientation de la politique étrangère et en particulier africaine du Brésil à partir de 2003. Toutefois, avant d’aborder en profondeur les manifestations de cette réorientation dans la suite de notre travail, deux choses nous semblent essentielles à préciser. D’abord décrire la manière dont la littérature aborde cette réorientation et ensuite la manière dont la théorie peut nous permettre de comprendre davantage cette réorientation de la politique africaine du Brésil.

Ce premier chapitre s’articulera autour de quatre sections. La première section concerne la politique étrangère générale du Brésil à partir de 2003 tandis que la deuxième, plus précise, s’intéressera à la politique étrangère du Brésil vis-à-vis de l’Afrique. Dans ces deux premières sections, il s’agira pour nous, en allant du général au particulier, de présenter à travers la littérature la nouvelle dynamique que l’administration de Lula da Silva a insufflé globalement à la politique étrangère brésilienne — avec un ancrage dans les relations Sud-Sud — et plus particulièrement à ses relations avec le continent africain. Dans la troisième section, nous effectuerons une revue de la littérature théorique sur l’analyse du changement de politique étrangère (CPE) afin de déterminer la manière dont la théorie peut nous aider à comprendre notre cas d’étude. Cela nous conduira dans la dernière section à la formulation de notre question spécifique de recherche.

Ainsi, le travail qui sera effectué dans ce premier chapitre nous permettra non seulement de présenter la réorientation de la politique africaine du Brésil, mais aussi de déterminer à travers la littérature théorique, un ensemble de facteurs explicatifs de cette réorientation que nous aborderons davantage dans le cadre analytique.

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1.2. La Politique étrangère du Brésil sous Lula da Silva : entre autonomie et insertion internationale

Une des grandes caractéristiques de l’analyse de la politique étrangère du Brésil depuis 2003 est le consensus dans la littérature pour reconnaître la nouvelle dimension prise par la politique extérieure du pays. La première décennie du 21e siècle a vu l’émergence politique et surtout économique du Brésil sur la scène internationale (Cervo, 2003 ; 2010 ; Rolland et Chassin, 2004 ; Rouquié, 2006 ; Rolland et Lessa, 2010 ; Saraiva, 2013). Conscient de l’opportunité dont disposait son pays pour s’affirmer davantage comme un acteur international de premier plan dans un contexte où l’ordre mondial se caractérise de plus en plus par un plus grand multilatéralisme, le président Lula da Silva a donné une nouvelle dimension à la politique étrangère brésilienne. Il ne s’agit pas d’une rupture par rapport à la politique étrangère de l’administration précédente du président Cardoso, mais d’une nouvelle dynamique impulsée afin d’atteindre un vieil objectif de la politique étrangère brésilienne :

l’autonomie.

C’est ce que souligne Patrick Howlett-Martin en rappelant que « Luiz Inácio da Silva (Lula) a mis en œuvre au cours de ses deux mandats présidentiels (2003-2010), une politique extérieure ambitieuse, nettement plus “affirmée” que celle de son prédécesseur, Fernando Henrique Cardoso (1994-2002), même si elle s’inscrit pour une partie dans sa continuité. Ses fondements sont plus idéologiques et ses priorités mieux définies. » (2012 :13)

La recherche d’une plus grande autonomie sur la scène internationale a toujours constitué un facteur déterminant de la diplomatie brésilienne et la période Lula da Silva n’est pas une exception (Pasquarelli, 2010). Kourliandsky (2004) décrit assez bien cet aspect lorsqu’il déclare que :

La véritable surprise de la mandature Lula n’a en aucune manière été l’expression attendue d’une rhétorique souverainiste, panaméricaine, et « tiers-mondiste ». C’est en revanche la mise en place d’une pratique diplomatique cherchant pacifiquement, mais avec méthode à dégager des espaces d’autonomie qui a surpris et parfois désarçonné les partenaires du Brésil, les mieux disposés comme les plus réservés. Habitués à gérer une diplomatie latino-américaine, de posture souvent irrationnelle, et en tous les cas, exprimée avec d’autant plus de radicalité qu’elle est rarement accompagnée d’une stratégie en permettant la faisabilité, les gouvernements du « G8 », comme ceux d’Amérique latine et d’autres continents, ont été pris de court dans un premier temps et

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contraints assez vite de prendre en compte un acteur mobile et imaginatif occupant un terrain diplomatique inédit. (2004 : 208).

Pour le gouvernement de Lula da Silva, le principal facteur incitatif à une évolution de la politique étrangère du Brésil est la consolidation de l’autonomie et de l’insertion internationale du pays à travers une diversification de ses partenaires politiques et économiques. Cette dimension que Vigevani et Cepulani appellent « l’autonomie par la diversification » (2007 : 1309) explique les quatre principaux axes de la politique extérieure du géant sud-américain sous Lula da Silva. Il s’agit de la recherche d’un plus grand équilibre sur la scène internationale en favorisant le multilatéralisme; du renforcement des relations bilatérales et multilatérales afin d’augmenter l’influence du Brésil dans les négociations politiques et économiques internationales; de plus importants échanges dans le domaine économique, financier, technologique et culturel; de la mise en place d’une politique permettant d’éviter des accords pouvant compromettre le développement économique du pays (Vigevani et Cepulani; 2007 : 1314).

Pour Brasilia, ceci nécessitait non seulement un maintien de relations politiques cordiales avec les puissances occidentales, mais aussi une intensification des relations avec les autres puissances émergentes comme la Chine et l’Inde, un approfondissement de l’intégration en Amérique du Sud, une consolidation des relations avec les pays africains et une plus grande présence dans les organisations et institutions internationales comme l’Organisation des Nations unies (ONU), dont la réforme du Conseil de sécurité constitue une demande du Brésil. Vigevani et Cepulani distinguent cette autonomie par la diversification de deux autres autonomies qui ont marqué la diplomatie brésilienne lors des dernières décennies : « l’autonomie par la distance » durant la guerre froide et « l’autonomie par la participation » au cours des années 1990 (2007 : 1309). Si la première se rapporte à une politique étrangère visant la sauvegarde de la souveraineté politique et économique nationale face aux politiques des grandes puissances, la seconde quant à elle fait référence à une politique étrangère qui prône une participation dans la définition des règles de fonctionnement du système international.

Valença et Carvalho (2014) s’inscrivent dans cette même perspective montrant un calcul stratégique qui a pour objectif d’assurer l’autonomie du Brésil. Ils rappellent que la politique

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étrangère brésilienne s’est traditionnellement construite autour de deux axes : la quête de son autonomie politique et économique et la volonté d’occuper un plus grand rôle dans la politique internationale. Pour ces auteurs, « l’autonomisme pragmatique » (2014 : 72) qui a caractérisé la présidence Lula da Silva poursuivait le même but que « l’institutionnalisme pragmatique » sous la présidence Cardoso, mais il diffère de cette dernière par l’importance accordée à la coopération Sud-Sud ainsi que par le dynamisme impulsé par Lula da Silva (Almeida, 2009 ; Flemes, 2009a ; Lessa, 2010 ; Saraiva, 2013).

À travers donc cette question de l’autonomie, c’est la volonté du Brésil de garantir son

insertion internationale qui est abordée dans la littérature. En effet, pour Brasilia, la

consolidation de son autonomie dépend beaucoup de la place que le pays occupe au sein du système international et ceci en fait un axe fort de sa politique étrangère. Que ce soit au plan régional ou mondial, le Brésil de Lula da Silva a clairement montré son ambition d’être un acteur incontournable (Soares de Lima et Hirst, 2006 ; Almeida, 2009 ; Rolland et Lessa, 2010 ; Milani, 2011). La littérature s’est surtout intéressée à la manière dont le Brésil a fondé sa stratégie d’insertion sur la scène internationale pour comprendre les véritables déterminants de la politique étrangère du Brésil. Amado Luiz Cervo (2010) considère que le Brésil de Lula da Silva a adopté une stratégie basée sur « un mode de mondialisation industriel, caractérisé à ce stade de maturité du processus de développement par deux aspects essentiels : le multilatéralisme réciproque et l’internationalisation économique » (2010 : 11). Le multilatéralisme réciproque correspond à l’instauration de règles de coopération multilatérale qui soient bénéfiques à tous les États participants alors que l’internationalisation économique renvoie à la volonté brésilienne « d’avoir des compagnies fortes pour concurrencer à l’échelle mondiale avec le soutien logistique de l’État et le soutien financier des institutions nationales, telles que la Banque nationale de développement économique et social (BNDES) et la Banque du Brésil. » (Cervo, 2010 : 21) Ceci est censé favoriser le développement économique du pays.

Pour atteindre son objectif d’insertion internationale à travers un leadership régional et un fort activisme, le gouvernement brésilien a milité en faveur d’un « multilatéralisme universel » (Saraiva, 2013 : 73) avec notamment le renforcement de la coopération Sud-Sud. Pour Miriam Gomes Saraiva, la politique étrangère brésilienne sous Lula da Silva, plus

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particulièrement lors de son second mandat (2007-2011), a constitué ce que Charles Hermann a appelé un « changement de programme » (1990 : 6), c’est-à-dire un changement des méthodes ou des ressources utilisées pour atteindre les objectifs de politique étrangère. Par ailleurs, le Brésil de Lula a su profiter du contexte des années 2000 marqué par une plus grande fragmentation du système international par rapport à la décennie précédente avec l’émergence de nouveaux acteurs qui posent une redéfinition de l’ordre international.

L’idée largement partagée dans la littérature est que l’orientation et le dynamisme impulsés par le gouvernement brésilien en matière de politique étrangère répondent à un calcul stratégique visant à assurer au Brésil un rôle de premier plan dans les affaires internationales que ce soit au plan diplomatique, économique et commercial. Octavio Amorim Neto (2011) abonde dans ce sens lorsqu’il rappelle que la politique étrangère brésilienne a toujours été influencée par des facteurs systémiques comme la position du Brésil dans la hiérarchie mondiale au niveau économique et militaire ou les préférences des États-Unis. La période Lula da Silva ne fait pas office d’exception. Toutefois, Neto n’ignore pas l’influence des facteurs internes à la fois idéologiques et institutionnels comme l’idéologie du président ou de son cabinet, la force législative du parti au pouvoir ou encore l’influence de l’Itamaraty2.

Neto rejoint ainsi le consensus qui veut que l’évolution de la politique étrangère d’un État réponde à des facteurs externes et internes.

Justement, un de ces facteurs internes peut être l’idéologie du parti au pouvoir et Paulo Roberto de Almeida décrit assez bien cette position lorsqu’il considère que :

En s’attachant aux premiers pas, en matière d’action extérieure, du président et de ses principaux assistants dans ce secteur, c’est-à-dire du ministre, du secrétaire général de l’Itamaraty et du conseiller présidentiel une première constatation que l’on pourrait faire c’est qu’il s’agit d’une diplomatie évolutive, dans ses caractéristiques formelles et conceptuelles comme dans son modus operandi, sa pratique concrète. Le nouveau gouvernement a certainement mis à profit le réalisme typique de la diplomatie professionnelle brésilienne, mais il a aussi cherché à mettre en avant certains des objectifs chers au vieux « cahier de route » international du PT, fait d’options préférentielles pour les forces progressistes et opposées à un ordre mondial dominé par les pays capitalistes avancés, tout en les combinant au pragmatisme qu’il est normal d’espérer d’un gouvernement établi. (2004a : 222)

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Ainsi, l’orientation de la politique extérieure du Brésil à partir de 2003 marquée par une consolidation des liens avec les pays du tiers-monde et avec les puissances émergentes est indissociable de l’idéologie du parti de Lula da Silva, le Parti des Travailleurs (PT). (Almeida, 2002 ; 2004a ; 2004b ; 2005 ; 2009). Ceci peut s’expliquer par le fait que « la politique étrangère est l’espace de politiques publiques où le président a le plus de marge de manœuvre et de se rapprocher des considérations de son parti. Il n’est pas étonnant d’entendre dès lors des discours à tendance universaliste, solidaire et défendant la contre-hégémonie » (Duarte, 2013 : 92). Rubens Ricupero abonde dans ce sens lorsqu’il souligne la corrélation entre la politique étrangère brésilienne, l’idéologie du PT et le charisme de Lula da Silva (2010a ; 2010b). Il souligne que d’une part, la stratégie d’insertion internationale du Brésil porte sur quatre axes principaux : reconnaissance du Brésil comme un acteur international de premier plan ; la consolidation des conditions économiques internationales favorables au développement du pays ; le renforcement de la coopération Sud-Sud ; l’édification d’un espace politico-stratégique et économico-commercial en Amérique du Sud à travers l’expansion du Marché commun du Sud (MERCOSUR) (Ricupero, 2010a : 29). D’autre part, il explique que cette stratégie est inspirée de l’idéologie anti-impérialiste et tiers-mondiste du PT.

La nouvelle orientation de la politique étrangère du Brésil s’observe non seulement dans sa dynamique et son engagement, mais aussi à travers le processus décisionnel avec « une pluralisation des acteurs et l’essor de la diplomatie présidentielle » (Cason et Power, 2009 : 117) ce qui fait que l’élaboration de la politique extérieure n’est plus uniquement l’apanage de l’Itamaraty.

Globalement, l’intérêt de la littérature pour la politique étrangère du Brésil porte sur la recherche d’autonomie et l’ambition d’insertion internationale qui sont clairement considérées comme les principaux facteurs de la réorientation de la politique extérieure brésilienne. Cet intérêt a vraisemblablement conduit à une plus grande attention concernant la place de la coopération Sud-Sud qui est devenue un des axes prioritaires de la diplomatie brésilienne sous la présidence Lula (Burges, 2005 ; Ribeiro, 2007 ; Vigevani et Cepulani, 2007 ; Amorim, 2010 ; Leite, 2011 ; Saraiva, 2013). La coopération Sud-Sud constitue donc pour Brasilia une stratégie d’insertion internationale illustrée par les efforts entrepris par

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Brasilia concernant l’intégration régionale en Amérique du Sud ; le renforcement des relations avec les autres pays émergents et plus particulièrement avec les pays du groupe des BRICS, et le rapprochement avec l’Afrique (Soares de Lima et Hirst, 2006 ; Flemes, 2009b ; Ventura, 2010 ; Sturaro et Junior, 2012). Miriam Gomes Saraiva (2013) résume assez bien la situation lorsqu’elle affirme que : « Avec une vision différente de la politique étrangère du gouvernement Cardoso, la diplomatie autonomiste de Lula est allée chercher des stratégies plus directes pour améliorer l’autonomie des actions brésiliennes ; renforcer l’universalisme à travers la coopération Sud-Sud et les instances multilatérales, et renforcer le rôle proactif du Brésil dans la politique internationale. » (Saraiva, 2013 : 76)

Par rapport au continent africain, il existe un large consensus dans la littérature pour admettre que c’est avec l’arrivée de Lula da Silva au pouvoir que Brasilia a redonné une nouvelle dynamique sans précédent à sa politique étrangère.

1.3. L’Afrique dans le calcul stratégique du Brésil de Lula da Silva

Il apparaît clairement dans la littérature que la politique africaine du Brésil sous le gouvernement Lula da Silva est une des grandes illustrations de l’évolution de la politique étrangère brésilienne dans son renforcement de la coopération Sud-Sud. En effet, si les années 1990 ont été marquées par un certain éloignement entre l’Afrique et le Brésil, le début des années 2000 verra la mise en place par le gouvernement brésilien d’une politique de rapprochement avec le continent africain. Sous la présidence de Fernando Henrique Cardoso, les relations diplomatiques et commerciales étaient essentiellement orientées vers les pays africains de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP)3 et vers les partenaires historiques comme l’Afrique du Sud et le Nigeria. Contrairement à son prédécesseur, le président Lula da Silva a impulsé une nouvelle dynamique à la politique africaine de son pays en allant au-delà des relations avec les pays lusophones du continent (Ribeiro, 2007 ; Lafargue, 2008 ; Lechini, 2008 ; Cervo, 2010 ; Saraiva, 2010 ; White, 2010 ; Leite, 2011 ; Miyamoto, 2011 ; Rizzi et al., 2011). Cette redéfinition de la politique africaine du Brésil a

3 La CPLP a été créée en 1996 et outre le Brésil, elle regroupe le Portugal, l’Angola, le Cap-Vert, la Guinée-Bissau, le Mozambique, Sao Tomé-et-Principe et le Timor oriental

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notamment été démontrée par un dynamisme diplomatique et commercial sans précédent. Lyal White (2010) souligne que la stratégie du Brésil en Afrique sous la présidence Lula reposait sur trois piliers : « la diplomatie politique, le néomercantilisme et la coopération au développement » (2010 : 228). Deux aspects sont particulièrement présents dans l’analyse de la réorientation de la politique africaine du Brésil dès 2003.

Le premier aspect concerne les principaux axes stratégiques de cette réorientation. Trois aspects sont généralement décrits dans la littérature comme les principaux leviers du rapprochement entre l’Afrique et le Brésil sous la présidence Lula. Il y a la consolidation des relations diplomatiques entre l’Afrique et le Brésil, la hausse des échanges commerciaux et des investissements brésiliens en Afrique et l’importance de la coopération en matière de développement, notamment dans le domaine de la coopération technique (Ribeiro, 2007; Lechini, 2008; de Freitas Barbosa et al., 2009; White, 2010; Iglesias et Costa, 2011; Leite, 2011; Miyamoto, 2011; Rizzi et al., 2011; Santander, 2011; Muggah et Hamann, 2012; Inoue et Vaz, 2012; Stolte, 2012).

À titre d’illustration, au niveau diplomatique, au-delà des nombreuses visites du président Lula en Afrique, six ambassades ont été rouvertes durant son premier mandat (Éthiopie, Tanzanie, Cameroun, République démocratique du Congo, Togo et Zambie) et six nouvelles ont été ouvertes (Guinée, Guinée équatoriale, Soudan, Bénin, Botswana, Sao Tomé et principe) (de Freitas Barbosa et al., 2009 ; Seibert, 2011). Sur les 35 ambassades ouvertes à l’étranger par Brasilia entre 2003 et 2011, 16 l’ont été en Afrique (Santander, 2011) où le pays compte actuellement plus de représentations diplomatiques que le Royaume-Uni par exemple4. Parallèlement, le nombre d’ambassades africaines à Brasilia est passé de 13 à 29 entre 2003 et 2010 (Patriota, 2011 ; Santander, 2011).

Au niveau commercial, entre 2000 et 2011, les échanges commerciaux entre le Brésil et le continent sont passés de 4,2 milliards $ US à 27,6 milliards $ US (Stolte, 2012). Sur le plan de la coopération au développement, la suppression ou la réduction de la dette de pays

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africains, l’aide dans la lutte contre la pauvreté et contre le sida, l’offre d’assistance technique notamment dans le secteur agricole ont été des instruments largement utilisés (de Freitas Barbosa et al., 2009; White, 2010; Stolte, 2012).

Le second aspect porte sur les facteurs régissant le calcul stratégique à la base de la réorientation de la politique africaine du Brésil. Un des plus grands spécialistes des relations afro-brésiliennes, José Flavio Sombra Saraiva (2002) évoque cinq raisons principales au renouveau de la politique africaine du Brésil à partir de 2003 (Saraiva ; 2002 : 13-17). Il y a tout d’abord l’importance du continent africain dans la stratégie d’insertion internationale de Brasilia, chose qui est largement partagée dans la littérature. En deuxième lieu, il y a la dette historique du pays par rapport à l’Afrique qui nécessite « une politique spécifique, publique et légitimée par la société brésilienne » (2002 : 14). La troisième raison concerne la place de l’Afrique dans le calcul politique et économique du Brésil sur la scène internationale. La quatrième raison souligne la volonté des pays africains de dialoguer avec le Brésil (2002 : 16). La dernière raison fait référence à la volonté de Brasilia de renforcer ses liens avec les pays lusophones, le Portugal en premier lieu, mais aussi avec les pays africains de la CPLP.

La primauté accordée par Saraiva à l’argument de l’insertion internationale à travers la consolidation de la coopération Sud-Sud est la plus répandue dans la littérature. Claudio Ribeiro (2007) rappelle que si les années 1980 et 1990 ont vu une baisse de l’intensité de la coopération commerciale entre le Brésil et l’Afrique, l’arrivée au pouvoir de Lula a coïncidé avec un accroissement des échanges commerciaux entre le Brésil et les pays africains et ceci a constitué un des axes fondateurs du rapprochement entre les deux parties. Pour Ribeiro, cette redynamisation des relations commerciales afro-brésiliennes et plus généralement de la politique africaine du Brésil illustre la place prépondérante de l’Afrique dans sa stratégie d’insertion internationale.

Ribeiro souligne également que le renforcement de la coopération commerciale avec l’Afrique était un moyen pour le gouvernement Lula da Silva de favoriser le développement et l’expansion à l’international des entreprises, en particulier celles du secteur privé et le continent africain apparaît comme une région propice à cette expansion (Ribeiro, 2007 : 208-209). De Freitas Barbosa et al. (2009) s’inscrivent également dans cette perspective

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d’insertion internationale en observant les trois objectifs principaux du renouvellement des relations du Brésil avec l’Afrique à savoir « la diplomatie Sud-Sud comme moyen de consolider son leadership mondial ; la candidature brésilienne à un siège au Conseil de sécurité des Nations unies et le programme des biocarburants » (de Freitas Barbosa et al., 2009 : 72).

La littérature fait donc état de la première raison développée par Saraiva et considère que la réorientation de la politique étrangère brésilienne envers le continent africain répond essentiellement à trois objectifs. D’abord, il y a la volonté brésilienne de diversifier ses partenariats politiques et économiques pour assurer son insertion internationale. Le rapprochement avec l’Afrique observé à partir de 2003 constitue donc un pilier du calcul stratégique de Brasilia dans sa volonté de consolider la coopération Sud-Sud, élément important de sa stratégie d’insertion internationale (de Oliveira, 2005).

Ensuite, le Brésil voulait profiter des opportunités qu’offre l’Afrique en matière de commerce et d’investissement. Pour Brasilia, l’augmentation des échanges commerciaux ainsi que des investissements des grandes compagnies brésiliennes comme Petrobras ou Odebrecht ne peut être que bénéfiques pour l’économie du pays (Ribeiro, 2007 ; Cervo, 2010 ; White, 2010 ; 2013).

Enfin, il y a la question de la dette qu’aurait le Brésil envers l’Afrique qui est souvent reprise dans le discours comme facteur explicatif de ce rapprochement. S’il est vrai qu’il est difficile, voire impossible, de faire abstraction des liens historiques, ethniques et culturels quand on analyse les relations entre l’Afrique et le Brésil (Captain, 2010 ; Cicalo, 2014 ; Saraiva, 2012), il apparaît cependant que la réorientation de la politique africaine du Brésil sous Lula répond surtout à des intérêts politiques et économiques. Ainsi, comme pour l’étude de la politique étrangère du Brésil, la littérature analyse la réorientation de la politique africaine du Brésil observée sous Lula da Silva en s’attardant sur la place de l’Afrique dans la stratégie brésilienne de consolider ses relations avec les pays du Sud. Comme l’expriment assez bien Ribeiro et Malaquais (2009) :

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L’élection de Lula a enclenché une nouvelle dynamique. Très vite, dans la rhétorique et la pratique, les relations Sud-Sud ont pris le devant de la scène diplomatique. Le nombre record de voyages officiels en Afrique entrepris par Lula et par son ministre des Affaires étrangères et la signature de nombreux accords bilatéraux en sont la preuve. Le secteur privé s’intéresse désormais de près à la politique étrangère de l’équipe Lula. De plus en plus d’entreprises privées, comme d’acteurs sociaux d’ailleurs, entrevoient ainsi aujourd’hui en Afrique une riche palette de possibilités nouvelles. (2009 : 91).

Par ailleurs, lorsqu’un État décide de donner une nouvelle orientation à sa politique extérieure, il le fait aussi dans un contexte international favorable à la réalisation de son calcul stratégique. En effet, comme le souligne à juste titre l’ancien ministre des Affaires étrangères brésilien sous Lula, Celso Amorim, « La montée de grands pays en développement [durant les années 2000] — le Brésil, la Chine, l’Inde, l’Afrique du Sud, l’Indonésie, le Mexique, l’Égypte, la Turquie, entre autres — est le phénomène le plus important de la période post-guerre froide. Cette tendance est devenue plus évidente après la crise économique de 2008. Les pays dits émergents jouissent d’un plus grand poids politique et économique dans les affaires mondiales » (Amorim, 2010 : 215).

Deux choses sont à noter par rapport au contexte. D’abord, aussi simpliste que cela puisse paraître, si le Brésil a adopté une nouvelle politique africaine au début des années 2000, c’est vraisemblablement parce que l’Afrique a également évolué. En effet, un des facteurs qui explique l’éloignement entre le géant sud-américain et le continent africain observé au cours des années 1980 et 1990, porte sur la crise économique et l’instabilité politique en Afrique (Saraiva, 2010 ; Santander 2014). Comparativement à ces deux décennies, l’Afrique du début du 21e siècle affiche une croissance économique ainsi qu’une plus grande stabilité politique. Le Brésil de Lula a donc perçu et compris que l’Afrique était en mouvement et que les pays africains pouvaient être des partenaires politiques et commerciaux fiables, contrairement à l’image qu’ils renvoyaient auparavant. Ensuite, cette réorientation de la politique africaine du Brésil est intervenue au moment où les autres pays du groupe des BRICS avec la Chine et l’Inde en tête de file, ont fait de l’Afrique un axe prioritaire de leur politique de coopération Sud-Sud (Ramo, 2004 ; Gaye, 2006 ; Gazibo et Mbabia, 2010 ; Gazibo et Chantal, 2011 ; Ndiaye, 2013).

C’est dans ce sens que White (2013) souligne que « pour comprendre la nouvelle dynamique du Brésil en Afrique, il est important de le contextualiser aux côtés des autres puissances

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émergentes en concurrence commerciale et d’influence politique à travers le continent » (2013 : 119). Pékin comme New Delhi ont considérablement renforcé leur politique africaine au niveau diplomatique, économique et commercial (Alden et al., 2008 ; Hugon, 2010). Ce contexte de présence des autres pays du BRICS en Afrique a fini par montrer au Brésil qu’il avait aussi un rôle à jouer dans cette partie du monde et qu’il avait beaucoup à gagner (et peut être à apporter) de son rapprochement avec le continent africain (Patriota, 2011 ; Santander 2014).

En résumé, une des particularités de la politique étrangère du Brésil à partir de 2003 est la nouvelle dynamique qui a été insufflée aux relations Sud-Sud et en particulier avec le continent africain. Cette consolidation de la politique africaine du Brésil s’inscrit dans la quête d’autonomie et la volonté d’insertion du gouvernement brésilien sur la scène internationale. Au-delà de la nécessité de montrer la manière dont s’est opérée la réorientation de la politique africaine du Brésil à partir de 2003 comme nous le verrons dans la suite de notre travail, l’un des principaux enjeux de notre thèse est d’analyser les facteurs explicatifs de cette réorientation. Pour cela, il nous faut d’abord aborder la revue de littérature théorique afin de saisir les outils qui nous permettront de comprendre notre cas d’étude.

1.4. Un intérêt pour l’étude du CPE

Pourquoi, à un moment donné de son histoire, un État décide-t-il de changer sa politique étrangère ? Cette question, comme nous le verrons à travers notre revue de littérature n’a pas toujours été à l’ordre du jour comme problème de recherche dans la réflexion sur les relations internationales. Le contexte de la guerre froide a davantage favorisé l’étude de la stabilité des relations interétatiques que l’analyse des conditions et des motivations qui amènent un État à modifier les fondements de ses relations avec le reste du monde. Bien que notre étude porte essentiellement sur le changement de politique étrangère (CPE), il nous paraît important de revenir plus généralement sur l’analyse de politique étrangère dans un premier temps afin de comprendre la genèse du CPE. Ainsi, dans les prochaines pages, nous procéderons à une revue de littérature sur l’analyse de politique étrangère (APE) en général et celle plus spécifique sur l’analyse du CPE.

Figure

Tableau 2 : les sources du changement de politique étrangère  Politique  Économique  Facteurs  internationaux  Relations de puissance sécurité nationale  Transactions  économiques internationales
Tableau 9: visites des présidents brésiliens en Afrique  Présidents  Pays africains visités
Tableau 14: les pays africains ayant ouvert une ambassade au Brésil à partir de 2003
Figure 2: profil des produits brésiliens exportés vers l’Afrique entre 1995 et 2016
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